Date de début de publication du BOI : 01/03/2017
Identifiant juridique : BOI-BIC-CHG-30-10

BIC - Frais et charges - Dépenses somptuaires - Règles applicables à l'ensemble des dépenses somptuaires

I. Définition des dépenses somptuaires

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Le 4 de l'article 39 du CGI exclut expressément des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et de l'impôt sur les sociétés :

- les dépenses et charges de toute nature ayant trait à l'exercice de la chasse ainsi qu'à l'exercice non professionnel de la pêche ;

- les charges à l'exception de celles ayant un caractère social (propriété affectée à une colonie de vacances par exemple), résultant de l'achat, de la location ou de toute autre opération faite en vue d'obtenir la disposition de résidences de plaisance ou d'agrément ainsi que de l'entretien de ces résidences.

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Le 4 de l'article 39 du CGI prévoit en outre l'exclusion, sauf justifications, de trois autres catégories de charges :

- les dépenses de toute nature résultant de l'achat, de la location ou de toute autre opération faite en vue d'obtenir la disposition de yachts ou de bateaux de plaisance à voile ou à moteur ainsi que de leur entretien ;

- l'amortissement des véhicules de tourisme au sens de l'article 1010 du CGI pour une fraction de leur prix d'acquisition (pour plus de précisions, il convient de se reporter au BOI-BIC-AMT-20-40-50) ;

- en cas d'opérations de crédit-bail ou de location de longue durée portant sur un véhicule de tourisme, la part du loyer supportée par le locataire et correspondant à l'amortissement pratiqué par le bailleur pour une fraction du prix d'acquisition dudit véhicule (pour plus de précisions, il convient de se reporter au BOI-BIC-AMT-20-40-50 précité).

En revanche, les amortissements des biens somptuaires autres que les véhicules de tourisme sont intégralement exclus des charges déductibles.

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Les dépenses énumérées ci-dessus sont exclues des charges déductibles quelle que soit la forme sous laquelle elles sont supportées par l'entreprise : prise en charge directe, allocation forfaitaire, remboursement de frais.

Il a été jugé à cet égard que doivent être réintégrées dans le bénéfice imposable d'une entreprise les sommes que cette dernière a versées à une société au titre d'un contrat de publicité mais qui ont eu essentiellement pour objet de permettre à l'entreprise en cause de disposer de chasses auxquelles étaient invités ses clients (CE, arrêt du 20 juin 1969 n° 75235).

II. Entreprises visées par ces dispositions

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Le principe de non-déduction des dépenses somptuaires est opposable non seulement à l'ensemble des entreprises relevant de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux mais aussi à toutes les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés tant étrangères que françaises et sans distinguer selon qu'il s'agit de sociétés civiles ou commerciales, d'organismes de droit public ou d'établissements privés à caractère soit lucratif soit désintéressé.

III. Justifications autorisant la déduction

A. Dépenses pour lesquelles des justifications peuvent être admises

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Le 4 de l'article 39 du CGI prévoit expressément que les frais et charges de caractère somptuaire qu'il désigne (fraction de l'amortissement ou du loyer des véhicules de tourisme dépassant certains plafonds, dépenses de toute nature afférentes à la navigation de plaisance) ne sont pas rapportés au bénéfice imposable en cas de justification.

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Bien que le premier alinéa du 4 de l'article 39 du CGI ne prévoie pas une disposition identique pour les autres dépenses qui y sont visées (chasse, pêche, résidences de plaisance ou d'agrément), il a été admis de leur étendre la faculté ouverte aux entreprises de présenter des justifications permettant d'en autoriser la déduction.

Toutes les dépenses et charges visées par le 4 de l'article 39 du CGI sont donc susceptibles d'échapper à l'interdiction de déduction si les justifications exigées sont produites par les entreprises qui les exposent.

B. Nature des justifications à produire

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L'expression « sauf justifications » ne saurait être considérée comme autorisant la déduction des frais et charges de caractère somptuaire sous le seul motif que leur engagement serait consenti dans l'intérêt de l'entreprise. La mesure d'exclusion n'aurait en effet aucune portée si cette interprétation était admise puisque la déduction de l'ensemble des dépenses professionnelles est d'une manière générale déjà subordonnée à la condition que ces dépenses soient exposées pour les besoins de l'exploitation. En réalité, il ressort des débats parlementaires (cf. notamment JO débats Sénat du 7 décembre 1961, p. 2326) que les frais et charges de caractère somptuaire ne peuvent être admis en déduction que s'il est justifié qu'ils sont nécessaires à l'activité de l'entreprise en raison même de son objet.

En pratique, cette justification est considérée comme valablement apportée lorsqu'il peut être démontré que l'entreprise a précisément pour objet - exclusif ou non - la vente, la location ou toute autre forme d'exploitation lucrative des biens ou droits à propos desquels ont été engagées les dépenses qu'il s'agit d'admettre en déduction.

C. Mode de présentation des justifications

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Les justifications exigées des entreprises qui prétendent à la déduction des dépenses de caractère somptuaire ne sont soumises à aucune forme particulière.

Il appartient donc aux redevables d'exposer dans une note les motifs qui leur paraissent de nature à emporter la décision qu'ils sollicitent, en fournissant à l'appui tous documents justificatifs utiles. Le service ne manquera pas, en cas de besoin, de les inviter à préciser ou compléter les documents produits.

La loi n'a fixé aucun délai pour la production des justifications. Cependant, il est de l'intérêt des entreprises de présenter ces dernières à l'appui de leur déclaration de résultats. En agissant ainsi, elles n'encourent, si les justifications présentées ne sont pas reconnues probantes, que le rappel des droits simples correspondant aux rehaussements opérés, à l'exclusion de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du CGI. La production simultanée de la déclaration et des justifications vaut donc « indication expresse », à la condition que le montant des dépenses somptuaires soit effectivement mentionné.

Toutefois, les entreprises admises, au titre d'un exercice déterminé, à déduire des bases de l'impôt des dépenses pour lesquelles elles ont produit des justifications reconnues valables, peuvent se dispenser de reproduire pour les exercices suivants le détail de ces justifications tant qu'aucun changement n'affecte, soit la nature des dépenses exposées, soit l'objet de leur activité. Il leur suffit, pour être réputées avoir fait mention expresse desdites dépenses au sens de l'article 1727 du CGI, d'en indiquer le montant pour chaque exercice en se référant, pour en motiver la déduction, aux justifications initialement fournies.

D. Cas particulier des organismes visés au 5 de l'article 206 du CGI

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S'agissant des établissements publics - autres que les établissements scientifiques, d'enseignement et d'assistance -  des associations et collectivités, visés au 5 de l'article 206 du CGI ne se trouvant soumis à un régime d'imposition atténuée à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 219 bis du CGI que du chef de certains revenus fonciers, agricoles, mobiliers ou des dividendes qui ne se rattachent pas à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif, les dépenses somptuaires qu'ils pourraient éventuellement exposer ne devraient être regardées comme justifiées au sens du 4 de l'article 39 du CGI que si elles étaient nécessaires à l'acquisition, à la conservation ou à l'amélioration des revenus imposables.

Une telle situation ne semble pas devoir se présenter dans la pratique, remarque étant faite que le problème ne se pose qu'à l'égard des organismes percevant des revenus mobiliers ou agricoles dont le montant net est déterminé en tenant compte des charges réelles et non forfaitairement.

En tout état de cause, il convient d'appliquer strictement les dispositions du 4 de l'article 39 du CGI aux organismes - associations régies par la loi du 1er juillet 1901 notamment - qui, sous le couvert d'un objet apparemment non lucratif, apparaîtraient en fait comme ayant été constitués dans le dessein d'assumer des dépenses somptuaires pour le compte d'entreprises ou de leurs dirigeants.

IV. Plus-values et moins-values résultant de la cession des biens somptuaires

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Les dispositions de l'article 39 duodecies du CGI prévoient que les plus-values à court terme résultant de la cession des biens en cause sont majorées et les moins-values à court terme diminuées des amortissements expressément exclus des charges déductibles.

Cette mesure a pour objet d'éviter que l'interdiction légale de déduction des amortissements ne soit systématiquement neutralisée lors de la cession des biens concernés.

V. Mesures de publicité – Information des actionnaires et associés

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Indépendamment de la réintégration extra-comptable découlant du 4 de l'article 39 du CGI, l'article 223 quater du CGI prévoit que les sociétés et personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés à l'exception des collectivités sans but lucratif visées au 5 de l'article 206 du CGI qui, directement ou indirectement, notamment par filiales, possèdent des biens ou droits générateurs de dépenses exclues doivent faire apparaître distinctement en comptabilité lesdites dépenses et charges, quelle que soit la forme sous laquelle elles les supportent.

En outre, ces entreprises doivent soumettre chaque année à l'approbation de l'assemblée générale ordinaire de leurs actionnaires ou associés, le montant global des dépenses et charges dont il s'agit, ainsi que de l'impôt supporté en raison de ces dépenses et charges. Ces dispositions sont applicables aussi bien aux entreprises nationales qu'aux entreprises privées.

VI. Conséquences, au regard de la taxation des sommes distribuées, de la réintégration des dépenses somptuaires dans les résultats de l'entreprise

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Le 4 de l'article 39 du CGI exclut des charges déductibles pour l'assiette de l'impôt dû par les entreprises, les dépenses de caractère somptuaire qu'elles aient été supportées directement par celles-ci ou sous forme d'allocations forfaitaires ou de remboursements de frais (cf. I § 20).

Conformément au e de l'article 111 du CGI, ces dépenses réalisées par des sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés sont considérées comme des revenus distribués, à l'exception de celles portant sur les véhicules.