Date de début de publication du BOI : 19/06/2024
Identifiant juridique : BOI-AIS-CCN-30-60

AIS - Culture, communication et numérique - Taxes portant sur l'utilisation finale des réseaux de communications électroniques - Taxe sur les locations en France de phonogrammes et de vidéomusiques destinés à l'usage privé du public dans le cadre d'une mise à disposition à la demande sur les réseaux en ligne

Actualité liée : 19/06/2024 : AIS - Consultation publique - Taxe sur les locations en France de phonogrammes et de vidéomusiques destinés à l'usage privé du public dans le cadre d'une mise à disposition à la demande sur les réseaux en ligne (loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, art. 53)

Les commentaires contenus dans le présent document font l'objet d'une consultation publique du 19 juin 2024 au 19 août 2024 inclus pour permettre aux personnes intéressées d'adresser leurs remarques éventuelles à l'administration. Ces remarques doivent être formulées par courriel adressé à : bureau.d2-dlf@dgfip.finances.gouv.fr. Seules les contributions signées seront examinées. Dès la présente publication, vous pouvez vous prévaloir de ces commentaires jusqu'à leur éventuelle révision à l'issue de la consultation.

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La taxe sur les locations en France de phonogrammes et de vidéomusiques destinés à l'usage privé du public dans le cadre d'une mise à disposition à la demande sur les réseaux en ligne a été instaurée par l'article 53 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

Le produit de la taxe est affecté au Centre national de la musique.

Le présent chapitre commente les règles applicables à cette taxe codifiée à l'article 1609 sexdecies C du code général des impôts (CGI).

I. Champ d'application

A. Services taxables

1. Mise à disposition en ligne de phonogrammes ou de vidéomusiques accessibles à la demande

10

Est soumis à la taxe prévue à l'article 1609 sexdecies C du CGI le service de mise à disposition en ligne de phonogrammes ou de vidéomusiques destinés à l’usage privé du public et accessibles sur demande individuelle du consommateur.

Ainsi, les ventes et locations de supports physiques sur lesquels sont fixés des contenus (cédéroms, vinyles, etc.) ne sont donc pas concernées.

Ne sont pas non plus concernés les services rendus entre professionnels en vue, pour l'acquéreur, d'exploiter les contenus dont les droits sont cédés.

20

Le phonogramme s’entend de la fixation de sons provenant d'une interprétation ou exécution ou d'autres sons, ou d'une représentation de sons autre que sous la forme d'une fixation incorporée dans un contenu audiovisuel.

Remarque : La notion de phonogramme est par ailleurs utilisée pour les besoins de la protection de la propriété intellectuelle (article 2 du traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes adopté à Genève le 20 décembre 1996 et signé par la France le 9 octobre 1997, publié par le décret n° 2017-79 du 25 janvier 2017 portant publication du traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes et du traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur le droit d'auteur, adoptés à Genève le 20 décembre 1996, signés par la France le 9 octobre 1997).

La nature du son fixé est sans incidence.

Exemple : Sont notamment concernés les œuvres musicales, les histoires, la poésie, les discours, les reportages, les émissions, les leçons, les didacticiels, les sons apaisants ou toute forme de bruitages.

Sont sans incidence les circonstances que le son fixé constitue ou non une œuvre de l'esprit susceptible d'être protégée par le droit de la propriété intellectuelle et que le contenu soit créé ou diffusé par son créateur dans un cadre professionnel ou privé.

Seule l'incorporation au sein d'un contenu audiovisuel (document constitué au moins en partie d'une séquence d'images animées), que ce dernier ait ou non la qualification d’œuvre de l'esprit, est de nature à exclure le son fixé de la qualification de phonogramme.

30

La vidéomusique s'entend du contenu audiovisuel mettant en images une composition musicale préexistante avec ou sans parole.

Remarque : Les vidéomusiques sont par ailleurs définies à l'article 120-1 du règlement général des aides financières du centre national du cinéma et de l'image animée, sans que l'attribution de ces aides n'ait d'incidence sur l'application de la taxe.

La vidéomusique implique l'existence préalable d'une succession de sons rattachée à l'un des genres musicaux, à l'exclusion des autres formes de sons. Cette succession peut être reprise à l'identique ou adaptée pour être mise en image.

Ne sont donc pas des vidéomusiques les œuvres pour lesquelles le son et un visuel sont créés simultanément puis fixés sur un support, comme les opéras ou les comédies musicales filmés.

Pour être qualifiées de vidéomusique, il est nécessaire que les images animées ne présentent qu'un accessoire de la musique dans le sens où, prises isolément, elles sont dépourvues de finalité autonome ou ne présentent qu'une finalité résiduelle. Ainsi, ne sont pas des vidéomusiques, les émissions musicales, les œuvres cinématographiques ou les logiciels (notamment les jeux vidéos) ou les publicités et messages promotionnels, même lorsque la musique en constitue un élément déterminant dont l'importance est comparable à celle des images.

Sont sans incidence les circonstances que le contenu audiovisuel ou la composition musicale sous-jacente constitue ou non une œuvre de l'esprit susceptible d'être protégée par le droit de la propriété intellectuelle et que ce contenu ou cette composition soient créés ou diffusés par leur créateur dans un cadre professionnel ou privé.

40

Seuls sont taxés les services pour lesquels les contenus sont disponibles sur demande individuelle formulée par un procédé de communications électroniques. Sont donc exclus les services de radio ou de télévision, pour lesquels la diffusion intervient de manière simultanée pour l'ensemble du public selon une grille de programmes.

Remarque : S'agissant des phonogrammes, ce mode d'accès est couramment désigné par l'expression « podcast » et s'agissant des contenus audiovisuels de services de vidéo à la demande.

En revanche, la forme que prend la mise à disposition et le caractère gratuit ou onéreux sont sans incidence.

Exemples : Sont taxables la plateforme de diffusion en ligne d’œuvres musicales, le service donnant accès gratuitement à des phonogrammes ou vidéomusiques créés par des utilisateurs privés à des fins de partages et d'échanges au sein de communautés d'intérêts ou encore le service de rattrapage d'un service de radio.

2. Exclusion des services pour lesquels les phonogrammes et vidéomusiques sont accessoires

50

N'est pas taxable le service pour lequel la mise à disposition de phonogramme ou de vidéomusique ne présente qu'un caractère accessoire au sein du service.

Tel est le cas lorsque ces contenus sont dépourvus de finalité autonome du point de vue du consommateur, c'est-à-dire qu'ils ont pour seul objet de rendre techniquement ou matériellement possible la fourniture du service, ou de la rendre plus facile ou de meilleure qualité, y compris en la complétant. Aux fins de cette appréciation, les critères et méthodes habituellement retenus en matière de TVA peuvent utilement être mobilisés (III-C § 220 et suivants du BOI-TVA-CHAMP-60-20).

Exemples : N'est pas taxable la fourniture d'un logiciel au seul motif qu'il dispose d'un environnement sonore particulier lié à certaines actions et participant de l'ergonomie de l'utilisation, la fourniture d'un jeux vidéo pour lequel, au sein des bonus, sont accessibles les œuvres de la bande-son ou encore le service de rattrapage d'un service de télévision pour lequel les émissions de vidéomusiques sont marginales dans la grille de programmation.

60

L'exclusion est appréciée service par service au regard des contenus auxquels il permet l'accès.

Elle n'a pas vocation à régir les situations où un service individualisable d’accès à des enregistrements phonographiques ou vidéomusicaux présenterait un caractère accessoire par rapport à d'autres services regroupés au sein d’une offre globale multi-services. Ainsi, dans le cas d'une offre multi-services, chaque service formant un tout cohérent doit faire l’objet d’une analyse dédiée et le caractère taxable de ce service dépendra de l’ampleur des enregistrements phonographiques ou vidéomusicaux accessibles au sein de l'offre.

Exemple : Un service de rattrapage propre à une chaîne musicale comprenant de nombreuses diffusions de vidéomusiques sera taxable, même lorsqu'il est commercialisé sans surcoût avec le service de télévision qu'il complète.

3. Exclusion des services d'information relatifs aux œuvres musicales

70

Ne sont pas soumis à la taxe les services gratuits dont l'objet principal est d'assurer la fourniture d'informations relatives à des œuvres musicales et leur promotion auprès du public.

Tel est le cas par exemple du site Internet d'un artiste diffusant des vidéomusiques de nouveaux morceaux ou d'un site référençant un ensemble d’œuvres musicales et comportant de courts extraits de chacune d'entre elles.

B. Territoire de taxation

80

La taxe s’applique lorsque les services mentionnés au I-A § 10 et suivants sont destinés à des personnes qui sont établies ou ont leur domicile ou leur résidence habituelle en France métropolitaine ou dans l'une des collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution (Guadeloupe, Martinique, La Réunion, Guyane et Mayotte).

II. Montant de l'impôt

A. Base d'imposition

90

En application du IV de l’article 1609 sexdecies C du CGI, la taxe est assise sur le montant hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA) des revenus suivants.

100

D'une part, sont pris en compte l'ensemble des prix acquittés par le public en contrepartie de l'accès aux contenus taxables mentionnés au I-A § 10 et suivants.

Ces prix peuvent notamment prendre la forme d'un paiement à l'acte (appliqué pour chaque phonogramme ou vidéomusique) ou d'un abonnement (accès à un ensemble de contenus au choix).

Lorsqu'un abonnement donne accès à la fois à des contenus taxables et non taxables, ou que, pour un prix forfaitaire, sont fournis différents services dont seulement certains donnent accès à des contenus taxables, seule est prise en compte la fraction de l'abonnement ou du prix de l'offre multi-services se rapportant à l'accès aux contenus taxables. Il appartient au redevable de retenir une méthodologie économique rationnelle de ventilation permettant de déterminer cette fraction. À cette fin, pourront être utilisées les méthodes fondées sur la valeur de marché ou sur les coûts, qui sont mentionnées au III § 160 et 170 du BOI-TVA-CHAMP-60-30.

Remarque : Il importe donc peu que les contenus taxables et non taxables accessibles via un même service ou que les différents services regroupés en une même offre soient considérés comme relevant d'une opération unique indissociable pour les besoins de la TVA.

110

D'autre part, sont prises en compte les sommes versées par les annonceurs et les parrains pour la diffusion de leurs messages publicitaires sur le service taxé.

Toutes les formes de diffusion des messages publicitaires sont prises en compte, qu'il s'agisse de sons ou vidéos en début ou au cours du contenu taxable ou encore d'images ou de sons affichés sur l'application permettant d'accéder au service.

L'intégralité des revenus publicitaires attachés au service taxé est prise en compte même lorsque ce service permet à la fois l'accès à des contenus taxables et à des contenus non taxables. Ces sommes sont prises en compte à hauteur de 34 %, y compris lorsque le service taxé ne permet l'accès qu'à des contenus taxables.

120

La base d'imposition est constituée de la fraction des sommes mentionnées au II-A § 100 et 110 qui excède 20 M€. Ce seuil est apprécié par année civile et séparément pour chaque service.

Pour les besoins de la détermination de ce seuil, sont considérés comme relevant du même service les diverses versions, payantes ou gratuites, et l'ensemble des fonctionnalités offertes formant un tout cohérent au regard des contenus fournis.

Exemple : Un opérateur donne accès à un ensemble de vidéomusiques commercialisées sous la forme de trois offres : la première comprend un accès gratuit et des messages publicitaires, la deuxième est payante et dépourvue de messages publicitaires, la troisième, également payante et plus onéreuse que la deuxième, donne accès à des contenus additionnels et à des services connexes (par exemple des réductions pour des concerts ou des rencontres avec certains auteurs). L'ensemble des revenus se rapportant aux contenus taxables et résultant de ces trois offres sont rattachés à un même service. Ce service sera taxé sur la somme de ces revenus, minorée de 20 M€.

B. Taux de la taxe

130

Le montant de la taxe est calculé en appliquant à la base d’imposition mentionnée au II-A § 120 le taux de 1,2 %.

III. Fait générateur et exigibilité

140

Conformément au premier alinéa du VI de l’article 1609 sexdecies C du CGI, le fait générateur de la taxe est constitué par l'achèvement de l'année civile au cours de laquelle les sommes constituant la base d'imposition et mentionnées au II-A § 90 et suivants sont encaissées.

150

Conformément au deuxième alinéa du VI de l’article 1609 sexdecies C du CGI, la taxe est exigible à chaque encaissement des sommes constituant la base d'imposition, sous réserve que ces encaissements aient conduit, depuis le début de l'année civile, à excéder le seuil mentionné au II-A § 120.

Il en résulte que la taxe devient exigible avant l'intervention de son fait générateur et potentiellement dès le mois de janvier si les sommes encaissées au cours de ce mois excèdent 20 M€.

IV. Personnes soumises aux obligations fiscales

160

Sont redevables de la taxe les personnes qui encaissent les sommes constituant la base d'imposition mentionnées au II-A § 90 et suivants.

Remarque : Le lieu d'établissement, en France ou à l'étranger, est sans incidence.

Ces personnes peuvent être différentes du fournisseur du service, notamment lorsque ce dernier recourt à une régie publicitaire pour négocier les revenus publicitaires ou à un opérateur de communications électroniques qui commercialise le service en complément ou conjointement avec ses propres offres.

170

Lorsqu'une personne autre que le fournisseur du service reverse des sommes qu'il a encaissées à une autre personne (le fournisseur ou un intermédiaire), cette autre personne sera redevable à hauteur de la taxe frappant ces sommes reversées.

Remarque : Il importe peu que le bénéficiaire initial ait agit en tant qu'intermédiaire transparent (encaissement au nom et pour le compte d'un tiers), en tant qu'intermédiaire opaque (encaissement en son nom propre et pour le compte d'un tiers) ou en tant qu'acheteur-revendeur (encaissement en son nom et pour son compte).

Il en résulte que, dans les situations de reversements successifs impliquant l’opérateur en relation directe avec le consommateur final, le fournisseur du service et, éventuellement, des intermédiaires, chaque acteur sera redevable sur les sommes qu’il aura effectivement conservées. À cette fin, il n'est pas tenu compte des sommes échangées dans le cadre de prestations de services distinctes rendues entre les acteurs.

Exemple 1 : Un opérateur de communications électroniques acquiert un service d’accès à des enregistrements phonographiques en ligne auprès d'un fournisseur puis le revend auprès du public à un prix plus élevé (ou de manière équivalente, les parties conviennent que, à chaque vente auprès du public, l'opérateur versera au fournisseur une somme inférieure au prix public). Dès lors, le partage de l’assiette taxable s’applique et il y a deux redevables : l’opérateur de communications électroniques pour la somme qu’il retient et le fournisseur pour le montant qui lui est reversé.

Exemple 2 : Un opérateur de communications électroniques acquiert un service d’accès à des enregistrements phonographiques en ligne auprès d'un fournisseur. Il encaisse les contreparties auprès du public et reverse intégralement ces dernières au fournisseur. Par ailleurs, il lui facture une prestation d’intermédiation ou de distribution. Dès lors, le fournisseur est seul redevable de la taxe au titre des sommes qui lui sont reversées. La circonstance que les parties conviennent, à titre de facilité de paiement, que le prix de cette prestation s’impute sur le reversement intégral est sans incidence.

Ainsi, le schéma de facturation des différents services mis en œuvre par les parties et appliqué pour les besoins de la TVA aux différentes opérations en cause est déterminant pour l’identification du ou des redevables.

180

Dès lors que le seuil mentionné au II-A § 120 est apprécié par service, en cas de multiplicité de redevables, il est ventilé entre ces derniers. Chacun bénéficiera d'un seuil individuel égal au produit entre, d'une part, la fraction, en pourcentage, du prix public qu'il a conservé et, d'autre part, le montant total de l'abattement.

V. Obligations du redevable

A. Modalités déclaratives

190

En application du troisième alinéa du VI de l’article 1609 sexdecies C du CGI, la taxe est déclarée et liquidée comme en matière de TVA (BOI-TVA-DECLA-20-20) au moyen du formulaire annexe à la déclaration de TVA n° 3310-A (imprimé n° 3310-A-SD [CERFA n° 10960]).

Les échéances de la déclaration varient donc selon la situation des redevables au regard de la TVA (échéance trimestrielle, mensuelle ou annuelle).

Exemple : Une entreprise, relevant du régime réel normal en matière de TVA, offre l'accès à titre onéreux à des phonogrammes musicaux par le biais d'abonnements mensuels. En janvier 2024, elle encaisse 18 M€ de recettes au titre de ces abonnements, puis 15 M€ en février de la même année. Le seuil de 20 M€ étant franchi en février, elle indiquera sur sa déclaration afférente au mois de février, et déposée en mars, la fraction des abonnements au-delà de ce seuil, soit 13 M€. À compter du mois de mars, il sera tenu compte de toute recette supplémentaire pour le calcul de la taxe.

En cas de cessation d’activité, les redevables déposent leur déclaration dans les 30 jours de la cessation d’activité.

200

La déclaration est souscrite par voie électronique et adressée au service de gestion dont relève le redevable (service des impôts des entreprises territorialement compétent ou direction des grandes entreprises).

B. Paiement

210

Comme en matière de TVA, les redevables acquittent la taxe par voie dématérialisée lors du dépôt de la déclaration.

VI. Contrôle, recouvrement et contentieux

220

Le contrôle de la taxe est soumis aux règles de droit commun exposées dans la série BOI-CF.

230

La taxe est par ailleurs soumise, le cas échéant, aux pénalités exposées au BOI-REC-PRO-10-30.

240

Enfin, les règles de la procédure contentieuse sont les règles de droit commun applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires et aux taxes assimilées exposées dans la série BOI-CTX.