BIC - Base d'imposition - Définition générale du bénéfice net
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« Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés ». L'actif net a été lui-même défini par ce texte comme « l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés » (code général des impôts [CGI], art. 38).
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Le présent titre est consacré à l'analyse et au commentaire de ces définitions.
I. Définition résultant du 1 de l'article 38 du CGI
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La définition résultant du 1 de l'article 38 du CGI est très générale puisque, selon ses termes, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation, sous réserve, toutefois, des exceptions prévues par la législation fiscale (cf. I-B § 100).
A. Portée générale de la définition
1. Le bénéfice net
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Le bénéfice net est déterminé en faisant masse de l'ensemble des produits et des charges qui trouvent leur origine dans des opérations de toute nature effectuées par l'entreprise.
Toutefois, le 2 de l'article 38 du CGI disposant que le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, il est également tenu compte, pour la détermination de ce bénéfice, des gains et des pertes n'étant pas nécessairement liés à une opération (cf. II § 110 et suiv.).
2. Les opérations de toute nature
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Il convient de tenir compte de l'ensemble des opérations effectuées.
Les opérations réalisées peuvent concerner l'objet même de l'entreprise ou n'avoir aucun lien direct avec son activité ; elles peuvent être effectuées à titre principal ou à titre accessoire.
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ll peut s'agir notamment :
- de ventes, de prestations de services, de travaux, mais aussi d'opérations de courtage ou de commission, de locations d'immeubles figurant à l'actif du bilan, de concessions de droits de la propriété industrielle, etc. ;
- des cessions d'éléments quelconques de l'actif, immobilisé ou non. ll n'y a pas lieu, à cet égard, de rechercher si la cession résulte ou non de la volonté de l'exploitant ; aussi convient-il d'entendre par cession toute opération ou tout événement ayant pour résultat de faire sortir un élément de l'actif de l'entreprise (vente, expropriation, apport, échange, partage, donation, retrait d'actif, etc.). Mais les plus ou moins-values réalisées lors de la cession de l'actif immobilisé sont soumises à un régime fiscal privilégié (BOI-BIC-PVMV).
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En application de ces principes, le Conseil d'État a notamment jugé :
- dans le cas d'une société exploitant un fonds de librairie-papeterie et dont le gérant avait obtenu la concession d'un débit de tabac par un traité de gérance l'obligeant à exploiter personnellement les produits du monopole, que l'Administration était fondée à se référer à la situation de fait créée par la société elle-même et à en déduire que cette société comprenait en réalité deux branches d'activité différentes dont elle assurait seule l'exploitation. En l'espèce, l'intéressé avait omis de se faire inscrire en qualité de gérant de débit de tabac au registre du commerce et il n'avait souscrit en son nom aucune déclaration de bénéfice. De plus, l'ensemble des recettes de la société et du débit de tabac étaient retracées sur un seul livre ouvert au nom de la société et il n'était tenu pour la librairie et le débit de tabac qu'un seul compte d'exploitation. Enfin, le compte bancaire ouvert au nom de la société servait également à l'exécution des opérations propres au débit de tabac (CE, arrêts du 12 juillet 1978, n° 6330 et n° 6331) ;
- qu'une société qui exploite une entreprise de négoce de denrées alimentaires n'est pas imposable à l'impôt sur les sociétés à raison des profits résultant d'opérations réalisées par des gérants de succursales agissant pour leur propre compte à l'insu des dirigeants. En effet, ces profits non comptabilisés dans les écritures sociales et directement appréhendés par les gérants sont restés sans influence sur les variations de l'actif net de la société (CE, arrêt du 17 décembre 1976, n° 151) ;
- s'agissant d'une société imposée à l'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices que lui auraient procurés les opérations frauduleuses réalisées par son représentant auprès d'une tierce entreprise :
- d'une part, que les profits supplémentaires correspondant aux factures établies à des prix majorés, avaient été à bon droit imposés au nom de la société comme ayant été appréhendés par cette dernière puis laissés à la disposition de son représentant dès lors qu'il apparaissait, dans les circonstances de l'espèce, que celle-ci n'avait pas ignoré les agissements de ce dernier,
- d'autre part, que les opérations correspondant aux factures fictives ne pouvaient être regardées comme réalisées par la société dès lors qu'aucune pièce du dossier ne permettait d'établir qu'elle avait pu avoir connaissance de ces factures fictives délivrées par son représentant.
Dans le même sens, CE, arrêt du 17 décembre 1976, n° 152 et CE, arrêt du 23 février 1979, n° 7307, rendus en matière de TVA ;
- que ne constitue pas le prix d'une cession d'élément incorporel de l'actif immobilisé relevant du régime des plus-values à long terme, mais un profit imposable au taux de droit commun, l'indemnité perçue par une entreprise en contrepartie de sa renonciation, avant son échéance, à une promesse contractuelle de concession de licence de fabrication qu'elle n'a pas utilisée et qu'elle ne s'est même pas mise en demeure d'utiliser (CE, arrêt du 29 juillet 1983, n° 28543).
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En ce qui concerne les extensions d'activités.
Il importe de noter que, conformément aux dispositions de l'article 155 du CGI, lorsqu'une entreprise industrielle ou commerciale non passible de l'impôt sur les sociétés étend son activité à des opérations dont les résultats entrent normalement dans la catégorie des bénéfices de l'exploitation agricole ou dans celle des bénéfices des professions non commerciales, il est tenu compte de ces résultats pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux à comprendre dans les bases de l'impôt sur le revenu.
Dans ce cas, le bénéfice net mentionné à l'article 38 du CGI est déterminé conformément aux dispositions du 1 du II de l'article 155 du CGI.
Toutefois, cette règle de cumul ne trouve son application que dans le cas où les opérations agricoles ou non commerciales ne sont accomplies qu'à titre de simple extension de l'activité industrielle ou commerciale exercée par l'entreprise. En d'autres termes, les contribuables soumis à cette disposition sont ceux qui se livrent à des opérations relevant en principe de catégories différentes, mais constituant en fait l'exploitation d'une seule et même entreprise dans laquelle l'objet industriel et commercial demeure prédominant.
Tel n'est pas le cas d'un contribuable exerçant d'une part la profession de pépiniériste et, d'autre part, celle d'entrepreneur de parcs et jardins qui comporte outre la vente de végétaux, un ensemble de prestations de services pour lesquelles la fourniture de main-d'œuvre est un élément important. Ainsi a-t-il été jugé que les bénéfices réalisés par l'intéressé dans sa profession d'entrepreneur de jardins qui présente un caractère industriel et commercial, doivent, en vertu du 1 de l'article 38 du CGI, être déterminés compte tenu de l'ensemble des recettes procurées par cette activité, y compris par conséquent celles qui proviennent de la vente aux clients de l'entreprise commerciale des produits végétaux issus de pépinières appartenant au contribuable (CE, arrêt du 4 octobre 1978 n° 7665).
Au cas particulier, il ne pourrait être fait application de l'article 155 du CGI dès l'instant que l'activité commerciale n'était pas prépondérante. Dans le cas contraire, c'est l'ensemble des ventes qui aurait dû être retenu pour la détermination du bénéfice commercial.
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Il est précisé que les dispositions du 1 du I de l'article 155 du CGI ne concernent que les exploitants individuels ainsi que les sociétés de personnes et assimilées n'ayant pas opté pour leur assujettissement à l'impôt sur les sociétés. En effet, les sociétés de capitaux et autres personnes morales passibles de ce dernier impôt sont imposables, sans distinction d'objet, conformément à l'article 205 du CGI, d'après l'ensemble des bénéfices ou revenus de toute nature qu'elles ont réalisés.
3. Opérations effectuées en cours ou en fin d'exploitation
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Toutes les opérations réalisées par l'entreprise concourent, en principe, à la détermination du bénéfice imposable, qu'elles soient effectuées en cours ou en fin d'exploitation. Aussi les opérations qu'une entreprise accomplit tant au commencement qu'au terme de son activité doivent-elles être prises en compte d'une manière identique.
Les conventions conclues au nom d'une société anonyme en formation, pendant la période de cette formation, peuvent en principe être prises en considération pour la détermination du bénéfice imposable de cette société (RM Soisson n° 23037, JO AN du 22 juillet 1972, p. 3285).
B. Dispositions dérogatoires visées au 1 de l'article 38 du CGI
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Le 1 de l'article 38 du CGI précise que les dispositions qu'il prévoit ne s'appliquent que sous réserve de l'article 33 ter du CGI, l'article 40 du CGI, l'article 40 sexies du CGI, l'article 41 du CGI, l'article 42 septies du CGI, l'article 42 octies du CGI, l'article 43 bis du CGI et l'article 151 sexies du CGI.
Mais cette énumération n'est pas limitative. Un certain nombre d'articles du CGI dont elle ne fait pas mention déroge également au principe général posé à l'article 38 du CGI.
Ces dispositions dérogatoires sont étudiées, cas par cas, dans les divisions de la présente série (BOI-BIC) consacrées aux domaines qu'elles concernent.
II. Définition résultant du 2 de l'article 38 du CGl
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Le 2 de l'article 38 du CGI complète le contenu de la notion de bénéfice en disposant que celui-ci « est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés ».
L'actif net est défini comme « l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ».
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ll s'ensuit que le bénéfice net ne résulte pas seulement des profits et pertes -en revenu ou en capital- engendrés par des opérations de toute nature effectuées par l'entreprise, mais aussi, conformément aux pratiques du commerce et de l'industrie, de la comparaison des valeurs actives et passives inventoriées suivant le code de commerce.
La notion de variation de l'actif net entre l'ouverture et la clôture de la période d'imposition appelle les explications suivantes.
A. L'actif net
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L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs réelles d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés.
1. Les valeurs réelles d'actif
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Les postes d'actif correspondant à des valeurs réelles de l'entreprise comprennent :
- les immobilisations corporelles, incorporelles, financières (prêts à plus d'un an, titres de participation, dépôts et cautionnements) ;
- les valeurs d'exploitation (marchandises, matières ou fournitures, produits intermédiaires et finis, productions en cours et emballages commerciaux : BOI-BIC-PDSTK-20) ;
- les valeurs réalisables à court terme ou disponibles à l'exclusion des frais d'établissement et bien entendu des pertes de l'exercice.
2. Le passif : les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés
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Ces éléments à prendre en considération pour la détermination de l'actif net sont :
- les créances des tiers ou, en d'autres termes, les dettes certaines et définitives, dans leur principe et dans leur montant, et qui sont à la charge effective de l'entreprise. Il s'agit, bien entendu, des seules dettes contractées pour les besoins de l'exploitation ou se rattachant à la gestion normale des entreprises. Il doit être fait abstraction, du point de vue fiscal, des dettes qui ne remplissent pas ces conditions, et les dépenses ou charges correspondantes doivent faire l'objet d'une réintégration extra-comptable dans les résultats imposables (BOI-BIC-BASE-30) ;
- les amortissements et provisions justifiés, c'est-à-dire les amortissements et provisions effectivement comptabilisés dans la limite de ceux déterminés conformément aux dispositions de la législation fiscale ; les amortissements et provisions excédant cette limite doivent être réintégrés dans les résultats imposables (BOI-BIC-BASE-30).
3. Le principe de séparation du patrimoine fiscal de l'entreprise et du patrimoine « privé » ou « civil » de l'exploitant
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On notera que les dispositions du 2 de l'article 38 du CGI constituent le fondement de l'important principe de séparation du patrimoine fiscal de l'entreprise et du patrimoine « privé » ou « civil » de l'exploitant.
Remarque :
Le patrimoine d'une société et celui de ses associés sont également distincts, même lorsqu'il s'agit de sociétés soumises au régime prévu à l'article 8 du CGI et dont les bénéfices, dès lors, sont considérés comme appréhendés par les associés au fur et à mesure de leur réalisation. Toutefois cette distinction n'est pas fondée sur les dispositions du 2 de l'article 38 du CGI, mais bien sur le fait que société et associés constituent des sujets de droit distincts.
Ce principe, confirmé par de nombreuses décisions jurisprudentielles, consiste à considérer que le patrimoine d'un exploitant individuel exerçant des activités industrielles et commerciales, s'il est unique au regard des principes généraux du droit, doit être regardé, du point de vue fiscal, comme comportant :
- des éléments compris dans l'actif et le passif de l'entreprise, et dont les variations de valeur doivent être prises en considération pour la détermination des résultats imposables ;
- et, a contrario, des éléments composant le patrimoine « privé » (ou, selon une terminologie équivalente, le patrimoine « civil ») de l'exploitant.
Sont également considérés comme ne faisant pas partie du patrimoine « privé » ou « civil » du contribuable :
- les éléments faisant partie de l'actif ou du passif d'une exploitation agricole dont les résultats sont déterminés d'après le régime du bénéfice réel ;
- les éléments considérés comme affectés à l'exercice d'une profession non commerciale.
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Seuls peuvent être considérés comme faisant partie de l'actif ou du passif d'une entreprise industrielle ou commerciale individuelle les biens qui ont été inscrits par le contribuable à l'actif de son bilan, soit en vertu de dispositions légales, soit par une décision de gestion opposable à l'Administration ; ainsi que les biens qui n'ont pas été inscrits à l'actif du bilan mais font partie de l'actif de l'entreprise en raison même de leur objet. Il s'agit essentiellement des éléments incorporels du fonds de commerce qui, par nature, font partie de l'actif immobilisé.
En ce qui concerne les dettes qui ont été inscrites au passif du bilan, la jurisprudence du Conseil d’État résultant des arrêts (CE, arrêt du 19 novembre 1976, n° 97386 et CE, arrêt du 19 novembre 1976, n° 97391) rendus par les trois sous-sections fiscales réunies, étend aux éléments du passif la liberté reconnue à l'exploitant individuel d'inscrire ou non à l'actif du bilan de son entreprise les biens mobiliers ou immobiliers lui appartenant (en ce sens également, CE, arrêt du 24 mai 1967, n° 65436).
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Mais cette jurisprudence ne saurait bien entendu faire obstacle à l'exercice du droit appartenant au service d'écarter, pour la détermination des résultats imposables, des dépenses en capital ou en intérêts qui seraient étrangères à l'intérêt de l'exploitation.
Ainsi, dans le cas d'une société qui faisait figurer au passif de son bilan le solde créditeur d'un compte-courant ouvert au nom d'une association qui avait pour objet de servir diverses prestations au personnel de l'entreprise, la Haute Assemblée a jugé que le solde créditeur de ce compte-courant n'avait pas le caractère d'une créance de tiers alors même que l'association était dotée de la personnalité morale, et que les sommes correspondantes devaient être rapportées aux résultats imposables. Au cas particulier, le comité de direction de cette association était en majorité composé de personnes désignées par le gérant de la société qui y siégeait lui-même. Comme ce comité décidait discrétionnairement du volume des prestations servies au personnel et par voie de conséquence de celui des sommes, d'ailleurs minimes, qui devaient être prélevées sur le compte-courant, c'est en fait l'entreprise elle-même qui réglait à son gré, par l'intermédiaire de ses représentants, les mouvements du compte-courant (CE, arrêt du 20 mai 1981, n° 16284).
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Dès lors, lorsqu'une personne physique qui exploite individuellement une entreprise industrielle et commerciale (régime d'imposition d'après le bénéfice réel) contracte une dette à l'égard d'un tiers, elle peut, en prenant une décision de gestion qui lui est opposable :
- soit regarder l'opération comme étrangère à l'exploitation de son entreprise et ne point la retracer dans ses écritures comptables ; dans ce cas, tout événement ultérieur, tel que le paiement des intérêts ou l'extinction de la dette par voie de remboursement ou autrement, survenant dans les rapports entre le débiteur et le créancier, reste sans influence sur les bénéfices imposables de l'entreprise ;
- soit, au contraire, regarder l'opération comme effectuée par l'entreprise et faire figurer en comptabilité l'encaissement de la somme prêtée et le montant de la dette contractée ; tout événement affectant les droits et obligations de l'entreprise à l'égard du créancier doit alors être pris en compte et peut influer sur le bénéfice net de l'exercice correspondant.
Dans ce second cas, le fait que la créance du tiers en cause, qui figurait au passif du bilan d'ouverture, ne se retrouve pas au passif du bilan de clôture traduit la réalisation d'un profit à moins que l'extinction ainsi constatée d'une dette de l'entreprise ait pour contrepartie, soit une diminution des valeurs d'actif par suite, par exemple, du remboursement, soit un supplément d'apport effectué par l'exploitant (cf. sur ce dernier point II-B-2 § 250).
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B. La variation de l'actif net
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Le bénéfice imposable est égal à la différence entre les valeurs d'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés.
Bien entendu, cette différence ainsi corrigée peut être négative, le résultat fiscal de la période considérée étant dans ce cas déficitaire.
1. La période d'imposition (CGI, art. 36 et CGI, art. 37)
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La période dont les résultats servent de base à l'impôt (impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou impôt sur les sociétés) est constituée, en principe, par l'exercice comptable de l'entreprise (CGI, art. 36 et CGI, art. 37)
Lorsque l'exercice comptable coïncide avec l'année civile, l'impôt est assis sur les résultats accusés par le bilan clos le 31 décembre. Quand il ne coïncide pas avec l'année civile, plusieurs situations différentes sont susceptibles de se présenter pour une année civile déterminée :
- un seul bilan a été dressé au cours de l'année : l'impôt est établi d'après le résultat accusé par ce bilan ;
- deux ou plusieurs bilans ont été dressés : l'impôt sur le revenu est assis sur la somme algébrique des résultats accusés par ces bilans ;
- aucun bilan n'a été dressé : l'impôt est établi d'après les résultats -déterminés si nécessaire d'une manière approximative dans la déclaration- de la période écoulée depuis la fin de la dernière période imposée ou, dans le cas d'entreprise nouvelle, depuis le commencement des opérations jusqu'au 31 décembre de l'année d'imposition. Ces mêmes bénéfices viennent ensuite en déduction des résultats du bilan dans lesquels ils sont compris. Toutefois, les sociétés nouvelles sont assujetties à l'impôt sur les sociétés sur les résultats de la période ouverte à la date de la création et fermée par la clôture du premier exercice ou au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle de la création (CGl, art. 209, I-al.2).
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Pour le calcul du résultat, il convient de considérer l'actif net à l'ouverture et à la clôture de la période d'imposition.
Ainsi, une société ne peut modifier rétroactivement les comptes de tiers qui doivent exprimer la situation débitrice ou créditrice de ces derniers telle qu'elle résulte, à la date du bilan, des opérations de l'exercice écoulé. En conséquence la remise de dette consentie par ladite société à une tierce entreprise doit rester sans influence sur les résultats de l'exercice dès lors qu'elle avait été décidée par une délibération des associés postérieure à la clôture de l'exercice (CE, arrêt du 14 mars 1979, n° 7360).
2. Les suppléments d'apport
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Les apports en espèces ou en nature faits à une entreprise lors de sa création et dont le montant net constitue l'actif net de départ ne constituent pas, bien entendu, un profit imposable.
Quant aux suppléments d'apports effectués par l'exploitant ou par les associés, ils doivent, aux termes du 2 de l'article 38 du CGI, être défalqués de la différence constatée entre la valeur de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période d'imposition.
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Le supplément d'apport peut prendre la forme de l'apport d'un bien corporel ou incorporel. Lorsqu'un tel apport est grevé d'une charge, il n'est considéré comme un supplément d'apport au sens du 2 de l'article 38 du CGI que pour son montant net.
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Le supplément d'apport peut également être réalisé sous forme de prise en charge, par le patrimoine privé de l'exploitant ou par un associé, de dettes qui grevaient effectivement le passif de l'entreprise à la date de cette opération.
Ainsi, le Conseil d'État considère que lorsque l'actif net augmente du fait de la suppression d'une dette de l'entreprise envers un tiers, il y a lieu de considérer que l'exploitant a effectué un supplément d'apport du même montant si la dette grevait réellement le passif de l'entreprise et si l'exploitant a repris et assumé à titre personnel les obligations de l'entreprise envers le titulaire de la créance correspondante.
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Jugé dès lors :
- qu'il n'y a pas eu modification du bénéfice net dans une espèce où l'annulation, à la date de la clôture d'un exercice, d'une dette envers un fournisseur par le crédit du compte personnel de l'exploitant a été, à la même date, compensée à due concurrence par la cession à l'entreprise d'une créance dont l'exploitant était titulaire vis-à-vis du même fournisseur, cette dernière cession présentant le caractère d'un supplément d'apport (CE, arrêt du 19 novembre 1976, n° 97386) ;
- que l'extinction de la dette d'une entreprise dont le montant a été viré en 1972, au compte « capital » trouve sa contrepartie dans un supplément d'apport dès lors que le contribuable établit que la suppression de cette dette a eu pour origine une transmission à titre gratuit l'ayant substitué personnellement dans les droits de la créancière de l'entreprise. En l'espèce la créancière, qui était la mère de l'époux de l'exploitante, avait fait part à son fils, en 1972, par lettre recommandée, de sa renonciation à obtenir le remboursement de la somme prêtée. Ce dernier a été regardé par le Conseil d'État comme ayant fait apport de la somme correspondante à l'entreprise de son épouse (CE, arrêt du 7 novembre 1979, n° 12129) ;
- qu'en revanche, l'extinction d'une dette de l'entreprise dont le montant a été viré au compte personnel de l'exploitant n'a pas été balancée par un supplément d'apport alors que l'exploitant n'établit :
- ni que la dette subsistât à la date du virement et qu'il ait pu de la sorte la prendre personnellement en charge,
- ni que la suppression de cette dette ait eu pour origine une transmission à titre gratuit l'ayant substitué dans les droits du créancier de l'entreprise. Au cas particulier, le créancier, qui était le père de l'exploitant, avait, selon le contribuable, renoncé à obtenir le remboursement de la somme prêtée mais il n'était justifié d'aucun acte souscrit par le père en faveur du fils et de nature à donner lieu à la perception des droits de mutation (CE, arrêt du 19 novembre 1976, n° 97391).
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Par ces arrêts, la Haute Assemblée a précisé la méthode à suivre pour rechercher s'il y a ou non supplément d'apport compensant la suppression d'une dette de l'entreprise. C'est ainsi qu'il ne peut y avoir prise en charge d'une dette de l'entreprise, et par suite supplément d'apport, qu'à condition que cette dette subsiste le jour où elle est virée au compte personnel de l'exploitant. Toutefois, il en est autrement lorsque ce dernier s'est trouvé par l'effet d'une transmission à titre gratuit substitué au créancier envers qui l'entreprise s'était obligée. Dans ce cas, en effet, les règles civiles relatives à la disparition des éléments de l'obligation, combinées avec la distinction fiscale du patrimoine privé et du patrimoine professionnel, conduisent à considérer que l'exploitant individuel apporte immédiatement à l'entreprise la créance dont il est devenu titulaire et que celle-ci s'éteint par la réunion sur la même tête des qualités de créancier et de débiteur. Mais il appartient au contribuable d'apporter la preuve complète de la mutation à titre gratuit en présentant, par exemple, un acte dûment enregistré.
D'une manière générale, les contribuables peuvent avoir recours à tous les moyens de preuve de droit commun pour établir l'existence d'un supplément d'apport compensant la suppression d'une dette de l'entreprise à l'égard d'un membre de la famille de l'exploitant, à la condition toutefois de respecter le caractère écrit de la procédure, ce qui exclut le recours à la preuve testimoniale.
A cet égard, le moyen le plus pratique de prouver l'existence d'une libéralité consiste en la présentation d'un acte susceptible de donner lieu au paiement des droits de mutation (RM du Luart n° 8946, JO Sénat, 3 février 1983, p. 182-183).
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Cas particulier : augmentation de capital suivie ou précédée d'une réduction de capital.
Jugé que la réalisation simultanée par une société anonyme d'une augmentation de capital en espèces, libérée par imputation sur le compte courant du principal associé, et d'une réduction de capital visant à résorber les pertes comptables précédemment constatées (solde débiteur du compte « report à nouveau ») demeure sans influence sur le résultat fiscal de l'exercice concerné, dès lors que la disparition de la dette à l'égard de l'associé est compensée par un apport d'égal montant. En conséquence, la société placée dans cette situation conserve le droit d'imputer, dans les conditions de droit commun prévues par les dispositions du I de l'article 209 du CGI, les déficits reportables constatés au cours des exercices antérieurs (CE, arrêt du 20 mars 1989, n° 56087). Prise sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 38 du CGI, la présente décision pose le principe selon lequel les opérations communément qualifiées de « coup d'accordéon » (augmentation immédiatement suivie ou précédée d'une réduction de capital) ne dégagent aucun profit imposable et n'affectent pas le droit au report des déficits et des amortissements réputés différés précédemment dégagés.
3. Exonérations de certains abandons de créance à caractère financier
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L'article 216 A du CGI prévoit que, pour leur fraction non déductible des résultats imposables d'une société créancière, les abandons de créance consentis par celle-ci à une autre société dans laquelle elle détient une participation ne sont pas pris en compte pour la détermination du résultat imposable de la société débitrice, à la condition que la société bénéficiaire s'engage à augmenter son capital (BOI-IS-BASE-10-10-30).
4. Les prélèvements
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Qu'ils soient effectués en nature ou en espèces, les prélèvements de l'exploitant ou des associés doivent être ajoutés au bénéfice imposable de la période d'imposition au cours de laquelle ils ont été effectués.
a. Prélèvements en nature
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Les prélèvements en nature peuvent consister notamment :
- en l'appropriation par l'exploitant ou les associés de marchandises, matières premières ou produits finis distraits des valeurs d'exploitation pour l'usage personnel des intéressés ou celui de leur famille ;
- en la prise en charge, par l'entreprise, de frais exposés pour les besoins personnels de l'exploitant ou des associés ou de leur famille.
Concernant le premier point, il a été précisé, notamment :
- que lorsque, au cours d'un exercice, un antiquaire a distrait de son stock commercial des objets d'art ou d'antiquité en vue de les affecter à sa collection privée, ses bénéfices doivent être déterminés en défalquant le prix de revient de ces objets du montant des achats ou de la valeur du stock d'entrée dudit exercice, selon qu'ils ont été achetés au cours du même exercice ou au cours d'exercices antérieurs ;
- que les débitants de boissons doivent rapporter à leurs bénéfices le prix d'achat ou de revient des marchandises qu'ils réservent à leur consommation familiale ou personnelle ;
- que l'associé d'une société, dont les bénéfices sont imposables selon le régime défini à l'article 8 du CGI, qui acquiert à un prix inférieur à sa valeur réelle un produit acquis ou créé par la société en vue de sa revente, est réputé avoir appréhendé par voie de prélèvement la libéralité correspondant à la différence entre cette valeur réelle et le prix de cession, laquelle doit être réintégrée dans les résultats du ou des exercices au cours desquels l'insuffisance du prix de cession a entraîné une diminution des recettes ou des créances acquises par l'entreprise.
C'est en ce sens qu'a statué le Conseil d'État dans le cas d'une société en nom collectif ayant cédé au prix de revient des appartements dépendant de son stock immobilier à ses associés alors qu'il n'était pas établi que l'état du marché immobilier l'avait contrainte à procéder à ces ventes pour des prix nettement inférieurs à ceux fixés pour des ventes faites à des tiers. C'est par suite à bon droit que le service a substitué aux prix de revient seulement exigés des associés, les prix de vente aux tiers (CE, arrêt du 24 avril 1981, n° 6657).
b. Prélèvements en espèces
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Constituent notamment des prélèvements en espèces :
- la rémunération que s'attribue l'entrepreneur individuel pour lui-même et son conjoint. Pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux, la déduction du salaire du conjoint de l'exploitant individuel ou de l'associé d'une société de personnes mentionnée à l'article 8 du CGI est autorisée dans les conditions prévues à l'article 154 du CGI ;
- les intérêts servis en rémunération des capitaux propres apportés par l'exploitant ou par les associés ;
- d'une manière générale, toutes les sommes prélevées dans la caisse sociale ou sur les comptes en banque de l'entreprise et destinées à payer des dépenses personnelles de l'exploitant ou des associés.