RES - Taxe sur la valeur ajoutée - Champ d’application et territorialité - Règles applicables aux prestations rendues à titre onéreux par un sportif ou un entraîneur professionnel salarié au titre de l’exploitation commerciale des attributs de sa personnalité par le club qui l’emploie
Question :
Les prestations rendues à titre onéreux par un sportif ou un entraîneur professionnel salarié, au club qui l’emploie, au titre de l’exploitation commerciale des attributs de sa personnalité, sont-elles imposables à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et, le cas échéant, le régime dérogatoire de retenue à la source de TVA applicable aux droits d’auteur, prévu à l’article 285 bis du code général des impôts (CGI), est-il applicable aux redevances perçues à ce titre ?
Réponse :
Conformément à l’article 256 du CGI, sont soumises à la TVA les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. Le 1° du IV de l’article 256 du CGI ajoute que la cession ou la concession de biens meubles incorporels est considérée comme une prestation de services.
Par ailleurs, l’article 256 A du CGI précise que sont considérées comme assujetties les personnes qui effectuent de manière indépendante une activité économique quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. Selon cette disposition, ne sont pas considérés comme agissant de manière indépendante les salariés et les autres personnes qui sont liés par un contrat de travail ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail, les modalités de rémunération et la responsabilité de l’employeur.
Est ainsi soumise à la TVA la rémunération versée en contrepartie de la concession du droit d’utiliser l’image ou le nom d’un sportif sauf si cette opération n’est pas détachable du contrat de travail. En revanche, les rémunérations perçues par les sportifs dans le cadre d’un rapport juridique impliquant un lien de subordination ainsi que les sommes qui n’ont pas de lien direct avec la fourniture d’une prestation de services sont hors du champ d’application de la TVA.
L’article L. 222-2-10-1 du code du sport autorise les sociétés ou associations sportives à conclure avec leurs sportifs ou entraîneurs professionnels, en parallèle du contrat de travail, un contrat relatif à l’exploitation commerciale de leur image, de leur nom ou de leur voix. Dès lors que leur présence physique n’est pas requise pour l’exploitation commerciale des attributs de leur personnalité et que la rémunération qui leur est versée à ce titre dépend exclusivement des recettes de cette exploitation et non du salaire reçu par ailleurs, ce contrat ne traduit aucun lien de subordination et reste donc distinct du contrat de travail.
Ces deux critères posés par le droit privé rejoignent ceux de la jurisprudence fiscale. En effet, selon le Conseil d’État, les redevances rémunèrent une prestation effectuée à titre onéreux, et donc soumise à TVA, dès lors que :
- d’une part, l’employeur s’abstient d’exercer sur le sportif ou l’entraîneur, au moment de l’exploitation de son image ou de son nom, le pouvoir de direction qu’il détient au titre du contrat de travail ;
En ce sens, la jurisprudence reconnaît que, lorsque les redevances constituent l’accessoire indispensable de l’activité salariée pour laquelle il existe un lien de subordination, il ne saurait y avoir prestation de services soumise à la TVA (CE, décision du 29 décembre 2000, n° 204136 et CAA Paris, arrêt du 14 décembre 2010, n° 08PA03207).
Remarque : Ces deux jurisprudences portent sur l’activité de mannequin dont l’exploitation de l’image est consubstantielle à l’activité principale consistant à défiler sur des podiums ou à être photographiés ou filmés. Mais tel est le cas aussi d’un sportif qui, par exemple, participerait à une séance de photographies en studio à la demande de son employeur et en respectant ses prescriptions.
- d’autre part, la rémunération de cette exploitation dépend uniquement des recettes associées. À cet égard, il importe peu que le contrat de travail et le contrat d’exploitation commerciale de l’image, du nom et de la voix figurent ou non dans le même acte.
En ce sens, la jurisprudence reconnaît que les redevances perçues par une personne physique ayant concédé à une société le droit d’exploiter son nom à des fins commerciales rémunèrent une prestation de services effectuée à titre onéreux et doivent dès lors être soumises à la TVA, nonobstant la circonstance que ladite personne soit placée dans une situation de dépendance à l’égard de la société dans le même contrat (CE, décision du 3 mars 1993, n° 83462).
Par conséquent, dès lors que les sportifs et les entraîneurs ne sont pas placés dans un état de subordination lors de l’exploitation de leur image, de leur nom ou de leur voix par les clubs sportifs, et dans la mesure où la redevance qui leur est versée à ce titre ne dépend que des recettes commerciales, la prestation rendue par le sportif ou l’entraîneur, assimilable à une prestation de services au sens du 1° du IV de l’article 256 du CGI, est bien fournie à titre onéreux et, par suite, soumise à TVA.
S’agissant des modalités de collecte de la TVA, les assujettis sont en principe tenus de remplir les obligations administratives, comptables et fiscales correspondantes, notamment en matière d’immatriculation, de facturation ou de déclaration.
Toutefois, dans un objectif de simplification, un dispositif de retenue à la source de TVA est prévu à l’article 285 bis du CGI. Il dispense de toute obligation au regard de la TVA les auteurs d’œuvres de l’esprit percevant des droits de la part d’éditeurs, d’organismes de gestion collective de droits ou de producteurs. Ces entités opèrent directement sur les droits versés aux auteurs une retenue de la taxe due par ces derniers puis la reversent à l’État.
Ce dispositif appliqué en France présente cependant un caractère dérogatoire.
Il a en effet été accordé par la décision 92/544/CEE du Conseil, du 23 novembre 1992, autorisant la République française à appliquer diverses mesures dérogeant à l’article 17 et à l’article 22 paragraphes 3, 4 et 5 de la sixième directive 77/388/CEE en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires en application de la procédure prévue à l’article 27 de la directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme. Initialement prévue pour une durée de quatre ans, cette dérogation a été renouvelée de manière tacite, et sans limitation de durée, sur demande des autorités françaises, la procédure précitée prévoyant que la décision du Conseil était réputée acquise sous certaines conditions (directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, art. 27, 4). Dans ce cadre dérogatoire, seules sont visées par le dispositif les rémunérations des auteurs d’œuvres de l’esprit.
Or, les attributs de la personnalité physique des sportifs et entraîneurs professionnels ne sauraient s’assimiler aux droits d’auteurs attachés aux œuvres de l’esprit. Par conséquent, il n’est pas possible d’appliquer le dispositif dérogatoire de retenue à la source de TVA prévu par l’article 285 bis du CGI à la TVA due au titre de la redevance de l’exploitation commerciale de l’image, du nom ou de la voix des sportifs et des entraîneurs professionnels.
Néanmoins, il est précisé, d’une part, que ces sportifs et entraîneurs ont la possibilité de confier l’établissement matériel de leurs factures à un tiers (sous-traitance de la facturation) ou à leur client (auto-facturation), conformément à l’article 289 du CGI et, d’autre part, qu’ils peuvent être dispensés des formalités de déclaration et de paiement de la TVA si leurs recettes se situent en-deçà des plafonds de la franchise en base prévue à l’article 293 B du CGI.
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