CTX - Contentieux de l'assiette de l'impôt – Dispositions communes - Les textes fiscaux et leur applicabilité - Sources internationales du droit fiscal
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Les législations fiscales sont déterminées en principe souverainement par les États. Elles peuvent, par conséquent, s'exercer concurremment à l'égard d'un même contribuable, sur une même matière imposable et pour une même période.
Il en est ainsi, par exemple, lorsqu'un revenu est imposable à la fois dans l'État où il a sa source, dans l'État du domicile du bénéficiaire et dans l'État où a lieu le paiement.
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C'est pourquoi les États ont été conduits à conclure des conventions, qui sont des traités internationaux bilatéraux, destinées à éviter les doubles impositions.
Actuellement, ces conventions sont souvent préparées à partir de modèles mis au point par les organisations internationales, ainsi ceux publiés par l'OCDE.
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Outre, l'élimination des doubles impositions, la plupart des conventions fiscales ont également pour objet de prévoir :
- des procédures de consultation ;
- des mesures d'assistance réciproque pour le recouvrement de l'impôt ;
- des échanges de renseignements tendant à lutter contre la fraude fiscale.
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L'article 55 de la Constitution place, dans la hiérarchie des normes, le droit issu de ces conventions internationales, dûment ratifiées, au-dessus des normes nationales.
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Il y a toutefois lieu de distinguer, en la matière, les conventions fiscales internationales traditionnelles, bilatérales du droit européen, issu de traités dont la portée n'était pas exclusivement fiscale.
Le droit communautaire, qui comprend sa propre hiérarchie des normes, s'intègre au droit national et doit être appliqué quelle que soit l'attitude des autres États membres.
Les conventions fiscales internationales comportent, au contraire, une clause de réciprocité. Un État contractant peut donc suspendre l'application d'une convention à l'égard des ressortissants de l'État contractant qui ne l'appliquerait pas.
I. Droit communautaire
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Le droit communautaire est constitué par un ensemble de traités et par les normes de droit qui ont été édictées pour leur application. Un nouvel ordre juridique a ainsi été créé, qui s'intègre au droit national.
A. Sources du droit communautaire
1. Traités institutionnels
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Les traités institutionnels étaient initialement au nombre de trois :
- le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), signé le 18 avril 1951 à Paris, venu à expiration le 23 juillet 2002 ;
- le traité de Rome du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique (Euratom) ;
- le traité de Rome du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne (CEE).
Cet ensemble a été complété :
- par des traités d'adhésion des États membres ;
- par l' « Acte unique européen » des 17-28 février 1986 ;
- par le traité sur l'Union européenne du 7 février 1992 qui instaure l'Union européenne et modifie le traité instituant la Communauté économique européenne (traité de Rome) en vue d'établir la Communauté européenne [la Communauté économique européenne (CEE) devient Communauté européenne (CE)] ;
- par le traité d'Amsterdam du 2 octobre 1997 ;
- par le traité de Nice du 26 février 2001 ;
- par le traité de Lisbonne du 13 décembre 2007 qui substitue l'Union européenne à la Communauté européenne.
Depuis le 1er décembre 2009, date d'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l'intitulé du « traité instituant la Communauté européenne » (traité de Rome ou traité CE) est remplacé par « traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ».
Remarque : Les articles, les sections, les chapitres, les titres et les parties du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne sont renumérotés
À cette occasion,il est observé que le système juridictionnel de l'Union est devenu la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE) composée de la Cour de Justice, du Tribunal, et du Tribunal de la Fonction publique (qui statue sur les différends opposant l'Union européenne aux membres de son personnel).
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Le droit fiscal « de l'Union » trouve essentiellement son fondement dans le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne au sein de ses articles 110 à 113 du TFUE (initialement articles 90 à 93 du traité de Rome).
Cela étant, la matière fiscale est également susceptible d'être indirectement impactée par les articles de ce traité qui garantissent les libertés d'établissement, de prestations de services et de circulation des capitaux (cf. TFUE, articles 49, 56 et 63).
2. Normes édictées par les institutions communautaires
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Pour la mise en œuvre des principes dégagés par les traités institutionnels, les institutions communautaires (Parlement européen, Conseil, Commission européenne, Banque centrale européenne notamment) peuvent édicter des actes unilatéraux.
L'article 288 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne
distingue ainsi entre:
- les règlements, mesures générales directement applicables dans le droit interne des États membres ;
-les directives, qui fixent un objectif à atteindre dans un délai déterminé en laissant les États membres, maîtres des mesures de mise en œuvre ;
- les décisions, impératives, mais adressées à un ou plusieurs États ou particuliers ;
- les recommandations et avis, sans portée juridique contraignante.
B. Intégration du droit communautaire au droit national
1. Principes de primauté et d'intégration du droit communautaire
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Dans ses arrêts de principe Van Gend en Loos arrêt du 5 février 1963 aff. 26/62) et Costa arrêt du 15 juillet 1964 aff. 6/64), la Cour de justice de l'Union européenne [alors dénommée Cour de justice des communautés européennes (CJCE)] a affirmé l'existence d'un ordre juridique communautaire à la fois indépendant de la législation des États membres et intégré à leur système juridique ; elle en a déduit que le droit communautaire créait, à l'égard des particuliers, des droits et des obligations susceptibles d'une sanction juridictionnelle nationale.
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Par suite, tout juge national, saisi dans le cadre de sa compétence, a l'obligation d'appliquer intégralement le droit communautaire et de protéger les droits que celui-ci confère aux particuliers, en laissant inappliquée toute disposition éventuellement contraire de la loi nationale, que celle-ci soit antérieure ou postérieure à la règle communautaire (CJCE arrêt du 9 mars 1978, aff. 106/77 Simmenthal).
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La Cour de Cassation (Ch. mixte arrêt du 24 mai 1975 n° 73-13556) puis le Conseil d'État (Ass. arrêt du 20 octobre 1989 n° 108243) ont consacré cette primauté du droit communautaire, y compris par rapport aux lois nationales postérieures.
2. Mise en œuvre des principes communautaires : l'effet direct
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La primauté de la règle communautaire n'a de valeur qu'autant que le particulier peut l'invoquer devant le juge national. On désigne communément les règles d'invocabilité sous l'expression d'effet direct du droit communautaire.
Celui-ci varie en fonction de la nature de la norme considérée (traité, règlement ou directive).
Le Conseil d'État a jugé que les dispositions alors en vigueur de l'article 212-1° du CGI, destinées à s'opposer, notamment, aux situations de sous capitalisation de filiales françaises de sociétés-mères étrangères, étaient incompatibles avec le principe communautaire de liberté d'établissement institué par l'article 43 (anciennement 52) du traité CE (cf. CE arrêt du 30 décembre 2003 n° 249047).
II. Conventions internationales
Outre l'élimination des doubles impositions, les conventions fiscales ont également pour objet d'assurer une protection des contribuables (possibilité particulière de recours en cas de difficultés d'application, protection contre les discriminations fiscales du fait de la nationalité).
Elles peuvent enfin constituer une incitation au développement des échanges et des activités entre les pays qui les concluent
A. Conventions internationales et législation interne
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En vertu de la règle posée par l'article 55 de la constitution du 4 octobre 1958, les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois.
En application de ce principe, l'article 4 bis-2° du Code général des Impôts prévoit que « sont également passibles de l'impôt sur le revenu les personnes de nationalité française ou étrangère, ayant ou non leur domicile fiscal en France, qui recueillent des bénéfices ou revenus dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions ».
De même, l'article 165 bis du CGI dispose que « nonobstant toute disposition contraire du présent code sont passibles en France de l'impôt sur le revenu tous revenus dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions ».
Cependant, les traités diplomatiques n'ont force de loi que s'ils ont été régulièrement ratifiés et publiés au Journal officiel.
Par suite, les conventions non ratifiées, ni publiées ne peuvent s'appliquer aux redevables. Ces derniers ne peuvent davantage s'en prévaloir.
B. Interprétation des conventions internationales
1. Tribunaux administratifs
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Le Conseil d'État a considéré que le juge était compétent pour interpréter une disposition conventionnelle sans renvoi au ministre des affaires étrangères (CE 29 juin 1990 n° 78519).
2. Tribunaux judiciaires
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Les tribunaux judiciaires sont compétents pour interpréter les traités diplomatiques, sauf lorsque les dispositions soumises à leur interprétation mettent en jeu des questions de droit public international (Cass. civ. arrêt du 16 décembre 1968).