REC - Mise en œuvre du recouvrement forcé - Avis à tiers détenteur - Champ d'application
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L'avis à tiers détenteur (ATD), comme toute mesure de saisie de créances, intéresse trois sujets de droit : le créancier, le débiteur et le tiers détenteur.
Les créances causes de la saisie sont définies par les dispositions du livre des procédures fiscales (LPF) qui délimitent le champ de l'ATD quant à la nature des droits auxquels la procédure est applicable, à savoir les impôts, les pénalités et les frais accessoires dont le recouvrement est garanti par le privilège du Trésor.
Les créances objet de la saisie sont déterminées largement par les textes et la jurisprudence, selon une formulation qui renvoie à la définition des tiers détenteurs : l'ATD peut être pratiqué à l'égard de tous ceux qui détiennent des fonds appartenant à un redevable ou qui sont débiteurs envers lui à quelque titre que ce soit.
L'ATD se caractérise donc par un vaste champ d'application. Toutefois, certaines circonstances de droit font obstacle à l'utilisation de l'ATD et son usage, dans ces cas, a été soit interdit, soit limité.
I. Impositions recouvrées par voie d'avis à tiers détenteur
La procédure de l'ATD prévue à l'article L. 262 du livre des procédures fiscales (LPF) s'applique à tous les impôts, pénalités et frais accessoires privilégiés recouvrés par les comptables des finances publiques.
A. Droits en principal
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La procédure de l'ATD s'applique pour le recouvrement :
- des impositions bénéficiant du privilège prévu à l'article 1920 du code général des impôts (CGI), contributions directes et taxes assimilées : impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, cotisation foncière des entreprises et cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, taxe d'habitation, taxes foncières ;
- des impositions bénéficiant du privilège prévu à l'article 1924 du CGI, taxes d'équipement et autres taxes d'urbanisme ;
- des impositions bénéficiant du privilège prévu à l'article 1926 du CGI, taxes sur le chiffre d'affaire (à l'exception de celles perçues à l'importation pour lesquelles l'article 379 du code des douanes s'applique) et taxes assimilées ainsi que les prélèvements communautaires ;
- des impositions bénéficiant du privilège prévu à l'article 1929 du CGI, droits d'enregistrement, taxe de publicité foncière, droits de timbre et droits et taxes assimilés.
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Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, l'exercice du privilège du Trésor s'étend au recouvrement des acomptes provisionnels (CGI, art. 1920).
B. Pénalités et les frais accessoires
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Les pénalités d'assiette et de recouvrement s'entendent de celles qui sanctionnent le non-respect des dispositions qui régissent l'assiette et le recouvrement de l'impôt.
Conformément au I de l'article 1754 du CGI, le recouvrement des pénalités calculées sur un impôt est régi par les dispositions applicables à cet impôt. En conséquence, elles peuvent être recouvrées par voie d'ATD.
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En revanche, le recouvrement des amendes pénales, fût-il garanti par le privilège du Trésor, n'entre pas dans les prévisions de l'article L. 262 du LPF et ne peut être poursuivi par la voie de l'ATD.
II. Sommes appréhendées par voie d'avis à tiers détenteur
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Le terme « créance » désigne l'obligation résultant d'un contrat en vertu duquel le créancier dispose d'un droit personnel sur le débiteur pour l'accomplissement d'une prestation. Ainsi, une somme déposée sur un compte bancaire résulte d'un contrat de mandat spécifique qui unit le déposant (créancier) à l'établissement teneur de compte (débiteur).
L'ATD ne peut appréhender que des deniers (des créances de sommes d'argent). En ce qui concerne la saisie des comptes titres, il convient de recourir à la procédure de saisie des valeurs mobilières et des droits d'associés (BOI-REC-FORCE-20-40).
Seules peuvent être saisies par voie d'ATD les créances saisissables. S'agissant des créances insaisissables, il convient de se rapporter aux développements contenus dans l'examen des règles générales relatives aux saisies de droit commun (BOI-REC-FORCE-20). Sauf exception tenant à la nature de la créance saisie, constituent des créances insaisissables toutes les sommes que la loi déclare insaisissables et incessibles.
Les créances peuvent être saisies par voie d'ATD qu'il s'agisse de créances existantes ou en germe, exigibles ou conditionnelles ou en germe, ou encore à exécution successive. Des développements relatifs aux créances saisissables figurent dans le titre 2 de la présente série, au sein du chapitre relatif à la saisie-attribution (BOI-REC-FORCE-20-10).
A. Créances existantes ou en germe
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La créance que détient le contribuable envers le tiers doit exister au moins en germe au moment de l'envoi de l'ATD (BOI-REC-FORCE-20-10-10).
Lorsque le contribuable est titulaire d'un compte de dépôt dans une banque, un ATD adressé à cette banque ne produit effet que sur les sommes inscrites au compte à la réception de l'avis ou pour lesquelles une opération est déjà engagée (ex : chèque déjà remis à l'encaissement mais non encore versé au compte). Les sommes inscrites au compte à raison d'opérations ultérieures n'ont pas à être versées par le tiers détenteur (BOI-REC-FORCE-20-10-20).
D'une manière générale, le tiers doit être débiteur du redevable à la date de réception de l'avis (CE, arrêt du 4 mai 1988, n° 28514).
B. Créances exigibles, conditionnelles et à terme
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Le premier alinéa de l'article L. 263 du LPF prévoit que l'ATD a pour effet d'affecter, dès réception, les sommes dont le versement est ainsi demandé au paiement des impositions privilégiées, quelle que soit la date à laquelle les créances mêmes conditionnelles ou à terme que le redevable possède à l'encontre du tiers détenteur deviennent effectivement exigibles.
Il résulte de ce texte que :
- l'ATD produit son effet sur les créances exigibles ;
- son effet s'étend aux créances conditionnelles ou à terme quelle que soit la date à laquelle elles sont exigibles. Il convient toutefois de préciser que l'ATD ne pourra être exécuté que lorsque la condition sera remplie ou le terme échu.
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En application de l'article L. 112-1 du code des procédures civiles d'exécution (CPCE), l'ATD peut aussi appréhender des créances répétitives ou à exécution successive (loyers, rémunérations résultant d'un même contrat) ; dans cette hypothèse, l'effet de l'ATD se prolonge jusqu'à ce que l'impôt visé par l'acte soit acquitté (l'article R. 211-15 du CPCE précise que le tiers saisi est tenu de se libérer entre les mains du créancier saisissant, au fur et à mesure des échéances).
La survenance d'une saisie ultérieure n'a pas d'incidence sur l'obligation du tiers saisi tant que la créance du premier saisissant n'a pas été totalement apurée. Il va de soi que la saisie cesse de produire ses effets dès que le tiers saisi n'est plus tenu envers le contribuable.
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La créance saisie peut donc être une créance conditionnelle (même sous condition suspensive), une créance à terme ou une créance non encore liquide. Les créances future, éventuelle ou hypothétique ne peuvent en revanche pas être saisies (BOI-REC-FORCE-20-10-10).
A été considérée comme une créance conditionnelle ou à terme susceptible de justifier l'utilisation de l'ATD une somme dont le tiers saisi conteste être débiteur, l’ATD n’ayant plein et entier effet que lorsque la créance aura été reconnue être à la charge du tiers saisi par une décision judiciaire définitive .
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En ce qui concerne la notion de créance éventuelle, il convient de considérer qu'il s'agit d'une créance qui n'est pas encore née à la date de notification de l'ATD, ce qui la rend incertaine, voire douteuse (BOI-REC-FORCE-20-10-10).
Par plusieurs arrêts, la Cour de cassation, tout en confirmant qu'un ATD ne pouvait appréhender une créance éventuelle, a donné une interprétation assez large de cette notion.
La cession d'un cabinet d'expert-comptable avec présentation de clientèle caractérise l'existence d'une créance pouvant être appréhendée par voie d'ATD (Cass. com., arrêt du 26 novembre 2003, n° 00-15877).
De même, la créance est également conditionnelle lorsqu'il existe une convention d'honoraires, aux termes de laquelle une partie du règlement est subordonnée à la réalisation effective de l'opération (Cass. com., arrêt du 30 mai 2007, n° 06-14994).
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En sens contraire, s'agissant d'un ATD émis en vue d'appréhender le prix de cession d'un office notarial, alors que cette cession, subordonnée à la condition d'obtention d'un agrément ministériel, n'était pas intervenue à la date de notification de l'ATD, la Cour de cassation a jugé que l'agrément ministériel constituait un élément légal de la convention intervenue et que la créance saisie n'était pas encore née à la date où les mesures d'exécution forcée avaient été pratiquées (Cass. civ. 2ème, arrêt du 11 mai 2000, n° 97-12362).
De plus, l'ATD ne peut porter sur des sommes versées par la Caisse primaire d'assurance maladie au titre du tiers payant pour des actes postérieurs à la notification de cet acte (Cass. com., arrêt du 17 décembre 2002, n° 99-14450).
La chambre commerciale de la Cour de cassation, après avoir confirmé qu'une créance éventuelle ne pouvait être saisie, n'a pas admis qu'un ATD puisse appréhender une créance (qualifiée d'éventuelle) issue d'une promesse unilatérale de cession de contrat de crédit-bail immobilier (Cass. com., arrêt du 13 mars 2001, n° 98-12700).
C. Créances à exécution successive
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Les effets d'un ATD portant sur des créances à exécution successive, telles que les rémunérations, les loyers et les créances engendrées par d'autres contrats à exécution successive, se prolongent jusqu'à ce que la créance cause de l'ATD soit apurée.
Cette thématique est développée dans le chapitre relatif à la saisie des rémunérations (BOI-REC-FORCE-20-20) et dans celui relatif à la saisie-attribution, pour les créances autres que les créances de rémunérations et créances assimilées (BOI-REC-FORCE-20-10-20).
III. Tiers détenteurs
La personne à qui l'ATD est notifié doit avoir la qualité de tiers et les fonds détenus doivent l'être du chef du redevable, c'est à dire lui appartenir ou devoir lui revenir.
A. Qualité de tiers
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L'article L. 262 du LPF permet d'utiliser l'ATD à l'égard de tous ceux qui détiennent des fonds appartenant à un redevable ou qui sont débiteurs de deniers envers lui, à quelque titre que ce soit (fermiers, locataires, employeurs, liquidateurs de sociétés, mandataires de justice, notaires, commissaires-priseurs, banques, centres de chèques postaux, comptables publics, clients, etc.).
Des développements relatifs aux tiers détenteurs figurent dans le titre 2 de la présente série, au sein des chapitres relatifs à la saisie-attribution (BOI-REC-FORCE-20-10) et à la saisie des rémunérations (BOI-REC-FORCE-20-20).
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Pour avoir la qualité de tiers, la personne qualifiée de « tiers saisi » ne doit pas être sous un lien de dépendance ou de subordination à l'égard du redevable. Par exemple, un caissier qui détient les deniers se trouvant dans la caisse de l'entreprise de son employeur n'est pas un tiers par rapport à ce dernier.
Les gérants, administrateurs, directeurs et liquidateurs de sociétés sont expressément considérés comme tiers par le second alinéa de l'article L. 262 du LPF. Ils peuvent donc recevoir des ATD pour le recouvrement des impositions dues par ces sociétés.
B. Origine des fonds détenus
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Il est nécessaire que les deniers détenus par un tiers proviennent bien du chef du redevable.
Ainsi, il a été jugé (DIJON, 9 novembre 1966) que l'ATD adressé à un notaire en vue d'appréhender le prix d'un terrain appartenant à un redevable de droits privilégiés est inopérant dès lors que le notaire ne détenait, à la date de cet avis, que des deniers versés par une personne qui, en définitive, n'a pas acheté le terrain et à laquelle ces deniers ont, du reste, été reversés ultérieurement.
Le fait que le notaire ait pris les deniers en compte sous la rubrique de l'opération immobilière à réaliser n'apporte pas la preuve certaine d'une créance ou d'un accord de volonté sur cette opération. Les deniers ne pouvaient donc être considérés comme « provenant du chef du redevable » ainsi que l'exige l'article L. 262 du LPF.
C. Cas particulier de l'avis à tiers détenteur entre les mains d'un comptable public
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L'article R. 143-1 du CPCE relatif aux saisies et cessions notifiées aux comptables publics prévoit que les dispositions du CPCE sont applicables aux saisies notifiées aux comptables publics. Certaines adaptations propres aux règles de la comptabilité publique sont cependant prévues (BOI-REC-FORCE-20-10-20).
Conformément à l'article R. 143-3 du CPCE, l'ATD doit être notifié au comptable public assignataire de la dépense.
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Par ailleurs, un ATD adressé à un comptable public ne produit ses effets que durant cinq ans et doit donc être éventuellement renouvelé lorsqu'il vise des marchés publics dont les échéances dépassent ce délai.
IV. Circonstances interdisant l'usage de l'avis à tiers détenteur
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Les comptables des finances publiques ne peuvent pas notifier d'ATD lorsque les poursuites sont suspendues. Tel peut être le cas en présence d'une procédure de sauvegarde, d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire ou bien encore d'une procédure de surendettement (BOI-REC-EVTS-10-10-20).
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L'ATD n'est pas utilisable non plus lorsque le contribuable bénéficie d'un sursis de paiement (BOI-REC-PREA-20-20) ou lorsque ses impositions font l'objet d'un plan de règlement échelonné qu'il respecte (BOI-REC-PREA-20-10).