Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Identifiant juridique : BOI-CTX-DG-20-30

CTX - Contentieux de l'assiette de l'impôt – Dispositions communes – Autorité de la chose jugée

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L'expression « chose jugée » dans le langage juridique s'applique à la décision prise par un jugement. Dès que celui-ci est rendu, on lui reconnaît « autorité de chose jugée », en ce qu'il met fin au litige. Le point sur lequel il a été statué ne peut plus, en principe, être remis en question dès lors qu'une présomption de vérité est attachée au jugement rendu.

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Le principe de l'autorité de la chose jugée a été posé par le code civil.

En effet, aux termes de l'article 1350 du code civil, la présomption légale est celle qui est attachée par une loi spéciale à certains actes ou à certains faits, tels que l'autorité que la loi attribue à la chose jugée.

L'article 1351 du code civil énonce que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.

Ainsi, l'autorité de la chose jugée par une décision rendue dans un litige de plein contentieux est subordonnée à la triple identité des parties, d'objet et de cause.

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L'autorité de la chose jugée peut être ou non définitive selon que les décisions auxquelles elle s'attache sont devenues ou non inattaquables.

C'est pourquoi, on distingue :

- les jugements passés en force de chose jugée irrévocable qui ne peuvent être remis en question devant aucun tribunal (lorsque les délais des voies de recours ordinaires et extraordinaires sont expirés ou qu'il a été fait usage en vain de ces voies de droit) ;

- les jugements qui ont acquis simplement la force de chose jugée, lesquels ne peuvent être attaqués que par des voies de recours extraordinaires (tierce opposition, recours en révision, pourvoi en cassation) ;

- les jugements qui n'ont que l'autorité de la chose jugée, et sont susceptibles d'être attaqués par les voies de recours ordinaires.

Ces distinctions n'ont qu'une importance secondaire en droit fiscal dans la mesure où certaines voies de recours (opposition, tierce opposition, recours en révision) n'y sont qu'assez exceptionnellement utilisées.

Ce n'est d'ailleurs pas tant l'autorité plus ou moins définitive de la chose jugée qui fait question en pratique, mais plutôt sa portée exacte et ses limites, ce qu'il est coutume de désigner sous l'expression de « relativité de la chose jugée » (cf. BOI-CTX-DG-20-30-30-II).

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La notion d'autorité de la chose jugée répond à un souci de sécurité juridique et de paix sociale : il est en effet primordial que les relations entre les particuliers eux-mêmes ou entre les particuliers et l'administration demeurent stables et ne soient pas sans cesse remises en cause devant les juridictions.

À cet égard, la chose jugée constitue une fin de non-recevoir et peut être opposée par l'une des parties pour empêcher que la partie adverse ne remette en question un point litigieux déjà tranché.

D'ailleurs, elle est rangée par l'article 1350 du code civil parmi les présomptions légales et par suite peut être invoquée par une partie qui entend en faire tirer par le juge de nouvelles conséquences. Elle dispense alors de toute preuve celui au profit duquel elle existe (Code civil, art. 1352).

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Issu des dispositions du code civil, le principe de l'autorité de la chose jugée trouve à s'appliquer non seulement en matière civile, mais également en matière administrative et répressive.

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L'intérêt pratique que peut présenter ce principe de l'autorité de la chose jugée dans le contentieux de l'impôt est loin d'apparaître négligeable

En effet, dans cette matière où le contribuable est presque toujours le demandeur, le service peut invoquer la chose jugée en tant que fin de non-recevoir, ce qui lui permet d'éviter qu'une même contestation présentée par un même contribuable soit jugée plusieurs fois (tout autant que le contribuable est toujours dans les délais pour engager une nouvelle instance juridictionnelle) et de s'exonérer ainsi des moyens dilatoires employés par un redevable procédurier ou de mauvaise foi.

À l'inverse, il est important de connaître quelles sont les limites de ce principe, sa « relativité », afin d'apprécier dans quelle mesure l'administration est habilitée à faire usage de son droit de reprise lorsqu'une imposition primitive contestée a déjà donné lieu à décision du juge de l'impôt ; il sera précisé qu'une imposition supplémentaire est possible lorsqu'elle n'a pas le même fondement juridique (cf. BOI-CTX-DG-20-30-30 II-C-2-b).

Enfin, dans le domaine des incidences respectives des jugements rendus par des juridictions différentes dans des litiges connexes, il est utile de savoir que seule la matérialité des faits établis par une décision de la juridiction répressive s'impose au juge de l'impôt de l'ordre administratif ou de l'ordre judiciaire jugeant au civil (cf. BOI-CTX-DG-20-30-40 I-A).

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S'agissant des litiges fiscaux qui sont susceptibles de faire l'objet d'un contentieux administratif ou judiciaire, les règles gouvernant le domaine, les éléments constitutifs, la portée et les effets ainsi que les diverses incidences de la chose jugée et qui s'inscrivent dans le cadre du droit commun avec leur spécificité propre, sont examinées dans quatre sections traitant respectivement :

- du domaine de l'autorité de la chose jugée (section 1, BOI-CTX-DG-20-30-10) ;

- des éléments constitutifs de la chose jugée (section 2, BOI-CTX-DG-20-30-20) ;

- de la portée et des effets du principe de l'autorité de la chose jugée (section 3, BOI-CTX-DG-20-30-30 ) ;

- de l'incidence de l'autorité de la chose jugée (section 4, BOI-CTX-DG-20-30-40).