Date de début de publication du BOI : 12/09/2012
Date de fin de publication du BOI : 30/10/2019
Identifiant juridique : BOI-CTX-ADM-10-10-10

CTX - Contentieux de l'assiette de l'impôt- Procédure devant le tribunal administratif - Compétence matérielle

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L'article L211-1 du code de justice administrative (CJA) pose en principe que les tribunaux administratifs sont, en premier ressort et sous réserve des compétences attribuées aux autres juridictions administratives, juges de droit commun du contentieux administratif.

Toutefois, en matière fiscale, les tribunaux administratifs ne statuent que sur les contestations relatives aux impôts, contributions, droits et taxes pour lesquels une disposition législative n'a pas expressément exclu leur compétence.

D'une manière générale, cette compétence est fixée :

- soit par une disposition formelle du LPF : ainsi, l'article L199 du LPF prévoit que les tribunaux administratifs sont compétents en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou taxes assimilées ;

Remarques : Le prélèvement institué par l'article 244 bis du CGI sur certains profits immobiliers réalisés par des personnes physiques ou morales n'ayant pas d'établissement en France a la même nature que l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés sur lequel il s'impute. Les litiges relatifs à ce prélèvement relèvent donc de la compétence du juge administratif. Cette décision s'applique également aux prélèvements des articles 244 bis A et 244 bis B du CGI.

Le 2ème alinéa de l'article L199 du LPF prévoit que le tribunal de grande instance est compétent en matière de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre et de taxes assimilées à ces droits ou taxes (cf. BOI-CTX-JUD-10-10 )

- soit par une référence aux règles du CGI ou du LPF incluse dans les lois relatives aux impôts ou taxes nouvellement instituées : cf. par exemple, l'article 1723 sexies du CGI en matière de taxe locale d'équipement.

La compétence « ratione materiae » des tribunaux administratifs et ses limites sont illustrées par une jurisprudence abondante. À de nombreuses reprises, le Conseil d'État a été, en effet, appelé à se prononcer sur les contestations que peut connaître la juridiction administrative et celles qui relèvent d'une autre juridiction.

I. Contestations relevant de la compétence de la juridiction administrative

A. Règles générales concernant tous les impôts

Le tribunal administratif a notamment qualité pour se prononcer :

10

- Sur la légalité des actes administratifs.

La juridiction administrative est compétente pour connaître des réclamations fondées sur l'illégalité ou l'irrégularité substantielle des actes par lesquels les ressources communales sont votées, autorisées, réparties ou mises en recouvrement.

20

- Sur les exceptions opposées à l'action entrant dans sa compétence.

Lorsqu'elle est saisie d'une action entrant dans sa compétence, la juridiction administrative a qualité pour se prononcer, le cas échéant, sur les exceptions opposées à cette action ; il n'en est autrement que s'il s'agit d'exceptions qui ressortissent à la compétence exclusive des tribunaux judiciaires ; seules les exceptions remplissant cette condition constituent des questions préjudicielles qui imposent à la juridiction administrative l'obligation de surseoir à statuer jusqu'à ce que lesdites questions aient été tranchées par le tribunal de l'ordre judiciaire compétent.

30

- Sur certaines questions de nationalité.

La juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des contestations sur la nationalité française ou étrangère des personnes physiques. Ainsi, les questions de nationalité sont préjudicielles devant toute autre juridiction de l'ordre administratif.

Ainsi, la question de savoir quelle est la nationalité qui a pu être acquise par un contribuable à la suite de son mariage relève de la compétence exclusive de l'autorité judiciaire. Lorsqu'une requête présente à juger une telle question, la juridiction administrative doit surseoir à statuer jusqu'à ce que la question préjudicielle ait été résolue par le tribunal compétent.

En revanche, s'agissant des personnes morales, aucune disposition législative n'attribue aux tribunaux judiciaires une compétence exclusive pour se prononcer soit par voie principale, soit par voie de question préjudicielle sur la détermination de leur nationalité.

Dès lors, la question de la nationalité d'une société doit être tranchée par la juridiction qui a compétence pour connaître de l'action à l'occasion de laquelle elle est soulevée et ne saurait constituer une question préjudicielle imposant à ladite juridiction l'obligation de surseoir à statuer.

40

- Sur l'interprétation d'une convention internationale.

Il convient de se reporter à cet égard aux documents traitant des sources internationales du droit fiscal (CTX-DG-20-10-30 § 170) et des questions préjudicielles (BOI-CTX-DG-20-60-10 § 180).

50

- Sur les réclamations relatives aux poursuites.

Il résulte des dispositions des articles L199 et L281 que les tribunaux administratifs sont habilités à connaître des contestations liées à l'exercice des poursuites pour le recouvrement des impôts directs, des taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées qui portent sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt.

Le contentieux des poursuites est étudié au BOI-REC-EVTS-20 auquel il convient de se reporter.

60

- Sur les contestations des mandataires et liquidateurs judiciaires portant sur le montant des droits réclamés au redevable en état de redressement ou de liquidation judiciaires.

La juridiction administrative est compétente pour statuer sur un litige né de la contestation, par le mandataire ou le liquidateur judiciaires, d'impôts réclamés au redevable.

70

- Sur les litiges relatifs au remboursement des frais de constitution de garantie (CE, arrêt du 26 juillet 1982 n° 25385).

80

- Sur la qualification d'une activité au regard de la loi fiscale.

90

- Sur la « taxe » de raccordement au réseau téléphonique.

100

- Sur les litiges relatifs à la « taxe » de pacage sur les pâturages communaux.

110

- Sur les redevances domaniales mises à la charge du concessionnaire d'un port de plaisance.

120

- Sur les recours pour excès de pouvoir en matière gracieuse (CE, arrêt du 2 mars 1983, n° 26020).

130

- Sur le fait de déterminer si une société civile immobilière est passible ou non de l'impôt sur les sociétés (CE, arrêt du 28 novembre 1979, n° 10816).

140

- Sur une demande de sursis à exécution d'une décision de contrainte administrative prise par un comptable public pour poursuivre le recouvrement forcé d'une créance fiscale (CE, arrêts du 13 juin 1980, n°s 10219 et 11497, plénière).

150

- Sur le contentieux portant sur les droits perçus à l'occasion de la délivrance d'un permis de construire (CE, arrêt du 24 juillet 1981, n° 11573).

B. Règles particulières concernant les impôts directs

Le tribunal administratif est notamment compétent :

160

- pour connaître des réclamations portant sur l'imposition des centimes additionnels communaux ( CE, arrêt du 26 juillet 1946, RO, p.67);

170

- pour statuer sur la demande d'un contribuable tendant à faire ordonner son inscription au rôle de la taxe professionnelle (actuellement contribution économique territoriale ) dès lors que ledit tribunal a qualité pour connaître de tous les litiges relatifs à l'existence ou au montant des impôts directs (CE, arrêt du 14 juin 1948, n°77699, RO p.58 Leb. Chron., p.558).  ;

180

- pour apprécier si un étranger qui possède une résidence en France y est ou non domicilié (CE, arrêt du 22 mars 1937, n° 44935, RO, p. 192) ;

190

- pour apprécier si un contribuable de nationalité française est ou non domicilié en France (CE, arrêt du 11 mars 1970, n° 69588, RJ, n° III, p. 59 );

200

- pour juger le litige d'ordre fiscal portant sur le lieu d'imposition d'une maison située sur la ligne séparative de deux communes dès lors qu'il n'existe, sur les limites mêmes des communes, aucune contestation présentant à juger une question préjudicielle.(CE, arrêt du 23 mai 1960, n° 35333, RO, p. 89, Leb. chron., p. 964 et 974).

II. Contestations ne relevant pas de la compétence de la juridiction administrative

A. Exceptions concernant tous les impôts

Le tribunal administratif n'a pas compétence pour connaître des litiges suivants :

210

- Opposition aux actes de poursuites.

D'une manière générale, les conclusions tendant à l'annulation d'actes de poursuites ne ressortissent pas à la compétence de la juridiction administrative.

En effet, aux termes de l'article L281 du LPF, les oppositions qui portent sur la régularité en la forme des actes de poursuites doivent être portés devant le juge de l'exécution, quelle que soit la nature des impositions dont le recouvrement est poursuivi.

il convient de se reporter au BOI-REC-EVTS-20 pour le contentieux des poursuites..

220

- Action en responsabilité.

Le tribunal administratif est incompétent pour connaître :

    • des conclusions d'un contribuable tendant à la réparation du préjudice qui lui aurait été causé par des poursuites en recouvrement et notamment par une saisie d'objets mobiliers lui appartenant, les fautes invoquées ne pouvant être regardées comme détachables de la procédure d'exécution dont le contrôle appartient à l'autorité judiciaire ;

    • d'une demande d'indemnité présentée par un contribuable et fondée sur les conditions dans lesquelles le comité départemental de confiscation des profits illicites a sollicité la mise sous séquestre de ses biens par l'autorité judiciaire dès lors qu'un tel litige se rattache à une procédure judiciaire.

230

- Contestation portant sur les avis de la commission nationale et des commissions départementales des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

Les avis émis par la commission nationale et les commissions départementales des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ne constituent pas des décisions faisant grief aux contribuables et ne sont dès lors pas susceptibles de faire l'objet de recours contentieux. Ils ne peuvent en conséquence, être contestés qu'à l'occasion de réclamations introduites selon la procédure prévue à l'article R* 190-1 du LPF et dirigée contre les impositions qui y ont fait suite.

De même, ni la décision du directeur de soumettre à ladite commission le désaccord qui existe entre le service et un contribuable, ni l'avis émis par ladite commission ne constituent des actes faisant grief au redevable. Leur validité ne peut donc être contestée qu'à l'occasion et à l'appui d'une réclamation introduite selon la procédure prévue par l'article R*190-1 du LPF et dirigée contre l'imposition établie à la suite de l'avis de la commission.

240

- Validité d'une convention internationale.

250

- Contestations portant sur les décisions de l'administration.

Les décisions de l'Administration relatives aux opérations de contrôle fiscal ne constituent pas des actes détachables de la procédure d'imposition et ne peuvent être attaquées qu'à l'occasion d'une réclamation introduite selon la procédure prévue par l'article R* 190-1 du LPF et dirigée contre l'imposition établie à la suite desdites opérations.

Jugé, en conséquence, qu'un contribuable, n'est pas recevable à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le directeur départemental a refusé de mettre fin à une vérification de sa comptabilité (CE, arrêt du 29 janvier 1965, n° 62558, RO, p. 269).

260

- Demande en restitution d'ordre contractuel.

Si, dans le contrat passé avec l'un de ses fournisseurs, l'État s'est engagé à rembourser audit fournisseur l'impôt payé par celui-ci, la demande en restitution basée sur les clauses du marché est d'ordre contractuel et il ne peut être statué sur cette demande par le juge de l'exigibilité de l'impôt.

270

- Action en dommages-intérêts.

cf. ci-dessus « Action en responsabilité » (II-A-§220).

280

- Désaccord portant sur le droit de propriété.

Quand la solution qu'appelle une demande en décharge de cotisation de taxe foncière fondée sur les dispositions de l'article 1404 du CGI est subordonnée à une question d'attribution de propriété, le tribunal administratif ne peut valablement statuer qu'après le jugement définitif par les tribunaux civils, du droit à la propriété ou, du moins, qu'après l'expiration d'un délai imparti au réclamant pour justifier de sa diligence à saisir le tribunal compétent.

290

- Injonction à l'administration.

Il n'appartient pas à la juridiction administrative d'adresser des injonctions à l'Administration en vue de faire délivrer aux contribuables des certificats de non-imposition à certains impôts ou contributions.

300

- Juridiction gracieuse.

Il n'appartient pas à la juridiction administrative de se prononcer sur le bien-fondé d'une remise gracieuse des pénalités légalement infligées.

Il est cependant précisé qu'une décision gracieuse peut utilement faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir notamment lorsqu'elle est entachée d'une erreur de droit ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

310

- Mandat.

Le tribunal administratif n'a pas à connaître du litige survenu entre un contribuable et son mandataire au sujet de l'accomplissement du mandat.

320

- Privilège du Trésor.

Toutes les difficultés relatives au privilège du Trésor sont de la compétence de l'autorité judiciaire.

330

- Question de droit civil.

Dans les cas exceptionnels où une contestation soulevée à l'occasion de la perception des taxes sur le chiffre d'affaires porte sur une question de pur droit civil, telle que l'existence d'une sûreté spéciale pour le recouvrement de l'impôt, et ressortit à la compétence des tribunaux judiciaires, elle doit être instruite et jugée par ces tribunaux suivant les règles de droit commun.

340

- Question de droit pénal.

La juridiction administrative n'est pas compétente, pour connaître des conclusions d'un contribuable tendant à la condamnation pénale d'un fonctionnaire de l'administration fiscale pour infraction aux règles du secret professionnel.

B. Exceptions propres aux impôts directs

- Ne constituent pas des réclamations contentieuses pouvant être portées devant le tribunal administratif :

350

  • une demande tendant à la rectification de l'adresse portée au rôle ainsi que des erreurs commises dans la rédaction des nom et adresse d'un contribuable portés sur un avis d'imposition ;

360

  • une demande tendant à la refonte d'un rôle.

370

- Litiges relevant de la compétence du comptable de la DGFIP

Lorsque le directeur a prononcé d'office la réduction de droits contestés par un contribuable et sur le montant desquels le service du recouvrement avait appliqué la majoration de 10 % pour paiement tardif, c'est au comptable de la DGFIP, saisi du certificat de dégrèvement, qu'il appartient d'accorder d'office le remboursement de ladite majoration en proportion des droits dégrevés. Tout litige pouvant s'élever à ce sujet relève, dès lors, du contentieux du recouvrement et le contribuable n'est pas recevable à contester ladite majoration dans une demande adressée au tribunal administratif et portant sur le bien-fondé de l'imposition elle-même.

380

- Litiges portant sur les évaluations des propriétés bâties et non bâties.

390

- Demande d'inscription d'un tiers sur un rôle.

Le tribunal administratif n'est pas compétent pour connaître d'une demande tendant à faire ordonner l'inscription d'un tiers sur les rôles.

400

- Demande relevant du domaine de la juridiction gracieuse.

Les demandes tendant à la remise ou à la modération d'impôts directs relèvent de la juridiction gracieuse conformément à l'article L247 du LPF et ne peuvent être portées devant la juridiction contentieuse alors même que la décision par laquelle le directeur a rejeté la demande serait rédigée comme en matière contentieuse (au motif, par exemple, que ladite demande ne comportait ni la signature de l'intéressé, ni l'exposé des faits et moyens).

Ainsi, la juridiction contentieuse administrative n'a pas qualité pour connaître des demandes en remise ou modération d'impôts directs présentées notamment dans les cas d'indigence ou de gêne.

Bien que les demandes en remise ou modération ne relèvent pas de la juridiction contentieuse, le juge de l'impôt peut, pour apprécier l'existence ou l'exigibilité de la dette du contribuable, constater la réalité ou le défaut d'une mesure gracieuse prise par l'autorité compétente et, lorsqu'il s'agit d'une remise conditionnelle, rechercher si la condition se trouve ou non remplie.

Enfin, il est précisé qu'une décision gracieuse peut utilement faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir devant la juridiction administrative lorsqu'elle est entachée d'une erreur de droit ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

410

- Litige portant sur la superficie d'une parcelle.

Un propriétaire qui se croit fondé à prétendre que la superficie retenue dans les documents cadastraux pour une de ses parcelles ne correspond pas à celle qui résulte de ses titres de propriété doit saisir du litige l'autorité judiciaire.

C. Taxes et redevances diverses

420

Ne relèvent pas de la juridiction administrative, les contestations relatives aux taxes et redevances suivantes:

- taxe communale sur l'électricité consommée ;

- impôt sur les spectacles à l'exception des décisions intervenues en cas de contestation pour la fixation du montant des abonnements prévus à l'article 1700 du CGI pour les établissements soumis à l'impôt sur les spectacles (article L199 du LPF) ;

- redevances pour services rendus par les abattoirs ;

- taxe sur les céréales visée à l'article 1619 du CGI ;

D. Autres contestations

430

Ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative, les contestations :

- concernant l'appréciation du caractère suffisant des tolérances administratives ;

- relatives au paiement d'une amende civile infligée par une juridiction judiciaire (CE, arrêt du 4 avril 1979, n° 15120) ;

- concernant le régime des agréments fiscaux en matière de droits d'enregistrement ;

- portant sur la validité des productions au passif dans le cadre des procédures collectives ainsi que sur le montant des frais et dépens afférents à une instance portée devant une juridiction judiciaire en matière de contentieux du recouvrement (CE, arrêt du 4 juillet 1980, n° 12581) ;

- relatives à l'indemnité tendant à la réparation du préjudice subi par un contribuable à la suite du dépôt d'une plainte pour complicité de fraude fiscale par l'Administration :

- portant sur l'appréciation de la régularité d'un procès-verbal constatant une infraction pénale résultant du refus d'un contribuable vérifié de communiquer ses documents comptables (CE, arrêt du 31 janvier 1983, n° 27591) ;

- ayant pour objet de déterminer si une veuve, désignée comme redevable de l'impôt par le service d'assiette, est tenue aux dettes de succession de son mari (CE, arrêt du 15 avril 1983, n° 24391, plénière) ;

- à propos d'une demande en décharge de responsabilité présentée, en l'absence de toute contrainte, par l'ex-épouse d'un contribuable (CE, arrêt du 22 juin 1983, n°s 30300 et 30301).