Date de début de publication du BOI : 03/05/2017
Identifiant juridique : BOI-BIC-PVMV-30-30-120

BIC - Plus-values et moins-values du portefeuille-titres - Limitation de la déduction des moins-values sur titres de participation cédés dans les deux ans de leur émission

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L'article 18 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, codifié au 2 bis de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts (CGI), limite la déduction des moins-values résultant de la cession, moins de deux ans après leur émission, de titres de participation reçus en contrepartie d’un apport, lorsqu’à la date de leur émission, les titres reçus avaient une valeur réelle inférieure à la valeur d’inscription en comptabilité.

Désormais, la moins-value à court terme, résultant de la cession de titres de participation, n’est plus déductible à hauteur de la différence entre la valeur d’inscription en comptabilité des titres et leur valeur réelle à la date de leur émission. 

Ce dispositif s'applique aux cessions de titres reçus en contrepartie des apports réalisés à compter du 19 juillet 2012. L'entrée en vigueur du dispositif s'apprécie donc à la date de réalisation définitive de l'opération au sens de l'article L. 236-4 du code de commerce, quelle que soit la date d'effet rétroactif convenue par les sociétés apporteuse et bénéficiaire de l'apport.

I. Champ d’application du dispositif

A.  Entreprises concernées

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Sont soumises au présent dispositif les entreprises relevant de l’impôt sur le revenu, imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles déterminés selon les règles prévues à l’article 72 du CGI et des bénéfices non commerciaux déterminés conformément aux dispositions de l’article 93 quater du CGI, ainsi qu'aux établissements français des entreprises étrangères dont les bénéfices sont imposables en France tant au regard des critères de droit interne (BOI-IR-CHAMP-10) que de ceux définis par les conventions fiscales (BOI-INT-DG-20-10-20).

Les dispositions du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du CGI s’appliquent également aux sociétés et organismes soumis de plein droit ou sur option à l’impôt sur les sociétés selon les dispositions de l'article 206 du CGI et de l’article 209 du CGI, ainsi qu’aux établissements français d’une société étrangère qui remplissent les conditions pour être soumis à l’impôt sur les sociétés en France tant au regard des critères de droit interne retenus par la jurisprudence administrative (BOI-IS-CHAMP-60-10-30), que de ceux définis par les conventions fiscales (BOI-INT-DG-20-10-20).

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Par ailleurs, le présent dispositif s'applique aux sociétés ou groupements mentionnés à l'article 8 du CGI, à l'article 8 quinquies du CGI, à l'article 239 quater du CGI, à l'article 239 quater B du CGI, à l'article 239 quater C du CGI ou à l'article 239 quater D du CGI dont les bénéfices sont imposés, en application de l'article 238 bis K du CGI, à l'impôt sur le revenu en catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles ou des bénéfices non commerciaux, ou à l'impôt sur les sociétés.

B. Titres de participation concernés

1. Nature des titres

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La moins-value dont la déduction est limitée en application de la présente mesure est celle résultant de la cession de titres de participation.

Sont visés par le présent dispositif, les titres de participation définis au dix huitième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 du CGI :

- les titres de participation au sens strict, c'est-à-dire les parts ou actions revêtant ce caractère sur le plan comptable ;

- les actions acquises en exécution d'une offre publique d'achat ou d'échange dont l'entreprise détentrice est l'initiatrice, si ces actions sont inscrites en comptabilité au compte titres de participation ou à une subdivision spéciale d'un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable ;

- les titres ouvrant droit au régime des sociétés mères si ces titres sont inscrits en comptabilité au compte titres de participation ou à une subdivision spéciale d'un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable et si la société mère détient au moins 5 % des droits de vote de la société émettrice.

Pour l'ensemble de ces notions, il convient de se reporter au BOI-BIC-PVMV-30-10.

2. Origine des titres

40

Les titres de participation concernés par la présente mesure sont ceux faisant l'objet d'une émission nouvelle en contrepartie d’un apport. Ainsi, ne sont pas concernés par la mesure les titres acquis à titre onéreux, ni ceux remis dans le cadre d’une incorporation de réserves au capital.

Les apports en contrepartie desquels les titres de participation sont reçus peuvent être réalisés sous différentes formes, notamment en numéraire ou en nature, y compris par compensation avec des créances liquides et exigibles.

Les apports susceptibles d'entrer dans le champ de la mesure sont aussi bien les apports d'actifs isolés que les apports partiels d'actifs portant sur des branches complètes d'activité.

Cas des cessions de titres de participation reçus dans le cadre d'opérations d'apports et de fusion soumis au régime spécial :

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Le régime spécial prévu à l'article 210 A du CGI et à l'article 210 B du CGI permet, sous certaines conditions, de surseoir à l'imposition des plus-values latentes afférentes aux éléments d'actifs transmis dans le cadre d'une opération de fusion, de scission ou d'apport partiel d'actif, ces opérations de restructuration revêtant alors un caractère intercalaire (BOI-IS-FUS-10-20-40).

Lorsque des titres ont été reçus par une société en contrepartie d'un apport, puis que ladite société a été absorbée, scindée ou a procédé à un apport partiel d'actif dans le cadre du régime spécial et que ces titres ont ainsi été transmis à la société absorbante, à la société issue de la scission ou à  la société bénéficiaire de l'apport partiel d'actif, la cession ultérieure de ces titres (par la société absorbante, par la société issue de la scission ou par la société bénéficiaire de l'apport partiel d'actif) est soumise aux dispositions du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du CGI, même si, dans ce cas particulier, la société cédante n'a pas elle-même réalisé l'apport en contrepartie duquel les titres ont été émis à l'origine.

C. Opérations concernées

1. Notion de cession

60

Pour l'application de ce dispositif, la cession répond à une définition large et correspond, en règle générale, à toute opération aboutissant à la sortie de l'actif de l'élément considéré. Ces opérations sont énumérées et commentées au BOI-BIC-PVMV-10-10-20 et au BOI-BIC-PVMV-10-10-30.

2. Durée de détention des titres

70

Sont concernées par le dispositif de limitation de déduction les moins-values résultant de la cession de titres de participation moins de deux ans après leur émission.

Pour l’appréciation du délai de détention de deux ans des titres de participation, il est renvoyé aux développements relatifs à la définition des plus-values à court terme (BOI-BIC-PVMV-20-10). Ainsi, pour apprécier si les titres sont cédés avant ou après un délai de deux ans à compter de leur émission, il convient de tenir compte, d'une manière générale, de la date à laquelle cet élément est définitivement entré dans l'actif de l'entreprise.

Plus particulièrement, lorsque des titres de même nature ont été acquis ou souscrits à des dates différentes, l’appréciation de la durée de détention est décrite au II-A § 80 et suivants du BOI-BIC-PVMV-30-30-10.

Lorsque les titres reçus en contrepartie d'un apport sont ensuite transmis dans le cadre d'une fusion, d'une scission ou d'un apport partiel d'actif placé sous le régime spécial (cf. I-B-2 § 40), il est considéré que ces titres figurent dans le patrimoine de la société bénéficiaire depuis la date de leur acquisition par la société absorbée, scindée ou apporteuse. La durée de détention des titres transmis est donc décomptée à partir de la date de leur émission.

II.  Modalités de détermination de la limite de déduction

80

Le 2 bis de l'article 39 quaterdecies du CGI s’applique dans les cas où :

- les titres reçus en rémunération d’un apport sont cédés moins de deux ans après leur émission ;

- et si la valeur réelle des titres à la date de leur émission est inférieure à leur valeur d’inscription en comptabilité.

En application de ce dispositif, la moins-value résultant de la cession n’est pas déductible à hauteur de la différence entre, d’une part, la valeur d’inscription en comptabilité des titres et, d’autre part, leur valeur réelle à la date de leur émission.

A.  Valeur réelle à l’émission

1. Date d’appréciation de la valeur des titres reçus en contrepartie d’un apport

90

La valeur réelle des titres reçus en contrepartie d’un apport doit être appréciée à la date d’émission des titres de participation et, par conséquent, à la date de leur inscription à l’actif du bilan de l’entreprise.

Il résulte de ce principe que seule la moins-value latente au moment de l’apport n’est pas déductible en cas de cession dans les deux ans de l'émission des titres.

La perte de valeur supplémentaire constatée postérieurement à la date d’émission des titres, se traduisant par une moins-value lors de la cession des titres, n’est pas soumise au présent dispositif et reste donc fiscalement déductible dans les conditions de droit commun.

2. Appréciation de la valeur réelle des titres reçus en contrepartie d’un apport

100

Pour l’application du présent dispositif, la valeur réelle des titres est entendue comme la valeur d’utilité pour l’entreprise. En cela, la valeur réelle des titres est identique à celle retenue pour l’évaluation des titres à l’inventaire, définie au BOI-BIC-PVMV-30-20-10-10.

La valeur d’utilité représente ce que l’entreprise accepterait de décaisser si elle devait acquérir ces titres, conformément aux dispositions de l'article 221-3 du plan comptable général (PCG).

B. Valeur d’inscription des titres

110

La valeur d’inscription en comptabilité des titres de participation, reçus en contrepartie d'un apport, est celle définie par les règles comptables, figurant aux articles 213-1 et suivants du PCG et aux articles 221-1 et suivants du PCG.

Ainsi, les titres reçus en contrepartie d’un apport en numéraire sont  inscrits en comptabilité pour la valeur nominale du numéraire. Les titres reçus en contrepartie d’un apport en nature sont inscrits en comptabilité à la valeur vénale du bien apporté.

120

Cas des titres de participation reçus en contrepartie d’apports partiels d’actifs (BOI-IS-FUS-30-20).

Il est rappelé que la valeur d'inscription des titres reçus en contrepartie d'un apport partiel d'actif dépend de la méthode de valorisation des apports imposée par la réglementation comptable, puisque conformément à l'article 221-1 du PCG et à l'article 744-3 du PCG, le coût d’entrée des titres reçus en contrepartie d’un apport partiel d’actif par la société apporteuse doit être égal à la valeur des apports retenue dans le traité d’apport :

- les titres reçus en rémunération par la société apporteuse sont comptabilisés à la valeur comptable si les apports ont été évalués à la valeur comptable dans le traité d’apport ;

- les titres reçus en rémunération par la société apporteuse sont comptabilisés à la valeur réelle si les apports ont été évalués à la valeur réelle dans le traité d’apport.

Ces règles de valorisation comptable sont indépendantes du régime fiscal appliqué à l'opération d'apport partiel d'actif.

C. Détermination de la fraction non déductible de la moins-value

130

Exemple :

Une entreprise A détient, depuis plus de 2 ans, 100 % des titres de sa filiale B, inscrits dans un compte « titres de participation », pour 2 000 000 € (10 000 titres d’une valeur nominale de 200 €).

La société A décide le 1/1/N d’augmenter le capital social de sa filiale B à hauteur de 200 000 €, par l’émission de 1 000 nouveaux titres B. Par hypothèse, aucune prime d'émission n'est constatée.

Cas n° 1 : valeur de la société B lors de l’émission des nouveaux titres : 0 €.

Valeur réelle des titres B reçus par A lors de leur émission : 0 €.

Valeur d’inscription en comptabilité des titres B émis le 1/1/N : 200 000 €.

La différence entre la valeur réelle des titres et leur valeur d'inscription à l'actif au jour de l'émission est de  200 000 €.

La société A cède toute sa participation le 1/1/N+1 pour 1 € :

moins-value = 1 - (2 000 000 + 200 000) = -2 199 999 €.

La moins-value est classée :

- à long terme à hauteur de 1 999 999 € ;

- à court terme à hauteur de 200 000 €.

En application du nouveau dispositif, la moins-value à court terme n’est pas déductible des résultats au titre de l’exercice N+1, pour l'intégralité de son montant.

La moins-value à long terme suit quant à elle le régime applicable selon que l'entreprise A cédante est imposable à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés. 

Cas n° 2 : valeur de la société B lors de l’émission au 1/1/N : 1 500 000 €.

Valeur réelle des titres B reçus par A lors de leur émission le 1/1/N : (1 500 000 / 11 000) x 1 000 = 136 364 €.

Valeur d’inscription en comptabilité des titres B émis le 1/1/N : 200 000 €.

La différence entre la valeur d'inscription à l'actif au jour de l'émission et la valeur réelle des titres est de  200 000 - 136 364 = 63 636 €.

A la revente de la totalité des titres en N+1 pour 100 000 €, la moins-value globale s'élève à : 100 000 - 2 200 000 =  - 2 100 000 € ;

La moins-value est considérée :

- à long terme à hauteur de : 2 100 000 x 10 000 / 11 000 = 1 909 091€ ;

- à court terme à hauteur de:  2 100 000 x 1 000 / 11 000 = 190 909 €.

La moins-value à court terme, d'un montant de 190 909 € :

- n'est pas déductible du résultat à hauteur de 63 636 € (il s'agit de la différence constatée à la date de l'émission des titres nouveaux entre leur valeur d'inscription en comptabilité et leur valeur réelle) ;

- est déductible des résultats au titre de l'exercice N+1, pour le surplus (127 273 €).

La moins-value à long terme suit, quant à elle, le régime applicable selon que l'entreprise A cédante est imposable à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés.

(140 à 150)

III. Articulation avec d'autres dispositifs

160

Lorsque la cession des titres entre dans le champ d'application du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du CGI et est effectuée au profit d'une société liée à la société cédante, cette cession entre également dans le champ d'application du report d'imposition des moins-values prévu au a septies du I de l'article 219 du CGI. L'articulation de ces deux dispositifs est exposée au III-A § 170.

En outre, lorsque les sociétés cédante et cessionnaire liées sont membres d'un même groupe fiscal au sens de l'article 223 A du CGI, le régime de neutralisation des plus-values et moins-values de cession prévu à l'article 223 F du CGI trouve à s'appliquer en sus des deux dispositifs déjà mentionnés, étant précisé que deux sociétés membres d'un même groupe fiscal sont nécessairement considérées comme liées l'une à l'autre, et que les moins-values réalisées lors d'une cession de titres entre sociétés d'un même groupe sont à la fois soumises aux dispositions de l'article 223 F du CGI et du a septies du I de l'article 219 du CGI. L'articulation de ces trois dispositifs est exposée au III-B § 190.

A. Report d'imposition du a septies du I de l'article 219 du CGI

170

Les dispositions du a septies du I de l'article 219 du CGI prévoient un mécanisme de report d’imposition des moins-values de cession de certains titres de participation détenus depuis moins de deux ans, par une société soumise à l’impôt sur les sociétés, lorsqu’il existe des liens de dépendance au sens du 12 de l'article 39 du CGI, entre l’entreprise cédante et l’entreprise cessionnaire.

La présente mesure ne fait pas obstacle au mécanisme de report.

Ainsi, une moins-value de cession de titres de participation, entrant dans le champ d’application du présent dispositif de limitation de déduction, peut être soumise aux dispositions du a septies du I de l'article 219 du CGI, pour l’intégralité de son montant.

180

Deux hypothèses sont alors à envisager selon que les événements mentionnés aux 1° et 2° du a septies du I de l'article 219 du CGI interviennent :

- après les deux ans suivant la date d'acquisition des titres par la cédante : le dispositif de limitation du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du CGI n'est alors pas applicable ;

- dans les deux ans suivant la date d'acquisition des titres par la cédante : la moins-value étant déduite à la date à laquelle survient l'un de ces événements, le dispositif de limitation du 2 bis de l'article 39 quaterdecies du CGI est alors applicable.

B. Régime de groupe (CGI, art. 223 A et suiv.)

190

Comme exposé aux II-A-2 § 70 et 90 du BOI-IS-GPE-20-20-20-30, lorsque les sociétés cédante et cessionnaire sont membres d'un même groupe fiscal au sens des dispositions des articles 223 A et suivants du CGI et que la cession entraîne la réalisation d'une moins-value, le dispositif prévu au a septies du I de l'article 219 du CGI est applicable.

La moins-value placée en report d'imposition n'est pas déduite du résultat individuel de la cédante et aucun retraitement n'est réalisé au niveau du résultat d'ensemble.

200

Lorsque le report d'imposition prend fin dans les deux ans suivant la date d'acquisition des titres par la société cédante, le dispositif de limitation est applicable. Parallèlement, aucun retraitement n'est à effectuer au niveau du résultat d'ensemble car les événements mettant fin au report d'imposition rendent inapplicables les dispositions de l'article 223 F du CGI.

Lorsque le report d'imposition prend fin à la date correspondant à l'expiration du délai de deux ans suivant la date d'acquisition des titres par la société cédante, la moins-value relève alors du régime du long terme (sauf cas particulier des titres exclus de ce régime par la loi décrits au II § 40 et suivants du BOI-IS-BASE-20-20-10-10) et n'est pas déductible du résultat individuel de la société cédante, puisque relevant du taux de 0 % et sans impact sur la quote-part de frais et charges taxable.

Remarque : Il est rappelé que la quote-part représentative de frais et charges imposée au taux normal est assise sur le montant brut des plus-values de cession exonérées, sans tenir compte des éventuelles moins-values (BOI-IS-BASE-20-20-10-20).

Par ailleurs, aucune neutralisation au niveau du résultat d'ensemble n'est à opérer si la moins-value est incluse dans la plus-value à long terme d'un exercice autre que l'exercice de la cession par la société cédante.