CTX – La juridiction gracieuse – Modalités d'instruction des demandes gracieuses de transaction, modération ou remise présentées par les contribuables - Intervention de la commission de surendettement des particuliers
I. Généralités
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La loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine modifie les dispositions du code de la consommation relatives à la procédure de traitement des situations de surendettement des particuliers.
Le décret n° 2004-180 du 24 février 2004 précise les modalités d'application de cette loi.
Leurs dispositions renforcent le rôle pivot de la commission qui est le point de passage obligé pour tous les dossiers déposés par des personnes surendettées. Il appartient à la commission d'orienter le dossier, soit vers des mesures de traitement du surendettement (plan conventionnel de redressement ou mesures de recommandations en cas d'échec de la mission de conciliation), soit vers le juge du tribunal d'instance aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel.
L'article 42 de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation étend les pouvoirs des commissions de surendettement. Pour accélérer le traitement des situations les plus graves, elle peut désormais recommander un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire du débiteur.
II. Cadre général et déroulement de la procédure de traitement du surendettement
A. Examen de la recevabilité de la demande
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La commission, saisie par le débiteur, s'assure que les conditions de recevabilité de sa demande sont réunies.
Il doit s'agir :
- d'une personne physique ;
- de bonne foi ;
- en situation de surendettement.
La situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste, pour le débiteur, de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir (code de la consommation,[C.cons], article L330-1).
Toutes les dettes non professionnelles sont concernées.
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La décision de recevabilité emporte la suspension et l'interdiction des voies d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par celui-ci et portant sur les dettes autres qu'alimentaires.
B. Instruction de la demande
1. Vérification des créances
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Informés par la commission, les créanciers disposent d'un délai de trente jours pour contester les déclarations du débiteur en fournissant les justificatifs de leurs créances.
La commission soumet ensuite au débiteur l'état de son passif. Ce dernier peut le contester dans les vingt jours en demandant la saisine du juge du tribunal d'instance.
2. Orientation du dossier
a. Mesures de traitement du surendettement
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Il convient de distinguer deux phases successives :
- une phase amiable ;
- une phase de mesures recommandées au juge ou imposées.
1° Procédure amiable
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La commission a pour mission d'élaborer un plan de règlement recueillant l'approbation du débiteur et de ses principaux créanciers (C.cons, article L331-6).
2° Mesures imposées ou recommandées
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En cas d'échec de la mission de conciliation, la commission peut, à la demande du débiteur et après avoir examiné les observations des parties (C.cons, article L331-7), imposer tout ou partie des mesures suivantes :
- report ou rééchelonnement des dettes sur huit ans au maximum ;
- imputation prioritaire des paiements sur le capital ;
- réduction des taux d'intérêt ;
- moratoire des créances autres qu'alimentaires (suspension de l'exigibilité) qui ne peut excéder deux ans.
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A l'issue de la période de suspension, la commission réexamine la situation du débiteur. En fonction de celle-ci, la commission peut imposer ou recommander tout ou partie des mesures précitées et des mesures prévues à l'article L331-7-1 du C.cons. (diminution du solde restant dû d'un prêt immobilier contracté pour l'acquisition du logement principal, après la vente de celui-ci et effacement partiel des créances), à l'exception d'une nouvelle suspension.
Elle peut également recommander que ces mesures soient subordonnées à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette (C.cons, article L331-7-2).
La commission notifie les mesures imposées ou recommandées aux parties qui peuvent les contester dans le délai de quinze jours.
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En l'absence de contestation, dans les quinze jours, ces mesures s'imposent aux parties. Le juge du tribunal d'instance confère force exécutoire à certaines mesures recommandées (C.cons, article L332-1).
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En cas de contestation, le juge prend les mesures d'instruction qu'il juge nécessaires (auditions, vérifications complémentaires, etc.) puis statue (il peut alors prendre les mêmes mesures que celles mentionnées aux articles du code de la consommation précités mais celles-ci ont alors force exécutoire).
b. Procédure de rétablissement personnel
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Lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en œuvre les mesures de traitement prévues ci-dessus (cf. II-B-a), deux situations peuvent se présenter.
1° Le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire
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Lorsque le débiteur ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle, ou que l'actif n'est constitué que de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale, la commission de surendettement recommande un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
Le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire rendu exécutoire par le juge du tribunal d'instance entraîne l'effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur, à l'exception :
- des dettes alimentaires et des réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale ;
- des dettes issues de prêts sur gage souscrits auprès des caisses de crédit municipal en application de l'article L514-1 du code monétaire et financier (CMF).
2° La procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire
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Lorsque le débiteur n'est pas dans la situation précédente, la commission de surendettement saisit, avec l'accord du débiteur, le juge du tribunal d'instance aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.
Lorsque l'actif réalisé est suffisant pour désintéresser les créanciers, le juge prononce la clôture de la procédure.
Lorsque l'actif réalisé est insuffisant pour désintéresser les créanciers, le juge prononce la clôture pour insuffisance d'actif. La clôture entraîne l'effacement de toutes les dettes non professionnelles du débiteur.
III. Dispositions intéressant l'administration des finances publiques
A. Participation du responsable départemental de la direction générale des finances publiques chargé de la gestion publique à la commission
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La commission instituée dans chaque département (au moins une par département) comprend :
- le représentant de l'État dans le département (président) ;
- le responsable départemental de la direction générale des finances publiques chargé de la gestion publique (vice-président) ;
- le représentant local de la Banque de France (secrétaire) ;
- deux personnes, désignées par le représentant de l'État dans le département, la première sur proposition de l'Association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, la seconde sur proposition des associations familiales ou de consommateurs ;
- deux personnes, désignées par le représentant de l'État dans le département, justifiant pour l'une d'une expérience dans le domaine de l'économie sociale et familiale, pour l'autre d'un diplôme et d'une expérience dans le domaine juridique.
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Le président et le vice-président de la commission peuvent chacun se faire représenter par un délégué selon des modalités fixées par décret.
Ainsi, le responsable départemental de la direction générale des finances publiques chargé de la gestion publique peut se faire représenter par un délégué qu'il choisit parmi les fonctionnaires de catégorie A de la direction départementale des finances publiques placés sous son autorité.
B. Compétence de la commission en matière de dettes fiscales
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Les dettes fiscales entrent de plein droit dans le champ de compétence des commissions de surendettement.
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C'est ainsi que l'article L247 A du LPF prévoit que les contribuables de bonne foi, en situation de gêne ou d'indigence, qui ont déposé un dossier de surendettement faisant état de dettes fiscales auprès de la commission de surendettement et qui ne font pas l'objet d'une procédure de rétablissement personnel, bénéficient d'une remise d'impôts directs au moins équivalente à celle recommandée par ladite commission pour les autres créances.
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L'article R*247 A-1 du LPF précise que la saisine de la commission de surendettement vaut demande de remise gracieuse d'impôts directs dès lors que cette saisine satisfait aux conditions définies à l'article R331-8-1 du C.cons.
A cet effet, un imprimé recensant les dettes fiscales non professionnelles est joint au dossier type de surendettement servi par le débiteur. Il est transmis dès réception par la commission au responsable départemental de la direction générale des finances publiques chargé de la gestion publique.
C. Informations susceptibles d'être échangées
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L'administration des finances publiques est déliée du secret professionnel par l'article L331-3 du C.cons.
En application de ce texte, la commission « peut obtenir communication, auprès des administrations publiques, des établissements de crédit, des établissements de paiement, des organismes mentionnés au 5 de l'article L511-6 du CMF, des organismes de sécurité et de prévoyance sociale ainsi que des services chargés de centraliser les risques bancaires et les incidents de paiement, de tout renseignement de nature à lui donner une exacte information sur la situation du débiteur, l'évolution possible de celle-ci et les procédures de conciliation amiables en cours ».
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Le montant et le détail des dettes fiscales sont communiqués à la commission.
S'agissant des autres renseignements détenus par les services de la direction générale des finances publiques, doivent être communiqués à la commission tous ceux qui présentent un intérêt pour l'instruction du dossier du contribuable surendetté.
Il en est ainsi de toutes informations permettant à la commission d'apprécier le comportement de la personne surendettée au regard de ses obligations fiscales, ainsi que de mieux appréhender l'ensemble de ses ressources.
Ces dernières, doivent s'entendre non seulement des revenus proprement dits et des éléments composant le patrimoine de l'intéressé, mais également, par exemple, des aides de toutes sortes lui bénéficiant ou susceptibles de lui bénéficier.
Exemple 1 : Personnes tenues, à l'égard de l'intéressé, à une obligation d'assistance.
Exemple 2 : Concubins aux ressources suffisantes pour partager certaines charges de la vie commune.
Lorsqu'un contrôle fiscal est en cours, il conviendra d'informer la commission des rehaussements envisagés dès lors qu'ils ont été acceptés ou confirmés par lettre n° 3926.
De même, la commission devra être tenue informée du dépôt des réclamations et de l'engagement de recours juridictionnels, de l'issue des procédures contentieuses ou gracieuses, ainsi que des dégrèvements contentieux et gracieux prononcés ou envisagés, dans la mesure où cette information peut permettre une appréciation actualisée et prospective de la situation de la personne surendettée.
Elle est également informée des décisions prises mais non encore notifiées au débiteur, afin d'avoir une vue globale des remboursements auxquels celui-ci devra faire face.
D. Instruction des demandes de remise ou modération gracieuses présentées par des personnes qui ont, par ailleurs, saisi une commission de surendettement
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Même si les commissions sont compétentes à l'égard des dettes fiscales non professionnelles, ces dernières peuvent toujours faire l'objet de remises ou modérations gracieuses dans les conditions prévues à l'article L247 du LPF, c'est-à-dire lorsque le débiteur est dans l'impossibilité de payer par suite de gêne ou d'indigence.
Mais il appartient à l'Administration de procéder, le cas échéant, à l'ajustement de sa décision, après prononcé des mesures prises par la commission ou le juge du tribunal d'instance.
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Lorsque l'effacement partiel des créances est recommandé, les dettes fiscales non professionnelles subsistantes font l'objet de remises partielles dans les mêmes conditions que les autres dettes.
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En cas de mise en œuvre de la procédure de rétablissement personnel, les majorations, frais de poursuite et pénalités fiscales encourus en matière d'impôts directs dus à la date à laquelle la commission recommande un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ou à la date du jugement d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire sont remis, à l'exception des majorations prévues aux articles 1728-1-b et c et 1729 du CGI (CGI, article 1756-II).