Date de début de publication du BOI : 18/01/2023
Identifiant juridique : BOI-TVA-CHAMP-10-30

TVA - Champ d'application et territorialité - Opérations imposables - Importations

Les commentaires contenus dans le présent document font l'objet d'une consultation publique du 18 janvier 2023 au 15 avril 2023 inclus pour permettre aux personnes intéressées d'adresser leurs remarques éventuelles à l'administration. Ces remarques doivent être formulées par courriel adressé à l'adresse suivante : bureau.d1-dlf@dgfip.finances.gouv.fr. Seules les contributions signées seront examinées. Dès la présente publication, vous pouvez vous prévaloir de ces commentaires jusqu'à leur éventuelle révision à l'issue de la consultation.

Actualité liée : 18/01/2023 : TVA - Consultation publique - Nouvelles règles de déclaration et de paiement de la TVA à l'importation (loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, art. 181)

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Aux termes du I de l'article 291 du CGI, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) les importations de biens, c'est-à-dire les introductions de biens sur le territoire douanier européen en provenance de territoires tiers à l'Union européenne (UE) (pour la définition de ces territoires, il convient de se reporter au BOI-TVA-CHAMP-20-10). Les importations sont matérialisées, sauf exception, par la sortie de certaines situations d'attente d'assignation d'un régime douanier ou de certains régimes particuliers douaniers.

L’importation est une opération imposable à la TVA indépendamment du contexte dans lequel elle intervient. La TVA est due à l’importation, quelles que soient les raisons pour lesquelles le bien est importé (pour les besoins d'une activité économique ou non), quelle que soit la qualité du destinataire du bien importé ou de la personne qui réalise les formalités (assujetti ou non à la TVA, personne morale ou physique) et même en l'absence de toute transaction.

Remarque : Ces critères peuvent en revanche motiver l'application d'exonérations à l'importation (BOI-TVA-CHAMP-30-40) ou l'exercice du droit à déduction (BOI-TVA-DED-40-10-30).

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L'importation au sens de la TVA est définie par le 2 du I de l'article 291 du CGI, qui transpose l'article 30 de la directive TVA (directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée). Cette notion s'appuie essentiellement sur des concepts définis par le code des douanes de l'Union (CDU) (règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l'Union), entré en vigueur au 1er mai 2016. Elle est proche de la notion d'importation utilisée au sens douanier, mais peut s'en distinguer dans certaines situations.

Remarque : Les dispositions législatives européennes et nationales n'ont pas été mises à jour à la suite de la création du code des douanes de l'Union (CDU). Dès lors, le vocabulaire et les renvois qu'elles comportent sont partiellement obsolètes. Les présents commentaires sont rédigés en mettant à jour ces derniers.

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Les règles de la TVA applicables à l’opération d’importation, notamment l’intervention du fait générateur de la taxe et de son exigibilité, dépendent du choix du placement d’une marchandise sous le régime de la mise en libre pratique ou sous l’un des régimes particuliers (I-B § 90 et suivants). Pour plus de précisions, il convient de se reporter au VII § 240 et suivants du BOI-TVA-BASE-20-40.

Le partage de compétences entre les services de la direction générale des finances publiques et ceux de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) dans le recouvrement de la TVA à l’importation tel que résultant de l’article 1695 du CGI est détaillé au II-K § 290 à 335 du BOI-TVA-DECLA-20-20-10-20.

I. Rappel des principes douaniers régissant les marchandises sur le territoire douanier européen

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Les éléments exposés au I § 30 à 110 constituent une description simplifiée des principaux concepts douaniers utiles pour les besoins de la TVA (statuts, régimes et situations douaniers). Ils n'ont pas vocation à se substituer aux éléments élaborés par la DGDDI.

Pour plus de précisions sur l’ensemble de ces concepts, il convient de se reporter aux différentes fiches et commentaires disponibles sur le portail de la DGDDI.

La réglementation applicable résulte du CDU et de ses règlements d'application :

Peuvent s'y ajouter des règles propres à chaque État membre de l'UE ou à certaines situations particulières.

A. Statut des marchandises

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Le CDU distingue les marchandises selon leur statut douanier (CDU, art. 5, points 23 et 24), « Union » ou « non Union ».

50

Les marchandises « Union » désignent :

  • les marchandises entièrement obtenues dans le territoire douanier de l'Union, sans apport de marchandises importées de pays ou territoires situés hors du territoire douanier de l'Union ;
  • les marchandises importées de pays ou territoires situés hors du territoire douanier de l'Union et qui perdent ce statut à la suite d'une procédure administrative dénommée « placement sous le régime douanier de la mise en libre pratique » (I-A § 60) ;
  • les marchandises obtenues ou produites dans le territoire douanier de l'Union, soit à partir de marchandises mentionnées au deuxième tiret exclusivement, soit à partir de marchandises mentionnées aux premier et deuxième tirets.

Les marchandises « non Union » désignent les marchandises qui ne remplissent pas ces conditions ou qui ont perdu leur statut douanier de marchandises de l'Union au cours d'une procédure particulière (I-A § 60).

60

Une marchandise « non Union » acquiert le statut « Union » à la suite d'une procédure douanière dénommée « mise en libre pratique », qui correspond à la principale procédure au cours de laquelle sont perçus les droits de douane.

Sont concernées par cette procédure les marchandises « non Union » introduites sur le territoire douanier de l'UE. Plus généralement, est également concernée toute marchandise n'ayant pas le statut « Union » et ayant vocation à être versée sur le marché intérieur, même lorsqu'elle est obtenue sur le territoire douanier européen (marchandise obtenue à partir de marchandises « non Union » ou marchandise ayant perdu le statut « Union »).

Une marchandise « Union » perd le statut « Union » dans différentes situations listées à l'article 154 du CDU. Tel est en particulier le cas lorsque les marchandises quittent le territoire douanier de l'UE, lorsque la procédure de mise en libre pratique est invalidée après l'octroi de la mainlevée ou lorsque les marchandises sont placées sous certains régimes douaniers spécifiques (en effet, le CDU permet, dans certaines situations, le placement de marchandises ayant le statut « Union » sous le régime du transit externe (CDU, art. 226-2), du stockage (CDU, art. 237-2) ou encore du perfectionnement actif (CDU, art. 256-2, al. 2)).

70

Il est rappelé que la territorialité de la TVA pour les livraisons et acquisitions intracommunautaires de biens, ainsi que pour les prestations de services, est déterminée uniquement en fonction du positionnement des biens ou du lieu d'établissement des assujettis sur le territoire d'application de la TVA (BOI-TVA-CHAMP-20).

En particulier, le statut « non Union » de marchandises ou l'application d'un régime douanier ne fait pas obstacle à l'application des règles de la TVA afférentes aux opérations susmentionnées et portant sur ces biens, lorsque le lieu d'imposition se situe en France (dans la majorité des cas, des règles spécifiques de suspension de l'exigibilité de la TVA peuvent toutefois s'appliquer. Pour plus de précisions, il convient de se reporter au BOI-TVA-CHAMP-40-10). Inversement, le statut de marchandises « Union » n'induit pas l'application de la TVA sur de telles opérations lorsque celles-ci ne sont pas situées en France.

B. Régimes douaniers et situations préalables

80

Les marchandises sont susceptibles de relever des régimes douaniers suivants (CDU, art. 5, point 16) :

  • la mise en libre pratique, qui confère le statut « Union » à des biens « non Union », en contrepartie du paiement des droits de douane lorsque les marchandises en cause y sont soumises ;
  • le régime de l'exportation, qui concerne les marchandises « Union » destinées à quitter le territoire douanier de l'UE avant qu'elles n'en soient effectivement sorties et ne perdent ce statut ;
  • les régimes particuliers qui permettent, sous certaines conditions, la non-application à des marchandises de certains droits, taxes et mesures de contrôle du commerce extérieur et de politique commerciale, fiscale et douanière, à l'intérieur du territoire de l'Union. Sont concernés des biens « Union » qui circulent à l'intérieur du territoire douanier de l'UE ainsi que des biens « non Union » qui sont stockés, utilisés, ou transformés sur le territoire douanier de l'UE avant d'être réexportés hors de l’UE ou versés sur le marché européen.

90

L'article 210 du CDU regroupe les régimes particuliers en quatre fonctions :

  • le transit, comprenant (i) le transit externe pour le transport de marchandises « non Union », sans mise en libre pratique, à l'intérieur du territoire douanier de l'UE ou de la Convention relative à un régime de Transit Commun (CTC) et (ii) le transit interne pour le transport de marchandises « Union », sans perte de ce statut, entre deux points du territoire douanier de l'UE via un État partie à la CTC ;
  • le stockage des marchandises « non Union » sur le territoire douanier de l'UE, comprenant (i) le régime de l'entrepôt douanier et (ii) celui de la zone franche ;
  • l’utilisation spécifique sur le territoire douanier de l'UE, comprenant (i) l’admission temporaire, pour les marchandises « non Union » qui ne sont pas mises en libre pratique et sont destinées à être réexportées (elles peuvent être soumises aux droits de douane avec une exonération totale ou partielle), et (ii) la destination particulière, pour les marchandises « non Union » qui sont mises en libre pratique avec exonération totale ou partielle des droits de douane en raison de leur utilisation spécifique ;
  • la transformation, comprenant (i) le perfectionnement actif pour les marchandises « non Union » transformées sur le territoire douanier de l'UE sans être mises en libre pratique et (ii) le perfectionnement passif, pour les marchandises « Union » exportées temporairement en dehors du territoire douanier de l'UE pour y être transformées, puis réintroduites sur ce territoire.

Remarque : Avant le 1er mai 2016 (entrée en vigueur du CDU), les régimes douaniers particuliers existaient parfois sous d'autres appellations encore utilisées par le CGI, notamment l'article 291 du CGI.

100

Lorsque des marchandises « non Union » sont introduites sur le territoire douanier de l'UE, elles sont placées dans des situations d'attente (acheminement dans un lieu de dépôt temporaire, puis phase de dépôt temporaire sous surveillance douanière) avant qu'un régime douanier ne leur soit assigné ou qu'elles ne soient réexportées. Ces situations comprennent :

  • la période couverte par la déclaration sommaire d'entrée, comprise entre la notification d’arrivée du moyen de transport à l’entrée sur le territoire douanier de l'Union et la notification de présentation en douane dans un lieu désigné ou agréé par les bureaux de douane de présentation. Le CDU prévoit que l'acheminement au lieu de présentation est réalisé « sans délai » ;
  • la période pendant laquelle le bien est placé en dépôt temporaire sous couvert d'une déclaration temporaire, comprise entre la notification de présentation en douane et l'assignation à un régime douanier ou la réexportation. Le CDU limite la durée du dépôt temporaire à quatre-vingt-dix jours, sauf exceptions.

Concrètement, à l'issue de ces situations d'attente, selon les choix de l'opérateur économique, les marchandises sont soit mises en libre pratique (c'est-à-dire versées sur le marché de l'Union dans les conditions de droit commun), soit placées sous un régime particulier, soit réexportées.

110

Tout placement sous un régime douanier implique le dépôt d'une déclaration en douane (CDU, art. 158). Chaque régime obéit à des règles de fonctionnement spécifiques concernant les biens qui peuvent y être placés et les opérations qui peuvent y être réalisées. Ces dernières sont précisées par le CDU, le règlement délégué qui le complète et son règlement d'exécution (I § 30).

Tant qu'un régime douanier ne leur a pas été assigné ou tant qu'elles sont placées sous un régime particulier, les marchandises sont soumises à surveillance douanière, se traduisant par des obligations particulières.

À la sortie d'un régime douanier particulier, un bien « non Union » peut être mis en libre pratique, réexporté ou assigné à un nouveau régime douanier particulier. Dans certains cas, ce régime peut être apuré par la destruction des marchandises ou leur abandon au profit de l'État.

120

Pour les besoins de la TVA, un bien n'est pas considéré comme importé tant qu'il reste en situation d'attente d'assignation d'un régime douanier. Il en est de même lorsqu'en sortie de la situation d'attente, le bien est placé sous certains régimes douaniers particuliers (I-B § 90).

En revanche, même si un bien n'est pas considéré comme importé pour les besoins de la TVA, les opérations économiques portant sur ce bien et territorialisées en France (livraisons de biens, acquisitions intracommunautaires de biens, prestations de services) sont soumises à la TVA. Toutefois, l'exigibilité de la TVA sur ces opérations est suspendue et des règles particulières s'appliquent (BOI-TVA-CHAMP-40-10).

II. Définition des importations soumises à la TVA

A. Cas général (hors territoires fiscaux spéciaux)

130

L'importation soumise à la TVA en application de l'article 291 du CGI fait l'objet d'une définition propre à cet impôt qui s'appuie sur différentes notions du CDU, mais également sur des éléments spécifiques.

Bien qu'elle corresponde généralement à la mise en libre pratique, elle s'en distingue dans plusieurs situations.

Cette définition est également différente de celle utilisée pour d'autres impôts, par exemple en matière d'accises, ou de celles utilisées pour des besoins autres que fiscaux.

140

En application des articles 30 et 71 de la directive TVA, éclairés par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) (voir notamment CJUE, 8 novembre 2012, aff. C-165/11, Profitube, point 46), l'importation soumise à la TVA d'un bien est constituée lorsque les trois conditions suivantes sont cumulativement remplies :

  • le bien est introduit sur le territoire européen de la TVA depuis un territoire tiers (pour les définitions des territoires européens de la TVA et des territoires tiers, il convient de se reporter au II § 90 à 190 du BOI-TVA-CHAMP-20-10) ;

Remarque : Ne sont donc pas considérés comme importés les biens « Union » qui perdent ce statut, puis le réacquièrent, mais sans jamais avoir quitté le territoire européen de la TVA. Tel est le cas des biens « Union » qui, dans certaines circonstances, peuvent être placés sous le régime du transit externe, de l'entrepôt, de la zone franche ou encore du perfectionnement actif (CDU, art. 154, b). En revanche, si des opérations soumises à la TVA ont été réalisées en France sur ce bien « non Union », cette TVA sera suspendue et deviendra exigible à la sortie du régime (BOI-TVA-CHAMP-40-10).

  • avant son introduction sur le territoire européen de la TVA, le bien n'est pas en libre pratique, c'est-à-dire qu'il a le statut douanier « non Union » (I-A § 40 à 70) ;

Remarque : Ne sont donc pas considérés comme importés les biens « Union » qui quittent temporairement le territoire douanier de l'UE sans perdre ce statut (transit interne, sous les réserves propres au transit interne de l'Union pour les échanges avec les territoires fiscaux spéciaux mentionnées au II-B-1 § 170). En revanche, sont considérés comme importés les biens qui perdent le statut de marchandises « Union » lorsqu'ils sont transformés dans un territoire tiers à l'UE dans le cadre du régime particulier du perfectionnement passif (I-B § 90).

  • sur le territoire européen de la TVA, le bien n'est ni dans une situation d'attente d'assignation d'un régime douanier (I-B § 100), ni placé sous l'un des régimes douaniers particuliers (I-B § 90) suivants : transit externe, stockage (entrepôt ou zone franche), perfectionnement actif, admission temporaire en exonération totale des droits de douane. Ces situations et régimes sont qualifiés ci-après de « situations ou régimes douaniers de report des importations ». Ils couvrent l'ensemble des situations et régimes préservant le statut « non Union » des marchandises, à l'exception de l'admission temporaire en exonération partielle des droits de douane. Inversement, les régimes douaniers conduisant à l'acquisition du statut « Union » (mise en libre pratique de droit commun ou le régime de la destination particulière) impliquent une importation ; il en est de même du régime de l'admission temporaire en exonération partielle des droits de douane, bien que le statut « non Union » soit préservé.

Remarque : En cas d'admission temporaire en exonération partielle des droits de douane, les biens sont importés sous couvert d'une déclaration douanière comportant la mention « AT en exonération partielle, TVA due ».

150

Il en résulte qu'une importation, au sens de la TVA, se produit lorsqu'un bien « non Union » est introduit sur le territoire d'application de la TVA et que l'un des trois évènements suivants se produit :

  • le bien est mis en libre pratique (acquisition du statut « Union »), soit directement à l'issue de la situation d'attente d'assignation d'un régime douanier, soit après avoir séjourné sous un ou plusieurs régimes particuliers de report des importations. Il peut s'agir d'une mise en libre pratique dans les conditions de droit commun (sans conditions) ou d'une mise en libre pratique dans le cadre du régime particulier de la destination particulière (en exonération partielle ou totale des droits de douane) ;

Remarque 1 : La circonstance que le bien en cause soit ou non soumis à des droit de douane est sans incidence pour la TVA.

Remarque 2 : Cette situation couvre notamment le cas d'un bien « Union » transformé en dehors du territoire douanier de l'UE dans le cadre du régime du perfectionnement passif, puis réintroduit sur le territoire douanier de l'UE en tant que bien « non Union » (III § 420 et 430 du BOI-TVA-BASE-10-20-60-20).

  • le bien est versé sur le marché européen avec maintien de son statut « non Union » dans le cadre d'un placement sous le régime particulier douanier d'admission temporaire en exonération partielle de droits de douane. En effet, ce régime particulier ne reporte pas l'importation pour l'application de la TVA ;
  • une irrégularité conduit à faire sortir le bien « non Union » d'une situation ou d'un régime douanier de report des importations, sous réserve que les biens concernés aient été introduits dans le circuit économique de l'Union, ou que l'irrégularité permette de le présumer, et qu'ils puissent y faire l'objet d'une consommation (II-A § 160). Ces conditions cumulatives d'introduction dans le circuit économique de l'Union et de possibilité d'une consommation au sein de l'UE sont spécifiques à la TVA, et ne s'appliquent ni pour les droits de douane, ni pour les autres impôts comme les accises.

160

Un manquement aux obligations douanières fait naître une dette douanière dans certaines circonstances (CDU, art. 79, paragraphe 1). De tels manquements n'induisent pas nécessairement une importation soumise à la TVA. Ainsi, il peut y avoir perception des droits de douane sans perception de la TVA, même en l'absence d'exonération.

En effet, l'application de la TVA résulte en premier lieu de constatations de fait, indépendamment du respect du formalisme douanier : l'introduction dans le circuit économique de l'Union et la possibilité d'y faire l'objet d'une consommation. Ce principe a également des conséquences sur la territorialité de l'importation (II § 70 à 90 du BOI-TVA-CHAMP-20-65).

Cette distinction entre TVA et droits de douane en cas d'irrégularité est valable, y compris dans les situations où la TVA est régie par les procédures et sanctions du code des douanes national (CGI, art. 1695).

En cas d'omission de l'inscription d'une réexportation dans la comptabilité matière d'un entrepôt douanier impliquant l'exigibilité des droits de douane, il n'y a pas importation au sens de la TVA lorsqu'il est possible d'établir que les biens ont effectivement été réexportés (CJUE, 2 juin 2016, aff. C-226/14 et C-228/14, Eurogate Distribution, ECLI:EU:C:2016:405, points 66 et 78).

Malgré la naissance d'une dette douanière, la circonstance que des biens placés en zone franche soient soustraits à la surveillance douanière (scellés douaniers rompus) n'implique pas une importation imposable à la TVA lorsque les biens en cause ne sont ni mis en libre pratique, ni consommés, ni utilisés, mais sont ensuite transportés dans un autre État membre, puis placés sous un régime de report d'importation (CJUE, 1er juin 2017, aff. C-571/15, Wallenborn Transports, ECLI:EU:C:2017:417, point 53).

Des biens totalement détruits ou irrémédiablement perdus sous un régime de report des importations ne sont pas considérés comme étant importés au sens de la TVA dès lors qu'ils ne peuvent faire l'objet d'une consommation, même si des droits de douane sont susceptibles d'être perçus (CJUE, 18 mai 2017, aff. C-154/16, Latvijas Dzelzceļš, ECLI:EU:C:2017:392, points 66 à 72).

B. Cas des territoires fiscaux spéciaux

1. Biens importés en métropole et à Monaco depuis les territoires fiscaux spéciaux

170

En application du premier paragraphe de l’article 6 de la directive TVA, le territoire d'application de la TVA ne couvre pas l'ensemble du territoire douanier de l'UE. Les règles issues de cette directive ne s'appliquent pas dans les « territoires fiscaux spéciaux » (TFS) (II-C-4 § 190 du BOI-TVA-CHAMP-20-10). Il en résulte que les biens introduits sur le territoire européen de la TVA depuis un TFS ont déjà acquis le statut « Union » sans toutefois avoir été soumis à la TVA européenne lors de leur introduction sur le territoire du TFS.

Pour cette raison, l'article 30 de la directive TVA précise que constitue également une importation imposable à la TVA l'introduction de biens sur le territoire européen de la TVA depuis les TFS.

180

Aux fins de l'application de la TVA, le CDU, qui ne vise normalement que les échanges avec l'extérieur du territoire douanier de l'UE, prévoit que certaines de ses dispositions s'appliquent également aux échanges à l'intérieur du territoire douanier lorsqu'elles font intervenir un TFS (article 1er, par. 3). Ces dispositions sont précisées aux articles 114 et 134 du règlement délégué (UE) 2015/2446 de la Commission du 28 juillet 2015. En outre, l'article 275 de la directive TVA prévoit que, pour la TVA, les formalités s'imposant aux biens « Union » en provenance des TFS sont les mêmes que celles s'imposant aux biens « non Union » importés.

190

Par ailleurs, le droit européen assure l'existence, sur le territoire européen de la TVA (ce territoire est défini au II § 90 à 190 du BOI-TVA-CHAMP-20-10), de régimes dédiés aux importations en provenance des TFS, produisant des effets analogues à ceux des régimes de report de l'importation. À cette fin, sont distingués :

  • le régime de transit. Dans ce cas, l'article 188 du règlement délégué du CDU et l'article 276 de la directive TVA prescrivent le recourt au « transit interne de l'Union ». Dès lors, dans le cadre des échanges avec les TFS, le transit interne de l'Union reporte l'importation ;

Remarque 1 : Le transit interne de l'Union (CDU, art. 227, par. 2) concerne les marchandises « Union » qui circulent d'un point du territoire douanier de l'UE à un autre via un État partie à la CTC, mais peut également être utilisé pour les échanges de biens « Union » avec les TFS. Il est signalé que ce régime ne reporte par l'importation lorsqu'il est utilisé pour des échanges à l'intérieur du territoire européen de la TVA.

Remarque 2 : Pour les échanges impliquant un TFS, mais situés à l'intérieur d'un unique État membre, le droit européen permet à l'État membre de l'UE de mettre en place d'autres dispositifs que le transit interne de l'Union. Cette faculté est mise en œuvre en France : il est possible d’utiliser la preuve du statut (dépôt d’une déclaration en douane de type CO (certificat d'origine) et présentation d’un document T2LF entre la France métropolitaine et les outre-mer permettant de prouver que la marchandise a conservé son statut « Union ») ; c'est ce dernier dispositif qui, dans la pratique, est privilégié par rapport au transit interne.

  • les autres fonctions (stockage, transformation, utilisation spécifique). L'article 277 de la directive TVA laisse aux États membres de l'UE le choix des outils permettant d'assurer ces fonctions pour les échanges avec les TFS. En France, cette obligation est assurée par la possibilité de reporter l'exigibilité de la TVA due au titre des importations en provenance des TFS dans le cadre de régimes suspensifs (I-B § 50 à 110 du BOI-TVA-CHAMP-40-10-10). Dans ce cas, le fait générateur de la TVA à l'importation n'est pas reporté (au contraire des régimes de report des importations mentionnés au II-A § 140), mais uniquement son exigibilité.

200

Il en résulte que les importations en France métropolitaine (ou sur le territoire de Monaco) depuis les TFS sont, pour les besoins de la TVA, gérées mutatis mutandis de la même manière que les importations en provenance de l'extérieur du territoire douanier de l'Union, s'agissant tant de la liquidation de l'impôt que des règles de procédure.

Cela concerne, d'une part, les biens en provenance de TFS situés dans d'autres États membres et, d'autre part, en application du 1° du 3 de l'article 294 du CGI, les biens en provenance de l'un des TFS français (Guadeloupe et Martinique, Guyane, La Réunion, Mayotte, Saint-Martin).

2. Biens importés en Guadeloupe, Martinique ou à La Réunion

210

Bien que la directive TVA ne s'y applique pas (art. 6, 1-c), la France a fait le choix d'appliquer une TVA dans certains des TFS nationaux (Guadeloupe, Martinique et La Réunion, I-A § 10 du BOI-TVA-CHAMP-20-10). Les mécanismes de la TVA européenne y étant très largement reproduits, constituent également des importations soumises à la TVA française les introductions de biens dans ces TFS depuis les territoires suivants :

  • les territoires extérieurs au territoire douanier européen ;
  • la métropole ou les parties des territoires des autres États membres de l'UE incluses dans le territoire douanier (CGI, art. 294, 3-2° et 3°), y compris depuis les TFS de ces autres États et indépendamment du fait qu'une TVA y soit appliquée ;
  • un autre TFS français (CGI, art. 294, 3-2° et 3°), qu'une TVA y soit appliquée ou non. Toutefois, la Guadeloupe et la Martinique sont réputées relever d'un seul et même TFS de sorte que les échanges entre les deux collectivités ne sont pas des importations.

Pour plus de précisions, il convient de se reporter au BOI-TVA-GEO-20-40.

220

En outre, pour les besoins de la TVA, sont applicables en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion dans les mêmes conditions qu'en métropole :

  • les régimes douaniers particuliers, pour les biens en provenance de territoires extérieurs au territoire douanier européen (I-B § 90), y compris les biens en provenance des territoires français non compris dans le territoire douanier de l'Union (II-C-2 § 170 du BOI-TVA-CHAMP-20-10) ;
  • le transit interne de l'Union et les régimes suspensifs pour les biens en provenance du reste du territoire douanier européen (II-B-1 § 180), qu'ils proviennent d'autres États membres de l'UE, de métropole ou des autres collectivités françaises ultramarines comprises dans ce territoire et qualifiées de TFS (II-C-4 § 190 du BOI-TVA-CHAMP-20-10).

Remarque : Pour les échanges entre la métropole et les collectivités ultramarines françaises, ou entre ces collectivités, le recours à la déclaration en douane de type CO (certificat d'origine), garantissant le statut Union des marchandises, est privilégié par rapport au transit interne.