Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Identifiant juridique : BOI-CTX-ADM-10-40-20

CTX - Contentieux de l'assiette de l'impôt - Procédure devant le tribunal administratif - Mesure spéciale d'instruction - Opérations d'expertise

I. Procédure préliminaire aux opérations d'expertise

A. Droit des parties à l'exécution de l'expertise ordonnée

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Lorsque le jugement ordonnant l'expertise est intervenu, les parties en présence (contribuable et Administration) ont droit à l'exécution de cette mesure d'instruction.

Par suite, en cas de renonciation par le requérant à l'expertise, après qu'elle a été ordonnée, ce désistement doit, pour être valable, être accepté par l'Administration (CE, arrêts des 4 août 1899, n° 84703, RO, 4586, Leb. chron., p. 571, 2e esp. et 25 mai 1936, n° 52209, RO, 6466 ).

De son côté, le tribunal qui a ordonné l'expertise ne peut statuer au fond avant qu'elle ait été exécutée, sauf si des faits nouveaux rendent la mesure manifestement inutile et à condition d'en aviser les parties (CE, arrêt du 25 octobre 1968, n° 73905 et 74657).

Cependant, lorsque les agissements d'un contribuable tendent à retarder indéfiniment les opérations de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif, celui-ci peut légalement statuer sur le fond du litige sans qu'ait lieu cette mesure d'instruction dont il ne tenait qu'à l'intéressé qu'il y fût procédé en temps utile (CE, arrêt du 23 octobre 1961, n° 50022, RO, p. 430 ; CE, arrêt du 20 octobre 1976, req. N° 91672) à condition toutefois que l'expertise ait donné lieu à un procès-verbal de clôture constatant notamment la carence de l'expert du requérant et que ce dernier ait été averti de cette formalité (CE, arrêt du 9 juillet 1969, n° 70852 et 73690, RJ, 2e partie, p. 98, arrêt rendu alors que la législation en vigueur prévoyait que les opérations d'expertise étaient clôturées par un procès-verbal).

Enfin, les recours devant la cour administrative d'appel n'ayant pas d'effet suspensif, le jugement ordonnant l'expertise est exécutoire, bien qu'il ait été frappé d'appel.

B. Récusation d'experts

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Conformément aux dispositions de l'article R621-6 du CJA , tous les experts peuvent être récusés. Ainsi, le contribuable a le droit de demander la récusation de l'expert de l'Administration et de celui du tribunal administratif, l'Administration pouvant de son côté exercer le même droit à l'égard de ce dernier expert et de celui du contribuable.

Quant à celui ou ceux des experts qui s'estimeraient récusables, ils doivent immédiatement le déclarer au juge qui les a commis.

Les articles R621-6-1, R621-6-2, R621-6-3 et R621-6-4 du CJA prévoient une procédure de récusation calquée sur les articles R721-2 et suivants du CJA relatifs à la récusation des magistrats,

Lorsque l'Administration entend faire récuser l'expert du requérant ou celui du tribunal administratif, la demande est présentée par le directeur compétent pour suivre l'instance.

La demande de récusation doit être motivée. Elle peut invoquer soit l'un des motifs énumérés à l'article R*200-10 du LPF, qui interdit la désignation de certaines personnes comme expert (cf. BOI-CTX-ADM-10-40-10-IV), soit tout autre motif que le tribunal administratif apprécie. Peuvent notamment être invoquées les causes de récusation des juges (CJA, art. R621-6).

S'il s'agit d'une personne morale, la récusation peut viser tant la personne morale elle-même que la ou les personnes physiques qui assurent en son nom l'exécution de la mesure.

Peut être utilement récusé :

- l'expert de l'Administration au motif qu'il s'agit d'un répartiteur qui a concouru à l'établissement de l'imposition litigieuse et qui a, depuis, en la même qualité, exprimé son avis sur la réclamation ;

- l'expert désigné par un contribuable dans un litige concernant l'impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux et l'impôt sur le revenu dès lors que l'intéressé tient la comptabilité du requérant (CE, arrêt du 18 mai 1936, n° 48870, RO, 6457, Leb. chron., p. 556, 2e esp.).

En revanche, ne saurait valablement être récusé :

- l'expert de l'Administration dès lors qu'il n'est allégué aucun fait qui soit de nature à porter atteinte à l'honorabilité de cet expert (CE, arrêt du 20 mars 1931, n° 14649, RO, 5582, Leb. chron., p. 321, 2e esp.) ;

- l'expert désigné par un contribuable au motif que ce dernier l'aurait chargé de suivre sa réclamation alors qu'en réalité le contribuable a présenté lui-même sa demande et que l'expert choisi n'a pas été constitué mandataire au cours de l'instruction (CE, arrêt du 12 février 1932, RO, 5736) ;

- l'expert qui selon le contribuable ne présenterait pas de garanties suffisantes de compétence (CE, arrêt des 11 mars 1932, RO, 5787, 5 novembre 1934, RO, 6304, 20 mars 1961, n° 51129) ou serait un ancien fonctionnaire (CE, arrêt du 5 novembre 1934, RO, 6304).

La demande de récusation est adressée au greffe du tribunal administratif, où elle doit parvenir avant le début des opérations ou dès la révélation de la cause de la récusation (CJA, art. R621-6).

Ainsi un contribuable n'est pas recevable à prétendre pour la première fois devant le Conseil d'État que la participation d'un expert aux opérations de l'expertise entacherait de nullité cette mesure d'instruction (CE, arrêt du 1er décembre 1941,RO, p. 328), ou que la composition du collège des experts serait irrégulière, dès lors que ce moyen, ne pouvant s'analyser que comme une demande de récusation, n'a pas été invoqué devant le tribunal administratif dans le délai prévu par les textes (CE, arrêt du 22 mai 1974, n°88668).

En tout état de cause, si la partie assiste à ces opérations sans formuler ni protestation, ni réserve, elle est définitivement déchue du droit de récusation.

C'est pourquoi :

- un contribuable avisé des noms de l'expert de l'Administration et de celui du tribunal administratif, avant l'ouverture des opérations d'expertise, opérations auxquelles son mandataire a d'ailleurs assisté, n'est pas recevable à demander postérieurement à l'expertise, la récusation desdits experts (CE, arrêt du 22 décembre 1911, RO, 4594) ;

- le défaut de notification au requérant de la nomination de l'expert de l'Administration n'est pas un cas de nullité lorsque le contribuable, au cours de l'expertise à laquelle il a assisté, n'a pas protesté contre cette nomination (CE, arrêt du 18 juillet 1873, RO, 2490) ;

- une lettre adressée par un requérant au directeur pour le prévenir qu'il entend récuser un expert, ne constitue pas une demande de récusation valable, alors que l'intéressé n'a soumis au tribunal aucune demande à cet effet et qu'il a d'ailleurs pris part aux opérations de l'expertise sans formuler aucune observation (CE, arrêt du 23 juin 1911, n° 43022, RO, 4429, Leb. chron., p. 718).

Saisi d'une demande en récusation d'expert, le tribunal administratif doit statuer sur cette demande avant jugement sur le fond du litige.

Si la récusation est admise, il est pourvu au remplacement de l'expert.

En cas de rejet de la demande en récusation d'expert, la partie qui a présenté cette demande peut être condamnée à des dommages et intérêts, même envers l'expert, s'il le requiert ; mais, dans ce dernier cas, l'expert ne peut exécuter sa mission et il doit être pourvu à son remplacement.

Mais, si la demande de récusation a été rejetée par le tribunal administratif, l'expertise peut être effectuée, même si le jugement a été attaqué devant la juridiction d'appel.

C. Démission ou empêchement d'un expert et remplacement

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Lorsqu'un expert n'accepte pas la mission qui lui a été confiée ou donne sa démission, il doit être pourvu à son remplacement. Il en est de même lorsque, par suite d'un empêchement sérieux tel qu'une maladie dûment constatée, il ne peut accomplir sa mission, comme aussi dans le cas ou il ne remplit pas celle-ci bien que, l'ayant acceptée, il n'en soit pas empêché (CJA, art. R621-4). Il est alors procédé à la nomination du nouvel expert dans les conditions indiquées ci-dessus.

En effet, l'expertise effectuée en l'absence de l'expert du requérant n'aurait pas le caractère contradictoire et serait, par suite, irrégulière.

Il en est ainsi par exemple :

- lorsque l'expert du contribuable a prévenu en temps utile et justifié par un certificat du médecin qu'il ne pourrait assister aux opérations au jour primitivement fixé (CE, arrêt du 23 novembre 1908, n° 27838, RO, 4155, Leb. chron., p. 950, 1re esp.) ;

- lorsque cet expert a fait connaître, en temps utile, qu'il donnerait sa démission (CE, arrêt du 22 juillet 1910, n° 31707, RO, 4335, Leb. chron., p. 612, 1re esp.).

II. Opérations d'expertise

A. Fixation de la date de l'expertise et convocation des parties

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Les parties (ou leur mandataire) doivent être averties par le ou les experts des jours et heures auxquels il sera procédé à l'expertise ; cet avis leur est envoyé au moins quatre jours à l'avance, par lettre recommandée (CJA, art. R621-7).

Le délai fixé pour la convocation aux opérations de l'expertise est un délai franc, c'est-à-dire qu'il n'y a lieu de comprendre, dans la computation de ce délai, ni le jour qui sert de point de départ, ni celui de l'échéance

Devant les tribunaux administratifs de Mayotte, de la Polynésie française, de Mata-Utu et de Nouvelle Calédonie, le président du tribunal fixe, par ordonnance, les délais dans lesquels les parties doivent être averties ainsi que les moyens par lesquels cet avis est porté à leur connaissance (CJA, art. R 621-7, 3e a,).

En principe, les irrégularités constatées sur ce point ont pour effet de vicier les opérations d'expertise. Ainsi, est entachée de nullité l'expertise opérée sans la participation du requérant et de son expert, lorsque ceux-ci n'ont pas été convoqués dans les délais prescrits.

Par contre, ne constituent pas des irrégularités de nature à entraîner la nullité de l'expertise :

- la circonstance que la lettre de convocation adressée au requérant comporterait une erreur matérielle touchant l'année d'établissement de l'imposition contestée, une telle erreur n'ayant pu conduire l'intéressé à se méprendre sur l'objet de la mesure d'instruction ordonnée sur sa demande (CE, arrêt du 15 novembre 1955, RO, p. 432) ;

- la circonstance que la même lettre ne mentionnerait pas le lieu de l'expertise, cette mention n'étant imposée par aucun texte et son absence n'ayant pu avoir pour effet, au cas particulier, d'empêcher le requérant d'assister ou de se faire représenter à l'opération ;

- l'absence du représentant de l'Administration régulièrement convoqué aux opérations de l'expertise (CE, arrêt du 10 janvier 1968, n° 69050, RJ, 2e partie, p. 12) ;

- la circonstance que le représentant de l'Administration n'a pas été convoqué à deux réunions tenues par les experts à leur bureau après le début de leurs opérations, dès lors que l'Administration n'a pas protesté contre cette omission lors des réunions postérieures auxquelles elle a participé (CE, arrêt du 26 juin 1968, n° 66196) ;

- la circonstance que, lors d'un complément d'expertise, ni le contribuable, ni son expert n'ont été convoqués à une opération de vérification, dès l'instant que, faute de documents, il n'a pu être utilement procédé à cette opération et qu'ainsi l'irrégularité invoquée n'a pu exercer aucune influence sur le jugement rendu (CE, arrêt du 6 mars 1940, req. n° 36528, Bull., n° 8, 1940, p. 135, TJCA, n° 119030).

D'autre part, le requérant qui a été régulièrement convoqué à la première réunion des experts et qui n'a pas répondu à cette première convocation n'est pas fondé à se plaindre de n'avoir pas été avisé des réunions ultérieures (CE, arrêt du 4 novembre 1898, req. n° 85403, RO, 3792, Leb. chron., p. 673, 2e esp.).

En outre, l'irrégularité résultant de l'envoi tardif des convocations est couverte lorsque la partie convoquée tardivement et son expert assistent, sans protestations ni réserves, aux opérations de l'expertise (CE, arrêt du 23 juin 1911, req. n° 43022, RO, 4428, Leb. chron., p. 718 et 15 mai 1968, req. n° 72755, RJ, 2e partie, p. 146).

Si la réclamation a été soumise à la commission communale des impôts directs, le président de la juridiction peut prescrire à l'expert d'informer le maire du jour et de l'heure de l'expertise et d'inviter celui-ci à faire désigner par cette commission deux de ses membres pour y assister (LPF, art. R*200-11).

B. Personnes pouvant assister à l'expertise

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Toutes les personnes prévenues par l'expert de la date et de l'heure de l'expertise peuvent y assister.

L'Administration se fait représenter dans tous les cas à l'expertise par un agent (un inspecteur, un inspecteur départemental ou un inspecteur principal), qui doit obligatoirement accompagner les experts lorsqu'il est nécessaire, au cours des opérations, d'effectuer un déplacement sur les lieux (LPF, art. R*200-12).

Quant au requérant, il a la faculté de se faire assister d'un conseil pendant les opérations d'expertise. Il peut également se faire représenter par un mandataire (LPF, art. R*200-12).

La disposition par laquelle, dans un jugement ordonnant une expertise, le tribunal administratif n'autorise les experts à demander que par écrit des éclaircissements au vérificateur et au comptable n'ayant eu pour objet, en l'espèce, que d'éviter toute confrontation entre ces derniers, ne saurait être regardée comme comportant par elle-même l'interdiction, pour le requérant, de se faire représenter aux opérations par son comptable, ni par suite, comme entachée d'irrégularité (CE, arrêt du 29 juin 1966, n° 67034, RO, p. 199).

De leur côté, les experts peuvent s'adjoindre des auxiliaires non assermentés chargés de les assister dans leur travail (CE, arrêt du 29 janvier 1947, req. n° 73599, RO, p. 155, Leb. chron., p. 582) mais ils doivent dans tous les cas procéder personnellement aux opérations et ne peuvent déléguer leurs pouvoirs.

Enfin, le maire convoqué ainsi que les deux membres de la commission communale qu'il a désignés (cf. ci-dessus ) ont le droit de suivre les opérations ; mais leur présence n'étant pas obligatoire, l'expertise doit être entreprise même s'ils ne se présentent pas et poursuivie s'ils se retirent soit dès le début, soit au cours des opérations.

Jugé ainsi qu'une expertise est valable :

- bien que le maire et les répartiteurs ( membres de la commission communale des impôts directs) convoqués ne se soient pas présentés (CE, arrêt des 17 décembre 1862, RO, 1335 et 21 novembre 1930, n° 9375,RO, 5504, Leb. Chron., p. 962, 2e esp.) ;

- bien que le maire et les répartiteurs ( membres de la commission communale des impôts directs) se soient retirés dès le début (CE, arrêt du 21 décembre 1877, RO, 2993) ;

- bien que le délégué du maire se soit retiré avant la fin de l'opération et n'ait pas signé le procès-verbal (CE, arrêt du 18 juillet1873, n° 46132, RO, 2490,.Leb. chron., p. 645) ;

- bien qu'après la réunion à la mairie, l'un des répartiteurs ( membres de la commission communale des impôts directs) ait refusé de prendre part à la visite des lieux (CE, arrêt du 23 novembre 1877, n° 50642, RO, 2992, Leb. chron., p. 898).

Enfin, le maire et les répartiteurs (membres de la commission communale des impôts directs) qui assistent à l'expertise ne sont pas tenus de donner leur avis (CE, arrêt du 25 mars 1870, n° 43772, RO, 2239, Leb. chron., p. 351).

C. Incidents susceptibles de survenir au début de l'expertise

1. Demande en récusation d'expert

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Si, dès le début de la réunion, le requérant manifeste personnellement l'intention de demander la récusation d'un expert, en justifiant d'ailleurs qu'il n'a pas reçu notification de la désignation de cet expert, les opérations de l'expertise ne sont pas entreprises. Dans ce cas, l'expert consigne le fait dans son rapport.

Il y a lieu de remarquer à cet égard que les pourvois au Conseil d'État n'ayant pas d'effet suspensif, il peut être procédé à l'expertise même si le jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté une demande de récusation d'expert a été attaqué devant le Conseil d'État (CE, arrêt du 5 novembre 1934, RO, 6304) .

2. Absence du requérant ou d'un expert

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Lorsque le requérant ou un expert ne s'est pas rendu à la réunion, en excipant, pour motiver son abstention, soit d'une convocation réellement tardive, soit d'un cas de force majeure, soit enfin, pour l'expert, d'une démission, les opérations de l'expertise ne sont pas entreprises. Il appartient alors à l'expert du tribunal administratif de consigner le fait dans son rapport.

Par suite, est irrégulière l'expertise effectuée :

- sans la participation du requérant et de son expert, lorsque ceux-ci n'ont pas été convoqués au moins quatre jours à l'avance (CE, arrêt du 9 janvier 1874, n° 46614, RO, 2445, Leb. chron., p. 6) ;

- en l'absence de l'expert du requérant lorsque cet expert a prévenu en temps utile et justifié par un certificat du médecin qu'il ne pourrait assister aux opérations, au jour primitivement fixé (CE, arrêt du 23 novembre 1908, n° 27838, , RO, 4155, Leb. chron., p. 950, 1re esp.) ou lorsque cet expert a fait connaître, en temps utile, qu'il donnait sa démission (CE, arrêt du 22 juillet 1910, n° 31707, RO, 4335, Leb. chron., p. 612, 1re esp.).

- non par l'expert unique désigné par le tribunal administratif, mais par un employé dudit expert (CE, arrêt du 1er mai 1939, Bac, RO, p. 240).

Mais l'expertise est exécutée, nonobstant leur absence mentionnée dans le rapport d'expertise, si le requérant ou l'expert défaillant ont été régulièrement convoqués et s'ils se sont abstenus sans empêchement sérieux indépendant de leur volonté ou s'ils se sont volontairement retirés.

Ainsi, a été jugée régulière :

- l'expertise effectuée en l'absence du requérant et de son expert, dès lors que l'intéressé avait formellement accepté qu'il y soit procédé dans de telles conditions (CE, arrêt du 22 juillet 1948, n° 90387, RO p. 80, Leb. chron., p. 345) ;

- l'expertise effectuée en l'absence du requérant dont le défaut a été constaté par les experts dans le procès-verbal qui lui a été régulièrement notifié (CE, arrêt du 17 mai 1961, n° 41742, Leb. chron., p. 325).

De même, un requérant ne peut valablement attaquer :

- l'expertise par le motif qu'il se serait retiré avec son expert avant la fin de l'opération (CE, arrêt du 17 décembre 1862, n° 33960, RO, 1335, Leb. chron., p. 788) ;

- l'expertise faite en l'absence de son fondé de pouvoir, si ce dernier a assisté au commencement de l'opération et s'est ensuite retiré volontairement (CE, arrêt du 17 août 1864, n° 35249, Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée, RO, 1518, Leb. chron., p. 789, 3e esp.) ;

- l'expertise au cours de laquelle le requérant qui a été régulièrement convoqué à la première séance n'a pas été avisé des séances ultérieures, dès lors que son mandataire, après avoir assisté à l'ouverture des opérations, s'est retiré volontairement avant la fin de la première séance (CE, arrêt du 3 novembre 1933, n° 20260, RO, 6044) ;

- l'expertise faite en l'absence de son conseil dès lors qu'il a lui-même participé à la réunion des experts (CE, arrêt du 16 juillet 1976, n°99680).

3. Désistement

70

Lorsque le requérant ou son mandataire dûment qualifié déclare renoncer à l'expertise, cette déclaration est consignée dans le rapport d'expertise.

Dans ce cas, et si l'Administration accepte le désistement du requérant, l'exécution de l'expertise devient inutile. Si, au contraire, l'Administration n'accepte pas le désistement, l'expertise ne pourra être exécutée que lorsque le tribunal administratif aura sanctionné cette non-acceptation.

À noter que l'expert d'un contribuable n'a pas qualité, à défaut d'un mandat de ce dernier, pour accepter les propositions de l'Administration. Jugé en conséquence que l'inexécution d'une expertise à la suite d'une acceptation faite dans ces conditions et sans que le requérant ait déclaré renoncer à cette mesure d'instruction, constitue une irrégularité de procédure susceptible d'entraîner l'annulation du jugement du tribunal (CE, arrêt du 21 novembre 1896, n° 82673, RO, 3612, Leb. chron., p. 757, 3e esp.).

4. Autres incidents

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Un contribuable n'est pas fondé à se plaindre qu'il n'ait pas été procédé à l'expertise lorsque c'est par son fait que cette opération n'a pu avoir lieu (CE, arrêt du 30 mai 1873, RO, 2379) ou s'il s'est opposé à l'exécution de l'expertise ordonnée par le tribunal (CE, arrêt du 5 décembre 1873, n° 46783, RO, 2448, Leb. chron., p. 894).

D. Constatations des experts

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S'il y a plusieurs experts, ils procèdent ensemble aux opérations d'expertise (CJA, art. R621-8). Ils doivent s'attacher essentiellement à la vérification des faits. Mais il importe qu'ils restent dans les limites de la mission qui leur est confiée par le jugement ordonnant l'expertise.

Ainsi les experts qui ont reçu mission de vérifier la valeur probante des justifications comptables ou extra-comptables présentées par un contribuable, à l'effet de démontrer l'exagération de l'évaluation faite par l'Administration, peuvent, le cas échéant, mettre en évidence des erreurs de principe ou de fait viciant cette évaluation, mais il ne leur appartient pas de remettre en cause le caractère non probant de la comptabilité, ni de substituer purement et simplement leur évaluation à celle de l'Administration sans démontrer l'inexactitude de celle-ci (CE, arrêt du 23 janvier 1967, n° 65320, RJ, 2e partie, p. 20).

Les experts ne sont pas tenus d'étudier dans le détail toutes les pièces mises à leur disposition par le contribuable, dès lors qu'ils ont fait une étude suffisante de la comptabilité et notamment des livres de caisse et de banque, d'achats et de ventes et du livre centralisateur, dont la consultation était indispensable à l'accomplissement de leur mission (CE, arrêt du 4 octobre 1978, n° 01727).

1. Exécution des opérations d'expertise

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Les experts sont tenus, en principe, de se rendre sur les lieux, d'examiner les locaux, objets ou documents sur lesquels porte le litige et d'opérer toutes constatations utiles au vu des pièces comptables ou autres qui peuvent être produites ou représentées tant par le requérant que par l'Administration.

a. Déplacement des experts

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Jugé que la circonstance que l'expert unique désigné par le tribunal administratif et le représentant de l'Administration auraient été transportés dans un même véhicule n'est pas de nature à entacher d'irrégularité les opérations de l'expertise (CE, arrêt du 8 janvier 1958, RO, p. 6).

b. Lieu de l'expertise

120

Dans une espèce où le litige concernait une société dont le siège était à Monaco, le Conseil d'État a estimé qu'aucune disposition de la convention franco-monégasque du 23 décembre 1951 ne prévoyant la possibilité d'accomplir une mesure d'instruction judiciaire dans la Principauté, une société monégasque n'est pas recevable à prétendre qu'une expertise ordonnée par le tribunal administratif aurait dû se dérouler à Monaco (CE, arrêt du 13 novembre 1964, n°s 50944 et 60449, RO, p. 186).

Remarque : la convention du 19 mai 1963 actuellement en vigueur ne prévoit pas non plus cette possibilité,

c. Examen des lieux

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En ce qui concerne la visite sur place des experts, l'article R*200-12 du LPF précise que ce déplacement doit être effectué « lorsqu'il est nécessaire, au cours de l'expertise, de se rendre sur les lieux ».

Ainsi, est entachée de nullité l'expertise opérée sans que l'immeuble, objet de la réclamation, ait été visité (CE, arrêt du 29 juin 1877, n° 51475, RO, 2896, Leb. chron., p. 633).

En revanche, rien n'oblige les experts à procéder aux opérations d'expertise dans les locaux mêmes du requérant, dès lors qu'ils ont à leur disposition tous les documents nécessaires à l'accomplissement de leur mission et que la visite de ces locaux ne présente aucune utilité dans les circonstances de l'affaire (CE, arrêt du 5 décembre 1960, n° 47093, RO, p. 209).

d. Communication aux experts d'éléments d'information

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L'Administration ne doit pas se refuser à donner aux experts commis dans une instance fiscale communication de tous les éléments d'information de nature à permettre d'apprécier le bien-fondé de l'imposition litigieuse et notamment à désigner les entreprises ou personnes susceptibles d'être retenues comme termes de comparaison, s'il s'agit de la détermination de bénéfices.

Mais, pour respecter le secret professionnel auquel elle est tenue en vertu des articles L60, alinéa 2 du LPF et L103 du LPF, elle ne peut fournir que des moyennes de chiffres d'affaires, de revenus, de frais, dépenses, charges ou autres éléments se rapportant aux entreprises ou personnes qu'elle désigne nommément. Quant à la communication intégrale des documents ou pièces concernant lesdites entreprises ou personnes, elle ne doit, en vertu de l'article L201 du LPF, être donnée qu'au tribunal administratif, en chambre du conseil, lorsque celui-ci a demandé à l'audience à les recevoir pendant le délibéré pour son intime conviction.

e. Délais de production des documents impartis par les experts et conséquences des carences des parties

150

Les parties doivent remettre sans délai à l'expert tous documents que celui-ci estime nécessaires à l'accomplissement de sa mission (CJA, art. R621-7-1).

En cas de carence des parties, l'expert en informe le président de la juridiction qui, après avoir provoqué les observations écrites de la partie récalcitrante, peut ordonner la production des documents, s'il y a lieu sous astreinte, autoriser l'expert à passer outre, ou à déposer son rapport en l'état.

Le président peut en outre examiner les problèmes posés par cette carence lors de la séance prévue à l'article R621-8-1 du CJA.

La juridiction tire les conséquences du défaut de communication des documents à l'expert.

Lorsque les experts ont imparti un délai au requérant pour répondre à leurs demandes, ils ne peuvent, sans vicier les opérations d'expertise, négliger d'examiner les documents présentés par le contribuable après l'expiration dudit délai mais avant le dépôt au tribunal administratif de leur rapport (CE, arrêt du 11 février 1966, n° 57479, RO, p. 61).

f. Entraves aux constatations des experts

160

Dans une affaire où le contribuable soutenait que son expert avait été l'objet de mesures qui l'avaient gêné dans l'accomplissement de sa mission, le Conseil d'État a décidé que le moyen invoqué devait être rejeté dès lors que ce fait n'était pas établi et que le jugement avait été rendu sur le vu des trois rapports déposés par les experts (CE, arrêt du 3 avril 1940, n° 36378, Bull. n° 9, 1940, p. 166, TJCA, n° 119031, Leb. chron., p. 121, 1re esp.).

En revanche, l'expertise portant sur le classement de parcelles non bâties a été déclarée irrégulière, dès lors que les experts n'ont pu procéder efficacement aux constatations qui leur incombaient en raison des circonstances atmosphériques existant au moment des opérations (CE, arrêt du 13 juin 1938, RO, p. 324).

2. Caractère contradictoire des constatations

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Les experts doivent conserver à leurs constatations le caractère contradictoire qui s'attache à la procédure devant le tribunal administratif.

À défaut, l'expertise n'est pas régulière.

Dans la mesure où, au cours de l'expertise ordonnée par le tribunal administratif, l'administration a, pour appuyer sa thèse, fait valoir des termes de comparaison pris parmi d'autres entreprises dont elle a révélé l'identité aux experts mais non à l'entreprise requérante, l'expertise, qui n'a pas eu un caractère contradictoire, n'est pas régulière et le tribunal administratif ne peut valablement fonder son jugement sur les résultats de cette mesure d'instruction (CE, arrêt du 24 février 1971, n° 75754).

De même, n'a pas le caractère contradictoire et est, par suite, irrégulière, l'expertise au cours de laquelle les experts ont tenu compte d'une opération de vérification effectuée par un seul d'entre eux. Il s'ensuit que le jugement fondé sur le résultat d'une telle expertise doit être annulé (CE, arrêts des 3 juin 1932, n° 11680, Bull., n° 19, 1932, p. 315, TJCA, n° 119003, Leb. chron., p. 546, 3e esp. et 24 février 1933, n° 21609, Bull., n° 10, 1933, p. 157, TJCA, n° 119006, Leb. chron., p. 242, 1re esp.).

Par contre, ne constitue pas un cas de nullité de l'expertise pour méconnaissance de son caractère contradictoire le fait que l'un des experts a été chargé par ses confrères d'effectuer seul certaines constatations, dès lors que cette décision a été prise à l'unanimité et que le résultat des constatations a fait, par la suite, l'objet d'une discussion commune (CE, arrêt du 1er fevrier 1937, n° 48586, Bull., n° 9, 1937, p. 199, TJCA, n° 119012, Leb. chron., p. 1245)

E. La réunion d'expertise

180

Pendant le déroulement des opérations d'expertise, l'article R621-8-1 du CJA offre la possibilité au président de la juridiction d'organiser une ou plusieurs séances en vue de veiller au bon déroulement de ces opérations. A cette séance, peuvent notamment être examinées, à l'exclusion de tout point touchant au fond de l'expertise, les questions liées aux délais d'exécution, aux communications de pièces, au versement d'allocations provisionnelles ou, en matière de référés, à l'étendue de l'expertise.

Les parties et l'expert sont convoqués à la séance dans les conditions fixées à l'article R711-2 du CJA.

Il est dressé un relevé des conclusions auxquelles ont conduit les débats. Ce relevé est communiqué aux parties et à l'expert, et versé au dossier.

La décision d'organiser une telle séance, ou de refus de l'organiser, n'est pas susceptible de recours.

F. Rapport d'expertise

190

La production d'un rapport est obligatoire pour les experts. Il est dressé un seul rapport, même s'il y a plusieurs experts. Si ces derniers ne peuvent parvenir à la rédaction de conclusions communes, le rapport comporte l'avis motivé de chacun d'eux (CJA, art. R621-8).

Par ailleurs, lorsque les parties font des observations dans le cours des opérations d'expertise, celles-ci doivent être consignées dans le rapport (CJA, art. R621-7).

G. Transmission au greffe du rapport d'expertise

200

Le rapport d'expertise doit être, en principe, déposé au greffe, en deux exemplaires, dans le délai imparti par le président du tribunal administratif (CJA, art. R621-9). Des copies sont notifiées par l'expert aux parties intéressées.

Cependant, le dépôt tardif du rapport n'entache pas de nullité les opérations de l'expertise, dès lors que ce rapport a été soumis, avec les autres pièces de l'expertise, au tribunal administratif avant que ce dernier ait statué (CE, arrêt du 11 avril 1956, n° 32807, RO, p. 75, 2e esp.).

H. Compte rendu des opérations de l'expertise à la direction des finances publiques

210

Dès la clôture des opérations de l'expertise, l'agent qui a participé à cette mesure d'instruction adresse à la direction un compte rendu détaillé dans lequel il donne notamment son avis sur la suite que lui paraissent comporter les constatations du ou des experts.

Il est précisé toutefois qu'aucune disposition légale ne prescrit de donner communication au contribuable des avis exprimés par les agents de l'Administration sur les résultats de l'expertise.