Date de début de publication du BOI : 25/11/2020
Identifiant juridique : BOI-CF-CPF-30-40-10-10

CF - Obligations des contribuables tendant à la prévention de la fraude - Déclaration de dispositifs transfrontières - Champ d'application - Dispositifs transfrontières devant faire l'objet d'une déclaration

Actualité liée : 25/11/2020 : CF - Déclaration de dispositifs transfrontières potentiellement agressifs - Report de la date de mise en oeuvre du dispositif (loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificatives pour 2020 et mise à jour suite à consultation publique

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Conformément à l'article 1649 AD du code général des impôts (CGI),  l'obligation déclarative vise tout dispositif transfrontière comportant au moins l'un des marqueurs mentionnés au II de l'article 1649 AH du CGI.

Par référence au point 20 de l'article 3 de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal en rapport avec les dispositifs transfrontières devant faire l’objet d’une déclaration, un marqueur est une caractéristique ou particularité d'un dispositif transfrontière qui indique un risque potentiel d'évasion fiscale. Les marqueurs sont recensés à l’annexe IV de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018, transposée à l’article 1649 AH du CGI.

La déclaration d'un dispositif transfrontière entrant dans le champ de l’article 1649 AD du CGI ne constitue pas une reconnaissance ou une preuve de son caractère frauduleux.

Le fait que l’administration fiscale ne réagisse pas à un dispositif déclaré ne signifie pas l’acceptation de la validité fiscale de celui-ci.

I. Notion de dispositif

A. Définition

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Le terme « dispositif » est défini au II de l’article 1649 AD du CGI et s'entend au sens large : il recouvre notamment tout accord, entente, mécanisme, transaction ou série de transactions, qu’ils aient ou non force exécutoire. Il s’applique en particulier à la création, à l’attribution, à l’acquisition ou au transfert du revenu lui-même, ou de la propriété, ou du droit au titre duquel le revenu est dû.

Le terme dispositif recouvre également la constitution, l’acquisition ou la dissolution d’une personne morale, ou la souscription d’un instrument financier.

Un dispositif peut comporter plusieurs étapes et faire intervenir un ou plusieurs participants ; il peut être constitué d’une série des dispositifs.

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A titre d’exemple, constituent un dispositif transfrontière susceptible de relever de l’obligation déclarative :

- l’ensemble des mesures visant à tenir les réunions du conseil d’administration d’une société dans un État différent de l’État de résidence de la société, afin de pouvoir faire valoir un changement de résidence ;

- un dispositif reposant sur une opération de financement ou refinancement intra-groupe ;

Dans ce dernier cas, le dispositif procède des étapes suivantes :

- la transaction initiale qui permet d’injecter de nouveaux capitaux dans l’entité cible (notamment apport en capital, prêt, etc) dans le groupe ;

- les étapes subséquentes, et notamment les transactions intra-groupe qui permettent d’organiser l’utilisation de ces capitaux, comme les opérations effectuées en vue ou en conséquence du financement ou du refinancement en cause .

- un dispositif reposant sur l'acquisition d’une nouvelle société ou groupe de sociétés.

Dans ce cas, le dispositif comprend l’acquisition, le financement et toute restructuration antérieure ou postérieure à l’acquisition, notamment les scénarios possibles de sortie de la structure mise en place lorsque ceux-ci ont été définis.

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Ne constitue pas un dispositif une mesure ayant pour objet de prescrire au contribuable d’attendre simplement l’expiration d’un délai ou d’une période légale pour réaliser une transaction en exonération d’impôt.

Exemple  : Une société établie en France se conforme à la prescription qui lui est faite par un intermédiaire d’attendre l’expiration d’une période de deux ans pour vendre une participation qu’elle détient dans une société établie en Espagne, afin de bénéficier du régime d’exonération des plus-values à long terme prévu au a du I de l’article 219 du CGI.

B. Catégories

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Un dispositif peut être commercialisable ou sur mesure :

- un dispositif commercialisable est un dispositif transfrontière qui est conçu, commercialisé, prêt à être mis en œuvre ou mis à disposition aux fins de sa mise en œuvre, sans avoir besoin d’être adapté de façon importante ;

En pratique, un dispositif commercialisable est un dispositif auquel différents contribuables peuvent adhérer sans avoir besoin d'une analyse ou d'une opinion complémentaire et sans avoir la possibilité de modifier une disposition substantielle ou de formuler une option.

- un dispositif sur mesure est tout dispositif transfrontière qui n’est pas un dispositif commercialisable.

II. Caractère transfrontière d’un dispositif

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En application du II de l’article 1649 AD du CGI, est considéré comme transfrontière tout dispositif prenant la forme d’un accord, d’un montage ou d’un plan ayant ou non force exécutoire et concernant la France et un autre Etat, membre ou non de l’Union européenne, dès lors que l’une au moins des conditions suivantes est satisfaite :
 
a) au moins un des participants au dispositif n'est pas fiscalement domicilié ou résident en France ou n'y a pas son siège ;
 
b) au moins un des participants au dispositif est fiscalement domicilié, résident ou a son siège dans plusieurs États ou territoires simultanément ;
 
c) au moins un des participants au dispositif exerce une activité dans un autre État ou territoire par l'intermédiaire d'un établissement stable situé dans cet État ou territoire, le dispositif constituant une partie ou la totalité de l'activité de cet établissement stable ;
 
d) au moins un des participants au dispositif exerce une activité dans un autre État ou territoire sans y être fiscalement domicilié ou résident ni disposer d'établissement stable dans cet État ou territoire ;

e) le dispositif peut avoir des conséquences sur l'échange automatique d'informations entre États ou territoires ou sur l'identification des bénéficiaires effectifs.

Dans le cadre de l'échange automatique d'informations portant sur les comptes financiers en matière fiscale (Directive 2014/107/UE du Conseil du 9 décembre 2014 modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l'échange automatique et obligatoire d'informations dans le domaine fiscal (dite « DAC 2 » / Common reporting standard [CRS]), la condition de résidence ou d'activité s'apprécie au niveau d'un intermédiaire ou d'un contribuable mettant en œuvre un dispositif qui a pour conséquence de contourner ou de modifier l'obligation déclarative à charge d'un institution financière en application des dispositions prévues par l'article 1649 AC du CGI.

Par conséquent, un dispositif est réputé transfrontière dès lors que les deux conditions suivantes sont réunies :

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-  le dispositif concerne la France et un autre État, que cet État soit situé ou non dans l’Union européenne.

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-  le caractère transfrontière d'un dispositif implique également une condition de résidence ou d'activité dans deux États distincts, par un « participant au dispositif ».

Est considéré comme participant au dispositif :

- le contribuable concerné ;

- les entreprises associées lorsqu'elles sont actives dans le dispositif ;

- toute autre personne ou entité qui est active dans le dispositif.

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Exemples du caractère transfrontière d’un dispositif :

Remarque : Les exemples ci-après ont uniquement pour vocation d’illustrer le caractère transfrontière d'un dispositif. Ils ne préjugent pas du caractère déclarable d'un dispositif pour lequel la condition relative aux marqueurs mentionnés à l'article 1649 AH du CGI doit être remplie.

Exemple 1 : Une société établie en France (acheteur) acquiert auprès d'une société française (vendeur) 50 % des actions d'une société établie en Finlande en vue de convenir avec sa filiale d’une nouvelle répartition de certaines activités.

Le dispositif est transfrontière car la société établie en Finlande est une entreprise associée (participation excédant 25 % des droits de vote, du capital ou des droits à bénéfices) et active dans le dispositif, elle constitue donc un participant au dispositif dont le siège est situé hors de France.

Exemple 2 : Une société établie en France souscrit un emprunt auprès d’une société établie en Allemagne. La société française verse des intérêts à la société allemande créancière. Ce dispositif est transfrontière.

III. Caractère déclarable d’un dispositif transfrontière

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Le III de l'article 1649 AD du CGI précise les dispositifs transfrontières visés par l'obligation de déclaration.

Un dispositif transfrontière doit être déclaré lorsqu’il comporte un ou plusieurs marqueurs prévus à l'article 1649 AH du CGI.

Par exception, lorsque le dispositif transfrontière comporte certains marqueurs relevant de la catégorie A, B ou C mentionnés au II de l’article 1649 AH du CGI, celui-ci n’est à déclarer que s’il répond au critère de l’avantage principal défini au I de l’article 1649 AH du CGI.

Le caractère déclarable d’un dispositif résulte de la réunion des conditions et critères objectifs déterminés par les II et III de l’article 1649 AD du CGI, en vertu desquels ce dispositif est réputé « potentiellement agressif ». De même que l’obligation déclarative ne présuppose ni le caractère effectivement « agressif » du dispositif en cause ni son illégalité, l’administration demeure soumise aux règles de procédure en vigueur en matière de contrôle fiscal, et notamment à celles inhérentes à la charge de la preuve.

A. Définition des marqueurs

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Par référence au point  20 de l’article 3 de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018, un marqueur est une caractéristique ou particularité d'un dispositif transfrontière, qui indique un risque d'évasion fiscale correspondant à l’un de ceux recensés à l'annexe IV de la directive (UE) 2018/822 du Conseil du 25 mai 2018 qui a été transposée l’article 1649 AH du CGI.

B. Catégories de marqueurs

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Certains marqueurs sont soumis à la condition préalable de l’avantage principal.

En tout état de cause, les marqueurs appartiennent à deux catégories selon qu’ils sont de nature générale ou spécifique

1. Critère de l’avantage principal

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L’article 1649 AH du CGI prévoit que les marqueurs A.1., A.2., A.3., B.1., B.2., B.3., C.1.b.i), C.1.c. et C.1.d. sont soumis à la condition préalable de l’avantage principal.

Le critère de l’avantage principal est analysé de manière globale. Ainsi, afin de déterminer si un dispositif transfrontière présente un avantage fiscal principal, il y a lieu de l'analyser dans son ensemble, en considérant ses effets au sein et en dehors de l'Union européenne.

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En particulier, un dispositif peut être conçu pour permettre au contribuable de profiter d’une différence de traitement fiscal entre deux États. Par exemple, il peut être conforme à la législation de l’État A qu’une charge d’intérêt soit déductible et que le produit y afférent soit considéré comme un dividende exonéré par la législation en vigueur dans l’État B.

a. Notion d’avantage

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L’avantage s'entend comme un avantage fiscal. Un avantage fiscal est réputé exister lorsque le dispositif transfrontière permet notamment d’obtenir un abattement, un remboursement d’impôt, un allégement ou une diminution d’impôt, une réduction de dette fiscale, un report d’imposition ou une absence d’imposition.

L'existence d'un avantage fiscal n'est pas limitée au territoire français.

b. Caractère principal

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Le caractère principal de l'avantage fiscal est rempli s'il est établi que l'avantage principal ou l'un des avantages principaux qu'une personne peut raisonnablement s'attendre à retirer d'un dispositif, compte tenu de l'ensemble des faits et circonstances pertinents, est l'obtention d'un avantage fiscal.

La détermination du caractère principal se fait de manière objective, par opposition à une analyse subjective qui prendrait en compte les motivations ou l’intention des participants.

Par conséquent, même si l’obtention d’un avantage fiscal principal n’est pas recherchée par le contribuable concerné, le dispositif transfrontière qu’il utilise peut néanmoins répondre au critère de l’avantage principal.

Pour autant, le fait que le dispositif mis en place procure un avantage fiscal ne suffit pas à caractériser un avantage principal.

L’importance de l’avantage fiscal est notamment déterminée en fonction de la valeur de l’avantage fiscal obtenu par rapport à la valeur des autres avantages retirés du dispositif. Par exemple, dans le cas où l’avantage fiscal et l’avantage commercial seraient les principaux avantages retirés du dispositif, parallèlement à un avantage marginal en termes de positionnement géographique, l’un des avantages principaux retirés du dispositif est un avantage fiscal.

Le caractère principal résulte en particulier du fait que le dispositif transfrontière n'aurait pas été conçu de la même façon sans l'existence de cet avantage.

S’agissant de l’articulation de l’obligation déclarative en vertu de l’article 1649 AD du CGI avec les mesures anti-abus établies par l'article 205 A du CGI, l'article L. 64 du LPF, ou l'article L. 64 A du LPF, il convient de se reporter au II § 110 du BOI-CF-CPF-30-40-20.

c. Exclusion des dispositifs transfrontières présentant un avantage principal obtenu en France conforme à l’intention du législateur français

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Lorsque l’avantage principal obtenu en France au moyen du dispositif transfrontière résulte de l’utilisation d'une mesure d’incitation fiscale prévue par le législateur français, il n’est pas considéré comme un avantage fiscal principal au sens de l’article 1649 AH du CGI, sous réserve du respect de l'intention du législateur.

La notion d’objet ou de finalité du droit fiscal applicable renvoie à l’objectif poursuivi par le législateur au travers de la mise en œuvre des dispositions en cause. Certains régimes particuliers sont considérés comme des dispositifs d'incitation fiscale institués par le législateur, sous réserve de leur utilisation conforme à l'intention du législateur.

Exemple : Certains produits ou placements financiers bénéficiant d’un régime fiscal attractif voulu par le législateur français, telle que la détention d’un plan d’épargne en actions (PEA) en France, sont des dispositifs a priori exclus du champ d'application. Néanmoins, si ces produits ou placements financiers s’inscrivent dans un dispositif transfrontière plus large qui procure un avantage fiscal ne correspondant pas à l'intention du législateur français, celui-ci peut être considéré comme un avantage fiscal au sens de l'article 1649 AH du CGI et constituer ainsi l'obligation déclarative prévue au I de l'article 1649 AD du CGI.

2. Marqueurs généraux

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Les marqueurs généraux correspondent à des caractéristiques communes aux dispositifs de planification fiscale agressive.

Remarque : Des précisions sur les marqueurs généraux sont apportées au BOI-CF-CPF-30-40-30.

3. Marqueurs spécifiques

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Les marqueurs spécifiques comportent des caractéristiques particulières relatives notamment aux paiements transfrontières, à l’échange automatique d’informations et aux bénéficiaires effectifs, et aux prix de transfert.

Remarque : Des précisions sur les marqueurs spécifiques sont apportées au BOI-CF-CPF-30-40-30.