Date de début de publication du BOI : 14/06/2013
Date de fin de publication du BOI : 11/10/2018
Identifiant juridique : BOI-PAT-ISF-20-10-20

PAT - Impôt de solidarité sur la fortune - Champ d'application - Personnes physiques domiciliées en France

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À condition que la valeur nette de leur patrimoine soit supérieure au seuil fixé à l'article 885 A du code général des impôts (CGI), soit 1,3 M €, les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France sont, quelle que soit leur nationalité, assujetties à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) à raison de leurs biens situés en France ou hors de France.

Certaines conventions fiscales conclues par la France prévoient cependant une dérogation à la règle générale de l'imposition sur la totalité des biens français et étrangers en faveur des personnes physiques ayant la nationalité de l’autre État partie à la convention qui deviennent des résidents de France. Cette dérogation ne s’applique pas, en revanche, aux personnes de nationalité française.

Par ailleurs, depuis le 6 août 2008 les personnes physiques, quelle que soit leur nationalité, qui n'ont pas été fiscalement domiciliées en France au cours des cinq années civiles précédant celle au cours de laquelle elles établissent leur domicile fiscal en France ne sont désormais imposables qu'à raison de leurs biens situés en France, et cela jusqu'au 31 décembre de la cinquième année qui suit celle au cours de laquelle elles ont établi leur domicile fiscal en France.

I. Définition du domicile fiscal

A. Règle générale

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Le domicile fiscal est défini au titre de l'ISF comme en matière d'impôt sur le revenu par l'article 4 B du CGI, sous réserve des l'application des conventions internationales (BOI-PAT-ISF-20-20).

Ainsi, pour les redevables domiciliés en France, quelle que soit leur nationalité, le champ d'application de l’ISF est général : il correspond au patrimoine mondial, c’est-à-dire qu’il comprend tous les biens meubles ou immeubles, qu'ils soient situés en France ou à l’étranger, possédés au 1er janvier de l’année d’imposition.

Aux termes de l'article 4 B du CGI, doivent être considérées comme ayant leur domicile fiscal en France :

- les personnes qui ont en France leur foyer ;

- celles qui ont en France le lieu de leur séjour principal ;

- celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ;

- celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques.

1. Personnes qui ont en France leur foyer

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D'une manière générale, le foyer s'entend du lieu où les époux et leurs enfants habitent normalement, c'est-à-dire du lieu de leur résidence habituelle à condition que cette résidence en France ait un caractère permanent.

Cette résidence demeure le foyer des conjoints même si l'un ou l'autre est amené, en raison des nécessités de sa profession, à séjourner ailleurs temporairement ou pendant la plus grande partie de l'année, dès lors que, normalement, la famille continue d'y habiter et que tous ses membres s'y retrouvent.

2. Personnes qui ont en France le lieu de leur séjour principal

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La condition de séjour principal est réputée remplie lorsque l'un ou l'autre des époux est personnellement et effectivement présent à titre principal en France, quels que puissent être, par ailleurs, le lieu et les conditions de séjour de son conjoint et de ses enfants. Peu importe également que les intéressés vivent à l'hôtel ou dans un logement mis gratuitement à leur disposition.

En règle générale, doivent être considérés comme ayant en France le lieu de leur séjour principal les contribuables qui y séjournent pendant plus de six mois au cours d’une année donnée.

Cependant, la durée de séjour de plus de six mois au cours d'une même année ne constitue pas un critère absolu. En effet, le Conseil d'État s'est abstenu de se référer à ce critère lorsque les circonstances de fait donnaient à penser que le contribuable avait bien en France le lieu de son séjour principal et notamment dans le cas ou, au cours des années considérées, l'intéressé avait résidé en France pendant une durée nettement supérieure à celle des séjours effectués dans différents pays étrangers (voir notamment : CE, arrêt du 19 novembre 1969, n° 75295 ; CE, arrêt du 16 juillet 1976, n° 94488).

3. Personnes qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non

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Doivent être considérées comme ayant leur domicile en France les personnes qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire.

Pour les salariés, le domicile est fonction du lieu où ils exercent effectivement et régulièrement leur activité professionnelle.

Pour les redevables non salariés, il convient de rechercher s'ils ont en France un point d'attache fixe, un établissement stable ou une exploitation et si la majeure partie de leurs profits s'y rattache.

Lorsque le redevable exerce simultanément plusieurs professions ou la même profession dans plusieurs pays, l'intéressé est considéré comme domicilié en France s'il y exerce son activité principale. L'activité principale s'entend de celle à laquelle le redevable consacre le plus de temps effectif, même si elle ne dégage pas l'essentiel de ses revenus. Dans l'hypothèse où un tel critère ne peut être appliqué, il convient de considérer que l'activité principale est celle qui procure à l'intéressé la plus grande part de ses revenus. Il s'agit bien entendu, de l'ensemble des revenus perçus en France et à l'étranger, c'est-à-dire « des revenus mondiaux » .

4. Personnes qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques

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Il s'agit du lieu où le contribuable a effectué ses principaux investissements, où il possède le siège de ses affaires, d'où il administre ses biens. Ce peut être également le lieu où le contribuable a le centre de ses activités professionnelles, ou d'où il tire la majeure partie de ses revenus.

Selon la cour de cassation (Cass. com., 30 mai 2000, n° 98-10983), justifie légalement sa décision selon laquelle un redevable a en France le centre de ses intérêts économiques et doit être considéré comme y ayant son domicile fiscal, le tribunal qui relève que :

- ce contribuable dispose en France non seulement d'un important patrimoine immobilier, constitué de onze immeubles loués, mais également d'un portefeuille de valeurs mobilières tout aussi important sur des compte bancaires ;

- pour l'ensemble des années litigieuses, les revenus perçus en France par ce même contribuable, pris à juste titre pour leur montant brut et non pas net, étaient d'un montant nettement supérieur à ses revenus résultant de son activité professionnelle exercée pour des périodes variables hors de France.

La Cour suprême admet ainsi que le centre des intérêts économiques peut être notamment défini comme le lieu où est situé l'essentiel du patrimoine du redevable et où est perçue la plus grande partie de ses revenus.

Par le même arrêt, la Cour indique au surplus que ce sont les revenus bruts qui doivent être pris en considération et non les revenus nets. Il est en effet manifeste que la notion de revenus renvoie en ce cas au concept économique de ressources et non à une catégorie juridique comme celle du revenu net imposable.

La Cour de cassation précise par ailleurs que la territorialité de l'ISF est régie par les seules dispositions de l'article 4 B du CGI et qu'il s'ensuit que les placements financiers peuvent être pris en compte à ce titre (Cass. com., 3 mars 2009, n° 08-12600). L'article 885 L du CGI, qui exclut de l'ISF les placements financiers des personnes physiques n'ayant pas leur domicile fiscal en France, est en effet un texte d'assiette sans influence sur les règles de territorialité.

B. Modalités d'application

1. Caractère alternatif des critères

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Pour qu'un redevable soit considéré comme fiscalement domicilié en France, il suffit qu'un seul des quatre critères énumérés au I § 10 à 50 soit rempli.

Par un arrêt du 30 mai 2000, la Cour de cassation a d'ailleurs implicitement rappelé que les critères énoncés à  l'article 4 B du CGI étaient alternatifs et indépendants les uns des autres (Cass. Com., 30 mai 2000, n° 98-10983).

2. Appréciation du domicile fiscal à la date du fait générateur de l'impôt

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Si les critères de la domiciliation fiscale visés par l'article 4 B du CGI sont les mêmes en matière d'ISF et d'impôt sur le revenu, les périodes de référence pour apprécier ces critères diffèrent.

L'impôt sur le revenu vise en effet la taxation d'un flux de revenus réalisé entre le 1er janvier et le 31 décembre d'une année. L'appréciation des critères prévus par l'article 4 B du CGI peut donc se faire tout au long de l'année.

En revanche, en matière d'ISF, c'est le patrimoine en l'état dans lequel il se trouve au 1er janvier de l'année, date du fait générateur de l'impôt, qui est taxé. La territorialité est donc uniquement appréciée à cette date.

La Cour de cassation confirme cette analyse en rappelant que le domicile fiscal s'apprécie au 1er janvier de chaque année d'imposition, date du fait générateur de l'impôt, et que le changement de domicile en cours d'année ne peut avoir une influence qu'au titre de l'ISF dû au 1er janvier de l'année suivante (Cass. Com., 21 juin 2011, n° 10-23136).

C. Cas particuliers

1. Agents de l'État exerçant leurs fonctions à l'étranger

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Les agents de l'État tels que les personnels civils et militaires, les fonctionnaires statutaires et employés de nationalité française ou étrangère placés sous contrat de travail avec l'État français et exerçant en cette qualité leur activité à l'étranger doivent être considérés comme domiciliés en France lorsqu'ils ne sont pas soumis, dans le pays où ils exercent leurs fonctions, à un impôt personnel sur l'ensemble de leurs revenus.

2. Personnes qui deviennent résidentes de France

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Le III de l'article 121 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, qui a modifié à cet effet les dispositions de l'article 885 A du CGI, institue, en faveur des personnes physiques qui deviennent des résidents de France, une exception au principe général d'imposition à l'ISF à raison du patrimoine mondial, sans préjudice, le cas échéant, de l'application des stipulations plus favorables des conventions fiscales internationales.

Ainsi, les personnes physiques ayant leur domicile fiscal en France et qui n'ont pas été fiscalement domiciliées en France au cours des cinq années civiles précédant celle au cours de laquelle elles s’y domicilient, ne sont imposables qu'à raison de leurs seuls biens situés en France.

La condition de non-domiciliation fiscale en France pendant les cinq années précédant celle de la domiciliation fiscale en France est appréciée au regard des dispositions de l'article 4 B du CGI ou, le cas échéant, de celles de la convention fiscale internationale applicable (BOI-PAT-ISF-20-20).

Ainsi, les personnes éligibles à ce dispositif sont celles qui, quelle que soit leur nationalité, française ou étrangère, n’ont pas été fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du CGI ou, en présence d’une convention fiscale internationale, qui n’ont pas été résidentes de France au sens de ladite convention, et cela au cours des cinq années civiles précédant celle au cours de laquelle elles se domicilient en France.

Cette disposition s'applique au titre de chaque année au cours de laquelle le redevable conserve son domicile fiscal en France, et cela jusqu'au 31 décembre de la cinquième année qui suit celle au cours de laquelle le domicile fiscal a été établi en France.

Remarque : Cette mesure s’applique quel que soit le motif de l’établissement du domicile fiscal en France (mobilité professionnelle, retraite, etc.).

Exemple : M. X, cadre français poursuivant une carrière internationale depuis 2006 pour le compte de la société Y, dont le siège social est situé en France, est résident fiscal étranger depuis cette date. Il est assujetti à l’ISF depuis 2010, notamment à la suite de l’acquisition d’une résidence secondaire en France.

Il s’est installé en France le 1er octobre 2012 pour y créer et développer une société de conseil.

M. X sera soumis à l’ISF sur ses seuls biens situés en France au titre des années 2013 à 2017. A compter de l’ISF dû au titre de l’année 2018, il sera redevable de cet impôt dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire sur l’ensemble de son patrimoine, situé en France comme à l’étranger, s’il est toujours résident fiscal de France.

Concernant l'entrée en vigueur, aux termes du XI de l'article 121 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, ces dispositions s'appliquent aux personnes qui établissent leur domicile fiscal en France à compter de l'entrée en vigueur de ladite loi, soit à compter du 6 août 2008.

En pratique, ces dispositions s'appliquent donc depuis l'ISF dû au titre de l'année 2009.

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L'étendue de l'obligation fiscale est définie par l'article 885 A du CGI.

Les règles sont les mêmes que celles applicables en matière de mutation à titre gratuit.

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Ainsi, pour les redevables domiciliés en France, quelle que soit leur nationalité, le champ d'application de l'impôt de solidarité sur la fortune est absolument général. Il comprend tous les biens meubles ou immeubles, qu'ils soient français ou étrangers, possédés au 1er janvier.

Remarque : Cas des contribuables de nationalité étrangère effectivement domiciliés en France au sens des conventions internationales.

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Certaines conventions conclues par la France avec certains États prévoient des dérogations à la règle générale de l'imposition sur la totalité des biens français et étrangers à l’égard des personnes physiques ayant la nationalité de ces États sans avoir la nationalité française et qui deviennent des résidents de France (BOI-PAT-ISF-20-20).