Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Identifiant juridique : BOI-BIC-CHAMP-10-20

BIC - Champ d'application et territorialité - Revenus imposables par nature - Conditions d'exercice des professions commerciales, industrielles et artisanales

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Les revenus provenant de l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale ne sont considérés, au regard de l'impôt sur le revenu, comme des bénéfices industriels et commerciaux que s'ils sont réalisés à titre professionnel.

L'exercice d'une profession industrielle et commerciale suppose l'accomplissement habituel, par les personnes relevant de l'impôt sur le revenu, d'opérations de nature commerciale, industrielle ou artisanale, pour leur propre compte et dans un but lucratif.

La recherche des activités imposables doit être effectuée compte tenu des circonstances de fait dans lesquelles les opérations commerciales, industrielles ou artisanales sont réalisées.

A. Exercice habituel de l'activité

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L'exercice d'une profession commerciale ou industrielle implique l'accomplissement habituel d'opérations ayant le caractère d'actes de commerce au sens des dispositions des articles L110-1 du code de commerce et L110-2 du code de commerce .

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Toutefois, la condition d'habitude n'est pas nécessairement liée à la répétition fréquente des mêmes opérations. Des actes de commerce peu nombreux mais périodiques, et même des actes de commerce isolés mais dont l'exécution porterait sur une période d'assez longue durée, n'en ont pas moins un caractère professionnel. Ainsi, l'appréciation des critères d'exercice habituel d'une activité et du but lucratif résulte de l'examen au cas pas cas des circonstances de fait dans lesquelles les opérations sont réalisées (RM, Gerbaud, JO, Sénat du 6 septembre 2007, p.1575, n° 00094).

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À cet égard, le Conseil d'Etat a jugé qu'étaient imposables au titre des bénéfices industriels et commerciaux :

- une société en participation qui avait été constituée pour l'accomplissement de certains travaux ne faisant l'objet que d'un seul marché (CE, arrêt du 3 mai 1930 req. n° 785, RO, 5452, vol. 1 à 16) ;

- un contribuable qui, ayant reçu un stock de marchandises en héritage, en a poursuivi la réalisation pendant une période de plusieurs années selon les procédés commerciaux habituels et notamment par l'intermédiaire d'une SARL créée par lui à cet effet et rétribuée par une commission sur les marchandises vendues (CE, arrêt du 13 juillet 1954, req. n° 19560, RO, p. 122) ;

- un contribuable qui, au cours d'une année, s'est livré à des opérations de vente et d'échange portant sur plusieurs véhicules automobiles ainsi qu'à la revente de divers matériels, étant précisé que ces opérations ont revêtu un caractère répétitif et n'ont pas été conclues avec un même acheteur (CE, arrêt du 3 avril 1957, req. n° 30552, RO, p.323).

B. Exercice de l'activité pour son propre compte

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Les personnes qui accomplissent habituellement des actes de commerce ne peuvent être considérées comme exerçant une profession commerciale, industrielle ou artisanale qu'autant qu'elles les accomplissent pour leur propre compte.

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Si elles opèrent pour le compte d'autrui, moyennant rémunération, leur situation est celle de simples employés et leurs revenus sont rangés dans la catégorie des traitements et salaires. Il en est ainsi notamment des commis travaillant dans les établissements de leurs patrons, des placiers et des voyageurs de commerce ayant pour mission de recueillir des ordres d'achat, les uns auprès d'une clientèle locale, les autres dans une région plus ou moins étendue et même à l'étranger.

Il en est de même, s'ils ne font aucune opération pour leur propre compte, des représentants de commerce placés vis-à-vis de leurs mandants dans des liens de subordination étroite qui caractérisent le contrat de travail ou des représentants répondant aux conditions posées par les articles L 7313-1, L 7313-2 et L 7311-3 du code du travail (en ce qui concerne l'imposition des profits réalisés par les différents intermédiaires de commerce, cf. BOI- BIC-CHAMP-60-10-IV).

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Le Conseil d'Etat a jugé que :

- un contribuable qui - assurant, en vertu de contrats passés avec diverses entreprises, l'exploitation de cantines destinées au personnel de ces dernières - a la charge de l'approvisionnement, engage et rémunère le personnel, assume seul la responsabilité financière de la gestion, enfin est rétribué suivant des modalités n'excluant pas la réalisation de gains d'un montant variable, doit être regardé comme exerçant, pour son propre compte, une activité commerciale (CE, arrêt du 29 octobre 1965, req. n°s 64227 et 64229 RO, p. 419) ;

- un contribuable dont la profession consiste à prendre, pour le compte d'un grand magasin parisien, les commandes des clients au vu de catalogues, qui transmet ces commandes, reçoit les marchandises, conclut les ventes, en encaisse le prix et revend lui-même les articles refusés par les clients, doit être regardé comme exerçant une activité commerciale (CE, arrêt du 12 juillet 1969, req. n° 76637, RJCD, 1re partie, p. 199) ;

- un exploitant d'un dancing est réputé agir, non pas comme le mandataire des associations qui organisent des soirées dans ses locaux, mais comme un véritable organisateur de soirées dansantes dès lors que :

la publicité et la billetterie ne sont jamais faites au nom des associations organisatrices,

et les sommes reversées à ces dernières, après défalcation du prix de location de la salle et de la fourniture de diverses prestations est sans rapport avec les recettes encaissées par l'intéressé.

Ce dernier est donc le seul propriétaire de l'ensemble des recettes dégagées par les ventes de billets d'entrée et de boissons (CE, arrêt du 10 novembre 1989, n° 50557).

C. Exercice de l'activité dans un but lucratif

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Pour qu'il y ait imposition dans la catégorie des bénéfices industriels ou commerciaux, il faut enfin que l'activité soit exercée dans un but lucratif.

L'existence de l'intention spéculative résulte, en général, de l'examen des conditions d'exercice de l'activité. Cette intention peut exister même en cas de gestion partiellement désintéressée.

Ainsi un contribuable qui, exploitant dans un château dont il est propriétaire un établissement pour enfants « arriérés profonds », est rétribué par un prix de journée arrêté par l'Administration, lequel comprend, notamment, sa rémunération, des avantages en nature et le versement d'un intérêt pour le capital non amorti, doit être regardé comme exerçant une activité commerciale. Il en est ainsi alors même que :

- les enfants sont placés par l'Administration au titre de l'aide sociale ;

- l'intéressé s'est engagé à verser, en cas de cessation d'activité, à un établissement poursuivant un but similaire, le fonds de roulement et les provisions non employées ainsi qu'une somme correspondant à la plus-value immobilière résultant de la prise en compte des amortissements dans le calcul du prix de journée ;

- le tarif pratiqué est inférieur à celui d'entreprises similaires, cette circonstance n'étant pas de nature à établir le caractère non lucratif de l'exploitation (CE, arrêt du 8 octobre 1975 req. n° 88229, RJ, n° II, p. 120 ; à rapprocher des arrêts du 18 juin 1965, req. n°s 59768 et 62663, RO, p. 369 et du 25 juin 1969, req. n° 70573, RJCD, 1re partie, p. 155).

De même, l'exploitation d'un hôtel dans des conditions comparables à celles de la gestion par des entreprises commerciales présente un caractère commercial, même si l'un des exploitants se présente comme président d'une association à but non lucratif, si les produits sont affectés au remboursement des dettes de l'association, si les prix pratiqués sont modestes et si aucun personnel salarié n'est employé (CE, arrêt du 13 décembre 1982, req. n°s 26738 et 26739).

D. Circonstances sans influence sur la qualification qu'il convient de donner aux revenus imposables

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Restent notamment sans influence sur le caractère imposable ou non des activités commerciales, industrielles et artisanales :

- le régime de l'exploitant au regard de la contribution économique territoriale ;

- la nationalité de ce dernier (CE, arrêt du 6 décembre 1929, req. n° 6854, RO, 5411) ;

- le caractère illégal de l'exercice d'une profession commerciale.

Il est précisé, à cet égard, que l'exercice d'une profession industrielle ou commerciale est légalement interdit à certaines personnes telles que : mineurs non habilités, fonctionnaires, officiers ministériels et auxiliaires de justice (notaires, avocats, avoués, huissiers de justice), experts-comptables et comptables agréés, personnes ayant fait l'objet de certaines condamnations, etc.

Si les intéressés exercent effectivement un commerce, malgré l'interdiction qui leur en est faite par la loi ou le statut professionnel qui les régit, les bénéfices ainsi réalisés sont néanmoins imposables au titre des bénéfices commerciaux.

Il en a été ainsi jugé :

- à l'égard des bénéfices perçus par un officier en activité de service, dans l'exploitation d'un fonds de commerce dont il était co-propriétaire, nonobstant la circonstance que les règlements militaires interdisaient à l'intéressé toute occupation commerciale (CE, arrêt du 26 juillet 1928, req. n° 85810, RO, 5218, vol. 1 à 16) ;

- dans le cas d'un débitant de boissons qui, après la fermeture de son établissement en 1943, avait perdu sa licence de débitant, puis avait repris l'exercice de sa profession pour exploiter au cours des années 1946 et 1947 un café restaurant, sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'exploitant pouvait ou non se livrer légalement à l'activité précitée (CE, arrêt du 10 janvier 1953, req. n° 16084) ;

- en ce qui concerne un huissier de justice ayant exercé une activité d'administrateur d'immeubles, en infraction aux dispositions régissant sa profession (CE, arrêt du 2 juillet 1965, req. n° 53618) ; cf. BOI-BIC-CHAMP-60-10-I G).