CTX - Contentieux de l'assiette de l'impôt - Dispositions communes – Limites apportées au caractère exécutoire des décisions juridictionnelles : sursis à exécution
Quel que soit l'ordre juridictionnel concerné, administratif ou judiciaire, le caractère exécutoire attaché à certaines décisions des juges du fond est susceptible, par la voie de recours distincts, d'être remis en cause.
I. Le sursis à exécution devant les juridictions administratives
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Au sein du contentieux juridictionnel administratif, les décisions rendues revêtent un caractère exécutoire en application de l'article L11 du code de justice administrative (CJA).
Par ailleurs, il résulte des termes de l'article L4 du CJA que sauf dispositions législatives spéciales, les requêtes n'ont pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par la juridiction.
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Cela étant, un aménagement à ce principe est organisé afin d'accorder aux parties la possibilité d'obtenir du juge administratif une décision de sursis à exécution,
Devant les cours administratives d'appel, le sursis à exécution est régi par les dispositions des articles R811-14 du CJA , R811-15 du CJA, R811-16 du CJA, R811-17 du CJA, R811-17-1 du CJA, R811-18 du CJA et R811-19 du CJA et devant le Conseil d'Etat, par les articles R821-1 du CJA et R821-5-1 du CJA.
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L'attention est particulièrement appelée sur le fait que la procédure de sursis à exécution concerne exclusivement les décisions juridictionnelles et non les décisions administratives à l'endroit desquelles la procédure du référé suspension est susceptible de trouver application.
Remarque : les modalités de la procédure de référé suspension sont exposées dans la division relative aux juridictions administratives (cf. BOI-CTX-ADM).
A. Champ d'application : les décisions juridictionnelles concernées
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Peuvent faire l'objet d'une demande de sursis à exécution les décisions des tribunaux administratifs frappées d'appel (CJA, art R811-14) ainsi que les décisions faisant l'objet d'un pourvoi en cassation (CJA, art. R821-5).
De même, peuvent faire l'objet d'une demande de sursis à exécution les ordonnances rendues par le juge des référés :
- statuant en urgence (référé suspension) : le Conseil d'Etat pourra être saisi d'un pourvoi en cassation sur le fondement de l'article R821-5 du CJA ;
- ne statuant pas en urgence : la saisine s'effectuera sur les fondements respectifs des articles R541-6 du CJA et R533-2 du CJA, selon qu'il s'est agi d'un référé provision ou d'un référé instruction.
B. Procédure
1. Présentation de la requête de sursis à exécution
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Dès lors que, sauf dispositions particulières, le recours en appel n'a pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par le juge d'appel (CJA, art. R811-14), une demande de sursis à exécution est irrecevable si un appel de la décision du tribunal administratif n'est pas introduit par ailleurs.
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En outre, les conclusions tendant, en application des dispositions des articles R811-15 du CJA, R811-16 du CJA et R811-17 du CJA, au sursis à l'exécution de la décision de première instance attaquée doivent être présentées par requête distincte du recours en appel et accompagnées d'une copie de ce recours (CJA, art. R811-17-1).
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Ces mêmes exigences sont requises par l'auteur d'un pourvoi en cassation à l'encontre d'un arrêt de cour administrative d'appel (CJA, art. R821-5-1).
2. Effet du dépôt de la requête de sursis à exécution
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En droit, le dépôt d'une demande de sursis à exécution par le contribuable est dépourvu d'effet suspensif.
En ce sens : CE 30 novembre 2001 n°234654.
L'Administration prescrit néanmoins à ses comptables de surseoir au recouvrement de l'impôt dans l'attente qu'il soit statué sur cette requête
En ce sens : Rép. Frédéric Dupont, J.O. A.N. 24 novembre 1986, p. 4375, n° 9336.
3. Jugement de la requête
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Le président de la cour administrative d'appel peut, par ordonnance, rejeter les conclusions à fin de sursis à exécution d'une décision juridictionnelle frappée d'appel (CJA, art. R222-1).
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La même règle s'applique au président des formations de jugement en cas de requête au Conseil d'Etat,
4. Suite de la décision
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A tout moment, la juridiction d'appel peut mettre fin au sursis qu'elle a ordonné (CJA, art. R811-18).
Il en va de même lorsque le sursis est sollicité devant le Conseil d'Etat (CJA, art. R821-5, dernier alinéa).
5. Voies de recours
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Lorsque la cour administrative d'appel prononce le sursis à exécution d'un jugement, ses arrêts sont susceptibles de recours en cassation devant le Conseil d'Etat dans la quinzaine de leur notification (CJA, art. R811-19).
C. Conditions d'octroi du sursis à exécution
1. Devant la cour administrative d'appel
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Les conditions d'octroi du sursis à exécution diffèrent selon la qualité de la partie requérante, laquelle doit préciser le fondement dont elle se réclame
a. Demande de l'Administration
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Aux termes des dispositions de l'article R811-16 du CJA, lorsqu'il est fait appel par une personne autre que le demandeur en première instance, la juridiction peut, à la demande de l'appelant, ordonner (sous réserve des situations visées par les articles R533-2 du CJA et R541-6 du CJA) qu'il soit sursis à exécution du jugement déféré si cette exécution risque d'exposer l'appelant à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions seraient accueillies.
Ainsi, à défaut d'obligation de remboursement des sommes litigieuses, qui n'ont pas été acquittées par le redevable, qui bénéficiait du sursis de paiement, et, dans la mesure où la créance du Trésor a été régulièrement produite, l'administration n'établissait pas que l'exécution du jugement du tribunal administratif de Versailles l'exposerait à une perte définitive (CAA Versailles 3 mars 2005 n° 04VE03348).
Remarque :
Les dispositions de l'article R811-16 du CJA, qui permettent à l'Etat de demander le sursis à exécution d'un jugement dont il fait appel, ne sont pas d'ordre public (CE, arrêt du 19 juin 2006, n°270472).
b. Demande du contribuable
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En application des dispositions de l'article R811-17 du CJA, le sursis à exécution peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction.
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Interprétant ces dispositions, le Conseil d'Etat exclut toute possibilité pour un contribuable de présenter une demande de sursis à exécution du jugement du tribunal administratif qui a rejeté sa demande en décharge ou en réduction d'imposition. En effet, un tel jugement n'entraîne, en tant que tel, aucune mesure d'exécution (CE, arrêt du 12 janvier 2005, n°254590).
2. Devant le Conseil d'Etat (quel que soit le demandeur)
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Lorsque le sursis est demandé par l'auteur du pourvoi en cassation, la formation de jugement peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution d'une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort si cette décision risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens invoqués paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation de la décision juridictionnelle rendue en dernier ressort, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond (art. R821-5 du CJA).
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Ainsi, par un arrêt du 10 novembre 2004 n° 269058, le Conseil d'Etat a jugé que le ministre est fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêt de la cour administrative d'appel accordant à une société en liquidation judiciaire une réduction de ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés et à la T.V.A., dès lors que :
- le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel a statué ultra petita sur les conclusions dont la société l'avait saisie est un moyen sérieux et de nature à justifier, outre la cassation de l'arrêt attaqué, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond ;
- la situation de liquidation judiciaire dans laquelle se trouve la société expose l'Etat à la perte définitive de la somme que l'arrêt de la cour administrative d'appel lui a prescrit de verser, et qui ne devrait pas rester à sa charge au cas où ses conclusions seraient reconnues fondées par le Conseil d'Etat, et risque donc d'entraîner pour l'Etat des conséquences difficilement réparables.
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Cela étant, le sursis à exécution ne peut être régulièrement sollicité par l'Etat que pour autant que l'exécution du jugement ou de l'arrêt déféré exposerait celui-ci à une perte définitive de sa créance.
En ce sens : CE, arrêt du 16 juillet 1976, n°02769 ; CE, arrêt du 6 juillet 1987, n°83047 et CE, arrêt du 10 novembre 2004, n°269058.
Tel est le cas, lorsque l'Etat est tenu de reverser des impositions d'ores et déjà acquittées par le contribuable et/ou lorsque l'Etat ne participera pas, en tant que créancier privilégié, à la répartition de l'actif de l'entreprise liquidée.
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Par ailleurs, la solution jurisprudentielle exposée au paragraphe 150 ci-dessus revêt un caractère transposable au stade de la cassation.
Ainsi, l'arrêt par lequel une cour administrative d'appel confirme (totalement ou partiellement) le rejet, par les juges de première instance, de la demande en décharge ou en réduction d'impositions présentées par le contribuable n'a pas entraîné, par lui-même, des conséquences difficilement réparables de nature à justifier le prononcé du sursis prévu à l'article R821-5 du CJA. Dès lors, la demande de sursis à exécution présentée au Conseil d'Etat est donc irrecevable (CE, arrêt du 15 mars 2006, n°277707).
II. L'arrêt ou l'aménagement de l'exécution provisoire de droit du jugement du tribunal de grande instance
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Il résulte des dispositions de l'article L199 du LPF qu'en matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, le tribunal compétent est le tribunal de grande instance, qui statue en premier ressort.
Conformément aux dispositions de l'article 539 du C. proc. Civ., le délai de recours par une voie ordinaire comme l'appel, tout comme le recours effectivement exercé dans le délai, est normalement suspensif de l'exécution du jugement.
Or, dans le cadre du contentieux de l'assiette de l'impôt relevant de la compétence du juge administratif, les jugements rendus par les tribunaux administratifs sont exécutoires de plein droit (article L11 du CJA) et le recours en appel n'a pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par le juge d'appel (cf. I)
Aussi, afin de placer les contribuables et l'Administration dans une situation similaire au regard de l'exécution du jugement de première instance, quel que soit l'ordre de juridiction appelé à trancher le litige, et de manière à décourager l'exercice de recours à des fins purement dilatoires, l'article R*202-5 du LPF confère-il aux jugements rendus par les tribunaux de grande instance dans le cadre de l'article L199 du LPF un caractère exécutoire de droit à titre provisoire.
Cependant, cette même disposition organise également un recours, qui s'exerce devant le premier président de la cour d'appel saisie, permettant d'obtenir l'arrêt de cette exécution provisoire dans le cas où celle-ci risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives, ou son aménagement dans les conditions prévues par les articles 517 du C. proc. Civ., 518 du C. proc. Civ., 519 du C. proc. Civ., 520 du C. proc. Civ, 521 du C. proc. Civ., 522 du C. proc. Civ., 523 du C. proc. Civ. et 524 du C. proc. Civ. .
Les développements consacrés à ce dispositif sont exposés au sein de la division consacrée à la procédure devant les juridictions de l'ordre judiciaire, à laquelle il convient de se reporter (cf. BOI-CTX-JUD).