Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Date de fin de publication du BOI : 09/09/2013
Identifiant juridique : BOI-ENR-DMTG-10-40-10-10

ENR - Mutations à titre gratuit - Successions – Assiette - Principe d'évaluation à la valeur vénale

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Les droits de mutation par décès sont assis sur la valeur des biens transmis, abstraction faite de certaines déductions particulières et du passif successoral (cf. BOI-ENR-DMTG-10-40-20).

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Préalablement à l'examen des dispositions touchant l'évaluation des biens transmis à titre gratuit, il est précisé que la présente section n'a pas pour objet de traiter de la « technique » de l'évaluation. En tant que de besoin, il conviendra de se reporter notamment au guide de l'évaluation des biens qui résume les différentes méthodes d'évaluation possibles pour les diverses catégories de biens figurant, le plus fréquemment, dans le patrimoine d'une personne physique.

I. Principe d'évaluation à la valeur vénale

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Conformément à l'article 666 du CGI, les droits proportionnels ou progressifs d'enregistrement et la taxe proportionnelle de publicité foncière sont assis sur les valeurs. Il en résulte que les biens transmis sont évalués à leur valeur vénale au jour du fait générateur de l'impôt (cf. BOI-ENR-DMTG-10-30).

Toutefois, pour les transmissions sous condition suspensive, la valeur des biens est appréciée au jour de la réalisation de la condition (CGI, art. 676).

Les droits de mutation par décès sont en conséquence assis sur une déclaration estimative des redevables. Cependant pour certains biens, il existe des bases légales d'évaluation.

A. Notion de valeur vénale

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Par deux arrêts du 23 octobre 1984, la Cour de cassation a précisé la notion de valeur vénale.

1. Les clauses d'une promesse de vente d'un immeuble rural prévoyaient la conclusion d'un bail au profit du promettant concomitamment à la régularisation de la vente par acte authentique.

La Cour de cassation a estimé que, pour l'assiette des droits de mutation, les terres cédées devaient être considérées comme occupées au motif que « la valeur vénale réelle d'après laquelle les immeubles sont estimés pour la liquidation » de ces droits « en vertu de l'article L. 17 du LPF, est constituée par le prix qui pourrait en être obtenu par le jeu de l'offre et de la demande dans un marché réel compte tenu de l'état dans lequel se trouve l'immeuble avant la mutation et des clauses de l'acte de vente » (Cass. com., 23 octobre 1984, n° de pourvoi 83-12568).

2. Dans un arrêt rendu le même jour en matière de mutation à titre gratuit, la Cour suprême a considéré que les droits résultant du bail préalablement consenti au donataire affectaient la valeur intrinsèque d'une propriété rurale au jour de la donation de celle-ci et que la moins-value qui s'ensuivait devait, par conséquent, être prise en considération pour fixer la valeur vénale réelle à retenir à cette date (Cass. com., 23 octobre 1984, n° de pourvoi 83-11051).

Ces deux décisions participent d'une conception objective de la notion de valeur vénale réelle d'un bien immobilier, conception déjà affirmée par la Cour en droit commun en cas de rescision pour lésion (Civ. 1re, 16 novembre 1959 n° de pourvoi 57-11615, Bull. I, n° 477, p. 396), et selon laquelle il convient, pour appréhender cette valeur, de se placer du point de vue d'un acheteur quelconque (valeur commune, intrinsèque) et non d'une personne déterminée (valeur de convenance). Autrement dit, seuls sont à prendre en compte pour l'estimation du bien les éléments réels d'appréciation, qu'il s'agisse de facteurs d'ordre socio-économique, physique ou juridique, abstraction faite de circonstances propres à la situation personnelle des parties.

Par ailleurs, la Cour a jugé que l'état d'indivision dans lequel se trouvent les héritiers sur la pleine propriété d'un bien reçu par succession est sans incidence sur la valeur vénale de ce bien au jour de sa transmission (Cass. com., 28 janvier 2003, n° de pourvoi 01-12373 et Cass. com, 20 mars 2007, n° de pourvoi 05-17139).

Lorsqu'il s'agit d'un ensemble de biens, c'est la valeur de cet ensemble qui doit être prise en considération.

L'évaluation des biens d'après leur valeur vénale s'oppose à la publication et à l'utilisation de tableaux indicatifs, par exemple, relatifs à la valeur au mètre carré des appartements ou aux coefficients de capitalisation pour les immeubles loués. La publication par l'administration de barèmes ou de coefficients conduirait à des estimations forfaitaires contraires à l'esprit de la loi.

B. Détermination de la valeur vénale

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Les principes généraux gouvernant l'évaluation des diverses catégories de biens sont exposés dans le guide de l'évaluation des biens diffusé par l'administration. Cet ouvrage précise, pour chaque catégorie de biens (immeubles, fonds de commerce, clientèles, biens meubles, etc.), les principales méthodes d'évaluation susceptibles d'être utilisées et généralement admises par les experts privés ou publics.

Le guide de l'évaluation des biens n'impose pas une méthode, ni n'édicte d'exclusive à l'égard d'une autre, mais cherche à être une synthèse des travaux des experts privés ou publics et de l'expérience quotidienne du marché des biens. Il pourra être complété par la consultation d'ouvrages spécialisés dans l'évaluation de tel ou tel bien.

II. Précisions diverses

A. Monuments historiques

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Les demeures et bâtiments classés monuments historiques (ou inscrits à l'inventaire supplémentaire) se trouvent dans une situation particulière en raison, notamment, de leur nature spécifique, des charges souvent importantes qui les grèvent, du nombre limité des acquéreurs potentiels et des difficultés qui en découlent pour les vendre.

Il convient, en particulier, de tenir compte des contraintes qui résultent, pour les propriétaires de tels biens, de leur ouverture plus ou moins fréquente au public et de leur utilisation à des fins d'animation collective dans un but essentiellement culturel.

En ce qui concerne l'exonération dont peuvent bénéficier certains de ces biens, cf. BOI-ENR-DMTG-10-20-30-60 et BOI-ENR-DMTG-10-20-30-70.

B. Entreprises en difficulté

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Dans le cas d'entreprises en difficulté, c'est-à-dire d'entreprises ayant subi chroniquement des déficits traduisant une situation particulièrement obérée et dont les perspectives d'avenir sont compromises, le service doit faire preuve de prudence dans l'évaluation de leur valeur.

Il en est notamment ainsi, lorsqu'elles sont déficitaires depuis plusieurs exercices, des entreprises :

- dont le marché des produits est saturé ou est dominé par la concurrence ;

- ou dont la production est très liée à une mode ou repose sur des procédés techniques périmés ;

- ou dont les mécanismes de prise de décision et les modes d'organisation sont inadaptés et inefficaces.

Par ailleurs, le recours par des voies multiples à des aides publiques, le refus répété de crédits bancaires ou, à plus forte raison, la réalisation, dans un tel contexte, d'actifs importants constituent de très fortes présomptions de difficultés durables.

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Précisions relatives aux comptes courants détenus dans des sociétés en difficulté :

- si le compte courant n'est pas bloqué : il appartient au redevable de l'évaluer à la valeur pour laquelle il peut être recouvré compte tenu de la situation financière de la société ;

- si le compte courant est bloqué : il s'analyse en une créance à terme susceptible d'être évaluée d'après les règles prévues par l'article 760 du CGI (cf. BOI-ENR-DMTG-10-40-10-40). Il convient alors de retenir la valeur du compte courant en capital augmentée des intérêts échus et non encore payés à la date du fait générateur de l'impôt de même que des intérêts courus à la même date. En revanche, si la société se trouve en état de redressement ou liquidation judiciaire à la date du fait générateur de l'impôt, c'est alors la valeur probable de recouvrement qu'il y a lieu de déclarer. Si les sommes recouvrées sont ensuite supérieures à celles déclarées, la déclaration doit être régularisée en conséquence.

C. Stocks des entreprises

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Les stocks doivent être pris en compte pour leur valeur marchande, laquelle englobe la marge de commercialisation dès lors que, dans le cadre d'opérations courantes, leur vente en l'état à un acquéreur quelconque procurerait un bénéfice et que les liquidités ainsi dégagées seraient de toute façon comprises dans l'assiette des biens taxables. Mais, bien entendu, les produits en cours et les produits semi-ouvrés qui ne peuvent être vendus avec bénéfice qu'après transformation ou achèvement, doivent être évalués à partir de leur prix de revient.

D. Immeuble occupé par son propriétaire

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Pour l'assiette des droits de mutation à titre gratuit, les biens immobiliers sont retenus pour leur valeur vénale, c'est-à-dire au prix auquel ils pourraient être vendus si leur propriétaire décidait de les vendre à la date du fait générateur de l'impôt. Dès lors, un immeuble occupé par son propriétaire, qui n'est grevé d'aucun engagement de location, ne peut être évalué que comme un immeuble libre.

Conformément à la jurisprudence constante de la Haute Cour, la valeur vénale correspond au prix qui pourrait être obtenu du bien par le jeu de l'offre et de la demande dans un marché réel, compte tenu de l'état dans lequel il se trouve avant la mutation.

Dans un arrêt du 27 octobre 2009 (Cass. com., 27 octobre 2009, n° de pourvoi 08-11362), la Cour de cassation a précisé :

- que la limite apportée par le donateur à la liberté d'aliéner un immeuble dont il se réserve l'usufruit n'affecte pas sa valeur vénale ;

- qu'une occupation à titre de résidence secondaire n'a pas d'effet sur la valeur vénale du bien.

A titre dérogatoire, un abattement sur la valeur vénale de l'habitation principale est applicable dans certaines situations d'occupation (cf. BOI-ENR-DMTG-10-40-10-30).

E. Biens à usage agricole

1. Terres agricoles

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Conformément à la règle générale, la valeur vénale des biens agricoles est le prix auquel ces biens pourraient ou auraient pu normalement être négociés à l'époque considérée tel qu'il résulte en particulier de l'analyse des prix déclarés lors des mutations d'immeubles présentant des caractéristiques physiques et juridiques identiques et affectés au même usage. En ce qui concerne les terres agricoles, cette valeur correspond aux prix constatés sur le marché foncier lors de mutations de parcelles ayant la même situation locative. Ce marché présente une extrême variété sur le territoire national. Dans certaines régions agricoles naturelles, il se peut que l'étude du marché ne relève pas de différence sensible entre les prix pratiqués pour des terres agricoles libres et ceux payés pour des parcelles données en location, exactement comparables. En revanche, dans la plupart des régions, il s'agit de deux marchés distincts, s'adressant à des acquéreurs qui poursuivent des buts différents. Aussi, il est indispensable, pour éviter tout arbitraire, d'écarter la méthode qui consiste à calculer la valeur vénale d'une terre louée en pratiquant une décote forfaitaire sur la valeur libre supposée. Seul un examen attentif des mutations d'immeubles ruraux occupés permet de déterminer la valeur vénale du bien en cause.

À cet égard, les acquisitions et les cessions réalisées par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural constituent, au même titre que les mutations intervenues entre particuliers, des éléments d'appréciation très utiles.

2. Terres agricoles situées en zone constructible

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Leur valeur correspond aux prix constatés sur le marché foncier lors des mutations de parcelles de terre situées dans une même zone d'urbanisme, bénéficiant des mêmes éléments de viabilité et affectées au même usage. Dans la mesure où le marché des terrains situés dans une même zone constructible du plan local d'urbanisme aurait fait apparaître une valeur supérieure à celle que leur confère l'usage purement agricole auquel ils sont affectés, cette plus-value doit être prise en considération.

3. Bâtiments d'habitation des exploitations agricoles

120

Lorsque les bâtiments d'habitation ne peuvent être dissociés de l'ensemble de l'exploitation, la valeur de l'ensemble peut effectivement être inférieure à la somme des valeurs particulières de chacun des éléments constitutifs de cette exploitation.

A contrario, si les bâtiments d'habitation peuvent être dissociés de l'ensemble, la valeur patrimoniale de l'exploitation peut être augmentée de la plus-value dégagée par le caractère dissociable du bien.

4. Immeubles ruraux comportant de multiples parcelles

130

Lorsqu'ils forment une seule exploitation ou un corps de domaine connu sous un nom particulier, la valeur vénale de l'ensemble du domaine peut faire l'objet d'une évaluation en bloc.

En revanche, lorsqu'il s'agit de parcelles isolées, l'évaluation doit être faite parcelle par parcelle, mais l'administration admet que des parcelles voisines affectées à une même nature de culture soient regroupées et donnent lieu à une seule évaluation.

5. Biens loués par bail à long terme

140

Dans la généralité des cas, il est effectivement constaté que lors de la vente d'une exploitation louée à long terme, le prix de cession est inférieur à celui que l'exploitation aurait pu avoir si elle avait été vendue libre de toute occupation.

L'abattement pour indisponibilité est généralement proportionnel à la durée du bail restant à courir et doit être déterminé par une analyse attentive du marché local.

Dans l'hypothèse où un bail à long terme est consenti à un parent du bailleur, l'indisponibilité relative du bien née de l'existence d'un tel bail doit également trouver son prolongement lors de l'évaluation de l'exploitation par l'application d'un abattement d'importance identique à celui qui aurait été pris en compte si le preneur avait été étranger au bailleur.

F. Titres de sociétés et parts de groupements

1. Titres de sociétés cotées en bourse

150

Les valeurs mobilières cotées sur un marché sont évaluées selon la règle spécifique exposée BOI-ENR-DMTG-10-40-10-40.

2. Titres de sociétés non cotées en bourse

a. Règles générales

160

La Cour de Cassation a estimé dans divers arrêts, que la valeur vénale des titres des sociétés non cotées doit être appréciée en tenant compte de tous les éléments permettant d'obtenir un chiffre aussi proche que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande. En conséquence, cette valeur doit être déterminée en tenant compte, non seulement de la valeur mathématique obtenue par actualisation de l'actif net comptable de la société, mais également de la valeur de productivité tirée de l'importance du bénéfice et de la valeur de rendement établie par capitalisation du dividende. Il y a lieu également de prendre en compte les valeurs dégagées à l'occasion des mutations antérieures des mêmes titres et les perspectives d'avenir de la société en fonction notamment de sa capacité d'autofinancement.

Par ailleurs, la valeur des titres peut être différente selon qu'ils permettent ou non de détenir le pouvoir de décision dans l'entreprise. En principe, dans l'affirmative, la valeur mathématique est privilégiée. En revanche, s'ils ne représentent qu'une fraction minoritaire, le rendement attendu pourra constituer la principale référence.

En définitive, l'estimation de la valeur vénale des titres non cotés résulte de la combinaison de ces différentes méthodes suivant une pondération qui permet de prendre en considération les caractéristiques de la société et le contexte économique dans lequel elle évolue.

Les principes régissant l'évaluation des titres non cotés figurent dans le guide de l'évaluation des entreprises et des titres de sociétés diffusé par l'administration et qui est disponible sur le site « www.impots.gouv.fr »,

b. Dispositions particulières

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Les valeurs mobilières non cotées sont imposées d'après la déclaration détaillée et estimative des redevables.

Dans la mesure où seule la décision de l'assemblée générale de distribuer tout ou partie des bénéfices réalisés au cours de l'exercice sous forme de dividendes confère à ceux-ci l'existence juridique, la créance de dividendes sociaux mis en distribution postérieurement au décès ne peut faire partie de l'actif successoral (Cass. com., arrêt du 23 octobre 1990, n° de pourvoi 89-13999).

G. Biens situés à l'étranger

180

L'évaluation des biens situés à l'étranger est faite conformément aux dispositions du CGI, dans la mesure où celles-ci peuvent s'appliquer compte tenu de la situation des biens.

C'est ainsi que l'évaluation des immeubles situés à l'étranger est faite à la valeur vénale à la date de transmission d'après la déclaration détaillée et estimative des parties mais abstraction faite des dispositions du deuxième alinéa de l'article 761 du CGI.

De même, l'évaluation des biens mobiliers situés à l'étranger résulte généralement de la déclaration détaillée et estimative des parties, à moins que ces dernières puissent invoquer un contrat d'assurances répondant aux prescriptions du II de l'article 764 du CGI (cf. BOI-ENR-DMTG-10-40-10-20).

Le cours du change à retenir est, en principe, celui pratiqué sur la place de Paris au jour du fait générateur de l'impôt (sur ce point, cf. BOI-ENR-DMTG-10-30).