Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Identifiant juridique : BOI-SJ-RES-10-20-20-50

SJ - Garantie contre les changements de position de l'administration fiscale - Garantie contre les changements de doctrine - Procédures de rescrit fiscal - Rescrit fiscal, garantie apportée par une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait - Rescrits spécifiques avec l'accord implicite en cas d'absence de réponse de l'administration dans un délai encadré - Rescrit relatif à la notion d'établissement stable réservé aux contribuables résidents d'un État lié à la France par une convention fiscale internationale

I. Champ d'application de la garantie prévue à l'article L. 80 B-6° du LPF

1

L’article L. 80 B-6° du LPF permet à un contribuable de bonne foi d’interroger l’administration fiscale à partir d’une présentation écrite, précise, complète et sincère de la situation de fait, afin que celle-ci lui apporte l’assurance qu’il ne dispose pas en France d’un établissement stable ou d’une base fixe au sens de la convention fiscale liant la France à l'État dans lequel ce contribuable est résident.

10

Cette possibilité est toutefois réservée au contribuable résident d’un État lié à la France par une convention fiscale internationale.

II. Conditions d'application de la garantie prévue à l'article L. 80 B-6° du LPF

A. Demande : saisine et contenu

20

Les modalités d’application du 6° de l'article L. 80 B du LPF sont prévues par les dispositions réglementaires de l’article R*80 B 9 du LPF.

Un modèle de la demande est disponible au BOI-LETTRE-000130.

1. Dépôt de la demande

30

À  la différence de l’article L. 80 B-2°, 3° et 3° bis du LPF, le caractère préalable du dépôt de la demande avant l’opération n’est pas exigé.

2. Objet de la demande

40

Les dispositions de l'article L. 80 B-6° du LPF et, partant, les garanties qui y sont attachées, sont réservées aux entreprises qui souhaitent avoir l’assurance qu’elles ne disposent pas en France d’un établissement stable.

50

Les demandes des entreprises qui, au contraire, souhaitent savoir si elles disposent en France d’un établissement stable entrent dans le champ d’application des dispositions de l’article L. 80 B-1° du LPF et bénéficient des garanties attachées à ce dispositif (cf.  BOI-SJ-RES-10-20-10).

3. Forme et contenu de la demande

60

La demande doit préciser la dénomination sociale, l’adresse à l’étranger ainsi que l’adresse en France où le contribuable a élu domicile pour l’instruction de cette demande (représentant fiscal) et la qualité du signataire.

70

Elle doit également comporter une présentation précise, complète et sincère de la situation de fait de l’entité située en France et contenir toutes les informations nécessaires pour mettre l’administration en mesure d’apprécier si le contribuable ne dispose pas en France d’un établissement stable au sens de la convention fiscale internationale liant la France à l'État dans lequel ce contribuable est résident.

80

Les demandes sont à établir sur papier libre conformément au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du budget et repris en annexe à l'arrêté du 1er décembre 2005  fixant le modèle des demandes. Ce modèle est repris au BOI-LETTRE-000130 ; il est également disponible sur le site www.impots.gouv.fr. Elles doivent être adressées par voie postale, sous pli recommandé avec demande d’avis de réception ou déposées auprès de l’administration contre décharge.

4. Service auquel doit être adressée la demande

90

Les demandes doivent être adressées à l’administration centrale de la DGFiP, au Service Juridique de la Fiscalité, bureau des agréments et rescrits, 86/92 Allée de Bercy, 75574 Paris Cedex 12.

100

Lorsque la demande ne contient pas tous les éléments nécessaires à son instruction, l'administration invite le contribuable à produire les éléments manquants. La demande d'éléments complémentaires doit être adressée le plus rapidement possible au contribuable, sous pli recommandé avec demande d'avis de réception.

110

Les éléments complémentaires doivent être adressés à l'administration selon les mêmes modalités que la demande initiale, c'est-à-dire par la voie postale en recommandé avec accusé de réception ou par remise directe contre décharge.

120

Aucun délai n'est prévu pour la fourniture des éléments complémentaires, mais dans cette situation, le délai de trois mois à l'expiration duquel le silence de l'administration vaut accord tacite ne court qu'à compter de la réception par le service fiscal de la totalité du dossier.

B. Réponse de l'administration

130

L’administration dispose d’un délai de trois mois pour répondre au contribuable de bonne foi. À défaut, le silence gardé par l’administration, à l’issue de ce délai, vaut acceptation tacite de la demande du contribuable.

1. Point de départ du délai de trois mois

140

Le délai de trois mois commence à courir à compter de la réception de la demande par l'administration.

150

Par ailleurs, dans l'hypothèse où la demande est imprécise ou incomplète et ne permet pas à l'administration de se prononcer, le délai au terme duquel, à défaut de réponse expresse, la demande est réputée acceptée ne court qu'à compter de la réception des compléments demandés.

160

Lorsque la demande parvient à un service incompétent, ce service la transmet sans délai au service compétent et en informe l'auteur de la demande. Dans ce cas, le délai prévu à l’article L. 80 B-6° du LPF court à compter de la date de réception par le service compétent saisi.

170

En principe, un contribuable (ou son représentant) de bonne foi, au sens des articles L. 80 A et L. 80 B du LPF, n’a pas à saisir, pour une même demande ou l’application d’une même disposition, plusieurs services différents, d'autant que, dans l’hypothèse d’une erreur du contribuable sur le lieu de dépôt, il appartient à l’administration de transmettre sa demande au service compétent et de l’en informer.

Par conséquent, la saisine par un contribuable (ou son représentant) de plusieurs services, simultanément ou successivement, sans que chacun en soit expressément informé, pourra, en règle générale, être considérée comme abusive, en particulier, s’il est relevé, par exemple, l’absence manifeste de tout fondement à agir ainsi ou le caractère malintentionné d’une telle démarche visant notamment à rechercher la multiplication des prises de position de l’administration sur une même demande. Dans une telle situation, la bonne foi du contribuable, au sens des articles L. 80 A et L. 80 B du LPF , ne pourrait être retenue : sa demande ne pourrait alors recevoir une suite favorable et les réponses obtenues ne seraient pas opposables.

2. Point d'arrivée du délai de trois mois

180

Le délai de trois mois se calcule de quantième à quantième. Il commence à courir le jour de la réception de la demande et expire le jour du dernier mois qui porte le même quantième que le jour de la réception de la demande. Tout délai expire le dernier jour à minuit.

Exemple : lorsqu’une demande a été reçue le 10 mai, le délai de trois mois expire le 10 août à minuit.

À  défaut de quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois.

190

Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.

III. Étendue de la garantie prévue à l'article L. 80 B-6° du LPF

200

La portée de la garantie dépend de la suite donnée par l'administration, dans le délai de trois mois, à la demande présentée.

A. L'administration a répondu dans le délai

210

Trois situations peuvent se présenter :

1. La réponse de l'administration est négative

220

L'administration ne partage pas les conclusions de l’entreprise au vu de la situation exposée dans la demande et lui fait connaître son désaccord. Elle prend alors formellement position dans un sens différent de celui envisagé par l’entreprise.

230

Si elle ne partage pas l'avis de l'administration, l’entreprise a la faculté de solliciter un second examen dans les conditions prévues à l'article L. 80 CB du LPF (cf. BOI-SJ-RES-10-30 ).

240

Elle peut aussi décider de passer outre l'avis de l'administration mais s'expose alors à des rehaussements en cas de contrôle.

2. La réponse de l'administration est positive

250

La réponse de l'administration vaut prise de position formelle sur la situation de fait de l'entreprise au regard du texte légal en cause. L'administration est engagée par sa réponse dans les conditions prévues aux articles L. 80 A et L. 80 B-1° du LPF et ne saurait exercer son droit de reprise.

3. La réponse de l'administration est positive mais comporte des conditions

260

L’administration ne sera engagée par sa réponse que dans la mesure où l’entreprise aura satisfait les conditions qui y sont énoncées.

B. L'administration n'a pas répondu dans le délai

270

L’administration est réputée avoir pris une position favorable implicite opposable. Le contribuable ne peut opposer la réponse tacite de l'administration que si l'ensemble des conditions requises en matière de garantie contre les changements de doctrine est réuni. Ainsi, il faut notamment que la situation réelle corresponde à la situation décrite dans la demande.

C. Inopposabilité aux tiers

280

En outre, la réponse présente un caractère relatif, c'est-à-dire que la garantie ne peut s'appliquer qu'à l'entreprise demandeuse. La réponse ne vaut que pour l'entreprise concernée : un contribuable ne saurait invoquer la réponse faite à un autre.