CF - Droit de communication et procédures de recherche et de lutte contre la fraude - Champ d'application du droit de communication auprès des entreprises privées industrielles ou commerciales
I. Personnes visées par le droit de communication
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Les articles L85 et R*85-1 du livre des procédures fiscales (LPF) peuvent être mis en œuvre pour permettre l'assiette et le contrôle des impôts de toute nature.
Le droit de communication peut être exercé à l'encontre de toute personne physique ou morale passible de l'un quelconque des impôts ou taxes visés au code général des impôts (CGI) et qui, ayant la qualité de commerçant est de ce fait soumise aux obligations comptables du code de commerce. À cet égard, le code de commerce définit les commerçants comme « ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ».
Quatre éléments caractérisent donc la qualité de commerçant :
- exercer des actes de commerce au sens des articles L110-1 et L110-2 du code de commerce. En règle générale, I'acte de commerce comporte un achat en vue de la revente ;
- en faire une profession habituelle, cette notion impliquant à la fois la répétition et la recherche de moyens d'existence ;
- les faire pour son compte à ses risques et périls et de façon indépendante ;
- les faire à titre principal ou à titre secondaire. Une même personne peut exercer plusieurs professions, I'une à titre principal, I'autre à titre secondaire. C'est ainsi qu'un médecin qui exploite une clinique exerce à la fois une profession libérale en ce qui concerne les soins donnés aux malades, et une profession commerciale en ce qui concerne la fourniture du logement, de la nourriture et des divers services rendus aux malades. Il en est de même d'un notaire qui exerce, en principe, une profession civile mais, le cas échéant, doit être considéré comme commerçant pour la partie de son activité qui consiste à spéculer sur les fonds qui lui ont été remis en dépôt par ses clients.
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En application des dispositions de l’article L210-1 du code de commerce, le caractère commercial d'une société est déterminé par sa forme, ou par son objet. Sont commerciales, à raison de leur forme et quel que soit leur objet, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions.
Les associés d'une société en nom collectif, les associés commandités des sociétés en commandite simple, les membres des sociétés en participation qui sont indéfiniment responsables et dont les nom et adresse ont été communiqués à l'administration, l'associé unique d'une société à responsabilité limitée lorsque cet associé est une personne physique, les membres des sociétés à responsabilité limitée qui ont opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes demeurent soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux lorsque la société dont ils sont membres réalise des bénéfices ou revenus non commerciaux et n'a pas opté pour son assujettissement à l'impôt sur les sociétés. En dépit de leur transparence, ces sociétés sont commerciales à raison de leur forme. Dans la mesure où elles sont soumises à l'un quelconque des impôts ou taxes visés au code général des impôts, rien ne s'oppose à ce que l'administration exerce son droit de communication à leur encontre sur l'ensemble des documents comptables visés aux articles L85 et R*85-1 du LPF.
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Par ailleurs, les sociétés civiles sont soumises au droit de communication en application de l'article L94 A du LPF.
Ainsi sont visées les sociétés civiles définies à l'article 1845 du code civil, c'est-à-dire toutes les sociétés auxquelles la loi n'attribue pas un autre caractère à raison de leur forme, de leur nature ou de leur objet, qu'elles soient ou non soumises à l'impôt sur les sociétés.
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Lorsque les artisans n'ont pas la qualité de commerçants, ils échappent aux obligations comptables du code de commerce et à l'obligation de s'inscrire au registre du commerce.
Les artisans sont selon une définition usuelle ceux qui exercent un métier manuel, justifient d'une certaine qualification, prennent personnellement part à l'exécution du travail et n'emploient pas plus de cinq salariés.
Cependant, l'article L85-0 B du LPF fait obligation aux artisans inscrits au répertoire des métiers et de l'artisanat de communiquer à l'administration, sur sa demande, les documents comptables, pièces justificatives de recettes et de dépenses et tous documents relatifs à leur activité.
II. Documents sur lesquels porte le droit de communication
A. Cas général
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En vertu des dispositions du 1er alinéa de l'article L85 du LPF, le droit de communication s'applique aux documents suivants :
- les livres dont la tenue est prescrite par les articles L123-12 à L123-28 du code de commerce, c'est-à-dire :
-
le livre-journal qui doit enregistrer, opération par opération et jour par jour, les mouvements affectant le patrimoine de l'entreprise ;
-
le grand livre sur lequel les écritures du livre-journal doivent être portées et ventilées selon le plan de comptes du commerçant ;
-
le livre d'inventaire sur lequel sont regroupées les données d'inventaire (relevé de tous les éléments d'actif et de passif) et sont transcrits chaque année les comptes annuels.
- tous les livres et documents annexes, pièces de recettes et de dépenses.
Les documents annexes comprennent les correspondances reçues et les copies de lettres envoyées.
Les livres et documents annexes doivent s'entendre de ceux qui ont une corrélation certaine avec les données de la comptabilité commerciale, sans distinguer s'ils sont ou non d'ordre strictement comptable.
À l'égard des sociétés, Ie droit de communication porte également sur les registres de transfert d'actions et d'obligations, sur les feuilles de présence aux assemblées générales ainsi que sur les rapports des commissaires aux comptes (cf. II-C).
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L'article L85 du LPF permet aux agents des finances publiques d'exiger d'un commerçant la communication des livrets de caisse d'épargne ouverts à son nom ou à ceux des membres de sa famille dans la seule mesure où ces livrets traduisent des mouvements de fonds propres à l'entreprise et sont donc assimilables aux documents annexes visés précédemment. En toute hypothèse, communication des livrets en question peut être obtenue auprès des services financiers de La Poste ou autres services gestionnaires des caisses d'épargne par mise en œuvre des dispositions de l'article L83 du LPF.
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En outre, conformément à l’article 410-4 du plan comptable général, l’organisation de la comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés implique l’accès à la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l’exécution des traitements, en vue, notamment, de procéder aux tests nécessaires à la vérification des conditions d’enregistrement et de conservation des écritures. Toute donnée comptable entrée dans le système de traitement est enregistrée, sous une forme directement intelligible, sur papier ou éventuellement sur tout support offrant toute garantie en matière de preuve.
B. Cas des entreprises soumises au régime des micro-entreprises
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Sur le plan comptable, l'article L123-28 du code de commerce prévoit que les personnes physiques soumises au régime d’imposition des micro-entreprises peuvent ne pas établir de comptes annuels. Elles tiennent un livre mentionnant chronologiquement le montant et l'origine des recettes qu'elles perçoivent au titre de leur activité professionnelle. Elles tiennent également, lorsque leur commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, un registre récapitulé par année, présentant le détail de leurs achats. Un décret fixe les conditions dans lesquelles ce livre et ce registre sont tenus.
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Sur le plan fiscal, le 5 de l'article 50-0 du CGI prévoient que les contribuables placés dans le champ d'application du régime des micro-entreprises, bénéficient d'une dispense de bilan et de compte de résultat. Elles doivent tenir et présenter, sur demande de l'administration, un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes professionnelles, appuyé de factures et de toutes autres pièces justificatives. Elles doivent également, lorsque leur commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement, tenir et présenter, sur demande de l'administration, un registre récapitulé par année, présentant le détail de leurs achats.
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Dès lors, si le redevable concerné a la qualité de commerçant, rien ne s'oppose à ce que l'administration exerce son droit de communication sur l'ensemble des documents comptables tenus par ce redevable.
C. Cas des documents de sociétés
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Le 2e alinéa de l'article L85 du LPF précise que le droit de communication s'étend aux registres de transfert d'actions et d'obligations, ainsi qu'aux feuilles de présence aux assemblées générales. Les agents de l'administration peuvent également exiger dans les sociétés par actions la communication des procès-verbaux des conseils d'administration et des conseils de surveillance. En effet, le droit de communication, qui a pour but d'assurer le contrôle de l'impôt, doit porter sur les procès-verbaux et sur les rapports des commissaires aux comptes, dont le but est précisément de contrôler la comptabilité (réponse à M. Fley, JO du 23 avril 1926, déb. Ch., p. 1950, n° 6870).