Date de début de publication du BOI : 19/08/2020
Identifiant juridique : BOI-REC-EVTS-30-30

REC - Evènements affectant l'action en recouvrement - Prescription de l'action en recouvrement - Effets

 

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Susceptible d'être invoqué à tout moment par le débiteur, le moyen tiré de la prescription n'est pas d'ordre public et celle-ci n'opère pas de plein droit. Autrement dit, il ne suffit pas à un débiteur d'être dans la situation de pouvoir en bénéficier pour être libéré, il doit s'en prévaloir lui-même auprès du juge.

I. Principes de droit commun de la prescription

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L’article 2249 du code civil (C. civ.) précise que le paiement effectué pour éteindre une dette ne peut être répété au seul motif que le délai de prescription était expiré.

Par ailleurs, le code civil dispose que seule une prescription acquise est susceptible de renonciation (C. civ. art. 2250).

A. Renonciation tacite ou expresse à la prescription

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Le code civil dispose que seule une prescription acquise est susceptible de renonciation (C. civ. art. 2250).

La renonciation à la prescription ne se présume pas, bien qu’elle puisse être tacite comme expresse (C. civ., art. 2251).

La renonciation expresse n’est soumise à aucune condition de forme. Elle doit toutefois manifester clairement l’intention du débiteur de ne pas invoquer la prescription.

La renonciation tacite, conformément à l'article 2251 du C. civ., résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription.

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Les effets de la renonciation sont limités à celui qui l’a faite et sa renonciation ne peut être opposée à ses codébiteurs ou cautions, l'article 2245 du C. civ. et l'article 2246 du C. civ. n’ayant d’application que dans le cas d’interruption de la prescription.

Les effets de cette renonciation sont également strictement limités à la dette qu’elle concerne, et ne s’étendent donc pas normalement aux pénalités dont celle-ci est assortie.

B. Invocation de la prescription

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La prescription n’opère pas de plein droit. Il ne suffit pas à un débiteur d’être dans la situation de pouvoir en bénéficier pour être libéré. Il lui faut s’en prévaloir et cela dans certaines conditions.

Ainsi, la prescription doit être invoquée devant le juge par le débiteur lui-même qui ne doit pas y avoir renoncé.

Le juge ne peut, en effet, soulever d’office la prescription et déclarer prescrite l’action du créancier, quand bien même il constate que toutes les conditions de la prescription sont réunies (C. civ., art. 2247).

50

En vertu de l’article L. 274 du livre des procédures fiscales (LPF), la prescription de l’action en recouvrement fait disparaître le caractère obligatoire de la dette (obligation civile) et prive le Trésor du droit de contraindre son débiteur au paiement. Cela étant, il est admis traditionnellement qu'une obligation naturelle survit à l'obligation prescrite.

Dès lors, en cas de versement volontaire, celui-ci ne constituerait pas un versement sans cause dont le redevable pourrait demander le remboursement (C. civ., art. 2249).

II. Le contentieux de la prescription

60

Les contestations relatives à l’accomplissement de la prescription de l’action en recouvrement s’inscrivent dans le cadre des oppositions à poursuites régies par les dispositions de l'article L. 281 et suivants du LPF et de l'article R*. 281-1 et suivants du LPF.

C’est en effet à l’occasion de la notification d’actes de poursuites, au sens de l’article L. 281 du LPF que ces contestations sont soulevées.

Il est rappelé que cet article institue une procédure comprenant deux phases successives, l’une administrative, l’autre juridictionnelle (BOI-REC-EVTS-20-10-20).

Dans la phase administrative préalable, la saisine de l’administration s’effectue au moyen d’une demande préalable adressée au chef de service compétent (LPF, art. L. 281).

70

La demande préalable tendant à la constatation de la prescription de l’action en recouvrement doit être présentée au directeur départemental des Finances publiques dans un délai de deux mois à partir de la notification du premier acte de poursuite permettant d’invoquer ce moyen (LPF, art. R*. 281-3-1).

A. Juridictions compétentes

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Il résulte de l’article L. 281 du LPF que les requêtes dirigées contre un acte de poursuite relèvent de la compétence du juge de l’impôt dans la mesure où le requérant entend contester l’existence, la quotité ou l’exigibilité des sommes en cause, et du juge de l’exécution dans la mesure où il conteste la régularité en la forme de l’acte.

Le juge compétent pour examiner le moyen fondé sur la prescription (exigibilité de la créance) est en principe le juge de l’impôt au sens de l’article L281 du LPF (CE, décision du 28 mars 2007 n° 289613, Tribunal des conflits, décision du 17 décembre 2007 n° 07-03643 ; CE, décision du 17 mars 2010 n° 315715)

La compétence territoriale du tribunal administratif, juge de l’impôt (impôts directs, taxe sur la valeur ajoutée (TVA) etc.) est prévue par l’article R. 312-1 du code de justice administrative (CJA).

Le tribunal administratif compétent est celui dans lequel sont exercées les poursuites, entendu comme le département du siège du comptable qui exerce les poursuites (LPF, art. R*. 281-4).

Voir en ce sens, CAA Paris, décision du 15 octobre 2003 n° 99-3682.

La compétence territoriale du tribunal judiciaire, juge de l’impôt (droits d’enregistrement etc.) est prévue par l’article R*. 202-1 du LPF aux termes duquel, le tribunal judiciaire compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le bureau de l’administration chargée du recouvrement.

B. Recevabilité des moyens

90

Les règles applicables sont celles du contentieux du recouvrement, à l’article R*. 281-5 du LPF. Ce texte énonce que le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées lors de la réclamation préalable devant le chef de service.

Les redevables ne peuvent ainsi ni soumettre des pièces justificatives autres que celles qu’ils ont déjà produites à l’appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires.

100

Selon les juges de l’ordre administratif, les dispositions de l’article R*. 281-5 du LPF ne font pas obstacle à ce que le contribuable soulève devant le tribunal administratif ou devant la cour administrative d’appel jusqu’à la clôture de l’instruction, des moyens de droit nouveaux, à la condition que ces derniers n’impliquent pas l’appréciation de pièces justificatives ou de circonstances de fait qu’il lui eût appartenu de produire ou d’exposer dans sa demande au chef de service (pour la prescription CE, décision du 28 mars 2007 n° 289613 ; CE, décision du 5 mai 2010 n° 293915).

110

Le Conseil d'État adopte sur ce point une position plus favorable au contribuable que celle de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, selon laquelle tout moyen est irrecevable s’il n’a pas été invoqué dans la réclamation préalable adressée au chef de service (Cass. com. décision du 2 mai 2007 n° 06-14277).

La prescription doit être invoquée devant le juge par le débiteur lui-même qui ne doit pas y avoir renoncé. Ce moyen n’est pas d’ordre public.

120

En conséquence, le juge ne peut, de sa propre initiative, déclarer prescrite l’action du créancier, quand bien même il constate que toutes les conditions de la prescription sont réunies.

Ce principe, rappelé par l’article 2247 du C. civ., a été confirmé à de multiples reprises par la jurisprudence dans le domaine de la prescription de l’action en recouvrement des créances fiscales (notamment, CE, décision du 17 mars 1999, n° 163929 ; CE, décision du 5 mai 2010 n° 293915).