Date de début de publication du BOI : 18/01/2023
Identifiant juridique : BOI-TVA-CHAMP-20-65

TVA - Champ d'application et territorialité - Territorialité - Lieu des importations

Les commentaires contenus dans le présent document font l'objet d'une consultation publique du 18 janvier 2023 au 15 avril 2023 inclus pour permettre aux personnes intéressées d'adresser leurs remarques éventuelles à l'administration. Ces remarques doivent être formulées par courriel adressé à l'adresse suivante : bureau.d1-dlf@dgfip.finances.gouv.fr. Seules les contributions signées seront examinées. Dès la présente publication, vous pouvez vous prévaloir de ces commentaires jusqu'à leur éventuelle révision à l'issue de la consultation.

Actualité liée : 18/01/2023 : TVA - Consultation publique - Nouvelles règles de déclaration et de paiement de la TVA à l'importation (loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, art. 181)

L'importation au sens de la TVA s'entend de l'introduction de biens « non Union » depuis des territoires tiers sur le territoire européen de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) (II § 90 à 190 du BOI-TVA-CHAMP-20-10). Elle est constituée par l'un des trois évènements suivants résultant de la réglementation douanière (II-A § 140 du BOI-TVA-CHAMP-10-30), notamment le code des douanes de l'Union (CDU) (règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l'Union) :

  • la mise en libre pratique du bien, qui peut être de droit commun ou réalisée dans le cadre du régime douanier particulier de la destination particulière ;
  • le placement sous le régime douanier particulier de l'admission temporaire en exonération partielle de droits de douane ;
  • une irrégularité au regard des règles douanières, aboutissant à ce que le bien soit introduit dans le circuit économique de l'Union européenne (UE) et qu'il puisse y être consommé.

Ces évènements interviennent soit dès l'introduction de ces biens sur le territoire européen de la TVA, à l'issue de leur présentation en douane, soit ultérieurement, lorsqu'ils sont placés sous des régimes douaniers particuliers qui reportent l'importation au moment de la sortie de ces régimes.

En outre, sont également des importations pour les besoins de la TVA les échanges avec les territoires fiscaux spéciaux au sens de la TVA européenne (II-B § 170 et suivants du BOI-TVA-CHAMP-10-30).

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Le 2 du I de l'article 291 du CGI précise à quelles conditions une importation est imposable en France.

Cette disposition, qui transpose les articles 60 et 61 de la directive TVA (directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative à la taxe sur la valeur ajoutée), doit être lue à la lumière de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) dont il résulte qu'en cas d'irrégularité, les règles de territorialité des droits de douanes et celles de la TVA diffèrent.

I. Cas général

A. Règle applicable

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En l'absence d'irrégularité, l'importation est, pour les besoins de la TVA, localisée en France lorsque le bien est situé en France au moment où se produit la mise en libre pratique, le placement en admission temporaire en exonération partielle de droits de douane ou l'une des formalités équivalentes mise en œuvre spécifiquement pour les échanges entre la métropole, le marché antillais (Guadeloupe et Martinique), la Guyane et les autres territoires fiscaux spéciaux français ou étrangers (pour la définition des territoires fiscaux spéciaux, il convient de se reporter au II-C-4 § 190 du BOI-TVA-CHAMP-20-10).

En France et à Monaco, ces formalités sont réalisées auprès de la direction générale des douanes et des droits indirects.

30

Le même principe est appliqué à l'intérieur du territoire national afin de déterminer si l'importation est territorialisée en France métropolitaine, au sein du marché antillais (Guadeloupe, Martinique), à La Réunion ou dans le reste du territoire national (où la TVA ne s'applique pas). Elle ne sera soumise à la TVA que dans les trois premiers cas.

Il est rappelé que les échanges entre ces territoires sont qualifiés d'importations (II-B § 170 et suivants du BOI-TVA-CHAMP-10-30). Dès lors, sauf en cas d'application des régimes de transit à l'issue de la présentation en douane (I-B § 40 à 60), un bien introduit dans l'un de ces territoires, puis acheminé dans un autre de ces territoires sera importé deux fois. Il convient alors de déterminer le régime de TVA de chacune de ces deux importations (dans certains cas, des exonérations sont susceptibles de s'appliquer, pour plus de précisions, il convient de se reporter au BOI-TVA-CHAMP-30-40).

B. Conséquences des régimes de transit

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L'objet du régime de transit externe est de transporter des biens « non Union » entre les États membres de l'UE et les États parties à la Convention relative à un régime de transit commun (CTC) - PDF (2,3 Mo), et dans certains cas à l'intérieur d'un même État membre de l'UE, sans qu'ils ne soient mis en libre pratique. Concrètement, cela permet de reporter l'importation soumise à la TVA. 

Dès lors, le lieu où l'importation est imposable à la TVA n'est pas nécessairement celui où les biens sont physiquement introduits, mais celui où ils sont mis en libre pratique, sous la réserve mentionnée au I-B § 60.

50

Lorsqu'un bien « non Union » est physiquement introduit en France métropolitaine (resp. la Guadeloupe, la Martinique ou La Réunion), l'importation n'y sera pas imposable si, à la suite de sa présentation en douane, il est acheminé, sous couvert du régime de « transit externe » (I-B § 190 du BOI-TVA-CHAMP-10-30), dans un autre territoire (territoire d'un autre État membre de l'UE ou une partie du territoire français autre que celle où il a été introduit).

Inversement, l'importation d'un bien « non Union » introduit dans le territoire d'un autre État membre de l'UE, puis acheminé, sous couvert de ce même régime, en France métropolitaine (resp. la Guadeloupe, la Martinique ou La Réunion) sera imposable en France métropolitaine (resp. la Guadeloupe, la Martinique ou La Réunion).

60

Lorsque la mise en libre pratique intervient dans un « territoire fiscal spécial », c'est-à-dire une partie du territoire douanier européen où la TVA n'est pas harmonisée (II-C-4 § 190 du BOI-TVA-CHAMP-20-10), l'acheminement ultérieur en France métropolitaine, qui se fera sous couvert du régime de transit interne de l'Union (II-B-1 § 190 du BOI-TVA-CHAMP-10-30) ou, à l'intérieur du territoire national, d'une déclaration de type CO, constituera une importation imposable en France métropolitaine bien qu'aucun droit de douanes ne soit perçu à cette occasion.

Remarque : La déclaration de type CO est une déclaration en douane ad hoc qui, dans la pratique, est préférée au transit interne pour les échanges entre la métropole et les territoires fiscaux nationaux, ou entre ces territoires.

Il en sera de même s'agissant de l'introduction en Guadeloupe, en Martinique ou à La Réunion de biens préalablement mis en libre pratique dans un autre territoire, puis directement acheminés sous couvert de ce régime ou de cette déclaration de type CO.

II. Cas des irrégularités

70

L'article 87 du CDU définit le lieu où prend naissance la dette douanière. Le principe est qu'il s'agit du lieu de la déclaration en douane ou, à défaut, du lieu où se produisent les faits qui sont à l'origine de la dette, notamment l'inobservation d'une règle. Des règles subsidiaires sont prévues lorsqu'il n'est pas possible d'appliquer ce principe ou pour les faibles montants.

Ainsi, même en l'absence formelle de mise en libre pratique ou de placement sous le régime de l'admission temporaire en exonération partielle de droits de douanes, une importation soumise à la TVA est susceptible d'être constituée du seul fait de l'inobservation de la réglementation douanière relative, notamment, à la perception des droits de douane.

Une importation sera présumée être imposable à la TVA dans l'État membre de l'UE dans lequel la dette douanière est née du fait de l'inobservation de règles douanières.

80

Toutefois, pour qu'elle donne lieu à une importation imposable à la TVA, il est nécessaire que cette inobservation conduise à une introduction du bien dans le circuit économique de l'Union, ou que l'irrégularité permette de le présumer, et que le bien puisse y faire l'objet d'une consommation (II-A § 160 du BOI-TVA-CHAMP-10-30). La jurisprudence de la CJUE tire les conséquences de ce principe pour déterminer la territorialité de la TVA à l'importation.

Remarque : En cas d'admission temporaire en exonération partielle de droits de douane constitutive d'une importation au sens de l'article 291 du CGI, le fait que le bien soit in fine re-exporté n'empêche pas l'exigibilité d'un supplément de TVA en cas de minoration de la base de la TVA à l'importation.

Ainsi, la présomption de lieu d'imposition à la TVA mentionnée au II § 70 peut être renversée s'il est établi que, en dépit des manquements à la réglementation douanière dans un État membre, le bien a été introduit dans le circuit économique de l'Union sur le territoire d'un autre État membre de l'UE, dans lequel il est destiné à la consommation.

Des biens sont introduits en Allemagne, où ils sont uniquement transbordés dans un avion à l'autre, puis acheminés en Grèce, où ils sont consommés. Deux infractions sont constatées : certains biens n'ont pas été déclarés aux autorités allemandes et d'autres ont été soustraits à la surveillance allemande après avoir été déclarés pour les deux types d'irrégularités, la dette douanière est née en Allemagne (pays d'introduction du bien).. L'acheminement final de la totalité des biens en Grèce est établi. Les importations de tous les biens sont imposables à la TVA en Grèce et non en Allemagne (CJUE, arrêt du 10 juillet 2019, aff. C-26/18, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassun, ECLI:EU:C:2019:579).

Une personne résidant en Allemagne introduit dans cet État un véhicule particulier depuis la Turquie, en passant par la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie et l'Autriche. L'irrégularité au regard des règles douanières, générant la dette douanière, se produit en Bulgarie, pays par lequel le véhicule a été matériellement introduit dans l'UE. Cependant, l'importation au sens de la TVA a lieu en Allemagne, où le bien a été introduit dans le circuit économique de l'Union et sera consommé. Ce véhicule doit donc être imposé à la TVA en Allemagne, et non en Bulgarie ou en Hongrie (CJUE, arrêt du 3 mars 2021, aff. C-7/20, Hauptzollamt Münster, ECLI:EU:C:2021:161).

90

Les principes exposés au II § 70 à 90 sont également valables dans les échanges internes au territoire national, afin de déterminer si une importation est localisée en France métropolitaine ou dans l'un des territoires fiscaux spéciaux (Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte, Saint-Martin) et d'en déduire le régime de TVA correspondant (application ou non de la TVA et détermination du taux).