BIC - Champ d'application - Personnes imposables - Sociétés de personnes et assimilées - Sociétés créées de fait
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Depuis l'intervention de la loi n° 78-9 du 4 janvier 1978, l'article 1873 du code civil reconnaît l'existence de la société créée de fait. Toutefois ce texte n'en donne aucune définition et se borne à la soumettre au même régime que la société en participation.
Le code civil et le code général des impôts visent « la société créée de fait ». La terminologie « société de fait » est encore assez couramment employée. En tout état de cause, les deux formules recouvrent une même réalité.
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L'appellation de société créée de fait recouvre les sociétés qui ne remplissent pas toutes les conditions de forme requises en droit privé (cas d'une société commerciale constatée par un écrit mais non publiée), les sociétés qui sont en cours de liquidation après annulation judiciaire ou encore les sociétés qui, bien que réunissant les éléments de fond du contrat de société (mise en commun d'apports, participation aux bénéfices et aux pertes, intention de s'associer sur un pied d'égalité quant au contrôle de l'affaire) n'ont donné lieu à aucune des formalités prescrites par la loi et les règlements pour leur constitution régulière.
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Au plan fiscal et en vertu des dispositions de l'article 238 bis L du code général des impôts (CGI), le régime des sociétés créées de fait est aligné sur celui des sociétés en participation.
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La présente section est consacrée à l'examen :
- d'une part, des critères d'existence de la société créée de fait ;
- d'autre part, de son régime fiscal.
I. Critères d'existence de la société créée de fait
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Le point de savoir si une entreprise est exploitée ou non en société créée de fait est essentiellement une question d'espèce que seul le service est à même de résoudre au vu de circonstances propres à l'entreprise.
Il est à noter que le point de savoir si une société de fait existe ou non ne soulève aucune question relevant de la compétence du comité consultatif des abus de droit prévu à l'article L 64 du livre des procédures fiscales (LPF) (CE, arrêt du 16 décembre 1970, req. N° 75496, RJ, n° II, p 243).
A. Détermination des critères d'existence de la société créée de fait
1. Critères jurisprudentiels
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Selon une jurisprudence constante du conseil d'État, l'existence d'une société créée de fait suppose la réunion de trois conditions :
- chaque membre doit participer effectivement aux apports en capital ou en industrie.
À cet égard, le critère de la participation aux apports est satisfait alors même qu'il ne serait fait que des apports en industrie (mise à la disposition par les associés de leurs connaissances techniques, de leur travail, de leur notoriété, ...) ;
- chaque membre doit participer effectivement à la gestion de l'entreprise, c'est-à-dire aux fonctions de direction ou de contrôle et doit pouvoir engager l'entreprise vis-à-vis des tiers.
Cette participation doit être effective. Elle implique que l'associé dispose de pouvoirs de gestion qui ne soient pas limités ;
- chaque membre doit participer effectivement aux résultats bénéficiaires ou déficitaires de l'entreprise.
En principe, le critère de participation aux résultats est établi au vu d'une convention écrite prévoyant une répartition de ces résultats entre les associés de fait.
Cependant, en l'absence d'une telle convention, cette participation peut résulter par exemple de la perception d'une rémunération variable et demeurant sensiblement égale à une proportion de bénéfice, de l'absence de toute rémunération en période déficitaire, de la signature de traites obligeant l'associé à supporter éventuellement une partie du passif, etc.
Mais la simple répartition de charges entre co-exploitants ne constitue pas, à elle seule, une participation effective aux résultats.
Ces trois conditions doivent être simultanément remplies.
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Exemples :
Au regard des conditions susvisées, la situation des artisans utilisant un local commun pour l'exposition de leurs productions appelle les observations suivantes.
Afin d'améliorer la commercialisation de leurs produits, notamment auprès des touristes, certains professionnels pratiquent la vente à l'atelier ou à côté de l'atelier. À cet effet, ils installent à la vue du public une petite exposition permanente de leurs œuvres.
Il arrive également que certains artisans de la même localité ou de la même région exposent leurs productions dans l'atelier de celui d'entre eux qui est le mieux situé.
La question peut, dès lors, se poser de savoir si, lorsqu'ils groupent ainsi leurs ventes, les intéressés doivent être regardés comme exploitant une entreprise en société de fait.
Au cas particulier, la circonstance que plusieurs artisans utilisent le local de l'un d'entre eux pour exposer et vendre leurs travaux ne permet pas à elle seule de regarder ces contribuables comme des associés de fait.
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Le conseil d'État a jugé que devaient être considérés comme ayant formé une société de fait :
- deux contribuables, dont l'un est seul propriétaire de l'actif d'une entreprise et l'autre y fait apport de son travail et la dirige effectivement sans être lié au premier par un contrat de louage de services, y laisse des sommes importantes en compte courant et reçoit la moitié des bénéfices (CE, arrêt du 30 octobre 1937, req. n° 57369, RO, p. 595) ;
- une société à responsabilité limitée et deux contribuables -dont l'un est ancien associé- lorsque ces derniers possèdent, en cas de décès des associés, un droit de préemption sur le fonds de commerce et sur l'immeuble social, sont uniquement rémunérés de leur travail par une participation aux bénéfices et laissent en compte courant dans l'entreprise des sommes très importantes qu'ils ne peuvent retirer librement (CE, arrêt du 15 avril 1942, req. n°s 65206 et 65207, RO, p. 100) ;
- des particuliers qui prennent chacun une part effective à l'exploitation d'un fonds de commerce et engagent chacun l'entreprise vis-à-vis des tiers, dès lors d'ailleurs que l'existence d'une telle société résulte de l'inscription de la raison sociale à laquelle les intéressés ont procédé sur le registre du commerce (CE, arrêt du 6 mars 1944, req. n° 68498, RO, p. 62) ;
- deux contribuables fondateurs d'une société de fait, l'un ayant apporté sa clientèle en jouissance et disposant d'un droit de contrôle étendu, l'autre traitant les affaires en son nom, assurant l'exécution des ordres de publicité et fixant les prix, tous deux prenant part aux résultats de l'exploitation qui doit cesser au décès de l'un des intéressés (CE, arrêt du 26 novembre 1945, req. n° 65884, RO, p. 321) ;
- deux contribuables qui, ayant fourni, chacun à concurrence de la moitié, les sommes nécessaires à l'acquisition d'un fonds de commerce qu'ils ont donné -par bail unique- en gérance libre, assurent conjointement les risques de ce mode d'exploitation et en partagent les résultats dans la proportion de leurs apports (CE, arrêt du 7 novembre 1956, req. n° 37971, RO, p. 204) ;
- une personne qui, ayant acquis un fonds de commerce en commun avec des tiers, perçoit la moitié des bénéfices et dispose au sein de l'entreprise de pouvoirs de gestion, de direction et de contrôle de la nature de ceux qu'exerce un associé (CE, arrêt du 24 octobre 1966, req. n° 61501, RO, p. 245) ;
- deux personnes exploitant conjointement un hôtel qui ont mis en commun leurs apports personnels en biens et en industrie, assurent en commun la direction de l'établissement, participent aux bénéfices et aux pertes et disposent librement du produit de cette exploitation (arrêts CE du 13 décembre 1982, req n°s 26738 et 26739).
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En revanche, la haute assemblée a jugé que ne pouvait être considéré comme associé de fait d'une exploitation :
- un contribuable qui ne participe pas aux bénéfices et aux pertes de l'entreprise et qui n'a pas pouvoir pour engager cette dernière vis-à-vis des tiers alors même qu'il serait rémunéré par un pourcentage sur les ventes, qu'il laisserait en compte courant d'importantes sommes non productives d'intérêts et qu'il prendrait une part prépondérante dans la direction de l'affaire (CE, arrêt du 28 octobre 1946, req. n° 82096, RO, p. 79 ; à rapprocher de l'arrêt du 2 mai 1957, req. n° 19998) ;
- l'ancien exploitant d'une entreprise à laquelle il a mis fin, qui a loué ensuite les locaux à une personne alliée et l'a assistée de ses capitaux et de ses conseils pour l'exploitation de ce même commerce, mais sans avoir participé ni à la direction, à la gestion ou au contrôle de l'entreprise précitée, ni aux bénéfices ou aux pertes et sans, enfin, être investi de pouvoirs pour engager cette même entreprise vis-à-vis des tiers (CE, arrêt du 25 novembre 1963, req. n° 25221).
2. Critère administratif
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Sans qu'il y ait lieu de démontrer préalablement que les trois conditions énoncées ci-dessus sont remplies, le service est fondé à se prévaloir de l'existence d'une société créée de fait lorsque les déclarations souscrites en matière d'impôts directs ou indirects font état de cette société.
B. Autres décisions jurisprudentielles concernant des sociétés de fait ou créées de fait
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On trouvera ci-dessous l'analyse d'autres arrêts rendus en matière de sociétés créées de fait dont le caractère a été confirmé ou infirmé. Les sociétés avaient pu être constituées :
- entre parents et enfants ;
- entre collatéraux ;
- entre époux ;
- entre une société et ses collaborateurs ;
- entre membres de sociétés déclarées nulles par décision de justice.
1. Sociétés de fait entre parents et enfants
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Le Conseil d'État a considéré qu'existe une société de fait entre :
- un père et ses deux fils dès lors que chacun d'eux prend une part effective à cette exploitation, engage l'entreprise vis-à-vis des tiers et participe à la répartition des bénéfices (CE, arrêt du 4 mai 1928, req. n° 85893, RO, 5192, vol. 1 à 16) ;
- entre un père et un fils lorsque le père ayant fondé une entreprise commerciale, le fils a fait apport de ses capacités, assume seul la direction effective de l'entreprise, ne retire aucun intérêt des capitaux qu'il y a engagés, ne perçoit aucun traitement et que son compte courant est crédité, en fin d'année, du montant de ses participations, en même temps que le bénéfice net est viré au compte courant de son père (CE, arrêt du 18 octobre 1937, req. n° 54704, RO, p 550) ;
- un père et un fils qui exploitent un même commerce dès lors que le fils dispose des pouvoirs les plus étendus pour la gestion de l'affaire, est copropriétaire indivis de l'immeuble dans lequel est installée l'entreprise et perçoit sans aucun contrat une rémunération variable représentant une proportion à peu près constante des bénéfices réalisés (CE, arrêt du 21 mars 1938, req. n° 59740, RO, p.189) ;
- un père et un fils dès lors que ce dernier a fait apport à l'entreprise de son père d'une marque de spécialités lui appartenant, participe à la gestion de cette entreprise, y perçoit en sus d'un traitement fixe une allocation variable suivant le produit net de l'exploitation de ladite marque sans être lié à cette entreprise par aucun contrat de louage de service (CE, arrêt du 15 mars 1946, req. n° 71630, RO p. 25) ;
- un industriel et son père lorsque celui-ci, qui participe activement à la gestion de l'entreprise, a investi dans l'affaire des capitaux relativement importants pour lesquels aucun intérêt spécial ne lui est attribué et reçoit des rémunérations variables suivant les années mais toujours sensiblement égales au tiers des bénéfices (CE, arrêt du 3 février 1948 req. n° 77372, RO, p. 17) ; au cas particulier, le père remplissait les fonctions de directeur technique de l'entreprise de tissage à la tête de laquelle son fils lui avait succédé ;
- un commerçant et son fils lorsqu'une convention passée entre les intéressés confère au fils les pouvoirs les plus étendus dans la conduite de l'affaire, notamment en ce qui concerne la conclusion des achats et des ventes, lui attribue la moitié des bénéfices de l'entreprise et reconnaît à ses héritiers, en cas de décès, des droits tant sur les profits résultant de l'exploitation du fonds que sur le produit de la vente éventuelle (CE, arrêt du 23 novembre 1953, req. n° 18857, RO, p. 365) ;
- une mère et son fils qui assure la gestion de l'entreprise, appartenant à sa mère, et au service de laquelle il a apporté son expérience, dès lors qu'il reçoit une rémunération consistant en une participation aux bénéfices et impliquant une participation aux pertes d'égal montant (CE, arrêt du 2 décembre 1970, req. n° 79393, RJ, n° II, p. 227) ;
- une mère et son fils qui, ayant fait partie avec celle-ci d'une société à responsabilité limitée de deux membres, a, après avoir cédé toutes ses parts à la mère, continué de participer activement à la gestion de l'entreprise, fournissant en compte courant une partie du fonds de roulement nécessaire, percevant une rémunération dont le montant non fixé par contrat a fortement varié selon les années, s'obligeant enfin, par la signature de traites, à supporter éventuellement une partie du passif commercial (CE, arrêt du 16 décembre 1970, req. n° 75496, RJ, n° II, p. 243).
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En revanche, la haute assemblée a considéré que l'existence d'une société de fait n'était pas établie dans les cas suivants :
- en vertu d'un contrat de travail entre un père et son fils, celui-ci exerce les fonctions de directeur technique et commercial et dispose à ce titre de larges prérogatives ; mais placé sous l'autorité et le contrôle de son père, il n'a pas, notamment, le pouvoir de signer les déclarations fiscales et les polices d'assurances ; s'il a déposé en compte courant dans la caisse de l'entreprise de son père ses parts annuelles de bénéfices sans recevoir d'intérêt, ces sommes qui pouvaient être retirées à tout moment ne peuvent être considérées comme constituant un apport matériel à l'entreprise précitée (CE, arrêt du 22 décembre 1965, req. n° 64045) ;
- un contribuable soutient que l'entreprise dont il est propriétaire est exploitée par une société de fait existant entre lui, son fils et la femme de ce dernier alors que les activités exercées par le fils et la bru du requérant dans ladite entreprise ne peuvent être considérées comme constituant un apport en industrie (CE, arrêt du 18 mars 1970, req. n° 77618, RJ, n° II, p. 60) ;
- un contribuable soutient que la station de distribution de carburants et lubrifiants dont il est propriétaire est exploitée par une société de fait existant entre sa fille et lui en alléguant notamment le fait que celle-là a reçu procuration sur son compte postal, exerçant ainsi des pouvoirs de direction et de gestion, et qu'elle participe aux bénéfices. Mais il résulte de l'instruction que Monsieur X est seul propriétaire du fonds de commerce, que les factures, contrats et prêts établis, passés ou contractés par l'entreprise sont revêtus de la seule signature du contribuable, que la participation de sa fille à une quote-part des bénéfices n'est pas établie et qu'ainsi les conditions requises pour l'existence d'une société de fait ne sont pas réunies (CE, arrêt du 29 juillet 1983, req. n°s 36282 et 36283).
2. Sociétés de fait entre collatéraux
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Le Conseil d'État a jugé qu'il existe une société de fait entre :
- un contribuable exploitant son fonds de commerce avec le concours de son frère qui dispose des pouvoirs les plus étendus dans la gestion de l'affaire, laisse en compte courant des sommes importantes habituellement non productives d'intérêt, ne reçoit en contrepartie, bien qu'il soit propriétaire de l'immeuble affecté à l'exploitation, aucun loyer et perçoit, en sus d'un traitement fixe, une gratification annuelle variant avec les bénéfices sans leur être exactement proportionnelle, les deux intéressés étant, d'autre part, assurés sur la vie aux frais de l'entreprise (CE, arrêt du 5 novembre 1941, req. n° 71316, RO, p. 310) ;
- deux frères dont l'un, employé comme trésorier par une caisse d'épargne municipale et comme encaisseur par une société de distribution d'électricité, et dont l'autre exerce les fonctions de correspondant financier de divers établissements, dès l'instant qu'ils répartissent entre eux, par moitié, les dépenses et bénéfices afférents à l'ensemble de leurs activités ; l'objection selon laquelle chacun d'eux ne participerait aux opérations de l'autre qu'en qualité de salarié a été rejetée dès lors que les intéressés ne se sont pas soumis réciproquement aux obligations légales des employeurs envers leur personnel (CE, arrêt du 26 octobre 1942. req. n°s 69923 et 69927, RO, p. 190).
3. Sociétés de fait entre époux
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Les sociétés de fait peuvent exister entre époux, quels que soient le régime matrimonial de ceux-ci et l'activité de la société.
4. Sociétés de fait entre une entreprise et ses collaborateurs
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Dans le cas d'un contribuable qui, ayant passé avec une société à responsabilité limitée, pour toute la durée de celle-ci, un contrat dans lequel il s'est engagé à apporter tous ses soins et toutes ses connaissances techniques dans la gestion des affaires de la société, qui perçoit, outre une somme fixe mensuelle, une rémunération proportionnelle aux bénéfices et est appelé à participer aux pertes dans la même proportion, qui est en droit de prendre connaissance des écritures sociales et notamment de l'inventaire annuel et qui, enfin, a versé en compte courant dans la caisse de la société une somme de 75 000 F, il a été jugé qu'il existe entre ce contribuable, qui participe étroitement à la gestion et aux résultats de l'entreprise et ladite société à responsabilité limitée, une véritable société de fait (CE, arrêt du 7 novembre 1938, req. n° 61425, RO, p 479 ; à rapprocher de l'arrêt du 7 novembre 1938, req. n °61426).
De même, deux contribuables qui ont passé entre eux, à la même date, un contrat d'association ni publié ni enregistré et un contrat de travail doivent être regardés comme exploitant l'entreprise en société de fait si les bénéfices sont pratiquement répartis conformément au contrat d'association et si le prétendu salarié a reçu les pouvoirs nécessaires pour agir au nom de son associé (CE, arrêt du 19 mai 1947, req. n° 72350).
Le conseil d'État a également jugé qu'il existe une société de fait entre un agent de change et un de ses employés ayant fondé un service d'opérations sur bons à court terme, lorsque ce dernier qui a pécuniairement contribué à l'installation du service susvisé en assure la direction et jouit d'une large initiative pour se livrer aux divers actes financiers que comporte sa gestion et que l'un et l'autre des intéressés participent, dans une proportion fixée à l'avance aux bénéfices et aux pertes de l'exploitation (CE, arrêt du 5 juillet 1954, req. n° 92353, RO p. 112).
Enfin, un contribuable doit être regardé comme associé de fait dans une entreprise dont il se déclare directeur commercial dès lors qu'il a participé activement à la création et à l'exploitation de l'affaire, qu'il lui a fourni en compte courant les fonds de roulement nécessaires, qu'il est habilité à signer les traites, dispose d'une procuration générale pour utiliser le compte bancaire et reçoit à son nom la majeure partie de la correspondance commerciale, qu'il participe aux résultats de l'exploitation et qu'il perçoit une rémunération proportionnelle aux ventes (CE, arrêt du 26 mai 1967, req. n° 70648, RJCD, 1re partie, p. 145).
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En revanche, la haute assemblée a jugé que ne saurait être considéré comme associé de fait d'une exploitation :
- un représentant technicien nommé fondé de pouvoirs d'une entreprise qui, pendant six années consécutives, a perçu la moitié des bénéfices totaux à titre de commissions et a participé aux pertes dans la proportion de 50 % dès lors que l'Administration n'établit pas par ailleurs qu'il ait fait un apport matériel pour l'exploitation de l'entreprise en cause et qu'il ait eu la qualité d'associé (CE, arrêt du 10 février 1947, req. n° 76465) ;
- un directeur commercial qui perçoit une rémunération égale au tiers des bénéfices réalisés dans l'entreprise, qui prend une part importante à la direction et à la gestion de celle-ci, mais qui n'a pas fait des apports à ladite entreprise et dont la situation ne comporte pas une participation éventuelle aux pertes sur son patrimoine personnel (CE, arrêt du 5 juillet 1958. req. n°s 44149 et 44150 ; à rapprocher de l'arrêt du 29 mai 1957, req. n° 20022) ;
- un salarié pour le seul motif qu'il a pris à la direction et à la gestion de l'affaire une part excédant largement le rôle normal d'un représentant dès lors qu'en fait, il ne jouissait que de pouvoirs limités en ce qui concerne notamment la signature des baux, des déclarations fiscales et des polices d'assurances, que, d'autre part, la somme importante qu'il avait déposée en compte courant, sans intérêt, lui a été restituée à son départ et ne constituait donc pas un apport matériel et qu'enfin, les rémunérations qu'il a perçues n'étaient pas excessives eu égard aux fonctions qu'il assumait dans l'affaire et ne représentaient pas une participation aux bénéfices (CE, arrêt du 7 mai 1962, req. n° 51757, RO, p. 75 ; à rapprocher de l'arrêt du 28 octobre 1946 req. n° 82096, RO, p. 79) ;
- un contribuable qui exploitait un bureau d'agence en douane pour le compte d'un commissionnaire en douane avec lequel il était lié par un contrat de travail lui conférant la qualité de fondé de pouvoirs ; si la rémunération de l'intéressé était fixée par le contrat à 80 % des bénéfices nets dégagés par l'exploitation du bureau d'agence en douane et si le fonds de roulement dudit bureau était fourni par ce dernier, le redevable en cause n'était pas tenu des pertes de l'exploitation sur son patrimoine personnel, rendait quotidiennement compte de sa gestion au commissionnaire lequel d'ailleurs était seul titulaire de l'agrément de commissionnaire en douane donné à titre personnel (CE, arrêt du 30 avril 1975, req. n° 93345).
5. Sociétés déclarées nulles par décision de justice
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Le Conseil d'État a jugé :
- qu'une société anonyme qui, six ans après le jugement ayant prononcé sa nullité, n'a pas encore entrepris sa liquidation et a, non seulement engagé des opérations nouvelles correspondant à l'exercice normal de son industrie, mais encore entrepris des opérations sans rapport avec l'ancien pacte social, doit être considérée non plus comme une société anonyme, mais comme une société de fait (CE, arrêt du 18 juillet 1945, req. n° 76621, RO, p. 295) ;
- qu'une entreprise exploitée pendant une certaine période par une société en nom collectif déclarée nulle par décision de justice est une société de fait. Les résultats dégagés dans cette entreprise pendant ladite période doivent être regardés comme ayant été réalisés par une telle société (CE, arrêt du 17 décembre 1975, req. n° 90991).
II. Régime fiscal de la société créée de fait
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L'article 238 bis L du CGI dispose que les bénéfices réalisés par les sociétés créées de fait sont imposés selon les règles applicables aux sociétés en participation.
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Ces sociétés relèvent donc du régime des sociétés de personnes.
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Compte tenu de leur assimilation quant aux règles d'imposition aux sociétés en participation, les sociétés créées de fait peuvent opter pour l'impôt sur les sociétés. Dans ce cas, les bénéfices sont soumis à cet impôt au niveau de la société.