Date de début de publication du BOI : 23/08/2023
Identifiant juridique : BOI-TVA-CHAMP-60-40

TVA - Champ d'application et territorialité - Offres composites - Cas particuliers

Les commentaires contenus dans le présent document font l'objet d'une consultation publique du 23 août 2023 au 31 janvier 2024 inclus pour permettre aux personnes intéressées d'adresser leurs remarques éventuelles à l'administration. Ces remarques doivent être formulées par courriel adressé à bureau.d1-dlf@dgfip.finances.gouv.fr. Seules les contributions signées seront examinées. Dès la présente publication, vous pouvez vous prévaloir de ces commentaires jusqu'à leur éventuelle révision à l'issue de la consultation.

Actualité liée : 23/08/2023 : TVA - Consultation publique - Règles applicables aux offres composites (loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021, art. 44)

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Le présent document expose certaines pratiques commerciales pour lesquelles les principes régissant les opérations complexes uniques peuvent donner lieu à certaines précisions ayant un caractère de généralité. Il est toutefois rappelé que l'appréciation finale est essentiellement une affaire d'espèce et qu'un acteur économique peut écarter ces précisions en faisant état des spécificités liées aux circonstances.

Le BOI-ANNX-000503 permet d'identifier les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) par secteur d'activité.

I. Assurances accompagnant la commercialisation de biens ou services

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La question de l'opération complexe unique est soulevée en particulier au regard de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dont bénéficient les services d'assurance (IV § 255 et suivants du BOI-TVA-CHAMP-30-10-60-10).

Dans les faits, elle se pose essentiellement lorsqu'un vendeur recourt aux services d'un assureur pour couvrir des risques afférents aux biens et services qu'il commercialise et qui sont donc proposés par lui concomitamment à la vente de ces biens ou services. Le I § 20 et 30 reprend la règle applicable dans deux situations courantes. Dans les autres cas, une analyse en fonction des circonstances exactes est nécessaire pour trancher la question.

Remarque : La circonstance que le service d'assurance distribué par le vendeur soit intégré à une opération taxée de ce vendeur est sans incidence sur l'application de l'exonération dont relève l'acquisition du service d'assurance par ce vendeur.

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La prestation d'assurance accompagnant la commercialisation d'un bien ou d'un service constitue, nonobstant l'existence du lien économique qu'elle entretient avec ce bien ou service, une opération distincte de la livraison ou location de ce bien ou de la prestation de ce service, dès lors que l'acquéreur a le choix de l'assureur et qu'elles sont tarifées séparément (y compris les assurances prescrites par la loi). Cette opération distincte est alors exonérée.

En ce sens, CJUE, arrêt du 17 janvier 2013, aff. C-224/11, BGŻ Leasing, ECLI:EU:C:2013:15, points 34 à 39 et CJUE, arrêt du 17 juillet 2015, aff. C-584/13, Mapfre asistencia et Mapfre warranty, ECLI:EU:C:2015:488, points 51 à 57.

Faisant application de ces principes, la Cour administrative d'appel de Lyon a jugé que les prestations d’assurance et de transport proposées par une société en complément de son activité de location de skis, dont il n’était pas contesté qu’elles étaient facultatives et que, s’agissant de l’assurance, elles pouvaient être assurées par d'autres opérateurs, n'étaient pas accessoires à la prestation principale dès lors qu’elles n'étaient pas indispensables à l'exercice de cette dernière et constituaient une fin en soi pour les clients de la société (CAA Lyon, arrêt du 13 décembre 2016, n° 15LY01413).

S'agissant de la fourniture de la couverture d’assurance dommages-ouvrage proposée par un constructeur à ses clients conjointement avec ses opérations de construction, il convient de se reporter au BOI-RES-TVA-000057.

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Inversement, la garantie légale de conformité nécessairement incluse dans la vente d'un bien sera accessoire à cette vente, de même que les éventuelles garanties commerciales qui la prolongent et l'étendent et qui sont incluses sans surcoût. Elles suivront donc le régime de cette vente.

II. Services bancaires et financiers accompagnant la commercialisation de biens ou services

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La question de l'opération complexe unique est soulevée en particulier au regard de l'exonération de TVA dont bénéficient les opérations de crédit et de paiement (I-A § 10 et suivants du BOI-TVA-SECT-50-10-10 et III-D § 160 du BOI-TVA-SECT-50-10-10).

Dans les faits, elle se pose essentiellement lorsqu'un vendeur met en œuvre, généralement en recourant aux services d'un établissement bancaire ou financier, diverses solutions visant à rendre possible ou à faciliter le paiement d'un bien ou d'un service qu'il commercialise.

Remarque : La circonstance que ces services soient intégrés à une opération taxée du vendeur ne remet pas en cause l'application de l'exonération aux prestations distinctes qui lui sont facturées en amont de leur mise en œuvre.

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Les frais facturés par le vendeur au titre de l'utilisation d'un moyen de paiement sont, par leur objet même, accessoires et taxés dans le cadre de l'opération dont relève le bien ou service acheté.

En ce sens, CJUE, 2 décembre 2010, aff. C‑276/09, Everything Everywhere, ECLI:EU:C:2010:730, points 27 à 30 et CJCE, arrêt du 15 mai 2001, aff. C-34/99, Primback, ECLI:EU:C:2001:271, point 44.

Tel est également le cas de la faculté accordée par le vendeur à l'acheteur, contre rémunération, de reporter le paiement jusqu'à la fourniture effective du bien ou du service.

En ce sens, CJCE, arrêt du 27 octobre 1993, aff. C-281/91, Muys' en De Winter's Bouw- en Aannemingsbedrijf BV, ECLI:EU:C:1993:855, point 19.

60

Il en est de même, lorsqu'il est gratuit, du crédit à la consommation affecté ou lié à la vente de biens ou services tels que définis au 11° de l'article L. 311-1 du code de la consommation (C. consom.), qu'il relève du 5° de l'article L. 312-15 du C. consom. (moins de trois mois) ou de l'article L. 312-41 et suivants du C. consom. (plus de trois mois). La circonstance qu'un escompte soit accordé en cas de vente au comptant ne remet pas en cause le caractère accessoire du crédit gratuit.

Les crédits souscrits par les professionnels et répondant aux mêmes caractéristiques sont également concernés, même lorsqu'ils ne sont pas régis par le code de la consommation.

Un détaillant vend des marchandises à crédit. Le crédit est accordé sans frais pour l'acheteur par une société de financement autre que le détaillant, laquelle verse à ce dernier le prix de la marchandise, minoré d'une commission, et parallèlement, encaisse les mensualités de remboursement du prêt auprès de l'acheteur. La CJUE a considéré qu'étaient réalisées une opération entre la société de financement et le détaillant et une opération entre le détaillant et l'acheteur, le coût du crédit supporté par le détaillant ne devant pas venir en déduction du prix de vente de l'opération entre le détaillant et l'acheteur alors même que le détaillant ne percevait que ce prix minoré de ce coût (CJCE, arrêt du 15 mai 2001, aff. C-34/99, Primback).

70

Inversement, le crédit à la consommation affecté ou lié et proposé à titre facultatif et onéreux doit être considéré comme une opération distincte de la vente du bien ou service lié et, partant, exonérée. En effet, non seulement leur taux débiteur et effectif doit être explicité, mais en outre, l'article L. 312-34 du C. consom. ménage une faculté de résiliation distincte du crédit en plafonnant les indemnités.

Remarque : La notion d'opération commerciale unique utilisée au 11° de l'article L. 311-1 du C. consom. recouvre ainsi une réalité différente de celle d'opération unique pour les besoins de la TVA.

80

Enfin, les autres montages prévoyant des degrés d'intégration plus ou moins importants entre la fourniture d'un bien ou service et un crédit doivent faire l'objet d'une appréciation au cas par cas. En effet, la simple circonstance que les ressources financières associées résultant du crédit ne puissent être librement utilisées par l'acquéreur et soient nécessairement affectées à l'acquisition du bien ou service ne constitue qu'un indice en faveur d'une opération unique et non un critère décisif.

À titre d'illustration, si, compte tenu des pratiques usuelles du marché national et eu égard à son objet, il peut être présumé qu'une location avec option d'achat constitue une opération unique taxée à la TVA, et non deux opérations disjointes (location et crédit), cette présomption peut être renversée si les clauses contractuelles et tarifaires organisent la dissociation des deux.

La CJUE a considéré que l'octroi d'un crédit par une société commerciale à des agriculteurs et affecté à l'acquisition de semences auprès de ces mêmes sociétés relevait de la même opération que la vente de ces semences. À cette fin, elle ne s'est pas contentée de constater l'affectation du crédit, mais a également tenu compte, notamment, de la circonstance  que ces actes s'intégraient dans le cadre d’un régime juridique propre au système agricole hongrois dit de « coopération intégrée » poursuivant un objectif de mise en place d’un soutien financier et logistique aux agriculteurs, leur permettant d’exercer une activité de production agricole (CJUE, arrêt du 8 décembre 2016, aff. C-208/15, Stock ’94, ECLI:EU:C:2016:936, points 31 à 37).

La CJUE a admis, compte tenu du cadre propre au Royaume-Uni, qu'une location-vente dans laquelle les parties distinguaient une partie relative au financement, correspondant à des intérêts, et une partie relative à la mise à disposition du véhicule pouvait être regardée comme composée de deux opérations distinctes (CJUE, arrêt du 18 octobre 2018, aff. C-153/17, Volkswagen Financial Services (UK), ECLI:EU:C:2018:845, point 36).

III. Emballages des biens livrés

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Il résulte du 2° du I de l'article 267 du code général des impôts que :

  • les emballages et, plus globalement, tous les éléments du conditionnement d'un bien livré, sont des éléments constitutifs de cette livraison, même lorsqu'ils sont tarifés en sus du bien livré ou qu'ils sont consignés ;
  • ils sont accessoires et suivent donc le traitement fiscal du bien livré qu'ils emballent.

Sont concernés les cartons, plastiques, pots, bocaux, bouteilles, caisses etc, quelle que soit leur matière. Sont également concernés les coffrets, valisettes, corbeilles, bouteilles décoratives et autres contenants ayant également une finalité esthétique et de mise en valeur du bien.

Remarque : Lorsqu'il est consigné, la prise en compte de la consigne dans la base d'imposition de la livraison du bien dont l'emballage est l'accessoire fait l'objet de règles particulières (I-A § 10 et suivants du BOI-TVA-SECT-90-30).

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Toutefois, un emballage perd son caractère accessoire lorsque les conditions suivantes sont cumulativement remplies :

  • il présente, pour l'acquéreur, un intérêt propre, autre que sa fonction première, une fois dépourvu de son contenu ;
  • il présente des caractéristiques (matière, forme, valeur marchande, usage) qui vont au-delà de ce qui est utile, ou généralement pratiqué dans le secteur en cause, pour assurer la fourniture du bien, y compris son transport, sa conservation ou sa mise en valeur.

Remarque : Le simple fait qu'un contenant en verre de produits alimentaires soit décoré ou puisse être réutilisé en tant qu'ustensile ou pour la vaisselle ne suffit pas, à lui seul, pour écarter la caractérisation d'élément accessoire. Cet emballage suivra donc le régime du produit alimentaire contenu, notamment en matière de taux.

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Lorsque l'emballage est réutilisable, les parties peuvent organiser la transaction en deux opérations distinctes, relatives respectivement au bien et à son emballage Tel sera notamment le cas si les conditions cumulatives suivantes sont remplies :

  • l'emballage n'est pas repris par le vendeur après la transaction ;
  • un prix cohérent avec sa valeur marchande est convenu entre les parties indépendamment de celui du contenant.

IV. Contrats de la commande publique

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L'analyse des opérations complexes uniques repose sur l'identification de la finalité économique des actes juridiques et commerciaux, du point de vue de l'acquéreur. Ainsi, la circonstance que l'acquéreur définisse et explicite formellement ses attentes revêt une importance particulière.

Tel est le cas, compte tenu du cadre qui les régit (code de la commande publique [CCP]), des contrats de la commande publique, ainsi que des contrats auxquels les acteurs qui ne sont pas soumis à ce cadre recourent et qui en présentent les mêmes caractéristiques.

130

La question de l'opération complexe unique pour les contrats de la commande publique est soulevée en particulier au regard de l'exonération dont bénéficient les services financiers (BOI-TVA-SECT-50-10-10) ou des taux réduit dont relèvent certains services participant de la gestion publique des déchets ménagers (BOI-TVA-LIQ-30-20-70).

140

Ainsi, devront être particulièrement mobilisées lors de l'analyse les conditions de préparation du marché public ou de la concession qui traduisent l'intention de l'acquéreur à savoir :

  • les documents par lesquels l'acheteur a défini son besoin conformément à l'article L. 2111-1 et suivants du CCP ou à l'article L. 3111-1 et suivants du CCP, notamment les études et échanges préalables avec les opérateurs économiques ;
  • le recours à l'allotissement. En effet, sauf lorsqu'il présente un caractère purement artificiel, l'allotissement traduit par lui-même l'intention d'acquérir séparément plusieurs éléments. De même, pour les marchés publics, il résulte de l'article L. 2113-10 du CCP que les différents éléments d'un même lot n'ont normalement pas vocation à être scindés en plusieurs opérations distinctes. Tel est en particulier le cas lorsque, conformément au 1° de l'article L. 2113-11 du CCP, l'absence d'allotissement traduit le souhait d'externaliser les fonctions d'organisation, de pilotage ou de coordination, c'est à-dire une finalité économique propre à l'acquisition conjointe des différents éléments. De même, la décision de ne pas allotir pour éviter de rendre techniquement difficile ou financièrement plus coûteuse l'exécution des prestations, tel que prévu au 2° de l'article L. 2113-11 du CCP, est un indice de la recherche de liens économiques entre les éléments non allotis. Inversement, le choix de ne pas allotir pour d'autres motifs, notamment pour ne pas restreindre la concurrence, est, en l'absence d'autres éléments, neutre ;

Remarque : Conformément à l'article R. 2113-2 du CCP et à l'article R. 2113-3 du CCP, les motivations des choix réalisés pour l'allotissement sont explicitées dans divers documents que l'acquéreur doit conserver.

  • la forme du prix, au sens de l'article R. 2112-6 du CCP, en tant qu'elle est susceptible de refléter l'intention des parties concernées. Ainsi, la prédominance de prix forfaitaires, c'est-à-dire indépendants des quantités livrées ou exécutées, présume l'absence d'opérations distinctes. Inversement, lorsque le contrat prévoit, pour des éléments différents, des prix distincts déterminés chacun en fonction des quantités propres à chacun de ces éléments, ces éléments sont susceptibles de constituer des prestations dissociables au plan économique. L'appréciation est menée au regard de l'équilibre global du contrat, compte tenu en particulier de l'existence plus ou moins importante de la possibilité de subventionnements croisés entre les éléments qui ressortent de la structure de tarification.

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Il est rappelé que, lorsqu'en application d'un contrat de la commande publique, le titulaire du contrat recourt aux prestations d'un tiers, ou lorsque des tarifs sont à la charge des usagers, les opérations qui s'y rapportent suivent leur régime propre résultant de leur nature et en tenant compte du point de vue de leur bénéficiaire (l'opérateur économique qui recourt à un tiers ou l'usager), indépendamment du régime de TVA applicable au contrat de la commande publique, analysé, quant à lui, du point de vue de l'acheteur public.

V. Droits d'accès à des services

160

Les droits d'accès à des services sont définis comme suit :

  • en contrepartie d'un prix forfaitaire, le consommateur acquiert la possibilité de consommer une diversité de services. Ce prix est indépendant de la consommation effective de chacun des services, y compris dans le cas extrême d'une absence de consommation ;
  • pour un consommateur donné, la consommation effective de chacun des services accessibles est matériellement impossible ou peu vraisemblable et, en tout état de cause, n'est pas l'objectif principalement poursuivi. Les volumes à consommer peuvent être limités, soit explicitement par un plafond au-delà duquel la fourniture est interrompue ou un complément de prix est demandé, soit implicitement par exemple par une limitation de la durée pendant laquelle l'accès est possible ou au moyen d'une tarification en fonction de la durée d'accès ;
  • les services en cause, quoique formellement différents, présentent une proximité matérielle, soit qu'ils sont de même nature ou répondent à des besoins proches ou complémentaires, soit qu'ils sont fournis via une même infrastructure physique ou en recourant aux mêmes équipements ;
  • ils ne présentent pas les caractéristiques d'un bon à usages multiples (III-B § 100 du BOI-TVA-CHAMP-60-10).

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Peuvent en particulier constituer des droits d'accès :

  • l'accès, en contrepartie d'un billet d'entrée, à un établissement ou un parc qui comprend diverses installations (parc d'attraction, base de loisirs). L'analyse de l'opération complexe unique présente alors un intérêt notamment pour l'application du taux réduit aux expositions, sites, installations et appareils à caractère culturel, ludique, éducatif ou professionnel (BOI-TVA-LIQ-30-20-50) ;
  • une offre donnant accès à divers services numériques : communications électroniques (internet, téléphone, messages textuels), contenus numériques en téléchargement ou en lecture continue (images, audios, vidéos y compris télévision, livres ou presse numérique) ou d'autres services numériques (stockage de données, accès privilégié à certaines plateformes, etc.). L'analyse de l'opération complexe unique présente alors un intérêt notamment pour l'application du taux réduit dont bénéficient les services de télévision (I § 40 et suivants du BOI-TVA-LIQ-30-20-100), les livres numériques (BOI-TVA-LIQ-30-10-40) et la presse numérique (BOI-TVA-SECT-40-40).

180

Le droit d'accès présente, pour le consommateur, une finalité propre qui permet de le qualifier d'opération unique nonobstant la diversité des services offerts.

Ce droit présente en effet des caractéristiques notables qui le distingue, pour le consommateur, de l'achat séparé de chacun des services offerts. L'indépendance du prix par rapport à la consommation des services permet de disposer à la fois d'une visibilité sur les coûts supportés et de la souplesse dans le volume et la qualité des services respectifs qu'il consommera, voire du moment effectif de consommation, lesquels n'ont pas à être pleinement anticipés lors de la décision d'achat. Elle permet également, dans le cadre d'un achat collectif, par exemple pour les besoins des diverses personnes du foyer, de satisfaire aux exigences de plusieurs personnes.

Ainsi, la contrepartie du prix payé est constituée, non par la fourniture effective des services, mais par le droit qu’en tire le consommateur d'en bénéficier dans les conditions qu'il détermine et dans les seules limites fixées par le contrat, indépendamment du fait qu'il mette en œuvre ce droit, l'opérateur réalisant la prestation dès lors qu’il le met le consommateur en mesure de bénéficier de ces différents services.

En ce sens, par analogie, CJUE, arrêt du 23 décembre 2015, aff. C-250/14 et C-289/14, Air France-KLM et Hop!-Brit Air SAS, ECLI:EU:C:2015:841, point 28.

190

La commercialisation de droits d'accès peut toutefois soulever des questions sous l'angle des opérations complexes uniques lorsque plusieurs de ces droits, avec des périmètres de services différents, sont commercialisés au sein d'une même offre.

Exemple 1 : Un fournisseur de service numériques propose une offre comprenant divers services et, en contrepartie du paiement d'un supplément, des services optionnels. Les services optionnels peuvent, selon les circonstances, constituer une opération unique avec les services de base ou une opération distincte de ces services.

Exemple 2 : Un fournisseur de service numériques commercialise une gamme de trois offres, A, B et C, à prix croissant, chacune d'entre elles comprenant l'accès aux services de la précédente et à des services additionnels. B peut constituer une opération unique, ou regrouper deux opérations comprenant respectivement les services accessibles dans l'offre A et les services additionnels. De même, C peut comprendre une opération, deux opérations ou trois opérations.

Le regroupement des différents droits d'accès en une même opération est à réaliser selon la méthode du faisceau d'indices exposée au BOI-TVA-CHAMP-60-30. Certaines spécificités des offres numériques sont néanmoins soulignées au V § 200 et 210.

200

Le marché national des offres d'accès à des services numériques se caractérise par l'intervention d'acteur variés, comprenant à la fois des opérateurs qui, en complément d'un métier historique (communications électroniques, télévision, etc.) ont progressivement enrichi leurs offres d'autres services qu'ils conçoivent en propre ou acquièrent auprès d'autres acteurs et des opérateurs plus récents qui se sont spécialisés sur certains services nouveaux (vidéos à la demande, etc.). Il en résulte un foisonnement d'offres, d'autant qu'un même opérateur peut commercialiser simultanément ou successivement plusieurs dizaines, voire centaines d'offres résultant de diverses combinaisons de services.

Dans ce contexte, le métier historique de l'opérateur ou la circonstance qui en découle que l'essentiel ou la totalité de ses offres comprennent le service qu'il produit lui-même traduisent essentiellement ses intérêts économiques propres, lesquels peuvent diverger de l'intérêt du consommateur. Ainsi, non seulement, ces aspects ne constituent pas des éléments caractéristiques de l'opération du point de vue du consommateur au sens du II-A § 70 et suivants du BOI-TVA-CHAMP-60-20, mais en outre, ils ne présentent qu'un intérêt résiduel en tant que circonstances indirectes permettant d'établir ces éléments caractéristiques au sens du II-B § 100 et suivants du BOI-TVA-CHAMP-60-20. Sauf situations exceptionnelles, ils peuvent donc être écartés de l'analyse.

210

Le marché national des offres d'accès à des services numériques se caractérise également par l'importance, sur le plan économique, des durées d'engagement contractuelles (typiquement une ou deux années). Leur caractère essentiel pour le consommateur est conforté par l'existence de règles spécifiques dans le droit national et européen de la consommation, qui les encadrent et réglementent les frais de résiliation anticipée.

En effet, pour le fournisseur, elles permettent de stabiliser la base client et de faciliter l'amortissement des coûts fixes. Pour le client, elles conduisent à renoncer à moduler son budget à la baisse en fonction de sa consommation et rendent plus onéreux l'accès à de nouveaux services qui ne seraient pas inclus dans l'offre initiale, alors même que toute offre est régulièrement enrichie dans des conditions variables. Ces inconvénients constituent, en creux, un indice important des avantages économiques indirects que ces offres peuvent lui procurer (prix de l'offre moins élevé ou quantité et qualité des contenus plus importante).

Ainsi, la durée d'engagement commune à plusieurs droits d'accès au sein d'une même offre conduit le fournisseur à mutualiser des coûts importants entre les deux services ; elle peut également être utilisée pour fidéliser le consommateur, par exemple lorsque l'un des services est proposé sans surcoût ou à un prix moindre, mais en contrepartie d'un engagement sur l'ensemble des deux services. Inversement, pour le consommateur, il s'agit de supporter dans la durée le prix de l'accès à chacun de ces deux services, sans pouvoir renoncer spécifiquement à l'un ou à l'autre. Il existe donc une forte présomption de liens étroits entre les deux droits d'accès à plus forte raison lorsque l'un pourrait être souscrit individuellement sur une durée d'engagement plus courte.

Cette présomption pourrait toutefois être renversée s'il s'avérait que le consommateur pourrait renoncer à l'un des droits d'accès en cours de contrat pour bénéficier d'une baisse de prix. Cette capacité doit s'apprécier largement, au regard de l'ensemble du dispositif contractuel et tarifaire proposé par l'opérateur, notamment de la portée et de l'articulation des clauses régissant la résiliation totale ou partielle, des possibilités de migration d'une offre commerciale à l'autre et du jeux des options facultatives.

Exemple : L'opérateur A produit un ensemble de services qu'il commercialise sous la forme d'un abonnement mensuel à prix forfaitaire régi par contrat à durée indéterminée pouvant être résilié chaque mois à l'initiative du consommateur ou par contrat d'un mois tacitement reconduit chaque mois. L'opérateur B produit un ensemble de services qu'il commercialise sous la forme d'un abonnement mensuel à prix forfaitaire régi par contrat d'une durée d'une année.

B acquiert les droits de commercialisation du service de A et élabore une offre sous la forme d'un abonnement mensuel à prix forfaitaire régi par contrat d'une durée d'une année, sans possibilité aucune d'abaisser le prix en renonçant à l'accès au service de A.

La souscription de cette offre par le consommateur a ainsi des conséquences économiques sensiblement différentes de la souscription séparée de A et B et l'exigence d'une durée contractuelle commune aux deux services constitue un indice important d'une opération unique, à hauteur de la valeur économique que représente le renoncement par le consommateur à la souplesse dont il disposerait en cas de souscription séparée.