Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Identifiant juridique : BOI-ENR-AVS-10-50

ENR - Droits dus sur les actes relatifs à la vie des sociétés et assimilés – Règles de territorialité applicables aux apports en société

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L'article 2 de la loi n° 72-650 du 11 juillet 1972 a modifié les règles de territorialité à observer pour la perception des droits ou taxes sur les apports en société (cf. BOI-ENR-AVS-20-30-20-IV).

Le paragraphe I de la loi n°72-650 du 11 juillet 1972 (codifié sous l'article 638 A du code général des impôts (CGI)) vise toutes les sociétés civiles ou commerciales.

Les paragraphes II et III de la loi n°72-650 du 11 juillet 1972 (codifiés sous l'article 808 A du CGI) concernent spécialement les sociétés de capitaux.

I. Règles de territorialité applicables à la généralité des sociétés

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Sous réserve de l'exonération instituée par l'article 810 bis du CGI, le droit fixe prévu à l'article 810-I du CGI en cas d'apports purs et simples, autres que ceux assimilés à des mutations par l'article 809-I-3° du CGI, est susceptible d'être exigé, même en l'absence d'un écrit, en France :

- si le siège de la société bénéficiaire des apports est établi en France, quelle que soit la situation des biens apportés ou le lieu de rédaction de l'acte d'apport ;

- à défaut de siège en France de ladite société, si les biens apportés ont leur assiette matérielle ou juridique en France.

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En cas de rédaction d'un écrit en France, la nationalité de la société bénéficiaire de l'apport continuera à être négligée sous réserve des dispositions conventionnelles en vigueur avec certains états.

II. Règles territoriales applicables aux sociétés de capitaux

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Pour les sociétés de capitaux, ces règles de droit interne doivent être combinées avec celles qui découlent de l'article 808 A-I du CGI aux termes duquel « les opérations soumises au droit d'apport ou à la taxe de publicité foncière et concernant les sociétés de capitaux sont taxables en France lorsque s'y trouve le siège de direction effective ou le siège statutaire, à condition que, dans ce dernier cas, le siège de direction effective soit situé en dehors des États de l'Union européenne ».

40

Pour l'interprétation de l'article 808 A-I du CGI, il convient d'entendre par « sociétés de capitaux » celles énumérées par l'article 3 de la directive communautaire n° 69-335 du 17 juillet 1969 modifiée.

50

En vue d'éliminer à l'intérieur de l'Union européenne le risque de double imposition territoriale qui résulterait éventuellement de l'existence dans les autres États membres d'un impôt frappant les apports en espèces ou en nature consentie aux sociétés de capitaux, les règles internes de territorialité rappelées au I §10 ont été corrigées par l'article 808 A-I du CGI, en ce qui concerne les sociétés de capitaux.

60

L'article 808 A-I du CGI repose sur une distinction entre :

- le siège de direction effective, défini comme le « lieu où se trouve le centre de la vie intellectuelle de la société, d'où partent, en règle générale, les impulsions directrices de ses affaires, où se localisent, en fait, principalement ses organes de direction, d'administration et de contrôle » ;

Cette notion est assez voisine de celle dégagée par la jurisprudence à propos du « siège réel » ou « effectif » défini comme étant le lieu où en règle générale, la société a principalement sa direction juridique, financière, administrative et technique (Cass. civ., 25 avril 1950).

- le siège statutaire.

70

Le droit d'imposer l'opération d'apport est attribué de façon exclusive à celui des États membres de l'Union européenne sur le territoire duquel se trouve le siège de direction effective, et subsidiairement, le siège statutaire de la société de capitaux bénéficiaire des apports.

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Par suite, sous réserve des dispositions des conventions internationales, abstraction faite du caractère écrit ou verbal des apports purs et simples, la France renonce à percevoir le droit fixe :

- si le siège statutaire étant en France, le siège de direction effective se trouve dans un autre État membre de l'Union européenne ;

- ou encore, si le siège de direction effective se trouvant dans un État tiers, le siège statutaire est situé dans un État membre.

90

Mais le droit fixe doit continuer à être perçu lorsque la société bénéficiaire des apports, même si elle revêt le caractère d'une société de capitaux, a fixé hors de l'Union européenne à la fois son siège de direction effective, et son siège statutaire. En effet, dans cette dernière hypothèse, la mise à la disposition d'une succursale située en France de capitaux investis ou de capitaux d'exploitation peut être imposée dans notre pays.

Sous réserve des dispositions des conventions internationales, le droit fixe est donc maintenu notamment en cas d'apport constaté par écrit au profit d'une société étrangère qui dispose en France (ou va y disposer) d'une exploitation industrielle ou commerciale, ou agricole, ou qui y exerce (ou va y exercer) une profession libérale, lorsque les biens apportés ne sont pas taxables au droit spécial de mutation (cf. BOI-ENR-AVS-10-10-20), soit en raison de leur nature (matériel ne dépendant pas d'un fonds de commerce, espèces ou autres biens non visés à l'article 809-I-3° du CGI), soit en raison du régime fiscal de la société bénéficiaire des apports (par exemple : apport de clientèle à une société de capitaux placée exceptionnellement sous le régime des sociétés de personnes).

100

Enfin, il est précisé que l'article 808 A-I du CGI ne vise que le droit fixe à l'exclusion du droit spécial de mutation prévu à l'article 809-I-3° du CGI.

À cet égard, la Cour de cassation (Cass. com, 21 mai 1996, n° 94-14785) a jugé que conformément aux dispositions combinées des articles 10 et 12-1-b de la directive du Conseil des Communautés européennes n° 69-335 du 17 juillet 1969, concernant les impôts indirects frappant le rassemblement de capitaux, les États membres gardent la faculté de percevoir des droits de mutation sur les apports de biens immeubles, y compris à des sociétés dont le siège statutaire se trouve dans un autre État membre.

Qu'il en résulte que l'article 808 A du CGI n'exclut pas l'article 809-I-3° du CGI et que, dès lors, les apports faits à une personne morale passible de l'impôt sur les sociétés par une personne non soumise à cet impôt étant assimilés à des mutations à titre onéreux dans la mesure où ils ont pour objet un immeuble, les droits de mutation prévus à l'article 710 du CGI (article abrogé) peuvent être perçus sur l'apport à une société de droit néerlandais d'un immeuble situé en France.

L'article 808 A-I du CGI (transposition dans le droit interne de l'article 2 de la directive européenne n° 69-335 du 17 juillet 1969) autorise la perception du droit d'apport (ou de la taxe de publicité foncière qui tient lieu de droit d'apport dans le cadre de la formalité fusionnée) sur les opérations concernant les sociétés de capitaux lorsque se trouve en France le siège de direction effective ou le siège statutaire, à condition que, dans ce dernier cas, le siège de direction effective soit situé en dehors des États de l'Union européenne.

Cette perception est donc exclue sur les opérations concernant les sociétés dont le siège statutaire et effectif est situé dans un État de l'Union.

Toutefois, les dispositions combinées des articles 10 et 12-1-b de la directive européenne n°69-335 du 17 juillet 1969 autorisent la perception de droits de mutation à titre onéreux sur l'apport à une société de biens immeubles par l'État sur le territoire duquel ces biens sont situés, même si le siège statutaire de la société bénéficiaire de l'apport se trouve dans un autre État membre.

L'article 809-I-3° du CGI, qui assimile les apports faits à une personne morale passible de l'impôt sur les sociétés par une personne non soumise à cet impôt à des mutations à titre onéreux, est conforme au droit communautaire.

Ces dispositions peuvent s'appliquer indépendamment des règles de territorialité prévues à l'article 808 A-I du CGI.

La taxation s'effectue selon le régime national applicable, en l'espèce le régime prévu à l'article 710 du CGI (article en vigueur à l'époque des faits et abrogé aujourd'hui).