ENR - Mutations à titre gratuit – Successions – Champ d'application des droits de mutation par décès – Présomptions légales de propriété - Biens appartenant pour l'usufruit au défunt et pour la nue-propriété à ses présomptifs héritiers
I. Principe
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Aux termes de l'article 751 du code général des impôts (CGI), est réputé, au point de vue fiscal, faire partie, jusqu'à preuve contraire, de la succession de l'usufruitier, toute valeur mobilière, tout bien meuble ou immeuble appartenant, pour l'usufruit, au défunt et, pour la nue-propriété à l'un de ses présomptifs héritiers ou descendants d'eux, même exclu par testament ou à ses donataires ou légataires institués, même par testament postérieur, ou à des personnes interposées, à moins qu'il y ait eu donation régulière et que cette donation, si elle n'est pas constatée dans un contrat de mariage, ait été consentie plus de trois mois avant le décès ou qu'il y ait eu démembrement de propriété effectué à titre gratuit, réalisé plus de trois mois avant le décès, constaté par acte authentique et pour lequel la valeur de la nue-propriété a été déterminée selon le barème prévu à l'article 669 du CGI.
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Ce texte a pour but d'empêcher que certaines personnes ne se privent ou ne se dépouillent de leur vivant de la nue-propriété de tout ou partie de leurs biens en faveur de leurs présomptifs héritiers ou de leurs légataires, afin d'éviter à ceux-ci le paiement de l'impôt de mutation par décès. En effet, l'extinction naturelle de l'usufruit par le décès de l'usufruitier ne donne ouverture à aucun droit (BOI-ENR-DMTG-10-10-10-20).
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Dans ce cadre, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, il n'y a pas lieu de distinguer selon que le démembrement de propriété provient d'une vente consentie par le défunt à son héritier avec réserve d'usufruit ou d'une acquisition conjointe de l'usufruit par le défunt et de la nue-propriété par l'héritier (Cass. Com., 12 décembre 1995, n° 94-11491).
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Les nus-propriétaires à qui s'applique la présomption de l'article 751 du CGI sont les suivants :
- les héritiers présomptifs du de cujus et leurs descendants, même renonçants ou exclus par testament ;
- les donataires ou légataires même institués par testament postérieur au démembrement de propriété, même renonçants ;
- les personnes réputées interposées entre le défunt et les héritiers, donataires ou légataires et désignées au deuxième alinéa de l'article 911 du code civil. Il s'agit dans tous les cas, de leurs père et mère, de leur époux et, pour les donataires et légataires, de leurs enfants et descendants.
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Pour que la présomption soit applicable, il suffit que la qualité d'héritier ait appartenu au nu-propriétaire à un moment quelconque ; il n'y a pas dès lors à rechercher si cette qualité lui appartenait au moment du démembrement de propriété ou au moment du décès.
Mais, en revanche, en cas de vente d'immeuble sous réserve d'usufruit consentie à une personne précédemment légataire dudit immeuble, la vente entraînant la caducité du legs, la présomption de l'article 751 du CGI n'est pas applicable, pourvu que l'acquéreur n'ait pas par ailleurs la qualité d'héritier présomptif ou de personne interposée au sens de ce texte.
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Enfin, les dispositions de l'article 751 du CGI ne s'opposent pas à ce qu'en vertu de l'article L 64 du LPF (procédure de répression des abus de droit l'administration établisse postérieurement au décès, au moyen des preuves autorisées en matière fiscale, qu'un acte entaché de simulation a été passé en vue d'éluder en totalité ou en partie le paiement des droits d'enregistrement (Cass. com., 5 février 1980 n° 78-11774).
Pour déclarer fondée l'opposition formée par les époux X à deux avis de mise en recouvrement individuels émis à leur encontre par l'administration des impôts pour paiement des droits d'enregistrement dus, selon elle, à la suite de la donation déguisée sous l'apparence d'un acte à titre onéreux à eux faite par veuve Y, mère de dame X, de la nue-propriété de trois appartements et de leurs dépendances, lesquels lors du décès de veuve Y étaient exonérés des droits de mutation s'agissant de leur première transmission à titre gratuit, le jugement annulé, par la Cour suprême, tout en déclarant établie ladite donation déguisée, avait énoncé que, si la présomption édictée à l'article 751 du CGI , selon laquelle est réputé faire partie de la succession tout bien immeuble appartenant pour l'usufruit au défunt et pour la nue-propriété à un de ses présomptifs héritiers, réservait la preuve contraire, celle-ci ne pouvait être rapportée qu'après le décès de veuve Y et seulement par les successibles.
II. Limites d'application de la présomption
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La nature de l'acte ou de l'événement qui a opéré le démembrement de propriété peut limiter l'application de la présomption. En outre, l'article 751 du CGI ne s'applique pas lorsque le défunt était titulaire d'un simple droit d'usage ou d'habitation.
A. Nature de l'acte ou de l'événement
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La présomption ne joue pas lorsque le démembrement de propriété résulte :
- soit d'une donation régulière de la nue-propriété consentie plus de trois mois avant le décès, qu'il s'agisse d'une donation ordinaire ou d'une donation-partage ;
Exemple : Un père de deux enfants a transmis à titre gratuit à chacun d'eux et par simple bordereau de transfert la nue-propriété d'actions d'une société. Donateur et donataires établissent deux actes contenant reconnaissance de la libéralité ainsi consentie.
L'enregistrement de ces actes confère aux donations ainsi reconnues le caractère de donations régulières au sens de l'article 751 du CGI et permettra d'écarter l'application de la présomption édictée par ce texte à la condition toutefois que cet enregistrement ait eu lieu plus de trois mois avant le décès de l'usufruitier.
- soit d'une donation constatée dans un contrat de mariage sans condition de délai ;
- soit d'une succession dévolue de son vivant au défunt et à ses présomptifs héritiers et dans laquelle le premier aurait recueilli l'usufruit viager et les seconds la nue-propriété ;
- soit de dispositions testamentaires selon lesquelles l'usufruit aurait été légué à une personne et la nue-propriété à ses présomptifs héritiers. Il en est ainsi notamment lorsque, dans le cas d'une conversion des droits du conjoint survivant en un usufruit portant sur la totalité de la succession, le démembrement de propriété résulte d'une donation à cause de mort ou d'un legs consenti par le conjoint prédécédé et à l'exécution duquel les héritiers réservataires ont consenti. La présomption de l'article 751 du CGI n'est pas applicable, lors du décès du conjoint survivant, aux biens appartenant à ce titre pour l'usufruit à ce dernier et pour la nue-propriété à ses héritiers.
B. Biens grevés d'un droit d'usage ou d'habitation
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L'article 751 du CGI ne s'applique pas, en principe, aux biens immobiliers grevés d'un droit d'usage et d'habitation au profit du défunt, à condition que les intéressés n'aient pas constitué, sous l'apparence d'un droit de cette nature, un véritable droit d'usufruit.
C'est ainsi que la présomption a été reconnue applicable à la succession d'une personne qui avait vendu une maison en se réservant la jouissance d'un logement sa vie durant et avait donné à bail ce logement ; le droit d'usage et d'habitation n'est pas, en effet, susceptible de location et la réserve de jouissance ne pouvait être qu'une réserve d'usufruit.
III. Effet de la présomption
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L'article 751 du CGI, crée une présomption de fictivité de l'acte qui a opéré le démembrement, mais elle ne produit d'effet qu'au décès de l'usufruitier. Jusqu'à ce moment, le nu-propriétaire possède sans restriction la nue-propriété des biens et il en dispose à son gré.
IV. Calcul de l'impôt
A. Principes
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Lorsque la présomption joue, le nu-propriétaire, tel qu'il est défini au I § 30, est personnellement redevable des droits sur la valeur totale de ces biens au tarif fixé selon son degré de parenté avec le défunt.
Toutefois, selon le troisième alinéa de l'article 751 du CGI, si la nue-propriété provient à l'héritier, au donataire, au légataire ou à la personne interposée, d'une vente ou d'une donation à lui consentie par le défunt, les droits de mutation acquittés par le nu-propriétaire et dont il est justifié, sont imputés sur l'impôt de transmission par décès exigible à raison de l'incorporation des biens dans la succession.
Au contraire, aucune imputation n'est admise lorsque le démembrement résulte notamment d'une acquisition conjointe ou, d'une manière générale, lorsque le nu-propriétaire a acquis sa nue-propriété d'une autre personne que le défunt.
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D'une part, lorsque l'imputation est possible, elle est limitée au droit de vente ou au droit
de donation perçu sur la valeur au jour de la mutation des biens en
nue-propriété qui se retrouvent en nature au décès de l'usufruitier. Dès lors, si entre-temps une partie des biens a été réalisée ou supprimée (vente partielle, démolition), ne sont imputables que les
droits perçus sur la valeur, au jour de la vente ou de la donation, des biens qui subsistent et les parties sont tenues de souscrire une déclaration estimative.
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D'autre part, l'imputation est également limitée à la fraction de l'impôt de mutation par décès qui est exigible par suite de l'application de la présomption. Si les droits de vente ou de donation perçus sur la nue-propriété lui sont supérieurs, l'imputation ne peut être effectuée que jusqu'à concurrence de cette fraction. Il convient, dans ces conditions, de procéder à une double liquidation des droits de mutation par décès, la première en réintégrant dans la part du nu-propriétaire les biens frappés de la présomption, la deuxième en ne les comprenant pas ; la différence entre les résultats obtenus donne la somme sur laquelle peuvent être imputés, à due concurrence, ces droits de vente ou de donation.
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Enfin, les parties doivent justifier du paiement des droits à imputer et de leur montant par la production de l'original ou d'une expédition de l'acte ou par l'indication de la date de la formalité de l'enregistrement si celle-ci a été effectuée au même bureau.
B. Cas pratiques
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Exemple 1 :
M. Pierre DURAND est décédé le 31 mai 2009 laissant pour héritiers sa sœur Pierrette et son frère Paul. L'un et l'autre n'étaient pas domiciliés avec le défunt pendant les cinq années ayant précédé son décès.
La déclaration de succession déposée le 30 novembre 2009 fait apparaître un actif net de 200 000 € composé exclusivement de liquidités.
Les droits d'un montant de 71 132 € ont été acquittés le même jour.
Lors du contrôle, il est apparu qu'en 1999 le défunt avait cédé, à défaut de preuve contraire, à son frère pour un prix de 100 000 €, une maison dont il avait conservé l'usufruit sa vie durant.
Les droits de mutation à titre onéreux versés à l'époque se sont élevés à 4 890 €.
En application de l'article 751 du CGI , la liquidation des droits de succession doit être rétablie, précision faite qu'à la date du décès de M. DURAND, le bien en cause avait une valeur en toute propriété de 150 000 € .
Actif successoral 200 000 € + 150 000 € = 350 000 €
- Part de Pierrette (sans changement) : 100 000 €
Droits à 35 % et 45 % après abattement : 35 566 €
- Part de Paul : 100 000 €
Réintégration article 751 : + 150 000 €
Part total de Paul après réintégration : 250 000 € (= 100 000 + 150 000)
Droits à 35 % et 45 % après abattement : 103 066 €
Droits après imputation des droits de vente : 98 176 € (= 103 066 – 4 890)
- Rappel mis à la charge de Paul : 62 610 € (= 98 176 € – 35 566 €)
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Exemple 2 :
Cas dans lequel le bien en cause a été vendu dans les mêmes conditions, à Jean, fils de Pierrette, lequel est donc un descendant d'un présomptif héritier.
Actif successoral : 350 000 €
- Part de Pierrette ou de Paul
(sans changement) : 100 000 €
Droits à 35 % et 45 % (chacun) : 35 566 €
- Bien présumé légué à Jean : 150 000 €
Droits à 55 % après abattement
(tarif entre oncle et neveu) : 78 200 €
Droits après imputation des droits de vente : 73 310 € (= 78 200 – 4 890)
Rappel : 73 310 €
Remarque : Dans l'hypothèse où Pierrette et Paul seraient légataires institués, Jean serait atteint par la présomption, non en qualité de descendant de légataire - lequel n'est pas expressément visé par la loi - mais en qualité de personne interposée.
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Exemple 3 :
Cas dans lequel le bien en cause a été vendu dans les mêmes conditions à Pierrette et à son mari, Jacques, lequel est une personne interposée.
Actif successoral : 350 000 €
- Part de Paul
(sans changement) : 100 000 €
Droits à 35 % et 45 % : 35 566 €
- Part de Pierrette : 100 000 €
½ du bien réintégré : + 75 000 €
= 175 000 € (100 000 + 75 000)
Droits à 35 % et 45 % (après abattement) : 69 316 €
imputation droit de vente : 2 445 €
Droits après l'imputation des droits de vente : 66 871 € (= 69 316 - 2 445)
Biens présumés légués à Jacques : 75 000 €
Droits à 60 % (tarif non parent)
(après abattement) : 44 062 €
imputation droit de vente : - 2 445 €
Droits après l'imputation des droits de vente : 41 617 € (= 44 062 - 2 445)
Rappel (66 871 € - 35 566 €) + 41 617 € = 72 922 €
Remarque : Il en serait de même si au lieu d'être héritiers, Pierrette et Paul étaient légataires institués.
V. Cas particuliers
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L'application des principes ci-avant exposés conduit aux solutions suivantes.
A. Prix de vente encore dû
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Lorsque le prix de la vente de la nue-propriété par le défunt usufruitier est encore dû au moment de son décès, la créance correspondante ne doit pas, lorsque la présomption a été reconnue applicable, figurer dans l'actif successoral, l'acte de démembrement étant réputé inexistant au point de vue fiscal.
B. Impenses effectuées par le nu-propriétaire
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En vertu de la présomption légale, l'usufruitier est réputé, au point de vue fiscal, ne s'être jamais dessaisi de l'immeuble ; les impenses effectuées sur ce bien par le nu-propriétaire doivent donc être considérées faites sur le terrain d'autrui et peuvent donner naissance, par application des règles du droit civil, à une dette. Si celle-ci est régulièrement justifiée, elle est susceptible d'être déduite de l'émolument du nu-propriétaire pour le calcul des droits de mutation par décès.
C. Acquisition conjointe d'usufruit réversible par des époux mariés sous un régime communautaire
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En cas d'acquisition conjointe d'usufruit réversible par des époux mariés sous un régime communautaire, la présomption n'est pas applicable au décès du prémourant, car le conjoint survivant doit être considéré comme tenant directement du vendeur la totalité de l'usufruit, sauf récompense à la communauté. En revanche, au décès du survivant, la présomption de l'article 751 du CGI sera applicable à la totalité des biens.
D. Cessions successives de la nue-propriété et de l'usufruit
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Lorsqu'une personne a vendu à ses présomptifs héritiers la nue-propriété de ses biens, puis plusieurs années après, leur cède l'usufruit de ces mêmes biens, la présomption n'est pas applicable au moment de son décès, à condition que la cession de l'usufruit soit effective et sincère.
E. Donation de l'usufruit
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Il en serait de même en cas de donation de l'usufruit au nu-propriétaire.
En revanche, la donation régulière de l'usufruit qui aurait été faite par le nu-propriétaire au défunt ne met, en principe, pas obstacle à l'application de la présomption de l'article 751 du CGI, sauf à examiner, pour chaque cas particulier, si la donation peut constituer la preuve contraire réservée par ce texte.
F. Réserve d'usufruit conjoint réversible
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En cas de vente par deux personnes de la nue-propriété de biens avec réserve à leur profit d'usufruit conjoint réversible sur la tête du survivant, les biens dont il s'agit sont réputés au point de vue fiscal faire partie pour moitié en toute propriété de la succession du premier mourant des vendeurs. Mais pour la liquidation des droits de mutation par décès, la valeur de l'usufruit qui fait l'objet de la réservation, doit être déduite afin de ne pas la taxer deux fois.
L'hypothèse envisagée se rencontre le plus souvent sous forme de la vente, par des époux, de biens communs avec réserve d'usufruit jusqu'au décès du survivant. Ainsi, lorsqu'un bien appartenant à deux époux est vendu par eux en nue-propriété, avec stipulation que l'usufruit conservé sera réversible sur la tête du survivant, ce bien est réputé appartenir au premier des vendeurs qui décède, à concurrence de moitié si le nu-propriétaire est un héritier présomptif de cet époux ou une personne interposée.
Au décès de l'époux survivant, usufruitier pour la totalité en vertu de la clause de réversion, la présomption trouvera également à s'appliquer si les conditions posées par l'article 751 du CGI sont réunies, mais à concurrence de la moitié seulement du bien, puisque l'autre moitié est réputée avoir déjà été recueillie par le nu-propriétaire dans la succession du prémourant.
Si les conditions d'application de la présomption ne sont pas réunies au décès du premier époux, mais à celui du second seulement, cette présomption porte sur la totalité du bien dès lors qu'à la suite de la réversion l'époux décédé en second est usufruitier de la totalité du bien.
G. Nue-propriété appartenant à un légataire universel et acquise d'une autre personne que le défunt
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Dans cette hypothèse, au décès de l'usufruitier, la présomption de l'article 751 du CGI, est, en principe, applicable et les droits perçus sur l'acte d'acquisition de la nue-propriété ne peuvent s'imputer sur les droits de mutation par décès puisqu'ils n'ont pas été acquittés sur une aliénation consentie par le défunt. Ils ne sont pas davantage restituables.
H. Acquisition de la nue-propriété par une société civile ou apport en nue-propriété
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L'acquisition de la nue-propriété de biens par une société civile dont l'héritier est associé et de l'usufruit par le défunt ou l'apport fait en nue-propriété à une société civile dont l'héritier est membre avec son auteur, qui s'est réservé l'usufruit des biens apportés, n'est pas susceptible de donner ouverture, au décès de l'apporteur, à la présomption de l'article 751 du CGI ; dans ce cas, la nue-propriété appartient à la société, et non à l'héritier.
Toutefois, l'administration a la possibilité de mettre en œuvre la procédure de répression de l'abus de droit fiscal prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (LPF) selon les circonstances particulières de l'affaire (RM Borotra, n°65962, JO AN 22/02/1993, p. 674).
VI. Preuve contraire
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La présomption de propriété établie par l'article 751 du CGI est une présomption simple qui peut efficacement être combattue par la démonstration de la sincérité de l'opération emportant démembrement de propriété et notamment de la sincérité des donations survenues moins de trois mois avant le décès.
Ce texte a, en définitive, pour objet de renverser la charge de la preuve. Il appartient, dès lors, aux parties d'établir, dans les formes compatibles avec la procédure écrite, la sincérité et la réalité de l'opération de démembrement de la propriété que la loi présume fictive.
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La question de savoir si la preuve contraire est rapportée est une question de fait qui ne peut être résolue qu'après examen de l'ensemble des circonstances particulières de chaque affaire.
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L'administration, approuvée par la jurisprudence, considère que ne constitue pas à lui seul une preuve contraire suffisante le fait que :
- l'acte de démembrement ait été passé devant notaire ;
- le démembrement de la propriété se soit opéré par adjudication, même moyennant un prix payé comptant ;
- le prix ait été converti en une rente viagère, même si les quittances ou reçus des arrérages sont produits ;
- le nu-propriétaire ait effectué des travaux d'aménagement ou autres ;
- un titre ait été immatriculé pour l'usufruit au nom du crédirentier en garantie d'une rente viagère ;
- les héritiers du nu-propriétaire décédé avant l'usufruitier aient payé les droits de mutation par décès sur la nue-propriété ; ces droits ne peuvent d'ailleurs être imputés sur ceux réclamés sur la succession de l'usufruitier, mais ils sont restituables dans le délai de la prescription. À cet égard, il a été toutefois décidé que si le nu-propriétaire est décédé peu avant l'usufruitier et si la déclaration de succession du premier n'est pas souscrite avant celle du second, les biens objet de la présomption doivent, lorsque les héritiers du nu-propriétaire sont aussi les successibles de l'usufruitier, être déclarés dans la succession de ce dernier sans figurer dans celle du nu-propriétaire.
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En revanche, il a été admis que constituait la preuve contraire le fait que :
- le prix de vente de la nue-propriété ait été compensé avec une créance antérieure de l'acquéreur, d'égal montant, résultant d'une soulte de partage ;
- le démembrement résulte d'un partage complet et sincère;
- le décès soit survenu de manière soudaine et surprenante alors que l'usufruitier était en bonne santé au jour de la donation.
Ainsi, la Cour de cassation a estimé que l'attestation établie par le médecin traitant de l'usufruitière d'où il résultait qu'elle était en bonne santé début octobre 2002, ainsi que deux autres rédigées par des personnes l'ayant rencontrée peu de temps avant son décès qui confirmaient cet état et témoignaient du caractère soudain et surprenant de celui-ci, et que la donation s'inscrivait dans la continuité d'une précédente donation consentie en 1998, en des termes identiques, en faveur des mêmes bénéficiaires, suffisaient à démontrer la sincérité de la donation litigieuse (Cass. com. 17 janvier 2012 n°10-27185).
300
La Cour confirme que la preuve contraire à la présomption légale prévue à
l'article 751
du CGI est à la charge du contribuable qui
revendique la sincérité du démembrement et que l'administration n'a pas à rechercher si l'opération constitue une libéralité déguisée
(Cass. com., 5 mai 1998 n° 96-20780).
Dans cette affaire, le de cujus avait cédé un immeuble à sa légataire universelle, mais s'en était réservé l'usufruit contre paiement d'une rente viagère. Le jugement attaqué avait accueilli la demande de la contribuable en considérant, à tort, que l'intention libérale, dont la charge de la preuve incombait, selon le tribunal, à l'administration, n'était pas établie. Il estimait ainsi que l'administration aurait dû démontrer que la vente avait un caractère fictif et que, constituant une donation déguisée, elle n'avait pas eu une fonction translative de propriété. Mais ce n'était pas l'objet de la rectification et l'administration n'avait pas cherché, en l'occurrence, à démontrer que la vente constituait une donation déguisée.
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Enfin, le deuxième alinéa de l’article 751 du CGI prévoit que la preuve contraire peut notamment résulter d’une donation de deniers constatée par un acte ayant date certaine, quel qu’en soit l’auteur, en vue de financer, plus de trois mois avant le décès, l’acquisition de tout ou partie de la nue-propriété d’un bien, sous réserve de justifier de l’origine des deniers dans l’acte en constatant l’emploi. Le nu-propriétaire peut donc écarter la présomption de fictivité du démembrement édictée par le premier alinéa de l’article 751 du CGI en établissant qu’il a bénéficié d’une donation régulière de somme d’argent et que cette donation lui a permis d’acquérir la nue-propriété du bien concerné. A cet égard, il est précisé que l’origine des deniers doit être justifiée dans l’acte d’acquisition du bien dont la propriété est démembrée.
Par ailleurs, la donation de deniers ainsi que l’acquisition du bien devra avoir été effectuée plus de trois mois avant le décès de l’usufruitier.
S’agissant de la forme de la donation, il est précisé que ce dispositif s’applique aux dons manuels régulièrement enregistrés.
Remarque: ce dispositif n’interdit pas à l’administration fiscale d’apprécier le caractère réel et sincère du démembrement de propriété.