Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Identifiant juridique : BOI-REC-EVTS-30-10

REC - Prescription de l'action en recouvrement - Délai d'exercice de l'action en recouvrement

Appliquée à l'action en recouvrement de l'impôt, la notion de prescription extinctive, qui est un mode d’extinction d’un droit résultant de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps (art. 2219 du code civil) a pour corollaire une notion de délai, objet des développements suivants. Il s'agit d'un espace de temps à l'écoulement duquel s'attache un effet de droit. La longueur de cet espace de temps, essentiellement variable, est appelée " délai " dans les développements ci-après. Il comporte un point de départ et une échéance.

I. La nature du délai et la durée de la prescription

A défaut d'action du comptable des finances publiques pendant un certain délai fixé par la loi, celui-ci perd son droit d'agir contre un débiteur qui se trouve libéré de son obligation de paiement. La déchéance du droit d'exercer l'action en recouvrement doit être distinguée de celle du droit de reprise, faculté ouverte à l'administration de réparer les omissions ou insuffisances d'imposition dans un délai légal, à l'expiration duquel le service n'est plus en droit, en raison de la prescription, d'établir une imposition.

A. La nature du délai

1

En matière fiscale, il convient de distinguer :

- le délai de prescription de l’action en répétition (prescription d’assiette) qui est celui pendant lequel l’administration peut établir ou constater l’existence d’une dette fiscale constituée par l’impôt en principal et éventuellement une imposition complémentaire ou des pénalités fiscales ;

- le délai de prescription de l’action en recouvrement qui est celui pendant lequel le créancier peut poursuivre le recouvrement forcé de ces impositions ou pénalités. C'est cette prescription, régie par l’article L274 du LPF (livre des Procédures Fiscales), qui fait l'objet des développements du présent titre.

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La prescription de l’action en recouvrement constitue une prescription extinctive : à défaut d’action du comptable des finances publiques pendant un certain délai fixé par la loi, celui-ci perd son droit d’agir contre un débiteur.

L'article L274 du LPF constitue désormais l’article de référence en ce qui concerne les règles applicables à la prescription pour les produits fiscaux.

Ce texte précise que « Les comptables publics des administrations fiscales qui n’ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l’envoi de l’avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable »

B. La durée légale de l'exercice de l'action en recouvrement

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Aux termes de l’article L274 du LPF, le délai de prescription de l’action en recouvrement est de quatre ans. Il court à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement.

1. Combinaison du délai de prescription au sens fiscal avec des délais de prescription de nature civile ou pénale

30

Le délai de prescription de l’action en recouvrement peut se combiner avec des délais de prescription inhérents aux actions civiles ou pénales engagées par les comptables.

Le comptable se voit alors opposer, dans le cadre de son action en recouvrement de nature fiscale, un double délai de prescription (le délai de quatre ans modifié par le jeu des interruptions et suspensions et celui de l’action civile ou pénale). Le délai à retenir est celui qui prend fin le premier.

a. La prescription concernant l’engagement des actions judiciaires

40

Sont essentiellement visées les actions en reconstitution et surveillance du patrimoine des débiteurs (action oblique, paulienne, en déclaration de simulation).

L'article 2224 du code civil précité dispose que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ».

Par ailleurs, l'article 2227 du code civil indique que « les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de les exercer ».

Une action personnelle est une action en justice qui vise à faire reconnaître l’existence ou la validité d’un droit à l’égard d’une personne sur son patrimoine (ex : une action par laquelle le détenteur d’une créance demande la reconnaissance ou la protection de son droit au débiteur).

Si l’action tend à la protection d’un droit réel (droit de propriété, d’usufruit, de servitude…..), il s’agit d’une action réelle.

Il convient dès lors d’analyser la nature des actions concernées pour en déduire le délai de prescription qui doit être appliqué, étant observé que la créance fiscale ne doit pas être prescrite par ailleurs.

1° L’action paulienne 

50

L’action paulienne est prévue par l’article 1167 du code civil dans les termes suivants : « Ils (les créanciers) peuvent aussi, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits » (BOI-REC-SOLID-30-10).

L’action paulienne, présente un caractère personnel. En effet, elle ne peut atteindre que l’auteur et les complices de la fraude (cf. notamment Cass. civ. du 13 déc. 2005, N° 03-15455).

Dans ces conditions, c’est la prescription susvisée de cinq ans qui s'applique, à compter du jour où l’administration a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer cette action (publication de l’acte frauduleux).

2° L’action oblique

60

Aux termes de l’article 1166 du code civil, les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne (cf. BOI-REC-SOLID-30-30).

Cette action n’est recevable que si l’action en recouvrement du comptable n’est pas elle-même atteinte par la prescription fiscale de quatre ans fixée par l’article L274 du LPF. Par ailleurs, cette action est soumise à la prescription de cinq ans ou trente ans selon qu’il s’agit d’une action personnelle ou réelle du débiteur.

3° L’action en déclaration de simulation

70

Elle a pour objet de faire constater l’inexistence d’un acte, en raison de son caractère fictif. Le créancier, tiers à l’acte, qui agit en déclaration de simulation exerce un droit qui lui est personnel. En effet, il ne met pas en œuvre une action appartenant à une partie à l’opération simulée qui renoncerait à se prévaloir de la réalité apparente. Il ne s’agit pas d’une revendication directe d’un droit de propriété (cf. BOI-REC-SOLID-30-20).

Le délai de prescription est donc de cinq ans et commence à courir à compter du jour où l’administration a connu ou aurait dû connaître l’acte argué de simulation.

b. Prescription concernant la notification et l’exécution des décisions des juridictions judiciaires

1° Décisions rendues en matière civile
a° Jugements contradictoires

80

Aux termes de l’art. L111-4 du code des procédures civiles d'exécution (CPCE), le délai de prescription de l’exécution des jugements est de dix ans.

Cela étant, la prescription de l’exécution doit se combiner avec la prescription de l’action en recouvrement de quatre ans.

b° Jugements par défaut

90

Si la prescription de la notification et celle de l’exécution sont enfermées normalement dans un même délai, l’article 478 du code de procédure civile dans le cas d’un jugement par défaut, exige une notification dans les six mois de la date du jugement. A défaut, la décision est non avenue.

c° Décisions rendues en matière pénale

100

La condamnation au paiement solidaire des impôts fraudés par une société, sur le fondement de l’article 1745 du CGI (Code Général des Impôts) est une mesure à caractère pénal selon la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation. Cela étant, en application du principe civil régissant la solidarité, le délai de l’action en recouvrement (quatre ans) est applicable à la créance qui résulte d’une décision de justice constatant une solidarité au paiement de la créance fiscale et rendue par la juridiction pénale.

En principe, il n’est pas nécessaire de faire signifier les condamnations pénales qui ont été rendues de manière contradictoire. Toutefois, il est préférable de le faire.

S’agissant des autres jugements (par défaut ou réputé contradictoire) ils seront dans tous les cas signifiés avant l’expiration du délai précité. 

110

La condamnation obtenue par un comptable à la suite d'une plainte pour détournement d’objets saisis a le caractère d’une condamnation civile à dommages-intérêts et, comme telle, elle est régie, en ce qui concerne la prescription, par l’article 133-6 du code pénal qui prévoit que les obligations de nature civile résultant d’une décision pénale devenue définitive se prescrivent d’après les règles du Code civil.

Le délai de prescription est par conséquent de cinq ans à compter de la décision (article 2224 du code civil).

Le délai de notification est de cinq ans.

120

En cas d'escroquerie à la TVA, la condamnation est prononcée sur le fondement des articles 313-1 alinéa 2, 313-7 et 313-8 du code pénal.

Les dommages-intérêts accordés à l'État, en tant que partie civile, sont de nature civile. Le délai de prescription de l’action en recouvrement est par conséquent de cinq ans à compter de la décision (article 133-6 du code pénal et 2224 du code civil – cf. article 76 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962).

Le délai de notification de la décision judiciaire est de cinq ans.

130

L’article L235 du LPF précise que les infractions relevées en matière de contributions indirectes sont poursuivies devant le tribunal correctionnel. L’article L188 du LPF dispose que pour les amendes et confiscations fiscales prononcées par la juridiction pénale, le délai de prescription est le même que pour les peines correctionnelles de droit commun.

Dès lors, en application de l’article 133-3 du code pénal, qui prévoit que les peines prononcées pour un délit se prescrivent par cinq années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive, l’action en recouvrement des peines d’amende ou de confiscation prononcées par la juridiction pénale se prescrit dans le délai de cinq ans.

Si la notification de la décision judiciaire et celle de l’exécution de l’action sont enfermées dans le même délai, dans ce cas, par exception, la condamnation sera signifiée dans le délai maximum de trois ans à compter de la décision définitive.

c. Prescription concernant l’engagement de poursuites à l’encontre des associés de sociétés civiles et de sociétés en nom collectif

140

S’agissant des associés de sociétés civiles, l’article 1859 du code civil énonce le principe selon lequel toutes les actions contre les associés non liquidateurs se prescrivent par cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société au BODACC (bulletin officiel des annonces civiles et commerciales).

150

Pour ce qui concerne les associés de sociétés en nom collectif (et des associés de sociétés commerciales), l’article L 237-13 du code de commerce prévoit que le délai de prescription de l’action à l’égard des dits associés est de cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société au registre du commerce et des sociétés.

160

En cas de procédure collective, le délai de prescription est de cinq ans à compter de la publication du jugement de liquidation judiciaire au BODACC (Cass. com. 12 déc. 2006, N° 04-17187), la liquidation judiciaire emportant de plein droit sa dissolution en application de l’article 1844-7,7° du code civil.

d. Prescription concernant la créance saisie entre les mains d’un tiers

170

La créance du débiteur vis à vis d’un tiers et qui est saisie au profit du comptable conserve ses caractéristiques, notamment au regard de la prescription. Le comptable public ne peut appréhender qu’une créance non prescrite (prescription de droit commun pouvant atteindre la créance que détient le débiteur à l’encontre du tiers).

A cet égard, la durée de la prescription sera fonction de la créance transférée : cinq ans en règle générale, si elle est de nature civile (article 2224 du code civil) ou commerciale (article L110-4 du code de commerce ).

2. Point de départ du délai

a. Impôts recouvrés par voie d'avis de mise en recouvrement (AMR)

180

L’article L274 du LPF constitue l’article de référence en ce qui concerne les règles applicables à la prescription pour les produits fiscaux. Il fixe le point de départ du délai de prescription de l’action en recouvrement au jour de la notification de l’avis de mise en recouvrement.

1° Date de la notification de l’avis de mise en recouvrement (AMR)

190

S’agissant du point de départ du délai de prescription, il convient de tenir compte de la date de notification de l’AMR.

En cas d'envoi en recommandé au destinataire, la notification prend effet à la date de présentation au domicile. Lorsque l’AMR est retiré postérieurement à sa présentation, la prescription part de ce retrait et non de la vaine présentation initiale. Si l’AMR est retourné avec la mention « boite non identifiable » ou « boite inaccessible »), la notification n’est régulière que si l’avis a été envoyé à l’adresse que le redevable avait lui-même fait connaître au service des impôts compétent. Dans ce cas de figure, le délai court à compter de la présentation à l’adresse indiquée (article R*256-6 et R*256-7 du LPF).

En cas de notification par voie d’huissier de l’AMR, la date de notification est celle prévue par le Code de procédure civile (articles 656 et suivants du code de procédure civile).

Si la notification est effectuée dans le cadre de l’assistance administrative internationale, la date à retenir est celle de la notification par l’autorité étrangère.

b. Impôts recouvrés par voie de rôle

200

L’article L274 du LPF fixe le point de départ du délai de prescription de l’action en recouvrement au jour de la mise en recouvrement du rôle (articles 1658, 1659 et 1659 A du CGI).

Selon l’article L253 du LPF, « un avis d’imposition est adressé sous pli fermé à tout contribuable inscrit au rôle des impôts directs ». .

Ce document a pour but d’informer le contribuable de la date de mise en recouvrement, du montant de l’imposition due et de la date de majoration en cas d’absence de paiement. Il doit être fourni à l’appui d’une réclamation d’assiette. En effet, la date de mise en recouvrement constitue le point de départ du délai de prescription de l’action en recouvrement.

210

La date de mise en recouvrement de l’impôt établi par voie de rôle n’est pas celle de l’envoi de l’avis d’imposition ou de la réception de celui-ci par le contribuable ; c’est celle qui est fixée lors de la décision administrative homologuant le rôle. Il est fait mention de cette date sur l’avis d’imposition.

La date de mise en recouvrement du rôle conditionne la date d’exigibilité de l’impôt (article 1663-1 du CGI), ainsi que la date d’application de la majoration de 10 % (article 1730 du CGI).

Par un arrêt du 20 novembre 1992, req. n° 71902, le Conseil d'État n’a laissé la charge de la preuve de la notification ni au contribuable ni à l’administration. Néanmoins, cette juridiction a accordé une présomption d’envoi des avis d’imposition au profit du Trésor, présomption pouvant être combattue par le redevable en cas de changement de domicile non pris en compte par l’administration bien qu’elle en ait été informée.

c. Point de départ pour les décisions de justice 

220

Le délai de prescription de l’action en recouvrement part de la date à laquelle le comptable est en possession d’un titre exécutoire au regard de l’article L111-3 du CPCE relative aux procédures civiles d’exécution, qui précise que constituent des titres exécutoires « 1° Les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire...lorsqu’elles ont force exécutoire ».

Le délai applicable à l’exécution de la décision varie selon que la procédure suivie est civile ou pénale. En outre, le délai de prescription de l’action en recouvrement s’applique indépendamment de la procédure suivie.

1° Procédure civile
a° En première instance et en appel

230

Le point de départ de la prescription applicable à l’exécution de la décision est constitué par la date à laquelle cette dernière est passée en force de chose jugée, c’est à dire quand elle est exécutoire (cf. à cet égard, articles 500 et 501 du code de procédure civile).

Une décision est exécutoire lorsque les voies de recours ordinaires (appel ou opposition) n’ont pas été exercées ou lorsqu’elles ont été épuisées.

En effet, si l’appel ou l’opposition sont suspensifs d’exécution (article 539 du code de procédure civile), en revanche, les voies de recours extraordinaires (tierce opposition et pourvoi en cassation) ne le sont pas.

Dans ces conditions, le point de départ de la prescription applicable à l’exécution de la décision est constitué pour un jugement de première instance non frappé d’une voie de recours, par la date d’expiration du délai de recours et pour une décision d’appel, par la date du prononcé de l’arrêt.

b° Cas particulier du pourvoi en cassation

240

Lorsqu'un pourvoi en cassation est formé par le redevable, l’article 625 du code de procédure civile prévoit que « Sur les points qu’elle atteint, la cassation replace les parties dans l’état où elles se trouvaient avant le jugement cassé ».

« Elle entraîne, sans qu’il y ait lieu à une nouvelle décision, l’annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l’application ou l’exécution du jugement cassé ou qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire ».

La cassation d’une décision de justice sans renvoi entraîne dès lors la nullité de tous les actes interruptifs qui sont la suite ou l’exécution de la décision cassée.

250

S’agissant d’une cassation avec renvoi, l’idée fondamentale est que, par l’effet de la cassation de l’arrêt qui clôturait l’instance, l’instance antérieure reprend son cours devant la juridiction de renvoi, les parties étant replacées dans le même état.

L’article 2242 du code civil dispose, « L’interruption [de la prescription] résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance ».

Ce texte reprend en substance une jurisprudence constante aux termes de laquelle l’effet interruptif de la prescription résultant d’une action portée en justice se prolonge jusqu’à ce que le litige trouve sa solution (Cass. Civ.1, 8 décembre 1976, N° 74-10180 ; Cass. Com. 15 octobre. 1991, N° 90-10922 ; Cass. Civ, 24 juin 1997, N° 95-15273 ; Cass. Civ. 1, 23 mars 1999, N° 97-04162).

2° Procédure pénale

260

L’expiration du délai d’appel (cf supra procédure civile) confère au jugement son caractère de « décision passée en force de chose jugée ».

Le délai d’appel court normalement à compter du prononcé du jugement contradictoire (article 498 du code de procédure pénale). Cela étant, dans deux cas (jugement réputé contradictoire et jugement par défaut définis par l’article 498 du code de procédure pénale), il ne court qu’à compter de la signification du jugement à la diligence du ministère public ou de la partie civile (article 554 du code de procédure pénale), c’est à dire du comptable des finances publiques.

Au pénal, le pourvoi en cassation est suspensif d’exécution sauf en cas de condamnations civiles (article 569 du code de procédure pénale).

Nonobstant ses effets civils la solidarité juridique édictée par l’article 1745 du CGI étant qualifiée par la Cour de cassation de mesure à caractère pénal (Cass. crim. 3 juin 2004, Bull. crim. Pourvoi 04-82036), le caractère suspensif du pourvoi s’applique en la matière. Dans ces conditions, le comptable doit surseoir à l’exécution de l’arrêt rendu par la Cour d’appel dans l’attente de la décision de la Cour de cassation.

Ces principes sont également applicables en matière de contributions indirectes.

270

Le point de départ du délai de la prescription est constitué :

- pour un jugement ou un arrêt définitif, par la date d’expiration du délai de recours (plus de possibilité d’exercer les voies de recours) ;

- en cas de pourvoi en cassation, après obtention d’un arrêt irrévocable (pas de renvoi) à la date de l’arrêt, ou encore à la date d’une décision définitive si la juridiction suprême décide de renvoyer l’affaire devant une Cour de renvoi.

3. Computation du délai

280

Les articles 2228 et 2229 du code civil disposent que«la prescription se compte par jours,et non par heures » et qu'elle « est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli ».

Le délai commence à courir le premier jour qui suit l’événement déclencheur, étant observé que le jour pendant lequel se produit un événement à partir duquel court un délai de prescription ne compte pas. La prescription est acquise lorsque le dernier jour du délai est écoulé (articles 640 et 641 du code de procédure civile).

290

Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant (article 642 du code de procédure civile).

II. Le champ d'application du délai de prescription

L'étendue de la prescription, délai et point de départ, des impôts perçus par voie de rôle, est la même pour chaque article du rôle considéré isolément, et non pour l'ensemble des impôts dus au titre d'une année.

S'agissant des impôts faisant l'objet d'un avis de mise en recouvrement, la prescription s'applique à toutes les sommes portées sur cet avis et uniquement à celles-ci.

1. Au regard des sommes soumises à la prescription : la spécificité des pénalités

a. Impôts recouvrés par voie d'avis de mise en recouvrement

300

Dès lors qu’il est lié à l’émission d’un avis de mise en recouvrement (AMR), le délai de prescription de quatre ans s’applique au recouvrement de toutes sommes portées sur cet avis et uniquement celles-là, mais les pénalités de retard, compte tenu de leur nature, ne peuvent pas être liquidées et mises en recouvrement en même temps que les droits auxquels elles se rapportent. Elles ne sont calculées et authentifiées que lorsque les droits correspondants ont été acquittés.

Dès lors, la prescription de l’action en recouvrement des pénalités (quatre ans) court à compter de la notification de l’AMR qui authentifie les droits et tout acte qui interrompt la prescription du principal produit le même effet en ce qui concerne les accessoires de cette créance et notamment les pénalités de retard.

Conformément aux dispositions de l’article L274 du LPF, le comptable public dispose d’un nouveau délai de quatre ans à compter de la notification de l’AMR par lequel les pénalités sont liquidées et authentifiées pour obtenir le recouvrement des sommes qui y figurent.

b. Impôts recouvrés par voie de rôle

310

La formule exécutoire collective portée sur un rôle vaut pour l’ensemble des impositions y afférentes.

La majoration de 10 % pour défaut de paiement à échéance (article 1730 du CGI) et les frais de poursuites (article 1912 CGI) suivent en matière de prescription le régime des droits visés dans les rôles.

Remarque : La qualification d'accessoires de l'impôt attribués à la majoration de 10% et aux frais de poursuites a été établie par la jurisprudence.

La Cour de cassation a jugé que la majoration de 10% est soumise aux mêmes règles de recouvrement que l’impôt lui-même et garantie par le privilège du Trésor (Cass. Com., 11 juillet 1988, N° 87-14451). Une décision de la Cour administrative d’appel de Douai (29 mars 2005, n° 03DA00025) utilise cette terminologie en décidant que « la majoration de 10 % et les frais de poursuites afférents aux commandements de payer constituent des accessoires à l’impôt lui-même et sont soumis aux mêmes règles de recouvrement ».

2. Au regard des personnes visées par la prescription

320

Tout comptable public des administrations fiscales est fondé à poursuivre le recouvrement de ses créances auprès de débiteurs tenus conjointement, solidairement ou à titre subsidiaire (sous certaines conditions) au paiement des impositions. Pour ce faire, il doit disposer d’un titre exécutoire.

330

Aux termes de l’article R*256-2 du LPF, « Lorsque le comptable poursuit le recouvrement d’une créance à l’égard de débiteurs tenus conjointement ou solidairement au paiement de celle-ci, il notifie préalablement à chacun d’eux un avis de mise en recouvrement ».

En effet, en dehors des cas de solidarité strictement prévus par la loi (cf. paiement des droits de mutation par décès, article 1709 du CGI), les dettes successorales se divisent de plein droit entre les héritiers au prorata de leur part héréditaire (obligation conjointe).

S’agissant des droits de mutation par décès recouvrés par voie d’AMR, les héritiers sont tenus solidairement au paiement de ceux-ci.

340

En cas de pluralité de débiteurs, la prescription de l’action en recouvrement est affectée par les règles qui gouvernent la notification de titres exécutoires, déterminées en fonction de la nature de l'obligation (conjointe, solidaire ou subsidiaire).

a. Obligation conjointe de premier rang (voir exception SCI)

350

Chaque AMR a pour effet d’interrompre le délai de reprise à l’égard de chaque débiteur séparément et à concurrence du montant figurant sur le titre concerné (codébiteurs tenus chacun pour une part de la créance fiscale). Chaque AMR fait courir le délai de prescription de l’action en recouvrement de manière indépendante pour chaque débiteur.

b. Obligation solidaire (obligation au paiement pour le tout) :

360

La dette réclamée au codébiteur solidaire est identique, dans sa nature et son montant, à celle mise à la charge du débiteur principal. L’AMR émis à l’encontre du débiteur initialement recherché en paiement interrompt le délai de reprise à l’égard de tous et y substitue également à l’égard de tous la prescription quadriennale de l’action en recouvrement. Par conséquent, les AMR émis par la suite ne peuvent lancer de nouveaux délais de prescription et ne constituent pas davantage des actes de poursuite susceptibles d’interrompre la prescription en cours.

En revanche, un acte interruptif de prescription délivré à l’un des débiteurs solidaires interrompt le délai de prescription contre l’autre (combinaison des articles L 274 du LPF et 2245 du code civil).

Ce lien de solidarité concerne notamment les héritiers pour les droits de mutation à titre gratuit (art. 1709 du CGI).

Il concerne également la caution : le règlement de cautionnement auquel renvoie expressément l’acte de cautionnement prévoit en effet que la caution s’oblige solidairement avec le redevable et renonce en conséquence au bénéfice de discussion.

370

En ce qui concerne l’impôt sur le revenu, la taxe d’habitation et l’impôt de solidarité sur la fortune, l’article 1691 bis du CGI précise que les époux et partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont tenus solidairement au paiement de ces impositions.

c. Obligation subsidiaire :

380

Cette catégorie comprend notamment les associés de sociétés civiles (obligation subsidiaire par rapport à la société et conjointe entre les associés) et les associés de SNC (obligation subsidiaire par rapport à la société et solidaire entre les associés).

1° Associés de sociétés civiles :

390

Le délai de reprise est interrompu à l’égard de tous les débiteurs par l’AMR adressé au débiteur principal, c’est à dire la SCI. En revanche, l'AMR délivré à un associé ne peut lancer un nouveau délai de prescription et ne constitue pas un acte de poursuite susceptible d'interrompre la prescription en cours.

L'acte interruptif réalisé à l'encontre d'un associé ne produit pas d'effet à l'égard des autres associés (pas d'obligation solidaire entre les associés mais obligation conjointe). Il aura néanmoins un effet interruptif à l'égard de la société à hauteur de la part de l'associé dans la dette de la SCI.

2° Associés de SNC :

400

L’AMR émis à l’encontre de la société interrompt également le délai de reprise à l’égard des associés et y substitue à l’égard de tous la prescription quadriennale de l’action en recouvrement. En revanche, l’AMR délivré à un associé ne peut lancer un nouveau délai de prescription et ne constitue pas un acte de poursuite susceptible d’interrompre la prescription en cours. L’interruption de prescription faite à l’encontre d’un associé par le biais d’un acte de poursuite produit ses effets à l’égard des autres associés (obligation solidaire).