RFPI - Revenus fonciers - Revenus bruts imposables - Valeur locative des immeubles dont le propriétaire se réserve la jouissance, dépenses mises par convention à la charge du locataire et autres subventions et indemnités
I. Valeur locative des immeubles dont le propriétaire se réserve la jouissance
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Les propriétaires doivent, en principe, comprendre, dans leur base d'imposition, le revenu des immeubles ou parties d'immeubles dont ils se réservent la jouissance (code général des impôts (CGI), art. 30).
Le revenu brut est évalué par comparaison avec les immeubles ou parties d’immeubles similaires faisant l’objet d’une location normale (cf. I-A § 10 et suivants), ou, à défaut, par voie d’appréciation directe (cf. I-B § 30). Cette valeur locative doit être déterminée dans les mêmes conditions pour les propriétés urbaines et pour les propriétés rurales.
Au revenu brut ainsi déterminé, il convient d'ajouter le montant des revenus accessoires (BOI-RFPI-CHAMP-10-10). Le revenu net foncier est alors déterminé en déduisant, dans les conditions de droit commun, les charges de la propriété.
A. Évaluation par comparaison
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Le mode d'évaluation par comparaison comporte la recherche des locaux loués ayant une analogie avec ceux qu'il s'agit d'estimer et l'attribution à ces derniers d'une valeur locative proportionnelle à celle des termes de comparaison.
Ces termes doivent être choisis de préférence dans la même rue ou dans le même quartier, tout au moins dans la même commune. Cependant, en cas d'impossibilité absolue de trouver les termes de comparaison dans la commune, ils peuvent être pris en dehors de celle-ci.
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Toutefois, selon la jurisprudence du Conseil d'État dans un arrêt du 3 novembre 1978, n° 03421, les recettes « fictives » sont au moins égales aux charges courantes et normales de la propriété.
Ainsi, le Conseil d'État a jugé que, pour évaluer le loyer, et à défaut d'éléments d'appréciation conduisant à en fixer le montant à un chiffre différent, il y a lieu de se référer à la situation qui serait celle du propriétaire exploitant normalement ce droit par voie de location à un tiers et, par conséquent, d'évaluer ce loyer à une somme égale aux frais et charges courants de la propriété, y compris les frais de gestion et d'amortissement.
Il est à noter que cette jurisprudence est intervenue lorsque le droit de chasse dont le propriétaire se réserve la jouissance n’était pas exonéré, c’est-à-dire avant l’imposition des revenus de 2005. Les principes qu’elle dégage demeurent toutefois applicables.
B. Évaluation par voie d'appréciation directe
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Ce n'est que dans le cas où le mode d'évaluation par comparaison ne peut être employé qu'il doit être procédé à l'évaluation locative par voie d'appréciation directe.
II. Dépenses mises par convention à la charge du locataire
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Il convient d’ajouter aux recettes brutes le montant des dépenses incombant de droit au propriétaire, mais dont le paiement est, par l'effet des conventions, imposé au locataire.
Lorsque certaines dépenses incombant de droit au propriétaire sont mises à la charge du locataire par l’effet des conventions :
- le remboursement de ces dépenses constitue un supplément de loyer imposable en tant que recettes brutes ;
- les dépenses qui ont été directement payées à des tiers par le locataire en l'acquit du propriétaire sont imposables par disposition expresse de la loi (CGI, art. 29).
Ainsi, la surprime d’assurance payée par un propriétaire en raison de l’activité dangereuse du locataire et remboursée par ce dernier doit être comprise dans le revenu brut de l’immeuble, soit au titre des recettes encaissées par le propriétaire lorsque ce dernier l’acquitte et en exige le remboursement du locataire, soit au titre des dépenses incombant normalement au propriétaire et mises par le contrat à la charge du locataire si celui-ci la verse directement à la compagnie d’assurances.
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Clause expresse
Pour que les dépenses payées par le locataire soient ajoutées aux recettes brutes, il convient que celui-ci soit tenu à leur paiement par une clause expresse du bail.
Le montant des travaux effectués par le locataire, en l'absence de toute obligation contractuelle, ne peut donc être retenu pour la détermination du revenu brut foncier du propriétaire (CE, arrêt du 23 novembre 1977, n° 98227).
Si le contrat de location le prévoit, il convient par exemple d'ajouter aux recettes brutes, le montant des réparations autres que les réparations locatives payées par le locataire, les impôts à la charge du propriétaire et acquittés par le locataire (en particulier la taxe foncière) ou les primes d'assurance payées par le locataire contre des risques dont le propriétaire est responsable.
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Neutralisation de l’imposition et de la déduction
Dans la mesure où elles constituent des dépenses déductibles, ces sommes peuvent être ultérieurement déduites du revenu brut. Il est, dès lors, admis que le propriétaire ne tienne pas compte de ces sommes pour la détermination de ses recettes s'il s'abstient également de les comprendre ensuite dans ses charges déductibles.
Ainsi le propriétaire peut notamment faire purement et simplement abstraction du montant de ces sommes tant en recettes qu'en dépenses lorsqu’il ne connaît pas exactement, ou ne peut connaître, le montant des dépenses payées pour son compte par le locataire, ou, tout au moins, ne pas être en mesure d'en fournir la justification.
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Propriétés rurales
En sus du montant des loyers, les propriétaires peuvent demander à leurs fermiers le remboursement de certaines charges telles que :
- la moitié de la taxe pour frais de chambre d'agriculture (code rural et de la pêche maritime, art. L. 514-1) ;
- les dépenses de voirie ;
- une fraction du montant global de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de la taxe foncière sur les propriétés non bâties portant sur les biens pris à bail, au titre des dépenses afférentes aux voies communales et aux chemins ruraux. A défaut d'accord amiable entre les parties, cette fraction est fixée à un cinquième (code rural et de la pêche maritime, art. L. 415-3).
Les sommes encaissées à titre de remboursement de charges doivent être ajoutées au montant des loyers en principal. Mais, les propriétaires peuvent s'abstenir d'en faire état dans leurs recettes brutes, à la condition de ne pas les retrancher ultérieurement au titre des dépenses payées par le propriétaire pour le compte des locataires.
III. Subventions et indemnités
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Les recettes brutes imposables comprennent l’ensemble des indemnités ou subventions perçues par le contribuable. Des dispositions spéciales sont toutefois prévues en faveur des subventions ou indemnités qui sont destinées à financer des charges déductibles.
A. Indemnités destinées à compenser des pertes de recettes
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1. Indemnité compensant les pertes de loyers
L’indemnité accessoire destinée à compenser les pertes de loyers doit, en application des dispositions de l’article 28 du CGI, être comprise dans les recettes brutes imposables (voir en ce sens notamment RM Bourg-Broc, n° 53714, JO AN du 8 octobre 1984, p. 4502).
Ainsi, lorsque le propriétaire de l'immeuble donné en location souscrit directement ou par l'intermédiaire d'un professionnel de l'immobilier (administrateur de biens, notaire etc.) un contrat d'assurance dont l'objet est de couvrir le risque de loyers impayés, l'indemnité encaissée en cas de mise en œuvre des garanties du contrat doit être déclarée au titre des revenus fonciers de l'année de l'encaissement.
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2. Indemnités de retard dans la livraison d’un immeuble
Dès lors qu’elles se rapportent à un immeuble donné en location nue ou destiné à être donné en location nue et qu’elles sont fixées contractuellement, les indemnités perçues par un propriétaire en raison du retard dans la livraison d’un immeuble sont imposables.
En effet, de telles indemnités ne constituent pas la réparation d’un préjudice subi par le propriétaire et reconnu par le juge, mais la compensation de la perte d’un revenu.
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3. Sommes allouées par les tribunaux aux propriétaires en cas d’occupation sans titre de leurs logements
Les sommes fixées par les tribunaux judiciaires, en cas d’occupation de logements par des personnes dépourvues de bail (parfois dénommées indemnités d’occupation), présentent le plus souvent une nature mixte. Elles revêtent dans tous les cas un caractère compensatoire dès lors qu’elles constituent la contrepartie de la jouissance des locaux, et peuvent accessoirement présenter un caractère indemnitaire.
La partie de l’indemnité représentative du prix d’un loyer constitue pour le propriétaire un revenu imposable dans la catégorie des revenus fonciers. En revanche, le supplément d’indemnité qui peut être versé au titre de la réparation du préjudice subi par le propriétaire présente le caractère de dommages et intérêts et n’est donc pas imposable.
Une telle indemnité peut également intervenir en application d’une décision de justice, lorsqu’un congé a été donné au locataire avec offre conjointe de vente du logement antérieurement pris en location, et faire suite au constat que le locataire, déchu de tout titre d’occupation sur les locaux en cause, voit son expulsion ordonnée par le juge. Dans ce cas, l’indemnité versée au bailleur présente aussi une nature mixte. L’indemnité d’occupation reconnaît ainsi l’usage effectif de l’immeuble par un tiers et se substitue aux revenus qui auraient pu être régulièrement perçus par le propriétaire s’il avait pu normalement disposer de son bien et le mettre en location. Pour cette partie, elle doit donc être imposée chez celui qui la perçoit en tant que revenu brut foncier, sans pour autant résulter d’un bail.
B. Subventions et indemnités destinées à financer des charges déductibles
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L’article 29 du CGI prévoit que les subventions et indemnités destinées à financer des charges déductibles sont comprises dans le revenu brut l’année de leur encaissement par le bailleur. Corrélativement, les dépenses payées à l’aide de ces subventions ou indemnités sont déductibles en totalité.
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1. Financement d’une charge déductible
Pour être imposables, les subventions et indemnités doivent être destinées à financer une charge déductible au sens de l’article 31 du CGI comme de l’article 13 du CGI. Il en est notamment ainsi par exemple des indemnités versées à un propriétaire pour réparer les détériorations commises par les locataires ou à la suite d’un sinistre, à la condition qu’elles financent des dépenses déductibles des revenus fonciers.
Il peut notamment s’agir des subventions allouées par l'État, les collectivités territoriales, l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) ainsi que par les compagnies d’assurance. Il en est ainsi notamment des aides communales versées pour encourager le ravalement de leurs immeubles par les propriétaires ou des aides perçues par le propriétaire, en application des dispositions nationales, ou de mesures communautaires d'incitation, pour la mise en conformité des bâtiments d'exploitation agricole qu'il donne en location.
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2. Financement d’une charge non déductible
Lorsque les subventions et indemnités perçues par le bailleur financent des charges non déductibles, elles ne sont pas imposables au titre des revenus fonciers. Il en est ainsi lorsque les dépenses de travaux ne sont pas déductibles en tant que telles mais ouvrent droit au bénéfice de la déduction au titre de l’amortissement prévue aux f, g ou h du 1° du I de l’article 31 du CGI.
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3. Financement d’une dépense en capital
Ne constituent pas des recettes au sens de l’article 29 du CGI les subventions ou indemnités accordées pour l’acquisition, la construction, la reconstruction de locaux dont les revenus sont imposables dans la catégorie des revenus fonciers. De même ne sont pas imposables, les subventions ou indemnités destinées à financer des dépenses d’amélioration de locaux qui n’ouvrent pas droit à déduction.
Remarque : Pour plus de précisions sur les conditions générales d’imposition des subventions et indemnités destinées à financer des dépenses de travaux, cf. BOI-RFPI-BASE-20-30,
Il en est ainsi notamment des aides à la réalisation de locaux industriels, des indemnités d'assurance versées en vue de la reconstruction, même partielle, d'un immeuble sinistré ou des indemnités destinées à compenser une détérioration du capital, c’est-à-dire une dépréciation notoire de l’immeuble.
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4. Indemnités destinées à compenser un préjudice
Lorsque l’indemnité est versée, en application d’une décision de justice, au titre de la réparation d’un préjudice subi par le propriétaire, elle présente le caractère de dommages et intérêts. Elle n’est donc pas imposable.
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5. Financement partiel
Les dispositions prévues à l’article 29 du CGI concernent les indemnités ou subventions destinées à couvrir, même partiellement, des charges déductibles pour l’assiette des revenus fonciers.
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6. Absence de réalisation de la dépense
Les indemnités ou subventions sont imposables, même si la dépense qu’elles sont destinées à couvrir n’est pas réalisée (travaux par exemple).
IV. Autres subventions et indemnités
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A. Indemnité de déspécialisation
La somme versée en contrepartie de la déspécialisation du bail (souvent dénommée « indemnité de déspécialisation ») est celle qui est versée au propriétaire en contrepartie de l'autorisation donnée au locataire d'exercer une activité différente de celle prévue au bail.
L’article 4 de la loi n° 71-585 du 16 juillet 1971 permet au locataire d'un local commercial de demander au propriétaire, ou à défaut d'accord de celui-ci, au tribunal de grande instance, l'autorisation d'exercer dans les lieux loués une ou plusieurs activités différentes de celles prévues au bail.
Le changement d'activité peut motiver le paiement, à la charge du locataire, d'une indemnité - dite indemnité de déspécialisation - égale au montant du préjudice dont le bailleur établit l'existence. En outre, le propriétaire peut, en contrepartie de l'avantage procuré au locataire, demander, au moment de la transformation du fonds, une majoration de loyer.
L'indemnité de déspécialisation doit être comprise dans les revenus fonciers du bailleur si elle est destinée à compenser une perte de recettes (par exemple, diminution du loyer des autres locataires en compensation des troubles de jouissance qu'ils supportent du fait de la nouvelle activité exercée par le commerçant dont le bail a été modifié) ou un accroissement des charges qu'il supporte.
Il en est de même, quelle que soit la nature du préjudice subi, lorsque le montant de l'indemnité excède celui de ce préjudice ; dans un tel cas, l'excédent doit être considéré comme un supplément de loyer imposable.
Bien entendu, le supplément de loyer versé en tant que tel par le locataire au propriétaire en application de la loi du 16 juillet 1971 doit être également compris dans les revenus fonciers du propriétaire.
Dans les cas autres que ceux visés ci-dessus, sous réserve de l'examen des circonstances particulières, l'indemnité de déspécialisation présente le caractère d'un gain foncier qui n’a pas à être pris en compte pour la détermination du revenu foncier.
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B. Primes à la construction
Il est admis que les primes à la construction allouées en application du code de l'urbanisme ne constituent pas un revenu imposable.
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C. Indemnité versée à un particulier en dédommagement de la dépossession de surfaces habitables devant être démolies
S’agissant d’une indemnité intervenant du fait de la dépréciation irrémédiable ou non du capital initial, elle ne peut, par nature, être comprise dans les revenus fonciers du propriétaire bénéficiaire.
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D. Indemnité transactionnelle destinée à dédommager le bailleur d’une dépréciation réelle de son capital
Conformément aux principes généraux de l’impôt sur le revenu, une indemnité destinée à dédommager le bailleur d’une dépréciation réelle de son capital n’est pas imposable.
En revanche, lorsqu’une indemnité constitue la contrepartie d’une perte de recettes ou d’un accroissement des charges supportées par le bailleur, elle doit être prise en compte pour la détermination du revenu foncier imposable.
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E. Indemnité versée au bailleur en contrepartie de la renonciation à l’exercice de son droit de reprise
L'indemnité reçue par un propriétaire, lors du renouvellement d'un bail commercial, en contrepartie de sa renonciation à l'exercice de son droit de reprise a le caractère d’un supplément de loyer imposable (CE, arrêt du 21 mai 1962, n° 50140).