Date de début de publication du BOI : 31/01/2020
Identifiant juridique : BOI-CF-IOR-30-10

CF - Procédures de rectification et d'imposition d'office - Procédures de l'abus de droit fiscal - Procédure de l'abus de droit fiscal au sens de l'article L. 64 du LPF

I. Champ d’application de la procédure de l’abus de droit fiscal

A. Définition de l’abus de droit fiscal

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Selon l’article L. 64 du livre des procédures fiscales (LPF) qui définit l’abus de droit fiscal, afin d’en restituer le véritable caractère, l’administration est en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d’un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.

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La procédure de l’abus de droit fiscal concerne tous les impôts et peut être mise en œuvre indifféremment lorsque la situation constitutive de l’abus porte sur l’assiette, la liquidation de l’impôt ou son paiement.

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Cette définition couvre les situations de fictivité juridique et de fraude à la loi.

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En pratique, la fictivité juridique est constituée par la différence objective existant entre l’apparence juridique créée par l’acte en cause et la réalité, en particulier économique, sous-jacente à cet acte.

Selon la jurisprudence, la fraude à la loi en matière fiscale, souvent résumée par la recherche d’un but exclusivement fiscal, est constituée toutes les fois que sont réunies cette recherche d’un but exclusivement fiscal et, d’autre part, l’obtention d’un avantage fiscal par une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs (CE, décision du 29 décembre 2006, n° 283314), par exemple par le recours à un montage juridique et économique artificiel (CE, décision du 18 mai 2005, n° 267087 ; CE, décision du 18 février 2004, n° 247729 et CE, décision du 27 juillet 2009, n° 295358).

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La recherche d’un but exclusivement fiscal consistant à éluder ou atténuer les charges fiscales peut notamment prendre la forme d’une réduction d’une dette d’impôt ou de la perception indue d’un crédit d’impôt ou encore de l’augmentation abusive d’une situation déficitaire.

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L'exercice d’une option offerte par la législation fiscale n’est pas en soi constitutif d’un abus de droit, les conditions qui ont permis de se trouver en situation d’exercer cette option peuvent en revanche être abusives et encourir la mise en œuvre de la procédure de l’abus de droit fiscal (CE, décision du 3 février 1984, n° 38320).

B. Les actes pouvant être écartés par la procédure de l’abus de droit fiscal

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Les actes que l’administration peut écarter en démontrant un abus de droit sont des actes écrits ou non écrits (bail verbal, etc.) qu’ils soient unilatéraux, bilatéraux ou multilatéraux : il s’agit en pratique de tout document ou fait qui manifeste l’intention de son auteur et produit des effets de droit. Il s'agit bien évidemment d'un fait juridique matérialisant une volonté.

Le Conseil d'État a admis que l'occupation de résidences principales successives préalablement à leur revente pouvait être fictive (CE, décision du 18 novembre 1991, n° 77303). Il en va de même pour le choix d'un domicile.

C. Les textes ou les décisions retenus pour établir une fraude à la loi

1. Les textes

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Lorsque la mise en œuvre de la procédure de l’abus de droit fiscal a pour objectif la démonstration d’une fraude à la loi c’est-à-dire la mise en évidence de la recherche d’un but exclusivement fiscal par l’application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, les textes en question s’entendent des lois et le cas échéant des textes réglementaires (décrets pris en conseil d’état, décrets simples, arrêtés, etc.) qui en précisent les conditions d’application.

2. Les décisions

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Les décisions susceptibles d’être prises en compte pour établir une fraude à la loi s’entendent de celles qui vont au-delà du simple commentaire de la norme et qui de ce fait créent du droit.

Il en résulte que les instructions administratives publiées au bulletin officiel des finances publiques (BOFiP-Impôts) ne sont pas constitutives de décisions au sens de l’article L. 64 du LPF, dans la mesure où elles ont en principe pour seul objet de commenter la norme (loi, décret ou arrêté) et donc qu’elles ne créent pas du droit.

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Il peut en être différemment des instructions dont les dispositions outrepassent le commentaire et comportent ainsi une interprétation qui ajoute à la norme : dans l’hypothèse où un contribuable fait une application littérale d’une telle instruction à l’encontre des objectifs poursuivis par son auteur, la procédure de l’abus de droit fiscal est susceptible de s’appliquer.

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Les décisions administratives entrent dans le champ de l’article L. 64 du LPF lorsqu’elles sont de portée générale et comportent une interprétation favorable de la loi, telles les réponses ministérielles à des questions écrites des parlementaires ou les réponses à des représentants d’organisations professionnelles.

Il en est de même des précisions doctrinales de portée en générale apportées par l’administration fiscale. Ces précisions sont directement intégrées au BOFiP-Impôts dans la série RES-Rescrits. 

110

Les décisions individuelles ne peuvent en aucun cas servir de fondement à l’application de la procédure d’abus de droit fiscal.

D. Le rescrit « abus de droit »

120

En application des dispositions de l'article L. 64 B du LPF, la procédure prévue à l'article L. 64 du LPF n'est pas applicable lorsqu'un contribuable, préalablement à la conclusion d'un ou plusieurs actes, a consulté par écrit l'administration centrale en lui fournissant tous éléments utiles pour apprécier la portée véritable de ces actes, et que celle-ci n'a pas répondu dans un délai de six mois ou a confirmé que l’opération présentée ne constituait pas un abus de droit.

II. Majoration pour abus de droit

130

Les dispositions du b de l'article 1729 du CGI concernant la majoration pour abus de droit sont commentées au BOI-CF-INF-10-20-20 au III-C § 80 et suivants auxquels il convient de se reporter.

III. Solidarité de paiement des pénalités en cas d’abus de droit

140

Sur la solidarité de paiement des pénalités en cas d’abus de droit, il convient de se reporter au BOI-CF-INF-30-30 au II-A-1 § 90.