Date de début de publication du BOI : 02/09/2019
Identifiant juridique : BOI-RPPM-PVBMC-30-10

RPPM - Plus-values sur biens meubles et taxe forfaitaire sur les objets précieux - Cession d'actifs numériques à titre occasionnel - Champ d'application

Actualité liée : 02/09/2019 : RPPM - Création d'un régime fiscal spécifique applicable aux cessions d'actifs numériques réalisées à titre occasionnel, directement ou indirectement, par les particuliers (loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances 2019, art. 41)

1

L'article 150 UA du code général des impôts (CGI) précise le régime d'imposition de droit commun des plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux de biens meubles ou de droits relatifs à ces biens par les particuliers dans le cadre de la gestion non professionnelle de leur patrimoine.

Toutefois, pour les cessions réalisées à compter du 1er janvier 2019, le 3° du II de l'article 150 UA du CGI prévoit que les dispositions de l'article 150 UA du CGI ne s'appliquent pas aux biens et droits mentionnés à l'article 150 VH bis du CGI.

Ainsi, les plus-values réalisées lors de la cession d'actifs numériques ou de droits s'y rapportant relèvent du régime d'imposition des plus-values des particuliers prévu à l'article 150 VH bis du CGI lorsqu'elles sont réalisées à titre occasionnel par des personnes physiques, directement ou par personne interposée, et ce pour les cessions réalisées à compter du 1er janvier 2019.

I. Personnes imposables

A. Personnes physiques

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Le régime d'imposition s'applique aux plus-values réalisées par les particuliers, fiscalement domiciliés en France au sens de l'article 4 B du CGI, dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé. Il ne s'applique donc pas aux profits tirés d'une activité professionnelle imposables au titre des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), bénéfices agricoles (BA) et bénéfices non commerciaux (BNC) (III-A § 70).

Pour l'application de l'article 150 VH bis du CGI, il convient de retenir les cessions d'actifs numériques ou de droits s'y rapportant réalisées dans le cadre du foyer fiscal, c'est-à-dire les cessions réalisées tant par le contribuable ou les époux soumis à une imposition commune (ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité - PACS) que par les autres membres du foyer fiscal.

Outre le contribuable lui-même, le foyer fiscal comprend les personnes considérées comme étant à charge au sens de l'article 196 du CGI et de l'article 196 A bis du CGI, ainsi que les personnes rattachées au foyer fiscal en application du 3 de l'article 6 du CGI et de l'article 196 B du CGI (BOI-IR-LIQ-10-10-10-20).

En cas d'événement modifiant la composition du foyer fiscal en cours d'année, il convient de se reporter au BOI-IR-CHAMP-20.

B. Personnes interposées

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Le régime d'imposition des plus-values sur cessions d'actifs numériques des particuliers s'applique aux cessions occasionnelles à titre onéreux d'actifs numériques et de droits s'y rapportant réalisées par des sociétés ou groupements qui relèvent de plein droit ou sur option de l'article 8 du CGI, de l'article 8 bis du CGI et de l'article 8 ter du CGI dont le siège est situé en France, c'est-à-dire des sociétés non soumises à l'impôt sur les sociétés (IS) (I-B-1 § 30) qui exercent une activité non professionnelle (I-B-2 § 40).

Sont considérés comme des personnes interposées les sociétés ou groupements exerçant une activité civile telle que l'acquisition et la gestion d'un portefeuille d'actifs numériques et de droits s'y rapportant qui sont soumis au régime d'imposition des sociétés de personnes visées à l'article 8 du CGI et qui déterminent le montant des gains de cession des actifs numériques selon les règles prévues pour les particuliers conformément au II de l'article 238 bis K du CGI.

1. Sociétés qui relèvent de l'article 8 du CGI, de l'article 8 bis du CGI et de l'article 8 ter du CGI

30

Les sociétés de personnes s'entendent des sociétés qui relèvent de l'article 8 du CGI, de l'article 8 bis du CGI et de l'article 8 ter du CGI, c'est-à-dire des sociétés dont les bénéfices sont imposés entre les mains de leurs associés.

Sont donc exclues les sociétés et autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés, tant d'après le droit commun (CGI, art. 206, 1 à 4) que d'après le régime spécial prévu au 5 de l'article 206 du CGI et à l'article 219 bis du CGI (collectivités sans but lucratif).

Lorsqu'une société ou un groupement qui relève de l'article 8 du CGI, de l'article 8 bis du CGI ou de l'article 8 ter du CGI procède à des cessions à titre onéreux d'actifs numériques, chacun des associés est personnellement imposé pour la part qui lui revient dans les bénéfices sociaux.

Les dispositions de l'article 150 VH bis du CGI s'appliquent aux gains de cession occasionnelle d'actifs numériques et de droits s'y rapportant réalisés par une société ou un groupement qualifié de personne interposée, quelles que soient les fonctions et la participation du contribuable dans cette société ou ce groupement.

2. Sociétés exerçant une activité non professionnelle

40

Le régime d'imposition des plus-values d'actifs numériques ne s'applique pas aux sociétés de personnes ayant un objet industriel, commercial, artisanal, agricole ou non commercial. Les plus-values réalisées par de telles sociétés relèvent alors du régime des plus-values professionnelles, que les cessions d'actifs soient réalisées à titre habituel ou occasionnel.

II. Biens cédés imposables

50

Conformément aux dispositions du I de l'article 150 VH bis du CGI, les plus-values imposables sont celles qui proviennent de la cession à titre onéreux d'actifs numériques ou de droits relatifs à ces biens.

60

En application de l'article L. 54-10-1 du code monétaire et financier (CoMoFi), les actifs numériques comprennent :

- les jetons mentionnés à l'article L. 552-2 du CoMoFi, à l'exclusion de ceux répondant aux caractéristiques des instruments financiers mentionnés à l'article L. 211-1 du CoMoFi et des bons de caisse mentionnés à l'article L. 223-1 du CoMoFi soumis à un autre régime d'imposition (celui de l'article 200 A du CGI). Ainsi, en application de l'article L. 552-2 du CoMoFi précité, constitue un jeton tout bien incorporel représentant, sous forme numérique, un ou plusieurs droits, pouvant être émis, inscrits, conservés ou transférés au moyen d'un dispositif d'enregistrement électronique partagé permettant d'identifier, directement ou indirectement, le propriétaire dudit bien. En pratique, il s'agit notamment des jetons ou « tokens » issus d'opérations de levées de fonds ("ICO" : Initial Coin Offering), effectuées à travers une technologie de registre distribué ("blockchain") pour financer une entreprise nouvelle ou innovante ;

- toute représentation numérique d’une valeur qui n’est pas émise ou garantie par une banque centrale ou par une autorité publique, qui n’est pas nécessairement attachée à une monnaie ayant cours légal et qui ne possède pas le statut juridique d’une monnaie, mais qui est acceptée par des personnes physiques ou morales comme un moyen d’échange et qui peut être transférée, stockée ou échangée électroniquement.

III. Opérations imposables

A. Généralités

70

Constituent des opérations imposables au sens de l'article 150 VH bis du CGI les cessions à titre onéreux d'actifs numériques ou de droits s'y rapportant, réalisées à compter du 1er janvier 2019, en contrepartie :

- de monnaie ayant cours légal ;

- de l'échange d'un bien autre qu'un actif numérique ;

- de l'échange avec soulte d'un actif numérique ;

- d'un service.

Remarque 1 : Les transactions portant sur les actifs numériques peuvent donner lieu au paiement de frais de transaction perçus par une plateforme d'échanges ou par les membres d'un réseau (appelés "mineurs") en contrepartie de la validation de ces transactions. Le paiement de ces frais de transaction peut s'effectuer au moyen d'actifs numériques. Or, dans ce cas ce paiement est la contrepartie d'un service fourni au cédant et constitue une opération imposable au sens du I de l'article 150 VH bis du CGI. Cela étant, à titre de mesure de simplification, il est admis, dans ce cas, que la cession en tant que telle ainsi que les différentes prestations de services liées aux frais perçus par les plateformes ou les "mineurs" soient assimilées globalement à une seule et même opération imposable au sens de l'article 150 VH bis du CGI, pour laquelle il appartient au contribuable de déterminer une seule plus ou moins-value (BOI-RPPM-PVBMC-30-20 au I-A-3 § 50).

Par ailleurs, le régime d'imposition prévu à l'article 150 VH bis du CGI concerne exclusivement les personnes physiques qui réalisent des opérations à titre occasionnel dans le cadre de la gestion de leur patrimoine privé.

Remarque 2 : Les plus-values résultant de l’exercice habituel d’une activité d’achat en vue de la revente d'actifs numériques demeurent soumises au régime des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) (BOI-BIC-CHAMP-60-50 au XXIX § 730).

Remarque 3 : Le régime des bénéfices non commerciaux (BNC) s’applique, par exception, lorsque les gains réalisés par le contribuable ne constituent pas un gain en capital résultant d’une opération de placement, mais sont la contrepartie de la participation du contribuable à la création ou au fonctionnement de ce système d’unité de compte virtuelle (activité dite de « minage ») (BOI-BNC-CHAMP-10-10-20-40 au XXXIX § 1080).

B. Cas particulier des opérations d'échanges sans soulte entre actifs numériques

80

Conformément au A du II de l'article 150 VH bis du CGI, les opérations d'échanges sans soulte entre actifs numériques ou droits s'y rapportant bénéficient d'un sursis d'imposition.

Considérées comme des opérations intercalaires, ces opérations ne constituent pas un fait générateur d'imposition. Pour plus de précisions sur le fait générateur de l'imposition, il convient de se reporter au I § 1 du BOI-RPPM-PVBMC-30-30.

Remarque : À titre de mesure de tempérament, il est admis, en présence d'une opération d'échange sans soulte entre actifs numériques ou droits s'y rapportant bénéficiant du sursis d'imposition prévu au A du II de l'article 150 VH bis du CGI, que les paiements liés aux frais de transaction perçus par la plateforme d'échanges ainsi que ceux versés aux "mineurs" en contrepartie de la validation de l'opération, bénéficient également, dans ce cas, du même sursis d'imposition.

En revanche, l'échange avec soulte entre actifs numériques est une opération imposable au sens de l'article 150 VH bis du CGI (III-A § 70).

IV. Opérations exonérées

90

Conformément au B du II de l'article 150 VH bis du CGI, les personnes réalisant des cessions d'actifs numériques dont la somme des prix n'excède pas 305 € au cours d'une année d'imposition, hors opérations bénéficiant du sursis d'imposition (III-B § 80), sont exonérées.

Cette mesure permet de dispenser les contribuables, au titre de cette année, du calcul des plus ou moins-values constatées lors des cessions. Seuls les prix de cession doivent alors être déclarés.

Le seuil de 305 € s’apprécie en tenant compte de l’ensemble des cessions imposables, quelles qu’en soient les contreparties (monnaie, bien, service) réalisées par le foyer fiscal imposable au cours d’une même année d’imposition.

Exemple : En année N, un contribuable fiscalement domicilié en France réalise au total trois cessions d'actifs numériques pour un montant de 100 € chacune.

La plus-value globale réalisée au titre de ces trois cessions d'actifs numériques s'élève à 90 €.

Ainsi, le contribuable est exonéré au titre de la plus-value globale de 90 € réalisée au cours de l'année N puisque le montant total des prix de cessions de l’année est de 300 € (3 x 100 €) et n'excède pas le seuil de 305 €.

100

Les personnes réalisant des cessions dont la somme des prix au cours de l'année d'imposition excède le seuil de 305 € sont imposées sur l'ensemble des cessions entrant dans le champ d'application de l'article 150 VH bis du CGI réalisées au cours de l'année d'imposition, y compris celles dont le prix n'excédait pas le seuil de 305 €.

Exemple : En année N, un contribuable fiscalement domicilié en France réalise au total quatre cessions d'actifs numériques d'un montant de 100 € chacune.

La plus-value globale réalisée au titre de ces quatre cessions d'actifs numériques s'élève à 120 €.

Ainsi, le contribuable est imposé au titre de la plus-value globale de 120 € réalisée au cours de l'année N dès lors que le montant total des prix de cessions de l'année est de 400 € (4 x 100 €) et excède le seuil de 305 €.

110

Lorsque, au cours d'une même année d'imposition, le contribuable réalise des opérations imposables, certaines directement, d'autres par personne interposée, il convient, pour apprécier le seuil de 305 €, d'additionner l'ensemble des prix des cessions réalisées par le contribuable, directement et par personne interposée (hors opérations bénéficiant du sursis d'imposition [III-B § 80]).

Le prix de cession à retenir en présence d'une cession réalisée par l'intermédiaire d'une personne interposée est égal à la quote-part du prix de cession correspondant au droit de l'associé dans la société.

Exemple : En année N, un contribuable fiscalement domicilié en France réalise trois cessions d'actifs numériques pour un montant de 100 € chacune. La plus-value globale réalisée au titre de ces trois cessions d'actifs numériques s'élève à 90 €.

Par ailleurs, une société de personnes dont il est associé pour 1/3 réalise une cession d'un montant de 450 €. La plus-value globale réalisée au titre de cette cession d'actifs numériques s'élève à 135 €. À ce titre, les parts de prix de cession et de plus-value lui revenant s'élèvent respectivement à 150 € et 45 €.

Ainsi, le contribuable est imposé au titre de la plus-value globale de 135 € (90 € + 45 €) réalisée au cours de l'année N puisque le montant total des prix de cessions de l'année est de 450 € (3 x 100 € + 150 €) et excède le seuil de 305 €.