Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Identifiant juridique : BOI-ENR-DMTOM-10-20-10

ENR - Cessions de fonds de commerce et de clientèles, conventions assimilées - Modalités de taxation - Assiette

I. Cessions de fonds de commerce et de clientèles

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Le droit de mutation est exigible sur le prix de vente du fonds de commerce augmenté, le cas échéant, des charges imposées à l'acquéreur. Ces éléments sont déterminés comme en matière de vente d'immeuble. Il convient donc de se référer à :

- BOI-ENR-DMTOI-10-20-20-10 et BOI-ENR-DMTOI-10-20-20-20 en ce qui concerne la détermination du prix ;

BOI-ENR-DMTOI-10-10-20-20 en ce qui concerne les charges augmentatives du prix, sous réserve des précisions apportées infra.

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Toutefois, le droit de mutation doit être calculé sur la valeur vénale réelle des biens transmis, si eIle est supérieure au prix augmenté des charges (article 17 du livre des procédures fiscales [LPF]). Sur la procédure en cas d'insuffisance, cf. série Contrôle fiscal (CF).

À cet égard, il ne résulte pas des dispositions de l'article 719 du code général des impôts (CGI) que la valeur vénale du fonds de commerce doive, lorsqu'elle est substituée au prix stipulé dans l'acte de cession, être établie éIément par élément. Un tribunal peut donc, pour évaluer la valeur globale d'un fonds de commerce, écarter l'un des termes de comparaison proposés par le contribuable sans fixer la valeur propre de chacun de ses éléments (Cour de cassation, Chambre commerciale (Cass. com.), 10 janvier 1989, n°87-14864).

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Si l'acte ne stipule aucun prix (en cas d'échange, par exemple), le droit est dû sur Ia valeur vénale déterminée d'après une déclaration estimative détaillée des parties.

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En vertu du deuxième alinéa de l'article 719 du CGI, le droit de mutation de fonds de commerce s'applique au prix de vente des éléments constitutifs du fonds, c'est-à-dire la clientèle, le droit au bail et les objets mobiliers servant à l'exploitation, à l'exception des marchandises neuves garnissant le fonds (cf. BOI-ENR-DMTOM-10-10-10-II-A § 70).

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L'application de ce principe appelle Ies observations suivantes :

- les objets mobiliers vendus avec le fonds sont soumis au droit de vente de fonds de commerce lorsqu'ils ne sont pas immeubles par destination (cf. BOI-ENR-DMTOM-10-10-10-I-B § 40) ;

Remarque : Les mutations à titre onéreux de fonds de commerce étant regardées comme des transmissions d'une universalité de biens, les livraisons réalisées entre redevables lors de l'opération sont en principe dispensées de TVA, en vertu de l'article 257 bis du CGI.

Le cas échéant, les biens mobiliers d'investissement d'un fonds de commerce sont passibles des droits d'enregistrement sur un prix hors TVA, quel que soit le régime fiscal de ces biens au regard de cette taxe (Rép. Philibert : AN 20 août 1990, p. 3918, n°27568).

- lorsque l'acheteur acquiert en même temps que le fonds de commerce l'immeuble dans lequel le fonds est exploité, la valeur vénale du fonds doit être déterminée en faisant abstraction de la valeur du droit au bail, pour la liquidation du droit de mutation (Trib. civ. Château-Chinon, 3 juillet 1957) ;

- en cas de vente d'un fonds commerce loué, le prix stipulé pour les loyers à échoir est soumis au droit de vente de fonds de commerce. En effet, s'il est prévu dans l'acte que le vendeur percevra non seulement un prix mais également les loyers à courir jusqu'à la fin du bail concIu avec le locataire, le droit de vente est dû sur l'intégralité du prix constitué en l'occurrence par le prix stipulé dans l'acte auquel s'ajoutent les loyers à échoir (Trib. civ. Seine, 12 novembre 1907) ;

- la cession des marchés en cours consentie avec la cession du fonds donne lieu au droit de vente de fonds de commerce sur le prix versé par l'acquéreur au vendeur comme représentant la valeur du bénéfice à retirer de ces marchés (Trib. civ. Lyon, 23 mars 1899, et Seine, 11 février 1913 et 14 mars 1936). Il en est ainsi pour les marchés en cours relatifs à la construction et à la livraison de bateaux, qui font partie des éIéments cédés (Cass. com., 10 février 1987, n° 85-13262) ;

Remarque : à la suite de l'acquisition par une société des éIéments d'actif de bases nautiques, le service avait assujetti cette opération au droit de vente de fonds de commerce prévu à l'article 719 du CGI. La société redevable a contesté pour partie cette imposition en soutenant que l'assiette des droits ne pouvait comprendre la valeur de bateaux en cours de fabrication commandés mais non livrés à la société cédante lors de la mutation. La cour a décidé que le tribunal, en donnant gain de cause à l'administration, a fait une exacte application de l'article 719 du CGI dès lors que le jugement a retenu que les marchés en cours relatifs à la construction et à la livraison des bateaux faisaient partie des éléments cédés et, qu'en conséquence, Ia valeur de ces biens devait être comprise dans l'assiette des droits dus.

- le fait pour l'acquéreur d'un fonds de commerce de prendre à sa charge l'indemnité de licenciement versée à un salarié, mais incombant normalement au vendeur - le licenciement étant intervenu avant la vente - procure au vendeur un avantage indirect qui constitue une augmentation du prix de vente du fonds. Cette somme doit donc être ajoutée au prix pour la perception du droit.

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Sont à exclure du prix soumis au droit de mutation les éIéments suivants :

- les créances commerciales, le numéraire en caisse, les valeurs mobilières et droits sociaux en portefeuille, ces divers éléments ne faisant pas partie du fonds de commerce (cf. BOI-ENR-DMTOM-10-10-10-I-B § 60) ;

- les objets mobiliers, qui sont immeubles par destination, pour avoir été placés sur le fonds par le propriétaire pour l'exploitation de l'immeuble. Bien entendu, la fraction du prix afférente à chacun de ces éléments est taxée s'il y a lieu selon la nature des biens transmis ;

- le remboursement par le cessionnaire au cédant des loyers payés d'avance par celui-ci ;

- les frais et loyaux coûts du contrat de vente lorsque la cession du fonds de commerce est opérée « contrat en mains ». Il en est ainsi notamment des frais d'acte (cf. BOI-ENR-DMTOI-10-20-20-40).

Remarque : une vente est consentie « contrat en mains » lorsque le vendeur se charge de tous les frais qu'entraîne la transmission du bien vendu.

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La commission payée par l'acquéreur est également à exclure du prix imposable, dès lors que la rémunération de l'intermédiaire, dans le mandat confié par les vendeurs, est contractuellement mise à la charge de l'acquéreur et qu'aucune disposition de la loi du 2 janvier 1970 ne met la charge du paiement de la commission au vendeur (Cass. com., 12 décembre 1995, n° 94-10791).

La décision de la Cour de cassation se fonde sur le statut des intermédiaires dans les opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, duquel il résulte qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne met le paiement de la commission de l'intermédiaire à la charge du vendeur.

En effet, l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 exige seulement que le mandat précise les conditions de détermination de la rémunération de l'intermédiaire, ainsi que l'indication de la partie qui en aura la charge, alors que le décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, qui fixe les conditions d'application de ce principe, ne restreint pas davantage la liberté des contractants. Par conséquent, la commission versée à l'intermédiaire spécialisé dans les opérations portant sur des immeubles et des fonds de commerce n'entre pas dans l'assiette des droits de mutation à titre onéreux lorsque le mandat précise qu'elle sera mise à la charge de l'acquéreur, que le mandant soit le vendeur ou l'acquéreur.

En l'espèce, la haute juridiction a pu ainsi considérer que le paiement de la commission litigieuse, qui ne constituait pas la prise en charge d'une obligation incombant légalement au vendeur, mais était contractuellement mis à la charge de l'acquéreur, ne présentait pas le caractère d'une charge augmentative du prix. La circonstance qu'il y ait eu, au cas particulier, double mandat (mandat de vente et mandat de recherche d'un bien pour l'acquéreur) étant, en tout état de cause, dépourvue d'incidence à cet égard.

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Cette décision rendue dans un litige relatif à une cession de fonds de commerce est, compte tenu du caractère général de sa motivation, transposable aux commissions versées aux intermédiaires spécialisés dans les opérations portant sur des immeubles, quelle que soit leur nature (immeubles commerciaux, immeubles d'habitation, immeubles ruraux, etc.).

Par cet arrêt, la Cour de cassation infirme la doctrine administrative selon laquelle le paiement de la commission de l'intermédiaire, qui incombe normalement au vendeur, constitue, lorsqu'il est mis expressément à la charge de l'acquéreur, une charge à ajouter au prix exprimé (Rép. Becam : Sén. 30 mai 1985, p. 1012 ; Rép. Mathieu : AN 28 septembre 1987, p. 5393 ; Rép. Reitzer : AN 13 avril 1992, p. 1758). Cette doctrine est rapportée.

Bien entendu, la commission de l'intermédiaire contractuellement mise à la charge du vendeur, mais versée en lieu et place de celui-ci par l'acquéreur, constitue une charge augmentative du prix.

II. Conventions assimilées à des cessions de fonds de commerce

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En ce qui concerne les conventions visées à l'article 720 du CGI ayant pour effet de permettre à une personne d'exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire, le droit de mutation est exigible sur toutes les sommes dont le paiement est imposé au successeur du chef de la convention, sous quelque dénomination que ce soit, ainsi que sur toutes les charges lui incombant au même titre.

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Ainsi, le droit de mutation prévu à l'article 720 du CGI est exigible sur le prix global de cession d'une souche aviaire dont une partie du prix est payable au vendeur et le solde à un créancier du vendeur, pour le compte de ce dernier. En effet, dès lors que le paiement fait au créancier résulte d'une obIigation que la convention a imposée à l'acquéreur en l'acquit du vendeur, la totalité des sommes dont le versement est imposé du chef de la convention est assujettie au droit proportionnel (Cass. com., 24 février 1970, n°67-14774).

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De même, dans le cas d'une convention portant cession de matériel et présentant le caractère d'une convention de successeur, le droit de mutation de fonds de commerce est exigible sur I'intégralité du prix de cession du matériel, sans faire de distinction entre la valeur du matériel proprement dit et la partie du prix susceptible d'être versée en rémunération de la qualité de successeur, les termes généraux de l'article 720 du CGI ne permettant pas d'établir cette distinction (Cass. com., 8 juillet 1986, n° 84-17537).

Remarque : La partie adverse soutenait que la valeur vénale du matériel cédé devait venir en déduction du prix pour la détermination de la base taxable, de manière que ne soit imposée que la seule acquisition de la qualité de successeur. En ce qui concerne les éléments retenus par le juge pour qualifier le contrat de convention de successeur, cf. BOI-ENR-DMTOM-10-10-30-III-A-11.

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Par ailleurs, il résulte des dispositions combinées des articles 720 du CGI et 723 du CGI que, dans le cadre d'une convention de successeur, les marchandises neuves cédées par le précédent titulaire de l'activité et soumises à cette occasion à la TVA (ou dispensées de celle-ci en vertu de l'article 257 bis du CGI), ne sont pas susceptibles d'être taxées au droit prévu à l'article 719 du CGI.