Enregistrement - Droits de Mutation à titre gratuit - Biens mis en Trust
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Les dispositions relatives aux droits de mutation à titre gratuit issues de l’article 14 de la première loi de finances rectificative pour 2011 (n° 2011-900 du 29 juillet 2011) sont codifiées sous les articles 750 ter du code général des impôts (CGI), 752 du CGI et 792-0 bis du CGI et à l’article L. 19 du livre des procédures fiscales.
Elles s’appliquent aux donations consenties et aux décès intervenus depuis la date de publication au Journal officiel de la première loi de finances rectificative pour 2011 (n° 2011-900 du 29 juillet 2011), soit à compter du 30 juillet 2011.
Les solutions jurisprudentielles et la doctrine administrative antérieures demeurent applicables aux transmissions à titre gratuit réalisées via un trust et intervenues avant le 30 juillet 2011.
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Sur les dispositions d'ordre général, et notamment les définitions du trust, du constituant et du bénéficiaire, BOI-DJC-TRUST.
I. CHAMP D'APPLICATION
A. Transmissions taxables
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Toutes les transmissions à titre gratuit réalisées via un trust sont désormais soumises aux droits de mutation à titre gratuit (DMTG), qu’elles puissent être ou non qualifiées de donation ou de succession au regard des règles fiscales de droit commun. Les règles générales de territorialité et de présomption de propriété applicables en matière de droits de mutation à titre gratuit sont aménagées en conséquence.
Le patrimoine transmis, incluant les produits capitalisés du patrimoine placé dans le trust, est taxé à sa valeur vénale nette à la date de la transmission.
B. Biens taxables
1. Règles de territorialité prévues par le droit interne
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Les règles de territorialité applicables en matière de DMTG, qui figurent à l’article 750 ter du CGI,sont aménagées. Ainsi, l’article 14 précité de la première loi de finances rectificative pour 2011 (loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011) étend leur champ d'application aux transmissions portant sur des biens ou droits composant un trust, y compris les produits capitalisés.
Il est rappelé que les DMTG s’appliquent, sous réserve des conventions fiscales internationales :
- aux biens situés en France ou hors de France des donateurs ou défunts domiciliés fiscalement en France ;
- aux biens situés en France des donateurs ou défunts non résidents de France ;
- aux biens situés en France ou hors de France reçus par les héritiers, donataires ou légataires domiciliés fiscalement en France, à la condition qu’ils l’aient été pendant au moins six des dix années précédant celle au cours de laquelle ils reçoivent les biens.
Ainsi, les DMTG sont dus sur l’ensemble des biens ou droits composant un trust, quelle que soit leur situation, lorsque le constituant a son domicile fiscal en France.
Dans le cas où le constituant ou le bénéficiaire réputé constituant est domicilié hors de France, les droits sont dus :
- soit sur l’ensemble des biens ou droits composant le trust, quelle que soit leur situation, lorsque le bénéficiaire du trust est domicilié en France au jour de la transmission et l’a été pendant au moins six ans au cours des dix dernières années ;
- soit sur les seuls biens ou droits composant le trust situés en France dans les autres cas.
Pour plus de précisions sur les règles de territorialité, cf. BOI-ENR-DMTG-10-10-30.
2. Impacts des conventions fiscales internationales
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Les conventions fiscales internationales d’élimination de la double imposition en matière de succession et de donation répartissent entre les Etats le droit d’imposer les biens qui font partie d’une succession ou d’une donation. La mise en œuvre des règles conventionnelles de rattachement de l’imposition repose sur deux types de critères : la localisation des biens ou la domiciliation, selon le cas, du défunt, du donateur ou de l’héritier .
Dès lors, lorsque les biens mis en trust sont transmis dans les cas visés au II de l’article 792-0 bis du CGI, l’existence du trust n’a pas d’incidence sur l’application des conventions fiscales internationales en matière de succession ou de donation.
Les modalités d’élimination des doubles impositions prévues par les conventions en matière de succession ou de donation trouvent donc à s’appliquer dans les conditions de droit commun, dès lors qu’une double imposition juridique est caractérisée, c’est-à-dire dans les cas où une même personne est imposable au titre des mêmes biens par plus d’un Etat.
Dans cette hypothèse, lorsque la France est l’Etat de résidence, l'impôt acquitté à l’étranger est imputable dans la limite de l'impôt dû en France. Il incombe au redevable de justifier du paiement effectif de l’impôt étranger.
3. Présomption de propriété
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La présomption de propriété prévue à l’article 752 du CGI est expressément étendue aux biens ou droits placés dans un trust. Ainsi, le régime applicable aux valeurs mobilières est étendu aux biens ou droits placés dans un trust dont le défunt a eu la propriété, a perçu les revenus ou à raison desquels il a effectué une opération quelconque moins d’un an avant son décès. Ces biens ou droits sont présumés faire partie de sa succession, jusqu’à preuve contraire.
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Par coordination, la procédure spéciale de mise en œuvre de cette présomption de propriété, prévue par l’article L. 19 du livre des procédures fiscales, est adaptée pour étendre symétriquement le champ du contrôle des actes de succession par l’administration.
II. OBLIGATIONS DECLARATIVES
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Sur ce point, vous reporter au III § 130 et suivants du BOI-DJC-TRUST.
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Par ailleurs, s’agissant des transmissions à titre gratuit des biens ou droits composant un trust, y compris des produits capitalisés, celles–ci doivent être déclarées dans les conditions de droit commun (déclaration de succession ou de donation).
III. MODALITES DE TAXATION
A. Transmissions qualifiables de donation ou de transmission par décès
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Le patrimoine transmis, incluant les produits capitalisés des biens initialement placés dans le trust, est taxé à sa valeur vénale nette à la date de la transmission, dans les conditions de droit commun, à un taux dépendant du lien de parenté qui unit le constituant et le bénéficiaire.
En particulier, si le constituant et le bénéficiaire étaient mariés ou liés par un pacte civil de solidarité (PACS), une transmission au bénéficiaire à la suite du décès du constituant qualifiée de transmission par décès s’effectue, en application de l’article 796-0 bis du CGI en franchise de droits de mutation par décès.
B. Autres transmissions
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Le décès du constituant constitue le fait générateur d’une nouvelle imposition, que les biens soient transmis au décès du constituant ou à une date postérieure au(x) bénéficiaire(s) concerné(s).
1. Transmission d’une part déterminée à un bénéficiaire identifié
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Lorsque la part revenant à un bénéficiaire est déterminée à la date du décès, les droits de mutation par décès sont applicables à cette part en fonction du lien de parenté du constituant avec le bénéficiaire.
Ainsi, pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, la valeur des biens, droits et produits compris dans le trust et transmis au bénéficiaire au décès du constituant, est ajoutée à celle des autres biens compris dans l’actif successoral.
Dans cette hypothèse, comme les règles d’imposition de droit commun des transmissions à titre gratuit s’appliquent, les régimes de faveur ont également vocation à s’appliquer. Il en est par exemple ainsi des exonérations prévues à l’article 795 du CGI qui portent sur les transmissions réalisées au profit d’organismes à caractère philanthropique.
2. Transmission d’une part globale à des bénéficiaires descendants du constituant
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Cette hypothèse recouvre la situation dans laquelle une part, déterminée à la date du décès, revient globalement à des descendants du constituant, sans qu’il soit possible de la répartir entre eux. Dans cette situation, les droits de mutation par décès sont dus sur cette part au taux marginal supérieur du barème applicable en ligne directe pour les droits de mutation à titre gratuit (porté à 45 % pour les successions ouvertes depuis le 31 juillet 2011 par l’article 6 de la première loi de finances rectificative pour 2011, n°2011-900 du 29 juillet 2011) sans application de l’abattement.
3. Autres cas de transmission
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Ce troisième cas correspond en pratique :
- soit à l’hypothèse où les biens restent dans le trust à la suite du décès du constituant sans être attribués ;
- soit à l’hypothèse où il y a transmission d’une part non individuellement déterminée, à des bénéficiaires qui ne sont pas exclusivement des descendants du constituant.
Ainsi, dans ces situations, la taxation s'effectue au taux de la dernière tranche du tableau III de l'article 777 du CGI et s’entend nette des parts individuellement déterminées ou globalement déterminées à des bénéficiaires descendants du constituant et sans application de l’abattement.
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Exemple :
Le constituant d’un trust, non résident fiscal de France, décède le 10 janvier 2012. En 2010, il avait constitué trois trusts dont les caractéristiques sont les suivantes :
- trust A : trust révocable dont les bénéficiaires sont le constituant et l’un de ses deux enfants, résident fiscal de France;
- trust B : trust irrévocable dont les bénéficiaires sont les deux enfants du constituant, résidents fiscaux de France ;
- trust C : trust irrévocable dont les bénéficiaires sont pour moitié les petits enfants du constituant « vivants à la date du 1er janvier 2015 ».
L’administrateur du trust a toute latitude quant à la disposition de l’autre moitié de l’actif du trust. Le décès du constituant constitue le fait générateur des taxations suivantes :
- droits de mutation par décès sur l’actif net de succession qui comprend notamment l’actif net du trust A et l’actif net du trust B.
- droits de mutation par décès sur l’actif net du trust C : au taux de 45 % (dernière tranche du tableau I de l’article 777 du CGI ) pour la moitié de l’actif à la date du décès du constituant, le nombre de bénéficiaires n’étant pas déterminé (« petits enfants vivants à la date du 1er janvier 2015 ») et au taux de 60 % (dernière tranche du tableau III de l’article 777 du CGI ) pour le solde.
C. Sortie ultérieure des biens restés dans le trust
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Si les attributaires des biens sortis du trust sont les bénéficiaires identifiés lors de la dernière transmission avec une répartition entre eux des biens identique à celle opérée lors de la dernière transmission, il y a lieu de considérer que la sortie (totale ou partielle) des biens du trust ne constitue pas une nouvelle mutation et qu’elle s’effectue par conséquent en franchise de droits de mutation à titre gratuit.
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En revanche, s’il n’y a pas identité parfaite entre les attributaires des droits ou biens sortis du trust et les bénéficiaires identifiés lors de la dernière transmission ou si la répartition des droits ou biens sortis du trust diffère de celle opérée lors de la dernière transmission, une taxation aux droits de donation sera effectuée en considérant que le premier bénéficiaire a consenti une donation au profit du nouvel attributaire de ces droits ou biens.
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Les produits d’un trust étant taxés à l’impôt sur le revenu lors de leur distribution (9° de l’article 120 du CGI dans sa rédaction issue de l’article 14 de la première loi de finances rectificative pour 2011 (n° 2011-900 du 29 juillet 2011) , leur sortie du trust n’entraîne en principe aucune taxation aux droits de mutation à titre gratuit. Toutefois, l’attributaire de ces produits ou l’administrateur du trust devra être en mesure d’apporter à l’administration fiscale les éléments permettant de justifier la qualification de produits des sommes concernées ainsi que leur montant.
D. Dissolution du trust
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La taxation de l’opération de dissolution du trust s’effectue suivant les mêmes modalités que celles appliquées lors de la sortie ultérieure de biens restés dans le trust (voir n° 150).
IV. CAS PARTICULIERS DE NON PRISE EN COMPTE DU LIEN DE PARENTE
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Par exception aux dispositions précédentes, et dans les cas où la qualification de donation ou de succession ne s'applique pas, il est prévu que le taux des droits de mutation à titre gratuit applicable entre non-parents (soit le taux de la dernière tranche du tableau III de l’article 777 du CGI) s’applique, indépendamment du lien de parenté unissant le constituant au bénéficiaire et de l’objet de la transmission (part déterminée ou part globale), lorsque :
- le trust est administré depuis un État ou territoire non coopératif (ETNC) au sens de l’article 238-0 A du CGI ;
- ou que le trust a été créé après le 11 mai 2011 par un constituant fiscalement domicilié en France lors de la constitution.
V. RAPPORT FISCAL EN PRESENCE DE BIENS TRANSMIS VIA UN TRUST
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Pour l’application des abattements, tarifs et réductions de droits, les transmissions à titre gratuit réalisées via un trust ne sont pas imposables de manière autonome des autres transmissions à titre gratuit entre mêmes personnes.
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Ainsi, le rapport fiscal des donations antérieures, que celles-ci aient été réalisées via un trust ou non, s’applique aux transmissions à titre gratuit de biens, droits ou produits reçus via un trust sauf en cas de transmission d’une part globale à des bénéficiaires descendants du constituant ou de taxation du solde de l’actif du trust au taux de la dernière tranche du tableau III de l’article 777 du CGI.
Sur le rappel fiscal et ses modalités d’application telles qu’elles résultent de l’article 5 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 (n° 2012-958 du 16 août 2012), BOI-ENR-DMTG-10-50-50.
VI. PAIEMENT DES DROITS
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Les droits de mutation résultant de l'article 792-0 bis du CGI pour les situations dans lesquelles il n’y a pas transmission d’une part déterminée au profit d’un bénéficiaire également déterminé, doivent être acquittés par l’administrateur du trust dans les délais de droit commun des droits de mutation par décès (en application de l'article 641 du CGI).
Dans l'hypothèse d'une transmission d'une part globale à des bénéficiaires descendants ou d'une taxation du solde de l’actif du trust au taux de la dernière tranche du tableau III de l'article 777 du CGI , en cas de défaut de paiement des droits par l’administrateur du trust, lorsque celui-ci relève d’un Etat ou d’un territoire non coopératif en matière fiscale ou n’ayant pas conclu avec la France une convention d’assistance mutuelle au recouvrement, il est prévu que les bénéficiaires, qu’ils soient ou non résidents de France, sont solidairement responsables pour le paiement des droits.
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VII. RECAPITULATIF DES DIFFERENTS CAS DE TAXATION
Qualification |
Taxation |
Donation ou succession |
DMTG selon le lien de parenté |
Ni donation ni succession : - part et bénéficiaire déterminés - part déterminée revenant globalement à plusieurs descendants du constituant - autres cas - Administrateur du trust relevant de la loi d’un ETNC ou constituant domicilié en France lors de la constitution du trust intervenue après le 11 mai 2011 - Actifs demeurant dans le trust après le décès du constituant sans être attribués |
DMTG selon le lien de parenté 45 % 60% 60% 60% |