INT - Convention fiscale entre la France et le Royaume-Uni en matière de successions - Modalités d'élimination des doubles impositions
I. Régime institué par la convention
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Selon les stipulations de la convention du 21 juin 1963, la suppression des doubles impositions relatives aux successions de personnes ayant leur domicile en France ou dans le Royaume-Uni, quelle que soit, par ailleurs, leur nationalité, résulte d'une part, des règles fixant la situation des biens héréditaires à l'égard de l'État autre que celui du domicile du de cujus (Convention, art. 3 à 5), d'autre part, de l'imputation accordée par l'État du domicile du de cujus, en ce qui concerne les impôts perçus par l'autre État (Convention, art. 6 et 7).
A. Situation des biens
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L'article 3 de la convention prévoit que si une personne était, au moment de son décès, domiciliée sur une partie quelconque du territoire de l'une des parties contractantes, le lieu de la situation d'un bien sera, pour l'assiette de l'impôt et pour le calcul de l'imputation à accorder en vertu de l'article 6 de la convention, déterminé exclusivement conformément aux règles fixées à l'article 4 de la convention.
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Toutefois, il résulte des stipulations de l'article 5 de la convention que ces règles concernent uniquement l'application de l'impôt par l'État autre que celui où le défunt était domicilié. Il s'ensuit que les droits exigibles en France sur la succession d'une personne qui s'y trouvait domiciliée continuent d'être calculés dans les conditions du droit commun, alors même que certains biens héréditaires sont réputés situés en Grande-Bretagne au sens de l'article 4 de la convention.D'autre part, selon les prévisions de l'article 3 § 2 de la convention, les règles relatives à la situation des biens fixées par l'article 4 ne s'appliquent que lorsque, abstraction faite des stipulations de l'article 4 de la convention, le bien est imposable en vertu de la législation de chacun des deux États ou que, étant imposable en vertu de la législation de l'un des deux États, il le serait également dans l'autre État s'il ne faisait l'objet d'une exonération spéciale en vertu de la législation de cet autre État.
1. Immeubles et droits immobiliers
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Les immeubles sont réputés situés au lieu où ils se trouvent et les droits immobiliers, exclusion faite de toutes créances garanties par hypothèque, sur le territoire où se trouvent les immeubles auxquels ils s'appliquent.
La question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier est résolue d'après la législation du lieu dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé (Convention, art. 4, § a).
Eu égard à sa généralité, l'expression «législation du lieu » doit être considéré comme comprenant aussi bien le droit fiscal que le droit civil.
2. Biens meubles corporels
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Les biens mobiliers corporels à l'exception des bateaux et aéronefs visés ci-après-, ainsi que les droits réels portant sur des biens de cette nature, à l'exception des droits de gage, sont réputés situés au lieu où se trouvent, à la date du décès, les biens considérés ou les droits auxquels s'appliquent les droits envisagés, ou, si ces biens sont en cours de transfert à la date du décès, au lieu de leur destination.
Il est précisé que sont tenus pour des biens mobiliers corporels les billets de banque et autres espèces monétaires ayant cours légal au lieu de leur émission (Convention, art. 4, § b).
3. Bateaux et aéronefs
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Les bateaux et les aéronefs ainsi que les parts dans la propriété indivise de tels biens sont réputés situés au lieu d'immatriculation du bateau ou de l'aéronef (Convention, art. 4, § i).
4. Biens mobiliers incorporels
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Sont réputés situés au lieu où la personne décédée était domiciliée au moment de son décès :
- les brevets, marques de fabrique, dessins, droits d'auteur,ainsi que les droits de licences pour l'exploitation de brevets, marques de fabrique, dessins au œuvres protégées par un droit d'auteur (Convention, art. 4 § j);
- les créances, qu'elles soient assorties ou non de garanties et qu'elles soient établies ou non par jugement, y compris celles qui résultent d'obligations et de reconnaissances de dettes émanant d'une société, de lettres de change, de billets à ordre et de chèques. Cette règle s'applique notamment aux obligations négociables, quel que soit leur lieu d'émission, leur lieu de dépôt ou celui du siège de la société émettrice (Convention, art. 4 § c et e) ;
- les titres, bons et obligations ou titres de rente, émis par un État, un conseil de comté, un département, une commune ou par toute autre autorité publique (Convention, art. 4, § d) ;
- les sommes payables en vertu de polices d'assurance (Convention, art. 4 § f) ;
- les droits et actions dérivés d'obligations délictuelles ou quasi délictuelles et subsistant au bénéfice de la succession d'une personne décédée (Convention, art. 4 § k).
En revanche, des règles différentes sont prévues pour :
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Les clientèles, en tant qu'éléments de l'exploitation d'une entreprise commerciale ou industrielle ou d'une profession libérale, réputées situées au lieu où est exploitée l'entreprise ou exercée la profession à laquelle se rattache la clientèle considérée (Convention, art. 4 § h).
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Les actions et les parts dans les sociétés de capitaux (y compris les titres de cette nature qui sont détenus par un nomine, que le droit de jouissance soit constaté par un certificat ou autrement), qui sont réputées situées au lieu où la société a été constituée (Convention, art. 4 § e). Cette règle s'applique à l'ensemble des valeurs mobilières, exception faite des valeurs à revenu fixe (obligations négociables, baux, titres de rente, fonds d'État...). Elle est valable également pour les droits dans les sociétés à responsabilité limitée que la législation fiscale française assimile aux sociétés de capitaux.
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Les parts d'intérêts dans un partnership, ce terme voisin de celui de sociétés de personnes, incluant une société en nom collectif, une société en commandite simple ou une société civile du droit français. Ces parts sont réputées situées au lieu où l'affaire est principalement exploitée. Il est précisé que pour les sociétés civiles immobilières, ce lieu est celui de la situation des immeubles exploités conformément à l'objet social (Convention, art. 4 § g).
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Quant aux droits et intérêts, autres que ceux énumérés ci-dessus, ils sont réputés situés au lieu qui est déterminé par la législation en vigueur dans le territoire de la partie contractante où la personne décédée n'avait pas son domicile à la date de son décès (Convention, art. 4 § m).
B. Liquidation des droits
1. Principes généraux
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L'état dans lequel le défunt était domicilié taxe suivant les règles de sa législation les biens composant sa succession, les stipulations conventionnelles relatives à la situation des biens n'apportant aucune limitation au droit d'imposer de cet État.
De son côté, l'État dans lequel le défunt n'avait pas son domicile peut percevoir l'impôt sur les biens héréditaires qui se trouvent situés sur son territoire au sens de l'article 4, ainsi que sur tous autres biens qui étant imposables d'après sa législation interne, abstraction faite dudit article 4, ne sont pas imposés dans l'autre État, sans que cette non imposition résulte d'une exonération spéciale au sens de l'article 3 § 2 b de la convention. Mais il doit accorder, le cas échéant, tous abattements, exemptions, déductions ou réductions qui auraient été applicables d'après sa législation interne si le défunt avait été domicilié sur son territoire (Convention, art. 5 § 3).
D'autre part, pour éviter la double imposition, l'État du domicile doit accorder sur le montant des droits liquidés conformément à sa législation interne une réduction correspondant à l'impôt prélevé par l'autre État contractant à raison des biens sis sur le territoire de ce dernier et inclus dans l'assiette de l'impôt prélevé par chacun des deux États. Toutefois, le montant de cette réduction ne peut excéder celui de l'impôt perçu par l'État du domicile sur les mêmes biens (Convention, art. 6).
2. Succession d'une personne défunte domiciliée au Royaume-Uni
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En cas de décès d'une personne domiciliée au Royaume-Uni, les droits de succession sont exigibles en France sur les biens de la succession qui y sont situés au sens de l'article 4 de la convention.
C'est ainsi que l'impôt sur les successions est exigible en France sur les immeubles et les meubles corporels situés en France, sur les éléments incorporels (clientèles, droit au bail) et corporels (agencements, stocks) des fonds de commerce exploités en France ainsi que sur les actions, parts bénéficiaires, parts de fondateur ou autres droits analogues émis par les sociétés de capitaux et les sociétés à responsabilité limitée ayant leur siège en France.
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En revanche, aucun droit n'est dû sur les obligations émises par des sociétés françaises ni sur les titres de même nature, y compris les rentes et bons négociables émis par l'État français ou par des collectivités publiques françaises.
L'impôt exigible sur les biens réputés situés en France au sens de la convention doit être calculé suivant les règles du droit commun, en tenant compte uniquement de l'actif français, mais en procédant à tous abattements, exemptions, déductions ou réductions prévus par la législation française.
Ainsi, indépendamment des abattements à la base, lesquels font partie du tarif de l'impôt, les réductions de droits instituées pour des raisons de charges de famille doivent être accordées à tous les successibles ayant la nationalité française, celle du Royaume-Uni ou de tout autre pays lié à la France par un accord de réciprocité.
3. Succession d'une personne domiciliée en France
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Lorsqu'il s'agit de la succession d'une personne domiciliée en France, les droits de mutation par décès sont liquidés selon les règles de droit commun, abstraction faite des stipulations de la convention relatives à la situation des biens.
En particulier, dans une telle hypothèse, si l'actif successoral comprend des actions ou des parts émises par des sociétés de capitaux ayant leur siège au Royaume-Uni, ces valeurs supportent l'impôt français conformément à l'article 750 ter du code général des impôts.
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Mais en vertu de l'article 6 de la convention et sous réserve d'en faire la demande dans les cinq ans à compter de la date du décès, les ayants droit peuvent obtenir, soit au moment de l'acquittement des droits, soit ultérieurement par voie de remboursement, une réduction correspondant au montant de l'impôt perçu dans le Royaume-Uni par application des articles 3 à 5 de la convention. Cette réduction est toutefois limitée à un maximum égal à la fraction de l'impôt français afférente aux biens taxés dans le Royaume-Uni, en application de l'article 4 de la convention.
C. Modalités d'application : Réduction d'impôt accordée par l’État du domicile du défunt
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Aux termes de l'article 6 de la convention, lorsqu'à l'occasion du décès d'une personne domiciliée sur son territoire, un État prélève un impôt sur un bien réputé situé sur le territoire de l'autre État au sens de l'article 4 de la convention, il impute sur l'impôt applicable à ce bien, tel qu'il est calculé d'après sa législation interne et dans la limite de cet impôt un crédit égal au montant du droit perçu par l'autre État sur le même bien.
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Aux termes de l'article 7 de la convention, toute demande de réduction ou de remboursement d'impôt fondée sur les stipulations de la conventions doit être présentée dans les cinq ans à compter de la date du décès ou, lorsque la cause rendant exigible l'impôt se produit à une date postérieure au décès, dans les cinq ans qui suivent cette date.
Le remboursement est effectué sans paiement d'intérêts sur la somme remboursée..
En vue de faciliter la mise en œuvre de cette procédure deux modèles d'imprimés spéciaux, ont été établis sous forme bilingue, et devront être utilisés selon les modalités ci-après :
1. Imputation des droits de mutation par décès sur l'impôt britannique
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Pour obtenir l'imputation des droits de mutation par décès perçus en France sur l'impôt britannique dû à l'occasion du décès d'une personne domiciliée en Grande-Bretagne les ayants droit de la succession ou leurs représentants devront établir une demande de réduction sur une formule spéciale mise à la disposition des intéressés par l'Administration fiscale britannique.
Remarque : La représentation est de règle en Grande-Bretagne, la liquidation des successions étant sur le plan civil, obligatoirement confiée à des agents de procédure agréés, (executor, administrator).
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Dès réception de ces informations par les services fiscaux français compétents, les agents intéressés vérifieront soigneusement les indications portées par les ayants droit, notamment, en ce qui concerne la description des biens imposables en France, leur évaluation et le montant des droits perçus.
Bien que la délivrance de l'attestation de conformité ne mette pas obstacle, en principe, à des réclamations ultérieures, il convient, en règle générale, de procéder dans le moindre délai au contrôle de la déclaration de succession et de rehausser sans retard les omissions ou insuffisances dont elle pourrait être entachée. Après régularisation, les déclarations de paiement devront être rectifiées pour tenir compte de la nouvelle liquidation.
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Si postérieurement à la délivrance d'une attestation, une restitution de droits de mutation est accordée côté français, il y aura lieu d'établir un bulletin de renseignement pour les autorités fiscales britanniques précisant les modifications apportées aux indications fournies dans le premier certificat, en ce qui concerne notamment l'énumération et la valeur des biens déclarés et le montant de l'impôt perçu.
2. Imputation de l'impôt britannique sur les droits de mutation par décès
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Les ayants droit de la succession (ou leur représentant) d'une personne ayant son domicile en France qui veulent obtenir l'imputation de l'impôt britannique sur les droits de mutation exigibles en France doivent remplir un imprimé spécial 2740 en double exemplaire qu'ils peuvent se procurer à la Recette des non résidents – Direction des résidents à l'étranger et des services généraux– 10 rue du centre – 93465 Noisy-le-Grand CEDEX – FRANCE.
Ils doivent utiliser un formulaire distinct par pays ou territoire concerné et le remettre soit au moment du paiement des droits, soit à l'appui d'une demande de restitution (cf formulaire 2740 et notice explicative au BOI-LETTRE-000148).
Si la déclaration n'a pas encore été souscrite, l'attestation fera l'objet des mêmes annotations que les renvois de renseignements relatifs à des successions. Lors de l'enregistrement de la déclaration, le montant de l'impôt britannique qui est mentionné sur l'attestation sera imputé sur les droits de mutation dans les conditions précisées plus haut [130 à 140].
Si les droits ont été déjà acquittés, l'attestation sera considérée comme une demande en restitution et instruite en la forme habituelle.
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Au cas où postérieurement à la délivrance de l'attestation, une réduction de l'impôt britannique est accordée, il sera procédé à une nouvelle liquidation sur la base des indications rectificatives fournies par l'Administration fiscale de Grande-Bretagne. Les droits complémentaires sont réclamés immédiatement.
II. Assistance administrative
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En vertu de l'article 8 de la convention, les autorités fiscales des parties contractantes échangent les renseignements que les législations fiscales des deux États permettent d'obtenir dans le cadre de la pratique administrative normale et qui sont nécessaires pour assurer l'établissement et le recouvrement réguliers des impôts que chaque partie contractante prélève à l'occasion du décès des personnes domiciliées sur son territoire au moment de leur mort.
En application de cette disposition, le service pourra demander à l'administration fiscale britannique tous renseignements qui lui paraîtraient nécessaires pour l'assiette, le contrôle et le recouvrement des droits de mutation par décès exigibles sur la succession des personnes domiciliées en France.
Réciproquement, l'administration fiscale britannique pourra demander des renseignements analogues concernant les successions de personnes domiciliées au Royaume-Uni.
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Toute correspondance relative à l'assistance ainsi définie s'effectuera par l'intermédiaire de la direction générale des finances publiques.
Les renseignements échangés seront considérés comme secrets, ne devront pas être communiqués à d'autres personnes que celles qui sont chargées de l'assiette et du recouvrement des impôts visés dans la convention. En outre, il ne pourra être échangé de renseignement qui révélerait un secret commercial, industriel ou professionnel ou un procédé commercial.
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Dans les limites ainsi définies, devront être échangés d'office tous renseignements nécessaires pour assurer l'établissement et le recouvrement réguliers des impôts que chaque partie contractante prélève à l'occasion des personnes domiciliées sur son territoire au moment de leur mort.
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En conséquence, il convient d'adresser à l'Administration fiscale britannique tous renseignements concernant les biens dépendant de la succession d'une personne domiciliée en Grande-Bretagne, sans exclure, le cas échéant, les biens sur lesquels le défunt ne possédait qu'un droit d'usufruit.
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Ces renseignements donneront lieu à l'établissement de renvois en la forme ordinaire, complétés en suscription très apparente, dans leur partie supérieure par la mention « Convention du 21 juin 1963 entre la France et la Grande-Bretagne. Droits de succession ». Ces documents seront adressés immédiatement à la Direction générale des finances publiques.
Leur transmission à l'administration fiscale britannique s'effectuera dans les cinq premiers jours de chaque mois.
L'administration britannique adressera à la Direction générale des Finances publiques des renseignements analogues au sujet des successions des personnes domiciliées en France.