ENR - Mutations à titre gratuit - Successions - Tarifs et liquidation des droits - Cas particuliers
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La présente section est consacrée à l'étude des dispositions régissant la liquidation des droits de mutation à titre gratuit dans certains cas particuliers, à savoir :
- les transmissions entre adoptants et adoptés ;
- les dons et legs aux pupilles de l’État ou de la Nation et enfants en garde ;
- les transmissions au profit des enfants naturels ;
- les transmissions à la suite d'une renonciation ;
- le mécanisme de représentation ;
- les successions vacantes ;
- les dons et legs aux collectivités publiques.
I. Transmissions entre adoptants et adoptés
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La loi n° 66-500 du 11 juillet 1966 portant réforme de l'adoption a institué deux formes d'adoption : l'adoption plénière et l'adoption simple.
Depuis l'entrée en vigueur de ce texte, tout adopté appartient obligatoirement à l'une de ces deux catégories même si l'adoption a été prononcée sous le régime antérieur : c'est ainsi que l'adoption antérieurement prononcée emporte les mêmes effets que l'adoption simple, alors que la légitimation adoptive emporte les mêmes effets que l'adoption plénière.
A. Adoption plénière
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L'adoption plénière confère à l'adopté, dans la famille de l'adoptant, les mêmes droits et les mêmes obligations qu'un enfant légitime, naturel reconnu ou adultérin reconnu.
Remarque : La loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral a consacré au plan successoral un strict principe d'égalité des enfants quelle que soit la nature de leur filiation. Il y a lieu de se reporter sur ce point au III § 210 et suivants.
Dès lors, les transmissions qui interviennent entre adoptants et adoptés ayant fait l'objet d'une adoption plénière bénéficient de plein droit du régime fiscal des transmissions à titre gratuit en ligne directe, qu'elles aient lieu en voie descendante ou ascendante. Il suffit aux parties d'établir la nature du lien qui les unit à la date de la mutation.
B. Adoption simple
1. Principe
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Pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, il n'est pas tenu compte du lien de parenté résultant de l'adoption simple (code général des impôts (CGI), art. 786).
Il en résulte que dans les hypothèses où un adopté simple recueille la succession de l'adoptant, les droits de mutation par décès sont perçus au tarif prévu pour le lien de parenté naturelle existant entre eux ou, le cas échéant, au tarif applicable aux transmissions entre personnes non-parentes.
Remarque : En ce qui concerne les adoptions antérieures à la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966, il y a lieu de considérer que l'article 786 du CGI concerne les adoptions proprement dites et ne vise pas les légitimations adoptives.
2. Exceptions
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L'article 786 du CGI prévoit un certain nombre d'exceptions à ce principe, de sorte que les transmissions ainsi visées sont imposées selon le régime fiscal applicable aux transmissions en ligne directe.
a. Transmissions entrant dans les prévisions de l'alinéa 1er de l'article 368-1 du code civil
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L'article 786 du CGI vise le cas du décès de l'adopté sans descendance ni conjoint et prévoit l'exercice du droit de retour pour les biens donnés par l'adoptant ou recueillis dans sa succession.
b. Transmissions en faveur des enfants issus d'un premier mariage du conjoint de l'adoptant
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Il est sans importance que le mariage de l'adoptant avec le père ou la mère de l'adopté soit antérieur ou postérieur à l'adoption. Il est admis que cette exception profite aux descendants des enfants issus d'un premier mariage du conjoint de l'adoptant.
De même, les dispositions du 1° de l'article 786 du CGI sont applicables dans le cas des transmissions à titre gratuit à un enfant issu d'un premier mariage du conjoint de l'adoptant même si le mariage entre son père ou sa mère et l'adoptant a été rompu par divorce, à condition que l'adoption soit intervenue pendant le mariage.
Dans le cas où l'adoptant ou son conjoint a contracté plusieurs mariages, l'expression « premier mariage » doit s'entendre au sens de « précédent mariage ».
Pour l'application du 1° de l'article 786 du CGI il a été admis d'assimiler à un enfant « issu d'un premier mariage du conjoint de l'adoptant » :
- l'enfant naturel reconnu du conjoint de l'adoptant, sous réserve bien entendu que la filiation de l'enfant soit légalement établie ;
- l'enfant ayant fait l'objet d'une adoption plénière par le conjoint de l'adoptant.
c. Transmissions en faveur des pupilles de la Nation ou de l’État ainsi que d'orphelins d'un père mort pour la France
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Cette disposition (CGI, art. 786, 2°) s'applique quel que soit l'âge de l'adopté au moment du décès ou de l'adoption.
d. Successions en faveur d'adoptés mineurs au moment du décès de l'adoptant
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Le 3° de l'article 786 du CGI vise l'ensemble des adoptés simples mineurs au moment du décès de l'adoptant .
Remarque : L'article 36 de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l'enfant a modifié le 3° de l'article 786 du CGI en supprimant la condition de secours et de soins non interrompus pour les adoptés mineurs au moment du décès de l'adoptant.
e. Transmissions en faveur d'adoptés ayant reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus pendant une durée minimale
1° Principe
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En application des 3° et 3° bis de l'article 786 du CGI, sont concernés par cette exception :
- pour les donations uniquement : les adoptés mineurs au moment de la donation consentie par l'adoptant qui, pendant cinq ans au moins, ont reçu de celui-ci des secours et des soins non interrompus au titre d'une prise en charge continue et principale ;
- pour toutes les transmissions à titre gratuit (donations et successions) : les adoptés majeurs qui, soit dans leur minorité et pendant cinq ans au moins, soit dans leur minorité et leur majorité et pendant dix ans au moins, auront reçu de l'adoptant des secours et des soins non interrompus au titre d'une prise en charge continue et principale.
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Hors, les cas de transmissions par décès pendant la minorité de l'adopté (cf. I-B-2-d § 72), l'adopté qui demande le bénéfice des dispositions du 3° ou du 3° bis de l'article 786 du CGI doit apporter la preuve qu'il a reçu des secours et des soins non interrompus de l'adoptant pendant la durée minimale prévue par la loi.
La notion de secours et de soins ininterrompus n'impose pas une prise en charge exclusive, mais seulement continue et principale, de l'adopté simple par l'adoptant (Cass. com., arrêt du 6 mai 2014, pourvoi n° 12-21835, ECLI:FR:CCASS:2014:CO00450).
Sous réserve des règles précitées, la circonstance que l'adopté a bénéficié d'un régime d'aide sociale n'est pas de nature à le priver, à elle seule, pour la liquidation de la succession de l'adoptant, de l'application du tarif des droits de mutation en ligne directe. (RM Carrillon-Couvreur n° 108304, JO AN du 26 décembre 2006, p.13640 et RM Darciaux n° 109933, JO AN du 26 décembre 2006, p. 13640).
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La preuve que l'adopté a reçu des secours et des soins non interrompus de l'adoptant pendant la durée minimale prévue par la loi doit être fournie dans les formes compatibles avec la procédure écrite au moyen de documents tels que quittances, factures, lettres missives et papiers domestiques.
Le témoignage est, en principe, exclu même sous forme d'attestation ou de certificat de notoriété. Toutefois, il peut être produit pour corroborer d’autres moyens de preuve.
L'appréciation de la valeur probante des documents produits constitue une question de fait qui doit être examinée de manière libérale par le service. Ainsi, il peut être tenu compte du jugement d'adoption s'il ressort de celui-ci de façon suffisamment précise que les conditions prévues aux 3° ou 3° bis de l'article 786 du CGI sont remplies.
2° Cas particuliers
a° Enfant adopté recueillant la succession d'un auteur de l'adoptant
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Les droits de mutation par décès sont perçus au tarif en ligne directe dans le cas d'un enfant adopté recueillant la succession d'un parent de son père adoptif si l'adopté a été considéré, lors du décès de l'adoptant, comme remplissant les conditions des 3° et 3° bis de l'article 786 du CGI.
b° Enfant adopté ayant rompu ses liens avec sa famille naturelle et faisant l'objet d'une nouvelle adoption simple par ses parents naturels après le décès du premier adoptant
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Dans cette hypothèse, il n'est tenu compte, pour la perception des droits de mutation, du lien de parenté résultant de cette seconde adoption que si la preuve est apportée que l'adopté a reçu dans sa minorité des secours et des soins non interrompus des adoptants pendant la durée minimale de cinq ans prévue par la loi.
f. Transmissions en faveur d'adoptés dont le ou les adoptants ont perdu, morts pour la France, tous leurs descendants en ligne directe
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La justification de cette situation, visée au 4° de l'article 786 du CGI, résulte de la production d'un certificat délivré par l'autorité militaire.
g. Transmissions en faveur d'adoptés dont les liens de parenté avec la famille naturelle ont été déclarés rompus par le tribunal saisi de la requête en adoption sous le régime antérieur à l'entrée en vigueur de la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966
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La production par l'adopté d'une expédition du jugement d'adoption suffit à établir que cette condition, prévue au 5° de l'article 786 du CGI, est remplie.
h. Transmissions en faveur des successibles en ligne directe descendante des personnes visées aux n° 1 à 5 de l'article 786 du CGI
140
Les dispositions du premier alinéa de l'article 786 du CGI dont il résulte qu'il n'est pas tenu compte, pour la perception des droits de mutation à titre gratuit, du lien de parenté résultant de l'adoption simple, ne sont pas applicables aux transmissions en faveur des successibles en ligne directe descendante des personnes visées aux 1° à 5° (CGI, art. 786, 6°).
i. Transmissions en faveur des adoptés anciens déportés politiques ou enfants de déportés n'ayant pas de famille naturelle en ligne directe
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Les intéressés doivent produire, d'une part, les pièces d'état civil établissant l'absence de famille naturelle en ligne directe, d'autre part, un certificat délivré par le directeur départemental des anciens combattants et victimes de la guerre justifiant leur qualité d'ancien déporté ou d'enfant de déporté.
Il est admis que la présence d'un ascendant de l'adopté ne met pas obstacle à l'application de cette disposition.
Remarque : La loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral a consacré au plan successoral un strict principe d'égalité des enfants quelle que soit la nature de leur filiation.Il y a lieu de se reporter sur ce point au III § 210 et suivants.
j. Transmission des biens de l'adopté à l'adoptant ou à l'enfant de l'adoptant
160
Lorsque l'adopté prédécédé entre dans l'un des cas visés à l'article 786 du CGI, la succession recueillie par l'adoptant est soumise au régime fiscal des mutations à titre gratuit en ligne directe.
Dans les mêmes cas, la transmission des biens de l'adopté à l'enfant de l'adoptant (légitime, naturel reconnu ou adultérin reconnu) peut bénéficier du tarif prévu entre frères et sœurs.
II. Transmissions consenties aux pupilles de l’État ou de la Nation et enfants en garde
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L'article 787 A du CGI dispose que, bénéficient du régime fiscal des mutations à titre gratuit en ligne directe, lorsque le donateur ou le défunt a pourvu à leur entretien pendant cinq années au moins au cours de leur minorité, les dons et legs consentis :
- aux pupilles de l'État ou de la Nation ;
- aux enfants visés au 3° de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles.
Il est admis que ce régime s'applique également sous les mêmes conditions aux successions dévolues conformément à la loi (succession ab intestat).
A. Transmissions à titre gratuit entre parents nourriciers et pupilles de l'Etat ou de la Nation
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Deux conditions doivent être réunies pour que ce régime s'applique :
- première condition : le bénéficiaire du don ou du legs doit être pupille de l'État ou de la Nation.
Les pupilles de l'État, sont énumérés à l'article L. 224-4 du code de l'action sociale et des familles. Les pupilles de la Nation sont les orphelins de père ou de mère ou de soutien de famille, victimes d'événements de guerre ou de terrorismes ou assimilés, visés de l'article L. 411-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre à l'article L. 411-11 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Le donataire ou légataire qui demande le bénéfice de ces dispositions peut justifier de sa qualité de pupille de l'État ou de la Nation par tout mode de preuve en sa possession compatible avec la procédure écrite (copie de décision judiciaire, carte de pupille de la Nation, carnet de santé, etc.) ;
- deuxième condition : le donateur ou le testateur doit avoir pourvu à l'entretien du bénéficiaire pendant cinq ans au moins au cours de sa minorité, soit avant l'âge de dix-huit ans. Cette condition, analogue à celles prévues aux 3° et 3° bis de l'article 786 du CGI en cas d'adoption simple, comporte la même interprétation et les mêmes justifications (cf. I-B-2-e § 75 à 110). Il est rappelé que le service doit faire preuve de libéralisme dans l'appréciation de la valeur probante des documents produits.
190
Lorsque les deux conditions ci-dessus sont réunies, la donation ou le legs est soumis au régime fiscal des transmissions en ligne directe à tous points de vue, quel que soit l'âge du légataire ou du donataire au jour du décès ou de la donation.
A donc été étendu aux libéralités consenties aux pupilles de l’État ou de la Nation par leurs parents nourriciers (ayant pourvu à leur entretien pendant cinq ans au moins au cours de leur minorité) le régime fiscal prévu au profit de certains adoptés par l'article 786 du CGI .
Cette extension ne saurait toutefois s'appliquer à la totalité des enfants recueillis n'ayant pas bénéficié d'un jugement d'adoption simple (RM Vivien n° 32799, JO AN du 3 novembre 1980, p. 4635).
La Cour de Cassation a confirmé cette solution et précisé que la réponse ministérielle précitée n'a pas davantage permis d'étendre à la totalité des enfants recueillis, qui ne sont pas pupilles de l’État ou de la Nation, le bénéfice du tarif des mutations à titre gratuit applicable en ligne directe (Cass. com.,arrêt du 21 mars 1995, pourvoi n° 93-18462).
B. Transmissions entre parents nourriciers et enfants en garde
200
Pour pouvoir être assujettis au droit de mutation à titre gratuit en ligne directe, les dons et le legs en cause doivent être consentis, par des donateurs remplissant la condition prévue à l'article 787 A du CGI, à des enfants visés à l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles.
Il s'agit donc d'enfants dont les parents ont fait l'objet d'un retrait partiel de l'autorité parentale, ou dont la garde de droit a été confiée au service de l'aide sociale à l'enfance.
Le donataire ou le légataire qui demande le bénéfice de ces dispositions peut justifier de sa qualité d'enfant visé à l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles par tout mode de preuve en sa possession compatible avec la procédure écrite (copie de décision judiciaire, arrêté d'admission du mineur auprès du service de l'aide sociale à l'enfance, etc.).
III. Transmissions au profit d'un enfant naturel reconnu
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La loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral a supprimé la limitation des droits successoraux des enfants adultérins. Cette loi a consacré au plan successoral un strict principe d'égalité des enfants quelle que soit la nature de leur filiation.
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Les transmissions à titre gratuit qui interviennent entre personnes liées par une parenté naturelle établie bénéficient du même régime fiscal que si elles étaient unies par un lien légitime.
Ainsi, l'enfant naturel reconnu, appelé à la succession ab intestat ou testamentaire de son auteur, est considéré comme un enfant légitime pour la perception des droits de mutation à titre gratuit.
Remarque : Les enfants « adultérins » ou incestueux bénéficient du régime des transmissions en ligne directe, lorsque ces enfants sont reconnus.
Par suite, il bénéficie de l'abattement prévu au I de l'article 779 du CGI et de l'application du tarif des transmissions en ligne directe.
En revanche, le legs fait par une personne à son enfant naturel non reconnu est passible du droit au tarif des non-parents (BOI-ENR-DMTG-10-50-30).
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De même, les libéralités consenties par des grands-parents aux enfants naturels reconnus de leurs propres enfants sont soumises au régime fiscal des transmissions en ligne directe (BOI-ENR-DMTG-10-50-30). Pour l'application de l'abattement prévu au I de l'article 779 du CGI, les petits-enfants sont considérés comme représentant leur auteur lorsque ce dernier est prédécédé.
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Dans le cas d'enfant naturel légitimé et adopté par le conjoint de son ascendant, il y a lieu de se reporter au I-B-2-b § 60.
IV. Renonciation à la succession
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Les règles diffèrent selon que la renonciation est pure et simple ou translative.
A. Renonciation pure et simple
1. Dispositif civil
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La loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités a introduit en droit successoral la possibilité pour un héritier de renoncer à une succession et de se faire représenter par ses descendants. Cette loi a modifié l’article 754 du code civil afin de permettre la représentation des renonçants dans les successions dévolues en ligne directe ou collatérale, alors qu’auparavant seule la représentation du prédécédé ou de l’indigne était autorisée.
Depuis le 1er janvier 2007 et sous réserve du rapport des libéralités auquel le renonçant peut être expressément astreint par le disposant, la part du renonçant échoit à ses représentants ; à défaut, elle accroît à ses cohéritiers ; s’il est seul, elle est dévolue au degré subséquent (code civil, art. 805).
En conséquence, depuis cette date, la représentation de l’héritier renonçant est possible mais uniquement dans les successions dévolues en ligne directe ou collatérale. Il en résulte que les petits-enfants pourront, du fait de la renonciation de leur auteur direct, hériter directement de leur grand-père ou grand-mère.
De même, les neveux du défunt peuvent représenter leur père ou leur mère renonçant dans la succession de leur oncle.
2. Incidences fiscales
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Dans l’hypothèse visée à l’article 754 du code civil dans laquelle un héritier renonce à une succession, les droits dus par les héritiers acceptants, c'est-à-dire les descendants du renonçant, sont calculés comme si ces derniers avaient été les bénéficiaires directs de la succession. En conséquence, il n'y a donc plus lieu, dans cette situation, de procéder à une double liquidation des droits.
Les représentants d’un renonçant se partagent l’abattement personnel dont aurait dû bénéficier ce dernier (CGI, art. 779, I et IV). Cette règle de liquidation est donc identique à celle applicable en cas de représentation d’un parent prédécédé.
A cet égard, il est précisé que dans l’hypothèse où le partage de l’abattement du renonçant entre ses représentants aboutit à ce que chacun d’eux dispose d’un abattement inférieur à celui visé au IV de l'article 788 du CGI, il y a lieu d’appliquer sur la part de chacun l’abattement visé au IV de l’article 788 du CGI.
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S'agissant de la détermination des droits de succession en cas de renonciation de l'enfant unique du défunt au profit de ses propres enfants (RM Le Nay n° 86052, JO AN du 23 novembre 2010 p. 12822).
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S'agissant de la double renonciation à une succession en vue d'une donation :
RES N° 2008/17 du 22 juillet 2008 : Double renonciation à une succession en vue d'une donation.
Question :
La soeur d'une personne décédée sans descendance peut-elle renoncer en son nom propre et pour celui de ses enfants mineurs à la succession au profit de sa mère, seule autre co-héritière, de façon à ce que cette dernière, alors attributaire de la totalité de l'actif successoral, consente immédiatement après, au profit de ses petits-enfants, la donation d'une somme correspondant aux droits que ces derniers auraient eu dans la succession de leur oncle du fait de la renonciation de leur mère ?
Réponse :
La réforme des successions et des libéralités a pour objectif de favoriser les transmissions anticipées entre générations. Dans cet esprit, la représentation fiscale a été étendue aux héritiers renonçants dans une succession dévolue en ligne directe descendante ou en ligne collatérale. Ainsi, la part de la soeur du défunt, renonçant en son seul nom, échoit désormais à ses enfants, taxés en fonction du lien de parenté les unissant au défunt.
Au cas particulier, la renonciation de la soeur du défunt pour le compte de ses enfants mineurs, suivie de la donation par leur grand-mère de l'actif successoral ainsi reçu, conduit à attribuer aux petits-enfants les droits qui leur auraient été dévolus dans la succession de leur oncle du fait de la renonciation de leur mère. Cette double renonciation ne présente donc aucun intérêt économique ou patrimonial. Le seul intérêt de cette double renonciation est de nature fiscale puisqu'elle permet artificiellement de taxer au tarif applicable en ligne directe, une transmission entre un oncle et ses neveux.
Dès lors, la réalisation de ces opérations est constitutive d'un abus de droit et susceptible d'être remise en cause dans le cadre d'une procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales..
B. Renonciation translative
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Les renonciations translatives, c'est-à-dire celles consenties au profit d'une personne déterminée qui l'accepte, sont considérées comme opérant une double mutation taxable aux droits de mutation à titre gratuit.
En effet, la renonciation faite au profit d'une personne déterminée qui l'accepte opère un transfert de propriété entre le renonçant et le bénéficiaire de la renonciation. Elle suppose donc de la part de l'héritier l’acceptation de la succession dont il dispose ensuite. En conséquence, les droits de mutation par décès sont dus par le renonçant sur sa part successorale et le bénéficiaire de la renonciation doit acquitter les droits exigibles sur la donation qui lui est faite. Toutefois, les droits de donation ne sont exigibles que si l'accroissement de la part du bénéficiaire de la renonciation résulte de la seule volonté du renonçant. En outre, lorsqu'elle ne modifie pas, en fait, les règles de la dévolution légale, la renonciation en faveur d'une personne déterminée est assimilée à une renonciation pure et simple.
V. Mécanisme de la représentation
A. Champ d'application de la représentation
1. Application du mécanisme de la représentation en matière de succession
a. Application de la représentation aux successions « ab intestat »
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Conformément aux articles 751 et suivants du code civil, la représentation permet d'appeler à la succession les représentants aux droits du représenté.
On représente les prédécédés et les renonçants à une succession.
La représentation a lieu à l'infini dans la ligne directe descendante et, en ligne collatérale, en faveur des descendants des frères ou sœurs du défunt.
En revanche, s'agissant des successions réglées par la volonté du défunt, une disposition testamentaire est caduque si celui en faveur duquel elle a été faite n'a pas survécu au testateur (code civil, art. 1039), sauf s'il résulte clairement des termes du testament que l'intention de son auteur était d'appeler les descendants du légataire, en cas de prédécès de ce dernier, au bénéfice du legs.
Ainsi, la représentation n'existe pas à l'égard des dispositions testamentaires. Dans le cas où le testateur a appelé, dans le testament, les descendants du légataire au bénéfice du legs, ceux-ci bénéficient du legs par la volonté du testateur et non par l'effet du mécanisme de la représentation.
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Sur le plan fiscal, l'article 777 du CGI et l'article 779 du CGI permettent d'appliquer la représentation aux seules successions ab intestat, c'est-à-dire sans testament et dont les biens sont attribués aux héritiers selon les règles fixées par la loi civile.
b. Application de la représentation, en matière de successions, en cas de pluralité de souches seulement, sauf dérogation
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En application de l'article 752 du code civil et de l'article 752-2 du code civil, la représentation étant destinée à assurer l'égalité entre les souches, elle postule leur pluralité et ne peut donc pas jouer en présence d'une souche unique.
Par exception, en matière fiscale, il est dérogé à ce principe pour les héritiers en ligne directe descendante.
En effet, dans la situation où un petit-enfant est appelé à la succession de son grand-père du fait du prédécès de son père, enfant unique, il est admis l'application de l'abattement prévu au I de l'article 779 du CGI en faveur de l'enfant prédécédé sur la part successorale revenant au petit-enfant.
S'agissant des collatéraux, aucune dérogation n'est admise. La représentation ne s'applique qu'en cas de pluralité de frères ou sœurs du défunt, vivants ou ayant des descendants (RM Candelier n° 54899, JO AN du 26 janvier 2010, p.846).
Par ailleurs, il est précisé que la circonstance qu'une succession est dévolue à des neveux issus de parents différents qui ne sont pas en concurrence avec des héritiers vivants d'un degré plus proche, c'est-à-dire des frères ou sœurs du défunt, ne fait pas obstacle au mécanisme de la représentation.
En présence d'une pluralité de frères ou sœurs du défunt, le mécanisme de la représentation ne peut cependant être invoqué lorsqu'il y a renonciation des autres souches, laissant ainsi un seul ou des neveux issus du même frère ou de la même sœur pour recueillir la succession.
2. Inapplication de la représentation aux sommes transmises dans le cadre d'un contrat d'assurance-vie
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Conformément à l'article L. 132-12 du code des assurances, les sommes payées en vertu d'un contrat d'assurance-vie à un bénéficiaire déterminé ne font pas partie de la succession de l'assuré. Dans cette situation, les droits de mutation par décès sont donc calculés suivant le degré de parenté existant entre le bénéficiaire et l'assuré décédé (CGI, art. 757 B).
Remarque : Lorsqu'elles n'entrent pas dans le champ de l'article 757 B, les sommes, rentes ou valeurs quelconques dues directement ou indirectement par un ou plusieurs organismes d'assurance et assimilés, à raison du décès de l'assuré, sont soumises au prélèvement ad hoc de l'article 990 I du CGI (BOI-TCAS-AUT-60).
L'assurance-vie étant une stipulation pour autrui, lorsque aucun bénéficiaire n'est déterminé, ou que celui-ci est décédé, les sommes viennent s'ajouter à l'actif successoral. Il n'est donc pas possible d'être bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie par représentation d'un bénéficiaire prédécédé.
Dans le cas particulier où le bénéficiaire désigné décède après l'assuré, mais sans avoir déclaré son acceptation, et en l'absence de bénéficiaire en sous-ordre, les sommes reviennent aux héritiers du bénéficiaire (Cass. Civ., arrêt du 9 juin 1998, pourvoi n° 96-10794).
3. Application du mécanisme de la représentation en droit fiscal pour certaines transmissions à titre gratuit entre vifs
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Se reporter au RES N° 2010/58 repris au BOI-ENR-DMTG-20-30-20-10 au II § 40.
4. Descendants d'adoptés simples répondant aux conditions prévues au 6° de l'article 786 du CGI
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Se reporter au RES N° 2010/58 repris au BOI-ENR-DMTG-20-30-20-10 au II § 40.
B. Conséquences au regard de la liquidation des droits
1. Cas de non application de la représentation
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Se reporter au RES N° 2010/58 repris au BOI-ENR-DMTG-20-30-20-10 au II § 40.
2. Cas d'application de la représentation
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Se reporter au RES N° 2010/58 repris au BOI-ENR-DMTG-20-30-20-10 au II § 40.
3. Cas du représentant également bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie conclu par le défunt
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Dans cette situation, et dès lors que le mécanisme de la représentation ne s'applique pas en matière d'assurance-vie (cf. V-A-II-§ 340), il y a lieu de procéder à une « double liquidation ».
Ainsi, lorsqu'un petit-fils vient à la succession de son grand-père par représentation de son père prédécédé et qu'il est par ailleurs également bénéficiaire, à titre personnel, d'un contrat d'assurance-vie souscrit par son grand-père, il y a lieu de procéder à une « double liquidation » :
- application de l'abattement prévu pour les enfants au I de l'article 779 du CGI sur la part attribuée par succession en représentation du fils prédécédé ;
- application de l'abattement prévu au IV de l'article 788 du CGI (à défaut d'un autre abattement applicable) sur les sommes versées en raison d'un contrat d'assurance-vie et imposées en vertu des dispositions de l'article 757 B du CGI ou de l'article 990 I du CGI.
De même, si un neveu vient à la succession de son oncle par représentation du frère prédécédé et qu'il est également bénéficiaire, à titre personnel, d'un contrat d'assurance-vie souscrit par son oncle, il y a lieu d'effectuer une « double liquidation »
Ainsi, si un neveu vient à la succession de son oncle par représentation du frère prédécédé de ce dernier, et est également légataire particulier d'un bien et bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie souscrit par son oncle, il y a lieu d'effectuer une distinction entre deux masses taxables. D'une part, les biens reçus par voie légale pour lesquels le mécanisme de la représentation s'applique : il convient alors d'imposer la transmission selon l'abattement et le tarif prévus pour les frères et sœurs. D'autre part, les biens reçus par voie de legs ainsi que les sommes reçues au titre de l'assurance-vie qu'il convient de taxer, au-delà de l'abattement spécifique de 30 500 € réparti entre les différents bénéficiaires de contrats d'assurance-vie, selon l'abattement personnel et le tarif prévus pour les neveux.(RM Le Nay n° 59852, JO AN du 23 février 2010, p. 2052).
400
En revanche, lorsqu'un petit-fils vient à la succession de son grand-père par représentation de son père prédécédé, lequel était également unique bénéficiaire désigné d'un contrat d'assurance-vie souscrit par le grand-père, il n'y a pas lieu de procéder à une « double liquidation ».
En effet, dans ce cas de figure, dès lors que le contrat d'assurance-vie ne prévoit pas de bénéficiaire déterminé autre que le père prédécédé, les sommes viennent de fait s'ajouter à l'actif successoral.
Dans ces conditions, les sommes issues du contrat d'assurance-vie ont pour effet d'augmenter l'actif héréditaire taxable et sont imposées selon les règles de droit commun applicables aux successions.
Ainsi, sur la part attribuée par succession en représentation du fils prédécédé, les droits sont liquidés en tenant compte de l'abattement visé au I de l'article 779 du CGI et du barème en ligne directe prévu à l'article 777 du CGI.
410
Il est précisé que, lorsque la désignation d'un bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie est effectuée par la formule « à défaut mes héritiers », ceux-ci sont considérés comme des bénéficiaires déterminés du contrat (BOI-ENR-DMTG-10-10-10-20). Aussi les sommes ne font-elles pas partie de la succession du contractant, mais constituent un droit de créance direct à l'encontre de l'assureur au profit exclusif des bénéficiaires. Une double liquidation est alors justifiée pour chaque héritier, pris, d'une part, en qualité de successible par représentation, et, d'autre part, en tant que bénéficiaire direct et personnel du contrat d'assurance-vie.
VI. Successions vacantes
420
Lorsqu'il n'existe aucun héritier connu, les droits sont liquidés au tarif applicable aux transmissions entre personnes parentes au-delà du quatrième degré ou personnes non parentes. S'il se présente ultérieurement des héritiers d'un rang plus proche, la liquidation est révisée et le trop-perçu restitué sur demande déposée dans les délais de réclamation de droit commun.
En revanche, lorsqu'il y a des héritiers connus, mais qui ont renoncé à la succession, les droits sont liquidés au tarif applicable d'après le degré de parenté de ces héritiers avec le défunt.
VII. Dons et legs aux établissements publics ou d'utilité publique
430
En vertu de l'article 777 du CGI et sous réserve des exonérations prévues au I de l'article 794 du CGI, à l'article 795 du CGI et à l'article 795-0 A du CGI (BOI-ENR-DMTG-10-20-20), les établissements publics ou d'utilité publique sont soumis pour les dons et les legs qu'ils reçoivent au tarif prévu pour les successions entre frères et sœurs.