Date de début de publication du BOI : 16/02/2022
Identifiant juridique : BOI-BIC-PDSTK-10-20-70-30

BIC - Produits et stocks - Opérations réalisées par les entreprises sur les marchés financiers à terme - Pertes afférentes à des positions symétriques

Actualité liée : 16/02/2022 : BIC - Simplification de l'obligation déclarative liée à la déclaration des positions symétriques (loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, art. 181)

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Le 3° du 6 de l'article 38 du code général des impôts (CGI) dispose que, lorsqu'une entreprise a pris des positions symétriques, la perte sur une de ces positions n'est déductible du résultat imposable que pour la partie qui excède les gains non encore imposés sur les positions prises en sens inverse.

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Le 3° du 6 de l'article 38 du CGI limite la déduction des pertes constatées sur des instruments financiers (à terme ou non) lorsque l'entreprise a pris des positions symétriques, c'est-à-dire des positions dont la valeur ou le rendement varient de manière inverse et corrélée.

Dans ce cas, la perte sur une position n'est déductible des résultats imposables que pour la partie qui excède les gains non encore imposés sur la ou les positions prises en sens inverse.

L'entreprise consigne les positions symétriques dans un document spécifique remis ou adressé sur demande à l'administration fiscale.

I. Définition des positions symétriques

A. Notion de position

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Aux termes du deuxième alinéa du 3° du 6 de l'article 38 du CGI, une position s'entend de la détention, directe ou indirecte, de contrats à terme d'instruments financiers, de valeurs mobilières, de devises, de titres de créances négociables, de prêts ou d'emprunts, ou d'un engagement portant sur ces éléments.

D'une manière générale, il s'agit d'actifs, de passifs ou d'engagements portant sur des instruments financiers dont les valeurs ou les rendements sont liés à la variation des taux d'intérêt ou des taux de change. Il s'agit également d'actions détenues à titre de placement.

À cet égard, la détention de ces éléments peut être directe ou indirecte. Les instruments financiers détenus par des sociétés de personnes dont une entreprise est membre ou des sociétés de capitaux qu'elle contrôle, constituent des positions au sens du 3° du 6 de l'article 38 du CGI dès lors que leur détention a pour objet de compenser le risque d'autres positions de l'entreprise concernée.

À titre d'exemple, la détention de dettes ou de créances libellées en devises étrangères constitue une position au sens du 3° du 6 de l'article 38 du CGI, dès lors que ces actifs ou passifs aboutissent indirectement à la détention de devises (créances) ou d'engagements sur les devises (dettes).

La détention de valeurs d'exploitation (stocks) ou d'actifs corporels ou incorporels immobilisés non financiers (fonds de commerce, immeubles, matériel) ne constitue pas une position au sens du 3° du 6 de l'article 38. Il en est de même pour les titres de participation détenus par une entreprise.

Une position au sens du 3° du 6 de l'article 38 du CGI peut être constituée d'instruments financiers inscrits au bilan de l'entreprise (à l'actif ou au passif) ou détenus hors bilan, ou d'engagements qui peuvent aboutir à la détention ultérieure d'instruments financiers de même nature. Ainsi des opérations futures identifiées et qualifiées a priori d'opérations de couverture (ou de couverture affectée pour les entreprises soumises au contrôle de la commission bancaire) sur le plan comptable constituent une position au sens du 3° du 6 de l'article 38 du CGI. L'émission future d'un emprunt ou une dépense de l'exercice suivant peuvent donc constituer une position si ces opérations ont été identifiées dans le cadre d'une opération de couverture qualifiée comme telle sur le plan comptable.

La détention simultanée de certificats de valeur garantie et d’actions dont le cours est garanti par ces titres constitue des positions symétriques au sens du 3° du 6 de l’article 38 du CGI, dès lors que les variations affectant leur valeur sont corrélées et de sens inverse. En ce qui concerne l’application du régime de sursis d’imposition prévu par le 7 de l’article 38 du CGI aux opérations d’échange assorties de certificats de valeur garantie, il convient de se reporter au BOI-BIC-PVMV-30-30-60-10.

B. Notion de symétrie

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En application du troisième alinéa du 3° du 6 de l'article 38 du CGI, des positions sont qualifiées de symétriques si leurs valeurs ou leurs rendements subissent des variations corrélées telles que le risque de variation de valeur ou de rendement de l'une d'elles est compensé par une autre position, sans qu'il soit nécessaire que les positions concernées soient de même nature, prises sur la même place, ou qu'elles aient la même durée.

Pour que des positions soient qualifiées de symétriques, il faut que les variations de valeurs ou de rendement de chaque position soient corrélées et de sens inverse. Ces variations attendues doivent être d'importance comparable sur une période déterminée et être sensibles à un élément commun aux deux positions (taux d'intérêt, taux de change, indice boursier etc.).

Toutefois, il n'est pas nécessaire que le gain sur une position compense exactement la perte sur l'autre position ; cette compensation peut n'être que partielle et limitée dans le temps. Les positions peuvent donc être de durées différentes ; elles ne sont pas nécessairement prises et dénouées simultanément, ni simultanées.

Ainsi, des positions successives sur le marché à terme international de France (MATIF) peuvent être symétriques d'un portefeuille obligataire détenu avant l'ouverture des contrats et conservé après leur dénouement. De même, un emprunt peut être symétrique d'une position prise sur le MATIF avant son émission. Dans ce cas, les deux positions symétriques sont successives et n'ont pas de durée d'existence commune.

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À titre d'exemple les opérations suivantes peuvent être qualifiées de positions symétriques :

- position sur le MATIF et emprunt à émettre ;

- option sur devises et créance ou dette libellée dans la même devise ;

- contrat d'échange de taux d'intérêt (swap) et emprunt ou prêt figurant au bilan de l'entreprise ;

- vente à terme de devises et détention d'une créance libellée dans la même devise ;

- option sur devises et chiffre d'affaires ou dépense future dans la même devise ayant une probabilité suffisante de réalisation ;

- détention de titres obligataires ou de parts de fonds communs de placement dénommés « taureaux et ours » ou « bull and bear » : si la valeur ou le rendement des titres de la tranche haussière évolue de manière inverse de celle des titres de la tranche baissière, la détention d'une quantité comparable de titres des deux tranches caractérise des positions symétriques ; ce type d'emprunt comporte deux tranches d'émission d'égal montant. Elles sont souvent indexées sur un indice (indice boursier, hausse des prix etc.) qui joue de manière inverse sur chaque tranche d'émission. Les variations de valeurs des titres de chaque tranche sont d'égal montant et de sens inverse ;

- détention d'obligations assortie de bons de souscription d'actions ou d'obligations.

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Une position peut être composée de plusieurs éléments. A titre d'exemple, un emprunt peut être symétrique d'une position sur le MATIF et d'un « swap » de taux d'intérêt. De même, la détention d'une créance libellée en devise peut être symétrique d'une vente à terme de la même devise et d'une option de vente portant sur la même devise. Une position peut donc être constituée d'un ensemble homogène d'instruments financiers.

C. Appréciation de la symétrie

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La notion de symétrie est plus large que la notion de couverture comptable. Mais toutes les opérations qualifiées de couverture sur le plan comptable sont des opérations symétriques au sens du 3° du 6 de l'article 38 du CGI.

Conformément à l'avis du conseil national de la comptabilité du 9 juillet 1987, ces opérations doivent présenter les caractéristiques suivantes :

- les contrats achetés ou vendus doivent avoir pour effet de réduire le risque de variation de valeur affectant l'élément couvert (risque de taux d'intérêt, dépréciation du capital) ; l'élément couvert peut être un actif, un passif, un engagement existant ou une transaction future non encore matérialisée par un engagement si cette transaction est définie avec précision et possède une probabilité suffisante de réalisation, cette probabilité est à apprécier, au cas par cas, à partir de critères objectifs et vérifiables ;

- l'identification du risque à couvrir doit être effectuée après prise en compte des autres actifs, passifs et engagements ;

- une corrélation doit être établie entre les variations de valeur de l'élément couvert et celles du contrat de couverture puisque la réduction de ce risque doit résulter d'une neutralisation totale ou partielle, recherchée a priori entre les pertes éventuelles sur l'élément couvert et les gains sur les contrats négociés en couverture ;

- la qualification de couverture ne peut être appliquée qu'à des ensembles homogènes d'actifs, de passifs ou d'engagements pour lesquels la corrélation visée ci-avant peut être établie.

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Sur le plan fiscal l'existence de positions symétriques est établie par la constatation de la corrélation entre les positions. La reconnaissance expresse et préalable de la recherche d'une compensation des risques entre deux positions n'est donc pas une condition nécessaire d'application du 3° du 6 de l'article 38 du CGI. Toutefois, ce régime ne s'applique pas lorsque la corrélation entre deux positions prises par un organisme habilité à effectuer des opérations de contrepartie apparaît purement fortuite : il pourrait en être ainsi notamment lorsque ces positions ont été prises par des services différents d'une banque et à des fins différentes, ou lorsque deux positions ont connu par hasard des variations égales et de sens contraire alors que la corrélation entre leurs variations de valeur ou de rendement ne pouvait être supposée a priori.

II. Modalités de déduction des pertes

A. Principe

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Lorsqu'une entreprise a pris des positions symétriques, la perte subie sur une de ces positions est déductible des résultats imposables pour la partie qui excède les gains non encore imposés sur les positions prises en sens inverse à condition que l'ensemble de l'opération ait été déclaré par l'entreprise.

Si la perte sur une position excède le gain non encore imposé sur l'autre position, cet excédent est déductible immédiatement ; la déduction de la perte égale au profit non imposé est reportée jusqu'à la date d'imposition de ce profit.

Si la perte sur une position n'excède pas le gain non encore imposé sur l'autre position, sa déduction est reportée jusqu'à la date d'imposition du profit sur l'autre position.

Pour l'application de cette règle, la notion de gain ou de perte doit s'entendre de toutes les variations de valeur ou de rendement susceptibles d'affecter les éléments d'une position.

B. Précisions sur la notion de « gains non encore imposés »

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La fraction déductible de la perte sur une position symétrique est directement liée au montant des « gains non encore imposés » sur l'autre position.

À cet égard, lorsque les « gains non encore imposés » concernent un actif ou un passif financier dont la valeur ou le rendement est lié aux taux d'intérêt (emprunts, prêts, créances négociables), leur montant est fonction de la durée de vie restant à courir de l'actif en cause.

Dans ce cas, le montant des « gains non encore imposés » à la clôture d'un exercice est égal à la valeur actualisée du différentiel d'intérêt supporté en moins par l'entreprise (emprunt) ou acquis en plus à l'entreprise (prêt).

Cette actualisation doit être effectuée au taux d'intérêt constaté, le jour du dénouement de l'opération, sur le marché sur lequel a été conclu le contrat à terme (il est admis dans une telle situation que l'entreprise puisse étaler linéairement la déduction de la perte sur la durée restant à courir de l'emprunt).

Pour les instruments financiers dont les variations de valeur ou de rendement sont symétriques de celles susceptibles d'affecter une opération future, le gain non encore imposé sur cette opération, tant qu'elle n'aura pas été réalisée, est supposé égal à la perte subie sur l'instrument symétrique à cette opération.

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Exemple : En janvier N, une entreprise décide d'émettre un emprunt en septembre N, au taux actuel du marché financier (10 %). Mais dans la mesure où elle craint une hausse des taux d'intérêt, elle se couvre sur le MATIF en prenant une position vendeur pour se garantir de la variation du taux d'intérêt jusqu'à la date d'émission de l'emprunt.

En septembre N, le taux d'intérêt s'établit à 8 % et l'emprunt est émis à ce taux. L'entreprise réalise une économie d'intérêt de 2 points qui est compensée par la perte réalisée sur le MATIF dont la position a été dénouée en septembre N.

En application du 3° du 6 de l'article 38 du CGI, cette perte n'est déductible que pour la fraction qui excède les gains non encore imposés sur l'emprunt. Dans l'exemple, le montant de ces gains est égal à la valeur du différentiel d'intérêt qui ne sera pas supporté par l'entreprise (10 % - 8 % = 2 %) actualisée au taux de 8 % (taux d'intérêt en vigueur lors du dénouement des contrats MATIF).

Le montant des gains non encore imposés à la clôture de chacun des exercices suivants devra être déterminé de la même manière en tenant compte des différentiels d'intérêt restant à échoir à la date de cette clôture, la fraction de la perte reportée qui excède les gains ainsi déterminés pourra être déduite au titre de chacun des exercices concernés jusqu'à ce que l'emprunt soit intégralement remboursé (l'actualisation des différentiels d'intérêt s'effectue toujours au taux d'intérêt en vigueur lors du dénouement des contrats négociés sur le MATIF).

C. Modalités de déduction des provisions pour pertes latentes sur contrats ou engagements à terme

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Conformément à la jurisprudence du Conseil d'État (CE, décision du 26 avril 1985, n° 30077 et CE, décision du 26 juin 1987, n° 54757), les pertes latentes encourues à raison d'engagements à terme ne peuvent être constatées par voie de provision qu'à partir d'un bilan global prévisionnel de l'ensemble des opérations. Bien entendu, la provision n'est effectivement déductible que si elle est constatée en comptabilité.

Les opérations qui sont soumises à la règle de valorisation au prix du marché à la clôture de l'exercice (CGI, art. 38, 6-1°) n'entrent pas dans le champ d'application de cette provision. En effet, les pertes constatées à la clôture de l'exercice sur ces opérations sont immédiatement prises en compte sous réserve de la limitation prévue pour les opérations symétriques.

III. Obligations déclaratives

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En application du dernier alinéa du 3° du 6 de l'article 38 du CGI, les positions symétriques prises au cours de l'exercice et celles qui sont en cours à la clôture doivent être mentionnées sur un document spécifique remis ou adressé sur demande à l'administration fiscale. A défaut, la perte subie sur une position n'est pas déductible du résultat imposable.

Les entreprises qui ne respectent pas cette obligation déclarative perdent définitivement le droit de déduire la perte subie de leurs résultats imposables.

En application de l'article 2 C de l'annexe III au CGI, le document prévu à cet effet doit mentionner les positions symétriques qui sont nées au cours de l'exercice et les positions symétriques en cours à la clôture de cet exercice, c'est-à-dire les positions dont aucune n'est dénouée à cette date ou dont l'une des positions a été dénouée (BOI-FORM-000057 et BOI-FORM-000056).

À la clôture de chaque exercice, les entreprises devront donc recenser l'ensemble des pertes sur instruments financiers susceptibles d'affecter les résultats de cet exercice et s'assurer qu'elles ne sont pas compensées en partie ou en totalité par des gains non encore imposés sur d'autres positions de même nature.

Toutes les pertes ainsi compensées devront faire l'objet d'une déclaration dans les conditions prévues au présent III § 120 et ne pourront affecter les résultats imposables qu'à hauteur de la fraction qui excède les profits non encore imposés sur les autres positions.

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En ce qui concerne les établissements bancaires, soumis à une déclaration mensuelle de leurs positions de couverture, il sera tenu compte de cette obligation comptable particulière pour déterminer le caractère volontaire ou non des omissions susceptibles d'être constatées dans les déclarations fiscales produites par ces établissements pour les positions symétriques.