REC - Sûretés et garanties du recouvrement - Garanties du recouvrement - Cautionnement - Incidences de l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre du redevable
I. Principe de droit commun concernant la déchéance du terme dans le cas très spécifique des créances non échues
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Le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé (code de commerce [C. com.], art. L. 622-29 et C. com., art. L. 631-14).
L'absence de déchéance du terme à l'encontre du débiteur du seul fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire entraîne l'absence de déchéance du terme contre la caution.
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Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues (C. com., art. L. 643-1).
Toutefois, lorsque le tribunal autorise la poursuite de l'activité au motif que la cession totale ou partielle de l'entreprise est envisageable, les créances non échues sont exigibles à la date du jugement statuant sur la cession ou, à défaut, à la date à laquelle le maintien de l'activité prend fin (C. com., art. L. 643-1).
La déchéance du terme du débiteur dans les situations visées ci-dessus n'a d'effet qu'à l'égard du débiteur principal et ne peut être étendue à la caution (Cass. com. décision du 8 mars 1994, n° 92-11.854). La caution n'est donc tenue de payer la créance garantie qu'à l'échéance initialement fixée.
II. Déclaration des créances cautionnées
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Les comptables doivent déclarer l'ensemble de leurs créances qu'elles soient garanties par l'un des privilèges généraux mobiliers du Trésor ou par une sûreté réelle (hypothèque légale, conventionnelle, etc.), ou qu'elles soient chirographaires.
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Le défaut de déclaration dans le délai légal au passif d'une procédure collective n’entraîne pas, selon l'article L. 622-26 du C. com., l'extinction de la créance. Dès lors, le défaut de déclaration dans le délai légal au passif d'une procédure collective du débiteur principal, ne constitue pas une exception inhérente à la dette que la caution peut opposer au créancier (BOI-REC-GAR-20-40-20-10).
III. Abandon des pénalités
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L'article 1756 du code général des impôts (CGI) dispose qu'en cas de sauvegarde ou de redressement ou de liquidation judiciaires, les frais de poursuite et les pénalités fiscales encourues en matière d'impôts directs et taxes assimilées, de taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées, de droits d'enregistrement, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre et autres droits et taxes assimilés, de retenue à la source prévue à l'article 204 A du CGI, dus à la date du jugement d'ouverture, sont remis, à l'exception des majorations prévues aux b et c du 1 de l'article 1728 du CGI, à l'article 1729 du CGI et à l'article 1732 du CGI et des amendes mentionnées à l'article 1737 du CGI et à l'article 1740 A du CGI ainsi qu'aux 3° et 4° de l'article 1759-0 A du CGI.
L'article 1756 du CGI s'applique également à la caution.
Il y aura donc lieu de ne réclamer à la caution que le montant des impositions (droits, frais de poursuites et, le cas échéant, pénalités) déclarées à la procédure collective ouverte à l'encontre du redevable.
Le Conseil d’État a décidé que les pénalités pour distributions occultes sont rémissibles dès lors que l’avis de mise en recouvrement a été notifié antérieurement au jugement d’ouverture d'une procédure collective. Dans son considérant de principe, le Conseil d’État considère, en effet, que l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires n’est susceptible d’entraîner la remise de la pénalité pour distributions occultes (et, par suite, de faire obstacle à la mise en jeu, à ce titre, de la responsabilité solidaire du dirigeant gestionnaire de la société à la date de leur versement ou, à défaut de connaissance de cette date, à la date de déclaration des résultats de l'exercice au cours duquel les versements ont eu lieu) que dans l’hypothèse où cette pénalité est due à la date d’ouverture de la procédure judiciaire, c’est-à-dire lorsque cette procédure est ouverte postérieurement à la notification à la société de l’avis de mise en recouvrement de cette pénalité (CE, décision du 30 septembre 2019, n°415333, ECLI:FR:CECHR:2019:415333.20190930).
IV. Suspension des poursuites
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A. Suspension des poursuites durant la période d'observation en procédure de sauvegarde et de redressement judiciaire
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L'article L. 622-28 du C. com. et l'article L. 631-14 du C. com. prévoient que le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation toute action contre les personnes physiques ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie.
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Les créanciers ont toutefois la faculté de prendre des mesures conservatoires sur le patrimoine des intéressées conformément aux dispositions de l'article L. 622-28 du C. com. et de l'article L. 631-14 du C. com..
Les cautions personnes morales ne peuvent se prévaloir de cette suspension. Le comptable public peut donc leur demander d'exécuter l'ensemble de leur engagement.
B. Suspension des poursuites durant le plan de sauvegarde :
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Les personnes physiques ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent se prévaloir du jugement qui arrête le plan de sauvegarde à l'encontre d'un créancier poursuivant (C. com., art. L. 626-11).
En outre, les créanciers n'ayant pas déclaré leurs créances et leurs sûretés dans le cadre de la procédure de sauvegarde ne peuvent agir, pendant l'exécution du plan, contre les personnes physiques ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie (C. com., art. L. 622-26, al. 2)
La reprise des voies d'exécution à l'encontre de la caution personne physique se fait à l'issue de la période d'observation sur justification du jugement arrêtant le plan ou prononçant la liquidation judiciaire (C. com., art. R. 622-26, C. com., art. R. 631-27 et C. com., art. R. 641-26).
Il conviendra donc d'adresser à la caution une copie d'un de ces jugements avant de reprendre les poursuites à leur encontre (en ce qui concerne la prescription, BOI-REC-GAR-20-40-40-20). Ce jugement sera mentionné sur l'avis de mise en recouvrement.
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Par ailleurs, après le jugement adoptant le plan de sauvegarde, de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire, le tribunal peut accorder aux cautions des délais ou un différé de paiement dans la limite de deux ans (C. com., art. L. 622-28, C. com., art. L. 631-14).
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La situation des autres cautions demeure inchangée.
Ainsi, les cautions personnes morales, et notamment les établissements bancaires et de crédit, ne peuvent se prévaloir de cette suspension.
C. Suspension des poursuites durant le plan de redressement
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Pour les procédures ouvertes depuis le 1er octobre 2021, la suspension des poursuites prévue en cas de plan de sauvegarde est également applicable en cas de plan de redressement (C.com., art. L. 622-28 et C. com., art. L.631-19).
V. Clôture pour insuffisance d'actif
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En application de l'article L. 643-11 du C. com., le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif ne fait pas recouvrer en principe aux créanciers l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur.
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L'interdiction des poursuites à l'encontre du redevable dont la procédure collective a été clôturée pour insuffisance d'actif ne s'étend pas à la caution.
L'obligation de celle-ci est maintenue (Cass. com. décision du 8 juin 1993, n° 91-13295).