IS – Base d'imposition – Charges – Bonis ristournés aux sociétaires d'organismes coopératifs, mutualistes et similaires - Sociétés coopératives de consommation
I. Principe de déduction des bonis ristournés par les sociétés coopératives de consommation
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Conformément aux dispositions de l'article 214-1-1° du code général des impôts (CGI), les sociétés coopératives de consommation peuvent déduire de leurs bénéfices les bonis provenant des opérations faites avec les associés et distribués à ces derniers au prorata de la commande de chacun d'eux.
Il est rappelé que, hormis ces dispositions spéciales, le bénéfice imposable des sociétés coopératives est déterminé suivant les règles de droit commun des sociétés de capitaux. Ne peuvent, par suite, notamment être compris dans les charges déductibles :
- ni l'intérêt statutaire versé en rémunération du capital ;
- ni la fraction des bénéfices affectée aux réserves (CE, arrêt du 5 février 1968, req. n° 69371).
II. Conditions de déduction des bonis ristournés par les sociétés coopératives de consommation
A. Les bonis doivent provenir d'opérations faites avec les associés
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Dans le cas de coopératives ne vendant pas exclusivement à leurs adhérents, seule la fraction des bonis qui provient des opérations faites avec les sociétaires est susceptible de venir en déduction des bénéfices imposables.
Cette fraction doit être calculée en retranchant tout d'abord du bénéfice total réalisé par la société, les revenus accessoires et la part qui, d'après les statuts, est affectée à la réserve légale et aux intérêts des actions, et en répartissant ensuite le solde disponible proportionnellement aux chiffres d'affaires réalisés d'une part, avec les sociétaires et, d'autre part, avec les non-sociétaires.
Le montant des bonis distribués aux sociétaires et susceptibles d'être admis en déduction s'élève alors à :
solde disponible x (ventes aux sociétaires / ventes totales)
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Dans l'hypothèse où certaines coopératives de consommation ont adopté des formes nouvelles d'action commerciale en créant des magasins ouverts à un public non sociétaire (hypermarchés, cafétérias, stations-essence ...), il est admis que le montant des ristournes déductibles soit déterminé en fonction des seuls résultats du secteur coopératif traditionnel sous réserve que le chiffre d'affaires réalisé en dehors de ce secteur soit exclu du chiffre d'affaires total pour l'évaluation des ristournes et que l'adoption de ce mode de calcul ait un caractère définitif.
La formule de calcul énoncée ci-avant devient alors la suivante :
Solde disponible x (ventes aux sociétaires / Ventes totales diminuées des ventes réalisées dans le secteur non coopératif)
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Dans tous les cas, le solde disponible pris en considération pour le calcul des bonis est déterminé abstraction faite des revenus accessoires, des sommes versées à la réserve légale, ainsi que des intérêts servis aux actions.
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La diminution à opérer au titre des revenus accessoires doit être limitée au montant net de ces revenus.
En conséquence, lorsque les revenus dont il s'agit consistent en loyers, c'est le montant net de ces loyers, obtenu en tenant compte de toutes les charges incombant normalement au propriétaire et supportées par lui (impôts, amortissements, assurances, dépenses d'entretien et de réparation) qu'il y a lieu de retrancher du bénéfice net total pour déterminer le solde disponible à partir duquel doivent être calculés les bonis distribués en franchise d'impôt aux sociétaires.
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À la limite, une société coopérative de consommation pourrait échapper à l'impôt sur les sociétés en distribuant la totalité des bonis à ses sociétaires au prorata de leurs commandes. Mais encore faudrait-il pour cela que la société en cause ne traite pas avec des non-adhérents, qu'elle n'alloue aucun intérêt à ses membres, qu'elle ne réalise aucun revenu accessoire et, enfin, qu'elle n'ait à verser aucune somme aux réserves obligatoires.
B. Les bonis doivent être versés aux associés au prorata de la commande de chacun d'eux
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Pour être exonérés de l'impôt sur les sociétés, les bonis distribués doivent avoir le caractère de « trop-perçu » ou de ristournes sur les commandes faites par les associés.
Une ristourne n'est, en effet, déductible des bénéfices que si elle correspond à une réduction du prix de vente primitivement consenti aux adhérents. Par contre, si la ristourne n'est pas proportionnelle aux achats mais, par exemple, au montant des actions détenues par les associés, elle doit être assimilée à une distribution de bénéfices et réintégrée dans le montant des bénéfices imposables.
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C'est ainsi que les sommes consacrées par une société coopérative de consommation au fonctionnement d'une colonie de vacances créée par elle pour les enfants de ses adhérents qui remplissent certaines conditions d'ancienneté et ont fait au cours de l'année un certain chiffre d'achats, ne sont pas déductibles du bénéfice net car elles ont le caractère d'un boni dont la distribution aux associés n'a pas été faite au prorata de la commande de chacun d'eux (CE, arrêt du 7 juin 1943, req. n° 70982).
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Il est nécessaire également que la société distributrice soit une société coopérative au sens des dispositions de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération (cf. BOI-IS-CHAMP-10-20).
Le Conseil d'État a ainsi jugé que les sommes que, conformément à une disposition statutaire, une société anonyme d'approvisionnement - non soumise aux dispositions de la loi précitée - verse à ses actionnaires au prorata de leurs achats et qui sont déterminées, non à l'occasion de chaque opération, mais après l'établissement annuel du bilan de la société, doivent être regardées comme des bénéfices distribués quoique ces ristournes ne soient pas proportionnelles au nombre d'actions détenues par chaque ayant droit et alors même que cette répartition serait prélevée sur le produit des opérations réalisées avec les seuls actionnaires (CE, arrêt du 5 décembre 1966, req. n° 62644).
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Bien entendu, la société coopérative doit être en mesure d'établir par une comptabilité particulière, le chiffre exact des commandes de ses associés pour une catégorie de produits déterminés. Dans le cas contraire, les ventes desdits produits doivent être regardées comme ayant été consenties en totalité à des non-sociétaires pour l'application de l'article 214-1-1° du CGI (CE, arrêt du 5 février 1968, req n° 69371).
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Remarques : Dans la mesure où elles sont admises en déduction pour la détermination des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés, les ristournes versées aux adhérents des sociétés coopératives de consommation ne doivent pas être considérées comme des revenus distribués pour l'assiette de l'impôt sur le revenu.
Elles ne rentrent pas, d'autre part, dans la catégorie des ristournes, dont la déclaration est exigée par l'article 240 du CGI.
III. Modalités de déduction des bonis ristournés par les sociétés coopératives de consommation
A. Principe de déduction des bonis ristournés par les sociétés coopératives de consommation
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Les sociétés à statut coopératif sont donc admises à déduire pour le calcul de l'impôt les ristournes qu'elles versent à leurs sociétaires, au prorata des affaires faites avec chacun d'eux.
Mais ces ristournes ne peuvent être admises en déduction, pour la détermination du bénéfice imposable d'un exercice, dans les conditions de l'article 214-1-1°,du CGI qu'au moment où elles ont été mises effectivement à la disposition des sociétaires (CE, arrêt du 8 mars 1965, req. n° 58851).
La Haute Assemblée a jugé, à ce propos, que les bonis provenant de la gestion d'une société coopérative d'achats en commun de commerçants détaillants qui ont été versés, conformément aux décisions de l'assemblée générale des coopérateurs, à un compte collectif ouvert dans les écritures de la société, dans lequel la quote-part revenant à chaque adhérent est calculée d'après les commandes faites par lui au cours de chaque exercice était individualisée, doivent être regardés comme distribués au sens et selon les conditions de l'article 214-1-1° du CGI. Ces bonis doivent par suite, être admis en déduction du bénéfice imposable de la société (CE, arrêt du 21 juillet 1972, req. n° 82262,).
Cette jurisprudence s'applique également aux sociétés coopératives de consommation auxquelles sont assimilées à cet égard les sociétés coopératives d'achats en commun de commerçants détaillants.
B. Modalités pratiques de déduction des bonis ristournés par les sociétés coopératives de consommation
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La mise en œuvre du régime défini ci-dessus soulève toutefois des difficultés pratiques. En effet, ainsi que l'a confirmé le Conseil d'État dans un arrêt du 11 juillet 1973, req n° 82-432, les ristournes ne sont pas normalement déductibles des résultats de l'exercice de réalisation des profits auxquels elles correspondent, mais des résultats de l'exercice au cours duquel elles sont versées aux coopérateurs, c'est-à-dire en fait l'exercice suivant celui de la réalisation des bénéfices. Ce décalage d'un an entre la réalisation des excédents et l'affectation des résultats conformément aux statuts, rendu inévitable par des raisons de principe, comptables et juridiques, peut être défavorable aux coopératives, notamment compte tenu des charges de trésorerie qu'il fait naître.
Aussi, les coopératives peuvent constituer une provision pour ristournes à payer à la clôture de chaque exercice, à la condition que le principe et le mode de calcul des sommes en cause aient fait l'objet d'une délibération du conseil d'administration intervenue avant cette date et valant engagement ferme et nettement précisé.
Cette solution qui permet donc, en principe, aux coopératives de ne pas être imposées sur les ristournes avant leur distribution effective s'est révélée difficile à traduire en pratique.
En effet, si l'article 214-1 du CGI déjà cité considère les ristournes comme une charge déductible pour la détermination du résultat fiscal (par assimilation à des rabais sur ventes), il n'en est pas de même du point de vue comptable et juridique. Les répartitions opérées entre les associés au prorata des opérations traitées avec chacun d'eux ou du travail fourni (sommes communément appelées «Ristournes») constituent un mode d'affectation des excédents d'exploitation et non pas une charge pour la détermination du résultat comptable.
Les sociétés coopératives se trouvent donc dans l'impossibilité de pratiquer sur le plan comptable, à la clôture de l'exercice sur les résultats duquel elles sont imputables, une provision pour ristournes à payer. Elles ne peuvent pas non plus passer à la même date une écriture d'affectation des résultats qui pourrait, du point de vue fiscal, être assimilée à une provision.
Pour lever ces difficultés, les modalités de déduction du résultat fiscal des ristournes versées par les coopératives à leurs sociétaires ont été arrêtées en concertation avec les organismes intéressés.
C. Provisions pour ristournes
1. Conditions de déduction des provisions pour ristournes
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Les ristournes ne sont en principe déductibles que des résultats de l'exercice au cours duquel elles sont versées.
Il a néanmoins été admis qu'elles pourraient être déduites, sous forme de provisions, sur les résultats de l'exercice qui leur a donné naissance.
Cette faculté ne peut être utilisée par les coopératives que si les deux conditions énumérées ci-après sont remplies avant la date de clôture de l'exercice au cours duquel les dotations aux provisions sont déduites.
a. Un engagement ferme et définitif de la société coopérative
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Les ristournes susceptibles de faire l'objet d'une provision doivent correspondre à un engagement ferme et définitif, pris par la coopérative avant la date de clôture de l'exercice.
À défaut, la charge provisionnée ne serait pas susceptible d'affecter les résultats imposables de l'exercice dès lors qu'elle serait subordonnée à la réalisation d'un événement futur et éventuel.
b. Les modalités de calcul de la provision pour ristournes doivent être clairement précisées
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L'engagement de la coopérative doit porter non seulement sur le principe du versement de ristournes mais également sur les modalités, clairement définies, selon lesquelles elles seront calculées (pourcentage déterminé du chiffre d'affaires, de l'excédent brut d'exploitation, du bénéfice net, etc.).
Le simple engagement par les organes dirigeants d'une coopérative que des ristournes seront allouées aux adhérents ne saurait autoriser la déduction à l'avance, par voie de provision, des bonis.
2. Conditions de forme de la provision pour ristournes
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L'article 39-1-5°, 1er alinéa du CGI subordonne expressément la déduction des provisions à la condition qu'elles aient été effectivement comptabilisées dans les écritures de l'entreprise.
Il est admis, que cette condition ne soit pas opposée aux sociétés coopératives pour les provisions sur ristournes.
La déduction est opérée, de façon extracomptable, sur le tableau de détermination du résultat fiscal n° 2058 AN auquel doit être annexé un relevé précisant les modalités de calcul et le montant des dotations aux provisions pour ristournes.
3. Régularisations de la provision pour ristournes
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Le montant des ristournes versées est en principe égal à celui de la provision constituée au titre de l'exercice précédent.
Les ristournes s'imputent donc en totalité sur la provision. La déduction anticipée présente de ce fait un caractère définitif.
Toutefois, dans certains cas, le montant des ristournes effectivement versées peut s'avérer supérieur ou inférieur à celui de la provision. Dans tous les cas, la régularisation s'effectue par voie extra-comptable.
Dans le premier cas (les ristournes versées sont supérieures à la provision), la déduction opérée par voie de provision présente un caractère définitif et l'excédent des ristournes vient en déduction des bénéfices de l'exercice au cours duquel elles sont versées aux adhérents.
Si le montant des ristournes versées est inférieur à celui de la provision, la déduction de cette dernière devient définitive à concurrence des ristournes versées et le surplus doit être réintégré dans les résultats de l'exercice au cours duquel les ristournes sont versées aux adhérents.
Bien entendu, si l'importance ou la fréquence des excédents de provisions sur le montant des ristournes révèlent une précision insuffisante des modalités de calcul de la provision, la déduction de cette dernière devra être remise en cause.