Date de début de publication du BOI : 03/02/2021
Identifiant juridique : BOI-CTX-GCX-30

CTX - La juridiction gracieuse - Demandes gracieuses des tiers mis en cause

Actualité liée : 03/02/2021 : CTX - Délégation de signature en matière contentieuse et gracieuse (Décret n° 2013-443 du 30 mai 2013 relatif aux règles de compétence et de délégation de signature applicables au traitement des réclamations contentieuses et des demandes à titre gracieux présentées par les contribuables)

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Aux termes de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales (LPF), l'administration peut décharger de leur responsabilité les personnes tenues au paiement d'impositions dues par un tiers.

Les tiers ainsi visés sont ceux qui sont personnellement responsables du paiement, à l'exclusion des simples « tiers détenteurs », c'est-à-dire des personnes, qui étant dépositaires ou débiteurs de fonds provenant du contribuable, sont tenues, sur demande du comptable, d'affecter les sommes au paiement des impôts dus par le contribuable, mais qui ne sont pas responsables sur leurs deniers personnels (sur la notion de tiers détenteur, BOI-REC-FORCE-30).

Les tiers mis en cause peuvent soumettre à la juridiction gracieuse une demande tendant à être dispensés de l'obligation qu'ils assument en vertu des dispositions du code général des impôts (CGI) ou de toutes autres dispositions légales.

Remarque : Si le tiers mis en cause conteste le principe ou la quotité de l'obligation qui lui est imposée, les réclamations contentieuses, qui peuvent être présentées sous la forme soit d'oppositions à poursuites ou à contrainte, soit de demandes en restitution (lorsque les sommes réclamées ont été acquittées par le tiers mis en cause), sont présentées, instruites et jugées suivant les règles du contentieux du recouvrement (BOI-REC-EVTS-20-10).

I. Tiers mis en cause susceptibles d'introduire une demande gracieuse

A. En matière d'impôts directs

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En matière d'impôts directs et de taxes assimilées, les personnes déclarées solidairement responsables des impôts établis au nom d'un contribuable sont :

- les représentants ou ayants cause du contribuable (code général des impôts (CGI), art. 1682) : administrateur des biens du mineur (parents ou tuteur), tuteur ou curateur des incapables majeurs, héritiers et légataires universels ou à titre universel ; les cessionnaires du fonds de commerce, en matière d'impôt sur le revenu, d'impôt sur les sociétés et de taxe d'apprentissage (CGI, art. 1684, 1) (BOI-REC-SOLID-20-30) ;

- les successeurs des contribuables exerçant une profession non commerciale, dès lors que la cession a eu lieu à titre onéreux (CGI, art. 1684, 2) (BOI-REC-SOLID-20-30) ;

- les propriétaires non exploitants de fonds de commerce (CGI, art. 1684, 3) (BOI-REC-SOLID-20-30) ;

- les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité (PACS), en matière d'impôt sur le revenu lorsqu'ils font l'objet d'une imposition commune et de taxe d'habitation lorsqu'ils vivent sous le même toit (CGI, art. 1691 bis) (BOI-CTX-DRS-10).

- les propriétaires ou principaux locataires qui laissent déménager les contribuables logés chez eux sans avoir avisé le comptable public, pour la taxe d'habitation (CGI, art. 1686, al. 1 et 2) ou pour la cotisation foncière des entreprises (CGI, art. 1687) due par les contribuables (BOI-REC-SOLID-20-40) ;

- les logeurs en garni, pour la taxe d'habitation due par les personnes qu'ils logent (CGI, art. 1686, al. 3) (BOI-REC-SOLID-20-40) ;

- les loueurs de bureaux meublés par l'entremise desquels toute personne locataire desdits bureaux doit verser au Trésor, à la fin de chaque mois, 25 % du prix de location en garantie du paiement des impôts dont elle peut être redevable (CGI, art. 1688) (BOI-REC-SOLID-20-40) ;

- les complices de délits fiscaux (CGI, art. 1691) (BOI-REC-SOLID-20-50) ;

- les associés des sociétés civiles pour les impôts directs (impôts locaux ou impôts sur les sociétés) dont celles-ci sont redevables (recherchés en application de l'article 1857 du code civil) (BOI-REC-SOLID-20-10-10).

B. En matière de droits d'enregistrement

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Sont également solidaires vis-à-vis du Trésor les parties pour le paiement des droits simples et des pénalités dus sur les actes sous seing privé ou notariés, les sentences arbitrales et les décisions judiciaires (CGI, art. 1705 et CGI, art. 1707).

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Pour le paiement de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances et ses pénalités, sont solidaires dans tous les cas : les assureurs, leur représentant responsable, leurs agents, directeurs d'établissements ou de succursales ou leurs représentants, les courtiers et intermédiaires et les assurés (CGI, art. 1708).

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Pour les droits sur les déclarations des mutations par décès, les cohéritiers sont solidaires, à l’exception de ceux qui bénéficient de l'exemption prévue à l'article 796 du CGI (CGI, art. 1709 et CGI, art. 1710).

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Pour les droits dus sur les actes qu'ils ont négligé de soumettre à l'enregistrement ou à la formalité fusionnée, les notaires, huissiers et autres agents ayant pouvoir de faire des actes et procès-verbaux, greffiers et autorités administratives sont solidairement tenus de l'acquittement des droits (CGI, art. 1840 C).

C. En matière d’impôt sur la fortune immobilière

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Les époux et les partenaires liés par un PACS défini par l'article 515-1 du code civil sont solidaires pour le paiement de l'impôt sur la fortune immobilière (CGI, art. 1723 ter-00 B).

D. Autres dispositions

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Pour les impositions de toute nature et les pénalités fiscales dues par une société, une personne morale ou un groupement, dont le recouvrement a été rendu impossible par des manœuvres frauduleuses ou l'inobservation répétée des diverses obligations fiscales, le ou les dirigeants peuvent être rendus solidairement responsables avec la société, la personne morale ou le groupement, après décision du président du tribunal judiciaire du lieu du siège de la société (LPF, art. L. 267).

70

Pour les impôts et taxes dus par celui qui exerce un travail dissimulé, celui qui a été condamné pour avoir recouru à ses services est tenu solidairement avec celui-ci (CGI, art. 1724 quater).

80

Pour l'impôt fraudé et les pénalités fiscales y afférentes, tous ceux qui ont fait l'objet d'une condamnation définitive, prononcée en application de l'article 1741 du CGI, de l'article 1742 du CGI et de l'article 1743 du CGI peuvent être solidairement tenus avec le redevable légal de l'impôt fraudé et des pénalités fiscales y afférentes (CGI, art. 1745).

Enfin, sont solidaires pour le paiement des pénalités ou amendes :

- toutes les parties à l'acte ou à la convention en cas d'abus de droit ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat (CGI, art. 1754, V-1) ;

- les personnes mentionnées du 2 au 8 du V l'article 1754 du CGI, l'article 1786 du CGI et l'article 1840 E du CGI visant les solidarités en matière de pénalités.

II. Présentation des demandes gracieuses des tiers mis en cause

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Les demandes des tiers mis en cause doivent être présentées au directeur des finances publiques dont dépend le comptable chargé du recouvrement.

Les demandes ne sont soumises à aucune forme particulière. Elles peuvent être formulées à tout moment.

Remarque : La saisine de la commission de surendettement mentionnée à l'article L. 712-4 du code de la consommation (C. consom.) (BOI-CTX-GCX-10-30-30-30) par des tiers tenus au paiement de l'impôt vaut demande de dispense de paiement dès lors que cette saisine satisfait aux conditions prévues à l'article R. 712-15 du C. com., de l'article R. 721-1 du C. com. à l'article R. 721-4 du C. com. et à l'article R. 761-1 du C. com.  (LPF, art. R. 247-18).

Elles doivent être individuelles.

La demande peut tendre soit à la mise hors cause du tiers requérant, soit à la restitution des sommes qu'il a versées.

III. Examen des demandes gracieuses des tiers mis en cause

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L'octroi d'une décharge totale ou partielle de responsabilité à un tiers tenu de payer l'impôt en l'acquit du redevable n'est pas nécessairement subordonné à la constatation de l'insolvabilité du requérant.

Des mesures de cette nature peuvent intervenir en faveur de tiers dont la solvabilité est certaine. Les lois qui ont organisé la responsabilité des tiers ayant essentiellement pour objet soit de déjouer des manœuvres frauduleuses, soit de sanctionner certaines négligences, des décharges totales ou partielles de responsabilité peuvent être justifiées, abstraction faite de toute considération de solvabilité, en faveur des tiers de bonne foi, notamment si ces derniers peuvent établir qu'ils n'avaient aucun moyen d'obliger le contribuable à s'acquitter de ses cotisations ou que des circonstances particulières ne leur ont pas permis d'exiger du contribuable des garanties suffisantes.

IV. Décisions prises sur les demandes gracieuses des tiers mis en cause

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La décision appartient :

- au directeur chargé de la direction départementale ou régionale des finances publiques, du service à compétence nationale ou de la direction spécialisée dont dépend le comptable chargé du recouvrement lorsque les sommes n'excèdent pas 305 000 euros par cote, exercice ou affaire selon la nature des impôts ;

- au ministre chargé du budget dans les autres cas.

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L'autorité habilitée à statuer est déterminée en considérant chaque cote, exercice ou affaire. En pratique, si les sommes faisant l'objet de la demande concernent plusieurs cotes, exercices ou affaires, la compétence est fixée, pour l'ensemble de la demande, par la plus élevée de ces sommes.

La somme faisant l'objet de la demande est celle pour laquelle le service est appelé à prendre une décision, c'est-à-dire la somme au paiement de laquelle le tiers est légalement tenu. Il s'ensuit, notamment, que si le redevable principal avait acquitté une partie de l'imposition, la somme en jeu est celle restant due. Par contre, si le tiers mis en cause avait versé une partie de la somme au paiement de laquelle il était légalement obligé, il y aurait lieu de déterminer la compétence en fonction, non du solde de cette somme, mais de la créance initiale du Trésor contre le tiers.

La division par cote, exercice ou affaire des sommes dues correspond à celle qui a été adoptée pour les transactions, remises ou modérations (BOI-CTX-GCX-10-40-10).

Quelle que soit la nature de l'impôt, il n'y a pas à distinguer entre les droits et les pénalités dès lors que la décharge de responsabilité peut porter sur les uns comme sur les autres. C'est donc le montant global par cote, exercice ou affaire qui est à considérer.

(120-140)

V. Voies de recours contre les décisions prises sur les demandes gracieuses de tiers mis en cause

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Par application des principes généraux du droit administratif en matière de recours hiérarchique, les tiers mis en cause non satisfaits par la décision qui a été prise sur leur demande ont la faculté de présenter un recours hiérarchique auprès du directeur général des finances publiques ou auprès du ministre chargé du budget. Le recours hiérarchique peut être présenté à tout moment (BOI-CTX-GCX-10-50).

Le refus de décharge peut également faire l’objet d’un recours juridictionnel pour excès de pouvoir dans les conditions de droit commun (BOI-CTX-REP).