BA - Base d'imposition - Abattements et déductions - Déduction pour épargne de précaution - Champ d'application
Actualité liée : 03/03/2021 : BA - Aménagements de la déduction pour épargne de précaution (DEP) (loi n°2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, art.12)
I. Exploitants qui peuvent pratiquer la déduction
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La déduction pour épargne de précaution (DEP), prévue à l'article 73 du code général des impôts (CGI), peut être pratiquée par les exploitants individuels et les sociétés ou groupements agricoles qui relèvent de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles, sous réserve d’être imposés d’après un régime réel d’imposition, qu’il s’agisse du régime réel normal ou du régime réel simplifié, applicable de plein droit ou sur option.
Il est précisé que la DEP pratiquée par les sociétés ou groupements agricoles non soumis à l'impôt sur les sociétés doit l'être à leur niveau. En conséquence, un associé ne peut pas pratiquer de DEP sur la quote-part de résultat lui revenant.
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Sont exclues du bénéfice du dispositif les entreprises imposées selon le régime des micro-exploitations (ou « micro-BA ») ou le régime forfaitaire applicable aux exploitations forestières.
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La condition liée au régime d’imposition s’apprécie à la clôture de chacun des exercices au titre desquels la déduction est pratiquée.
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Par ailleurs, il est admis que la DEP soit pratiquée par chacun des conjoints qui gère de manière autonome une exploitation. Pour plus de précisions sur la notion d'exploitation autonome, il convient de se reporter au I-B-1-a-3° § 140 et suivants du BOI-BIC-PVMV-40-20-20-10.
II. Conditions relatives à la constitution d'une épargne professionnelle
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La DEP est subordonnée à la constitution d'une épargne professionnelle comprise entre 50 % et 100 % du montant de la déduction pratiquée. Cette épargne peut être constituée :
- de sommes épargnées sur un compte courant ouvert auprès d'un établissement de crédit ;
- des coûts engagés pour l'acquisition ou la production de stocks de fourrage destiné à être consommé par les animaux de l'exploitation ou de stocks de produits ou d'animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an ;
- de certaines créances détenues par les exploitants agricoles sur les coopératives agricoles dont ils sont associés et sur les organisations de producteurs agricoles ou d'associations d'organisations de producteurs agricoles reconnues par une autorité administrative auxquelles ils adhèrent.
A. Principe : constitution d'une épargne monétaire
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Conformément au 1 du II de l'article 73 du CGI, la DEP s’exerce à la condition que, dans les six mois suivant la clôture de l’exercice et au plus tard à la date limite de dépôt de la déclaration des résultats se rapportant à l'exercice au titre duquel la déduction est pratiquée, l’exploitant ait inscrit sur un compte courant ouvert auprès d’un établissement de crédit une somme comprise entre 50 % et 100 % du montant de la déduction.
L’épargne ainsi constituée doit être inscrite à l’actif du bilan de l’exploitation.
1. Inscription de l'épargne sur un compte bancaire
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L'épargne professionnelle doit être inscrite sur un compte courant ouvert au nom de l'exploitation auprès d'un établissement de crédit. Cette condition exclut que l'épargne puisse être déposée sur un compte à terme qui a pour effet de rendre indisponible l'épargne pendant un certain temps.
Ce compte courant bancaire doit retracer exclusivement les opérations afférentes aux sommes épargnées dans le cadre de la DEP (CGI, art. 73, II-1- al. 4).
Par ailleurs, il est possible d'ouvrir plusieurs comptes courants, dans un ou plusieurs établissements de crédit, destinés à recevoir l'épargne professionnelle constituée dans le cadre de la DEP.
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L'épargne professionnelle comprise entre 50 % et 100 % de la DEP pratiquée ne peut pas faire l'objet d'un placement en dehors de ce(s) compte(s) courant(s) bancaire(s) spécifique(s).
Symétriquement, l'épargne libre, c'est-à-dire la fraction de la trésorerie qui excède le montant de l'épargne professionnelle constituée, et en tout état de cause la fraction de l'épargne qui excède la déduction pratiquée, ne peut pas être placée sur ce(s) compte(s) courant(s) bancaire(s) spécifique(s). En effet, l'article 73 du CGI limite le montant de l'épargne à déposer sur ce compte au montant de la déduction pratiquée.
Il est en revanche possible, dans les six mois suivant la clôture et au plus tard à la date limite de dépôt de la déclaration, d'opérer un virement, pour un montant compris entre 50 % et 100 % du montant de la DEP pratiquée au titre de cet exercice, d'un compte bancaire alimenté par de l'épargne libre vers le compte courant répondant aux conditions fixées par l'article 73 du CGI.
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Dès lors que le compte courant bancaire ne peut accueillir aucune épargne libre, l'exploitant ne peut pas redéposer les sommes prélevées sur le compte, que ce soit au cours de l'exercice de leur prélèvement ou d'un exercice ultérieur, à moins de pratiquer une nouvelle DEP au titre de l'un de ces exercices.
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L'épargne professionnelle constituée dans le cadre du régime de la DEP ne peut pas être déposée sur le compte bancaire qui a été ouvert pour recevoir les sommes épargnées dans le cadre de la déduction pour aléas (DPA), dispositif qui a été supprimé par l’article 51 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.
2. Inscription de l'épargne à l'actif du bilan
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L'épargne professionnelle déposée sur le compte courant bancaire doit être inscrite à l'actif du bilan de l'exploitation. Compte tenu de cette obligation d'activation de l'épargne et de sa nature, l'éventuelle rémunération de cette épargne est imposable dans la catégorie des bénéfices agricoles (III § 130 du BOI-BA-CHAMP-10-40). Cette rémunération ne déqualifie pas la nature du compte courant bancaire dès lors que l'exploitant conserve à tout moment la libre disposition des sommes ainsi épargnées.
Remarque : Les intérêts produits par le placement de la trésorerie sur ce compte courant bancaire ne sont donc pas atteints par les effets de la suppression de la théorie du bilan. Pour plus de précisions sur la suppression des effets de la théorie du bilan, il convient de se reporter au BOI-BIC-BASE-90.
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Toutefois, pour permettre l'application du prélèvement prévu à l'article 200 A du CGI aux intérêts versés le cas échéant en rémunération de l'épargne professionnelle, il est admis qu'ils puissent être extournés du bénéfice agricole et déclarés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
B. Assimilation des coûts de revient afférents à certains stocks à de l'épargne monétaire
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Les dispositions du deuxième alinéa du 1 du II de l'article 73 du CGI assimilent à de l'épargne monétaire les coûts engagés pour l’acquisition ou la production de stocks de fourrage destiné à être consommé par les animaux de l'exploitation ou de stocks de produits ou d’animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an.
Ainsi, les coûts d'acquisition ou de production afférents à ces stocks peuvent se substituer totalement ou partiellement à l'épargne monétaire.
1. Stocks éligibles
a. Stocks de fourrage destiné à être consommé par les animaux de l'exploitation
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Par fourrage, il convient d'entendre les matières premières mentionnées au 6 de la partie C du règlement (UE) n° 575/2011 de la Commission du 16 juin 2011 relatif au catalogue des matières premières pour aliments des animaux. Il s'agit notamment des céréales, de la paille (de céréales, de féveroles, de lin, de pois), de la luzerne, des feuilles de bettes et betteraves, des herbes, de maïs ensilé ou encore des farines (de trèfle, de plantes fourragères, de chanvre).
b. Stocks de produits ou d'animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an
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Constituent des stocks de produits ou d'animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an les stocks portant sur des biens relevant de cette catégorie et dont la fréquence de renouvellement provenant de l'exploitation des éléments comptables de l'entreprise est supérieure à un an. En pratique, l'exploitant agricole pourra se référer à la fréquence de renouvellement historique des produits ou animaux de même nature. Sont par exemple susceptibles de relever de cette catégorie les bovidés et les produits de la viticulture.
Toutefois, les coûts afférents aux équidés et bovidés considérés comme des immobilisations amortissables en application de l'article 38 sexdecies D de l'annexe III au CGI ne sont pas assimilables à de l'épargne monétaire.
c. Cas particuliers
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Les produits ou animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an et le fourrage entreposé par un exploitant agricole chez un tiers sont assimilables à de l'épargne monétaire dès lors qu'ils restent inscrits dans les stocks de l'exploitant agricole jusqu'au transfert du contrôle et des avantages économiques futurs attachés à ces produits, animaux ou fourrage. Toutefois, il en est autrement de l'apport de raisin à des coopératives viticoles dont le maintien de l'inscription en stock au bilan de l'associé coopérateur constitue une fiction fiscale dès lors que la propriété du raisin a été transférée aux coopératives. Pour plus de précisions sur les productions agricoles entreposées et sur les apports de raisins à des coopératives viticoles, il convient de se référer au BOI-BA-BASE-20-20-20-30.
Les avances aux cultures inscrites dans les stocks d'entrée et de sortie au titre des travaux en cours en application des dispositions de l'article 72 A du CGI ne sont susceptibles d'être assimilées à de l'épargne monétaire que si la récolte obtenue après la clôture de l'exercice est qualifiée de fourrage ou de produit dont le cycle de rotation est supérieur à un an.
2. Coût d'acquisition ou de production à prendre en compte au titre de l'épargne professionnelle
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Conformément aux dispositions de l'article 38 sexdecies H de l'annexe III au CGI, les coûts d'acquisition ou de production des stocks agricoles s'entendent de ceux définis par l'article 38 nonies de l'annexe III au CGI. Toutefois, les exploitants agricoles sont autorisés à calculer forfaitairement le prix de revient de certains stocks. Pour plus de précisions sur la composition et l'évaluation des stocks agricoles, il convient de se référer au BOI-BA-BASE-20-20-20.
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Lorsque les stocks sont évalués au prix de revient effectif, la condition d'épargne monétaire telle que définie supra est réputée satisfaite à hauteur des coûts engagés au cours de l'exercice au titre duquel la déduction est pratiquée pour l'acquisition ou la production de stocks éligibles. En pratique, sont retenues les charges comptabilisées au cours de l'exercice qui entrent dans le coût de revient des stocks de produits ou d'animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an et des stocks de fourrage.
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Lorsqu'à la clôture de l'exercice, le cours du jour des stocks concernés est inférieur à leur prix de revient, le montant épargné au titre des stocks n'est pas réduit du montant de la provision pour dépréciation comptabilisée.
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Lorsque les stocks sont, sur option de l'exploitant agricole, évalués forfaitairement (CGI, art. 74, b), l'appréciation du respect de la condition d'épargne sous forme de stock conduit à distinguer dans les stocks figurant au bilan de clôture de l'exercice au titre duquel la DEP est pratiquée, d'une part, les fourrages, produits et animaux qui étaient déjà comptabilisés à la clôture de l'exercice précédent et, d'autre part, ceux qui ont été acquis et fabriqués au cours de l'exercice au titre duquel la DEP est pratiquée.
Pour les stocks qui étaient déjà comptabilisés à la clôture de l'exercice précédent, seule l'augmentation de leur prix de revient forfaitaire résultant de la progression du cours du jour à la clôture de l'exercice est assimilable à de l'épargne monétaire.
Pour les stocks qui ont été acquis ou fabriqués au cours de l'exercice au titre duquel la DEP est pratiquée, l'évaluation forfaitaire des éléments stockés peut être assimilée à de l'épargne monétaire.
Exemple : On suppose qu'au 31 décembre de l'année N, les stocks dont le cycle de rotation est supérieur à un an, possédés par un exploitant qui a exercé l'option pour l'évaluation forfaitaire de ses stocks prévue au b de l'article 74 du CGI, comporte :
- 150 hectolitres d'un vin provenant de la récolte N-1 (cours du jour : 100 € par hectolitre - Par hypothèse le cours du jour au 31 décembre N-1 était de 85 € par hectolitre) ;
- 200 hectolitres d'un vin provenant de la récolte N (cours du jour : 90 € par hectolitre).
Ces vins sont inscrits dans les stocks au 31 décembre de l'année N pour la valeur suivante (décote de 30 % appliquée sur le cours du jour à la clôture de l'exercice) :
- vin de millésime N-1 : 150 x 100 x (100 % - 30 %) = 10 500 €.
- vin de millésime N : 200 x 90 x (100 % - 30 %) = 12 600 €.
Pour apprécier le respect de la condition de constitution d'une épargne professionnelle pour la DEP pratiquée au titre de l'exercice N, les stocks dont le cycle de rotation est supérieur à un an sont retenus pour 14 175 €, valeur décomposée comme suit :
- vin de millésime N-1 : 150 x ((100 - 85) x (100 % - 30 %)) = 1 575 €.
- vin de millésime N : 200 x (90 x (100 % - 30 %)) = 12 600 €.
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Les coûts d'acquisition ou de production afférents à des stocks dont la valeur est bloquée et engagée postérieurement au blocage ne sont pas retenus pour apprécier le respect de la condition d'épargne.
Remarque : La valeur de certains stocks peut être bloquée en application de l'article 72 B bis du CGI.
3. Conséquence de la vente du stock épargné dans le cadre de la DEP
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En cas de vente des stocks de fourrage ou des stocks de produits ou d’animaux mentionnés au deuxième alinéa du 1 du II de l'article 73 du CGI, le troisième alinéa du 1 du même II de l'article 73 du CGI dispose qu’une quote-part du produit de la vente est inscrite au compte bancaire spécifique (II-A § 50 à 110) à hauteur d’un montant au moins égal à la différence entre, d'une part, 50 % du montant des déductions non encore rapportées et, d'autre part, l’épargne professionnelle totale diminuée de la part des coûts d’acquisition ou de production du stock de fourrage ou du stock de produits ou d’animaux objet de la vente réputés affectés au compte bancaire.
Par conséquent, si à la suite de la vente d'une partie ou de la totalité des stocks de fourrage ou des stocks de produits ou d'animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an, l'épargne professionnelle constituée est toujours au moins égale à 50 % du montant des déductions antérieurement pratiquées et non encore rapportées, l'exploitant n'a pas à inscrire au compte courant une quote-part du produit de cette vente.
La consommation par les animaux de l'exploitant agricole du stock de fourrage qu'il a épargné n'emporte pas l'obligation pour ce dernier d'inscrire sur le compte courant une somme équivalente au coût de revient du stock ainsi consommé. En revanche, si l'épargne professionnelle devient inférieure à 50 % du montant de la DEP non encore rapportée, l'exploitant doit reprendre le montant de la DEP qui excède le double de l'épargne professionnelle. À défaut, l'exploitant agricole s'expose aux conséquences du non-respect de l'obligation relative à l'encadrement de l'épargne professionnelle explicitée au III § 330.
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L'obligation d'inscription d'une quote-part du produit de la vente du stock sur le compte bancaire, prévue au troisième alinéa du 1 du II de l'article 73 du CGI, ne s’applique que si la vente porte sur le stock qui a permis à l’exploitant de ne pas constituer d’épargne monétaire.
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La quote-part du produit de la vente doit être inscrite sur le compte bancaire dans les six mois suivant la clôture de l'exercice et au plus tard à la date limite de dépôt de déclaration des résultats de l'exercice au cours duquel ladite vente est intervenue. Il en est ainsi même si le produit de la vente n'a pas été encaissé dans ces délais.
À défaut, la fraction de la déduction non encore rapportée qui excède le double de l'épargne professionnelle est rapportée au résultat de l'exercice concerné. Si l'exploitant ne rapporte pas cette fraction de déduction au résultat de l'exercice au titre duquel la vente est intervenue, la fraction de la DEP qui excède le double de l'épargne professionnelle doit être rapportée au résultat du premier exercice qui suit celui au titre duquel cette vente a été réalisée, majorée d'un montant égal au produit de cette somme par le taux de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI.
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Exemple :
À la clôture de l'exercice N, un exploitant pratique une DEP pour un montant de 30 000 €.
Pour répondre à la condition d’épargne professionnelle de 15 000 €, il inscrit 10 000 € sur un compte bancaire dédié et assimile à de l’épargne monétaire une somme de 5 000 € correspondant aux coûts des stocks acquis ou produits en N.
À la clôture de l'exercice N+1 :
- il pratique une nouvelle DEP pour un montant de 10 000 € et inscrit 5 000 € sur son compte bancaire dédié ;
- le montant de ses DEP est de 40 000 € et son épargne professionnelle s'élève à 20 000 €, composée d'une épargne monétaire de 15 000 € et d'une épargne en stock de 5 000 €, soit 50 % du montant des DEP pratiquées.
Cas 1 : Vente de la totalité du stock assimilé à de l'épargne monétaire
En N+3, l'exploitant cède ses stocks constitués au titre de la DEP au prix de 7 000 €.
À la clôture de cet exercice, il a alors l'obligation de reconstituer son épargne professionnelle pour une somme égale à 5 000 €, prélevée sur le produit de la vente et versée sur le compte bancaire dédié. Le solde du produit de la vente, soit 2 000 €, peut être utilisé librement. À défaut du versement de la somme de 5 000 € sur le compte bancaire, la DEP est rapportée au bénéfice imposable déclaré au titre de l'année N+3 pour un montant de 10 000 €, soit 40 000 - (15 000 x 2).
Si le prix de vente est inférieur à 5 000 €, l'intégralité du produit de la vente est inscrite au compte d'affectation. Dans ce cas, afin de respecter la condition d'épargne professionnelle de 50 % du montant des DEP non encore rapportées, l'exploitant peut affecter sur son compte bancaire dédié un montant égal à la différence entre 5 000 € et le prix de vente. À défaut, il doit rapporter au bénéfice imposable déclaré au titre de l'année un montant égal au double de cette différence.
Si l'exploitant ne reconstitue pas l'épargne monétaire dans les six mois suivant la clôture de l'exercice N+3 et au plus tard à la date limite de dépôt de déclaration des résultats de l'exercice N+3 et ne rapporte pas la fraction de la DEP qui excède le double de l'épargne professionnelle au résultat de l'exercice N+3, il doit alors rapporter au bénéfice imposable déclaré au titre de N+4 le double de cette différence majoré du produit de cette somme par le taux de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI (III § 330).
Cas 2 : Vente partielle du stock assimilé à de l'épargne monétaire
En N+3, l’exploitant cède la moitié de ses stocks constitués au titre de la DEP au prix de 3 000 €.
À la clôture de cet exercice, il a alors l’obligation de reconstituer son épargne professionnelle pour une somme égale à 2 500 € (50 % x 5 000), prélevée sur le produit de la vente et versée sur le compte bancaire dédié. L'autre moitié du stock est toujours considérée comme de l'épargne professionnelle. À défaut du versement de la somme de 2 500 € sur le compte bancaire, la DEP est rapportée au bénéfice imposable déclaré au titre de l'année N+3 pour un montant de 5 000 €, soit 40 000 - (17 500 x 2).
Si l'exploitant ne reconstitue pas l'épargne monétaire (2 500 €) dans les six mois suivant la clôture de l'exercice N+3 et au plus tard à la date limite de dépôt de déclaration des résultats de l'exercice N+3 et ne rapporte pas la fraction de la DEP qui excède le double de l'épargne professionnelle au résultat de l'exercice N+3 (5 000 €), il doit alors rapporter au bénéfice imposable déclaré au titre de N+4 la somme de 5 000 € majoré du produit de cette somme par le taux de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI (III § 330).
Cas 3 : Vente du stock assimilé à de l'épargne monétaire et se rapportant à une DEP partiellement rapportée au résultat
En N+3, l'exploitant rapporte sa DEP pour un montant de 5 000 € pour faire face à des dépenses nécessitées par l'exercice de sa profession et il prélève une somme de 2 500 € sur le compte bancaire dédié.
À la clôture de cet exercice, le montant des DEP restantes (c'est-à-dire non encore rapportées) est de 35 000 € (30 000 € +10 000€ - 5 000 €) et l'épargne professionnelle disponible est de 17 500 € (15 000 € + 5 000 € - 2 500 €), dont 12 500 € d'épargne monétaire et 5 000 € d'épargne en stock. Cette épargne professionnelle représente 50 % du montant des DEP non encore rapportées à la clôture de l'exercice.
En N+4, l'exploitant vend l'intégralité de son stock de fourrages au prix de 8 500 €.
À la clôture de cet exercice, il a donc l'obligation de reconstituer son épargne professionnelle pour une somme égale à 5 000 € [((30 000 € +10 000 € - 5 000 €) x 50 %) - (10 000 € + 5 000 € - 2 500 €)], prélevée sur le produit de la vente et versée sur le compte bancaire dédié.
4. Modalités de suivi des stocks affectés au respect de la condition d'épargne
250
L'assimilation des stocks de fourrage ou ceux dont le cycle de rotation est supérieur à un an à de l'épargne monétaire implique d'organiser un suivi des entrées en stock et des sorties du stock.
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Pour les exploitants agricoles qui tiennent une comptabilité matière ou une comptabilité analytique, cette obligation ne devrait pas soulever de difficulté.
Pour les exploitants qui ne tiennent pas ce type de comptabilité, la composition des stocks pourra être déterminée chaque année en appliquant la règle PEPS (premier entré - premier sorti). Ainsi, les ventes sont réputées porter en priorité sur les stocks de même nature acquis ou fabriqués à la date la plus ancienne. Cette règle permet de déterminer le nombre d'unités entrées à l'actif au titre de chaque exercice en imputant les sorties (ventes ou prélèvement) de l'année sur les exercices les plus anciens.
C. Assimilation de certaines créances détenues par les exploitants agricoles à de l'épargne monétaire
270
Conformément au dernier alinéa du 1 du II de l’article 73 du CGI, pour l’exploitant agricole associé coopérateur d’une société coopérative agricole (code rural., art. L. 521-1) qui est propriétaire des produits qu’elle commercialise, sont assimilées à de l'épargne monétaire les créances qu'il détient sur la coopérative représentatives des fonds qu'il peut laisser à sa disposition lorsque le prix de cession de ses produits excède un prix de référence fixé par un contrat.
Ces créances sont inscrites dans un compte ou un sous-compte de la nomenclature comptable de l'exploitation qui retrace exclusivement ces opérations.
280
Le contrat conclu entre l'agriculteur et la coopérative dont il est associé devra préciser les modalités d'application de ce mécanisme. En pratique, ces contrats organisent un système de lissage des prix des produits vendus par l'agriculteur à sa coopérative. À cet effet, le contrat prévoit que les ventes sont réalisées pour une période donnée et pour une production donnée à un prix de référence.
Lorsque le prix de marché des productions vendues excède le prix de référence prévu au contrat, l'agriculteur a la possibilité de laisser à la disposition de la coopérative une somme correspondant à la partie de la valorisation de la production qui dépasse celle résultant de l'application du prix de référence. Cette créance détenue sur la coopérative est utilisée par l'agriculteur lorsqu'il vend sa production à la coopérative pour un prix réel inférieur au prix de référence.
290
Les exploitants adhérents d’organisations de producteurs agricoles ou d’associations d’organisations de producteurs agricoles reconnues par une autorité administrative conformément à l’article L. 551-1 du code rural et de la pêche maritime peuvent également mettre en œuvre des contrats de lissage des prix et bénéficier des dispositions prévues au dernier alinéa du 1 du II de l’article 73 du CGI.
300
Seules les créances détenues par l'exploitant à raison des sommes qu'il laisse à la disposition de la coopérative dont il est associé, ou de l'organisation de producteurs agricoles ou de l'association d'organisations de producteurs agricoles reconnues par une autorité administrative conformément à l'article L. 551-1 du code rural et de la pêche, en exécution de ce type de contrat de lissage des prix sont assimilées à une épargne monétaire pour l'application de la DEP.
Les créances représentatives des délais de paiement accordés par l'exploitant agricole à sa coopérative ne sont donc pas assimilées à de l'épargne monétaire.
III. Mise en œuvre de l'encadrement pluriannuel de l'épargne professionnelle
310
Conformément aux dispositions du premier alinéa du 1 du II de l'article 73 du CGI et sous réserve des précisions figurant au III § 340, l'épargne professionnelle doit être à tout moment au moins égale à 50 % du montant des déductions non encore rapportées. Par ailleurs, cette épargne ne peut jamais excéder le montant des déductions non encore rapportées.
Les intérêts produits par l’épargne professionnelle ne sont pas retenus pour apprécier le rapport entre le montant de l’épargne professionnelle et le montant cumulé des déductions non encore rapportées.
320
Il résulte de ces dispositions que l'épargne professionnelle constituée dans le cadre de la DEP, qu'elle soit monétaire ou sous forme de stocks ou de créances, doit se situer tout au long de l'exercice dans une quotité comprise entre 50 % et 100 % du montant cumulé des DEP non encore rapportées. Le solde des DEP est arrêté à la date de clôture de l'exercice précédent après prise en compte de la dotation de l'année.
330
Lorsque les sommes épargnées dans le cadre de la DEP, dépassent le plafond de 100 % du montant cumulé des DEP non encore rapportées, la fraction excédentaire de l'épargne constitue alors une épargne libre qui doit être retirée du compte courant bancaire dédié ou du stock ou du montant des créances assimilé à de l'épargne monétaire.
En revanche, si l'épargne professionnelle passe sous le seuil de 50 % du montant cumulé des DEP non encore rapportées, la fraction des déductions non encore rapportées qui excède le double de l'épargne professionnelle est rapportée au résultat de cet exercice, majorée d'un montant égal au produit de cette somme par le taux de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI (CGI, art. 73, II-3-al. 2).
Il est précisé que les dispositions de l'article 73 du CGI ne font pas obligation aux exploitants agricoles de rapporter prioritairement les DEP les plus anciennes. Par conséquent, lorsque les DEP non encore rapportées excèdent le double de l'épargne professionnelle, les exploitants agricoles peuvent librement choisir de rapporter les DEP les plus anciennes ou les DEP les plus récentes. Ce choix, qui constitue une décision de gestion opposable, fixe le point de départ de l'intérêt de retard.
340
Les dispositions organisant l'encadrement de l'épargne professionnelle appellent les précisions suivantes :
- lorsque, conformément aux dispositions du premier alinéa du 1 du II de l'article 73 du CGI, l'exploitant dépose l'épargne professionnelle sur le compte bancaire spécifique dans les six mois suivant la clôture de l'exercice et au plus tard à la date limite de dépôt de la déclaration des résultats se rapportant à l'exercice au titre duquel la déduction est pratiquée, la condition relative au montant d'épargne obligatoire est satisfaite s’agissant des DEP constituées et non encore rapportées ; l'administration fiscale tient compte de ce délai légal pour apprécier la règle mentionnée à l'avant-dernière phrase du premier alinéa du 1 du II précité imposant que le rapport entre l'épargne professionnelle et déductions non encore rapportées soit au moins égal à 50 % ;
- lorsque l'épargne professionnelle est prélevée au cours de l'exercice et que, conformément aux dispositions du 2 du II de l'article 73 du CGI, la DEP est rapportée au résultat de ce même exercice ou au résultat de l'exercice suivant, l'épargne est considérée comme prélevée à la date de la reprise de la DEP.