TCA - Taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique - Calcul du montant à payer
1
Conformément à l’article 299 ter du code général des impôts (CGI), le fait générateur de la taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique (TSN) est fixé au 31 décembre de l’année au cours de laquelle des sommes ont été encaissées en contrepartie de la fourniture en France d’un service taxable (§ 20 du BOI-TCA-TSN-10), ci-après dénommée « année d'imposition ».
Toutefois, en cas de cessation d’activité du redevable, le fait générateur intervient au moment de cette cessation.
10
Le redevable de la taxe est la personne qui encaisse les sommes versées en contrepartie du service taxable, et l’exigibilité intervient au même moment que le fait générateur (CGI, art. 299 ter).
Il en résulte, en particulier, que lorsque plusieurs personnes encaissent des sommes se rapportant à un même service taxable, chacune est redevable à hauteur des sommes qu'il encaisse.
Exemple : Lorsqu'un logiciel relevant d'un service taxable est commercialisé par différents canaux de distribution, chaque distributeur est redevable des sommes encaissées au titre des logiciels qu'il vend, sous réserve de la condition relative aux seuils d'assujettissement exposée au III § 60 du BOI-TCA-TSN-10-20 appréciée à l'échelle du groupe TSN dont relève ce distributeur.
Remarque : Lorsqu’un même service taxable est exploité successivement par plusieurs personnes au cours d’une même année d’imposition, chacune est redevable, sous réserve qu'elle remplisse la condition relative aux seuils d'assujettissement exposée au III § 60 du BOI-TCA-TSN-10-20 au titre des sommes qu'elle a encaissées.
Le montant à payer est calculé dans les conditions exposées par le présent document et déclaré selon les modalités prévues au BOI-TCA-TSN-30.
20
Le montant à payer est égal, pour chaque redevable et pour chaque service taxable, au produit des trois termes suivants :
- la totalité des sommes encaissées, au niveau mondial, en contrepartie de la fourniture du service taxable, dénommée « sommes taxables » ;
- un pourcentage représentatif de la part rattachée à la France de ce service, dénommé « coefficient de présence nationale » ;
- le taux de 3 % prévu au II de l’article 299 quater du CGI.
Si une entreprise est redevable de la TSN au titre de plusieurs services taxables, le montant de taxe due est égal à la somme des montants ainsi calculés pour chaque service.
30
Il est rappelé que la détermination des sommes taxables ainsi que celle du coefficient de présence nationale sont effectuées à l’échelle du ou des services taxables. Cette échelle est susceptible d’être différente de celle des services tels qu’ils se présentent sur le plan contractuel ou commercial (§ 10 du BOI-TCA-TSN-10-10-10 et I-A § 40 du BOI-TCA-TSN-10-10-20) .
I. Sommes taxables
40
Les sommes taxables sont évaluées sur l’ensemble de l’année d’imposition ou, en cas de cessation d’activité, jusqu’à l’intervention de cette cessation.
Les sommes restituées par le redevable à celui qui les a versées viennent en déduction des sommes encaissées au cours de l’année d’imposition où intervient la restitution.
50
Dans le cas où les sommes taxables sont libellées dans une devise étrangère autre que l’euro, le redevable de la taxe doit les convertir en utilisant le taux de change publié au journal officiel de l’Union européenne connu au premier jour du mois de l’encaissement de ces sommes (CGI, art. 299 quinquies).
Remarque : Lorsqu'un même redevable recourt à plusieurs devises et convertit l'ensemble de ces dernières en une même devise pour les besoins de sa comptabilité, il est admis, à titre de simplification, que la conversion réalisée pour les besoins de la TSN soit réalisée à partir de cette même devise et non à partir de chacune des devises des encaissements réalisés.
60
Les règles selon lesquelles les sommes taxables sont déterminées diffèrent selon la catégorie de service taxable (service d'intermédiation numérique ou service de publicité ciblée).
A. Service d'intermédiation numérique
70
Le 3° du I de l’article 299 bis du CGI précise les conditions de calcul des sommes taxables pour l'intermédiation numérique en fixant :
- une règle générale selon laquelle est pris en compte l'ensemble des sommes versées par les utilisateurs de l’interface numérique en cause ;
- une première exception à cette règle concernant les sommes versées en contrepartie d'opérations économiques indépendantes de l'accès et de l'utilisation de l’interface numérique.
Par ailleurs, une seconde exception à la règle générale est prévue concernant les sommes liées à la consommation de produits soumis à accises (CGI, art. 299 quater, I-al. 2).
1. Règle générale
80
Les sommes taxables sont constituées de l'ensemble des sommes versées par les utilisateurs de l’interface numérique en cause.
Il en résulte, sous réserve des exclusions commentées au I-A-2 § 110 et suivants et au I-A-3 § 160 et suivants, que les sommes taxables peuvent résulter de toute livraison de biens ou prestation de services réalisée au bénéfice d’un utilisateur de l’interface, quel que soit son objet ou sa territorialité au regard d’autres impôts.
En particulier, si les conditions d’exclusion du champ des services taxables ne sont pas remplies (II-A-1 § 150 et suivants du BOI-TCA-TSN-10-10-20), doivent être prises en compte les sommes versées par les utilisateurs de cette interface en contrepartie de la fourniture de contenus numériques, de services de communication ou de services de paiement.
90
Sont sans incidence :
- les modalités selon lesquelles les sommes sont calculées ;
Exemple : L'exploitant d'une place de marché se rémunère auprès des vendeurs au moyen d'un abonnement, d'une commission à chaque transaction et d'un prix calculé à chaque publication d'annonce : l'ensemble des sommes en cause est taxable.
- la circonstance que la transaction entre l’utilisateur et le redevable soit réalisée par d’autres moyens que l’interface numérique en cause, notamment au moyen d’une autre interface numérique ;
- la devise utilisée ;
- la circonstance que certaines sommes ne soient perçues qu’auprès de certains utilisateurs, ou certaines catégories d’utilisateurs.
Exemple : L'exploitant d'une place de marché se rémunère au moyen d'une commission à la transaction, prélevée pour partie auprès du vendeur et pour partie auprès de l'acheteur : l'intégralité de la commission est taxable.
100
Ne sont pas concernées les sommes versées par les utilisateurs à d’autres personnes que le redevable, y compris lorsque ce dernier facilite la transaction en ayant mis en relation les parties prenantes ou met en œuvre les moyens permettant leur réalisation matérielle.
Exemple : L’exploitant d’une place de marché permet le paiement de la transaction par son intermédiaire et encaisse, au nom et pour le compte du vendeur, la contrepartie d’une livraison de bien ou d’une prestation de services versée par l'acheteur : cette contrepartie n’est pas taxable. Il en est de même des montants que l’exploitant perçoit au nom et pour le compte d’une autre entreprise qui réalise le transport des biens ainsi livrés.
Toutefois, ces sommes sont susceptibles d’être taxables pour les besoins de la TSN due par les personnes au nom et pour le compte desquelles elles sont perçues.
Exemple : Deux entreprises perçoivent des revenus de la part des utilisateurs d’une interface numérique permettant à ces derniers d’interagir entre eux. Ces revenus sont perçus selon deux modalités différentes. D'une part, pour avoir accès à l'interface, les utilisateurs versent à l'entreprise A un abonnement. D'autre part, les utilisateurs achètent ponctuellement auprès de l'entreprise B des prestations d'optimisation de leur affichage sur l'interface. Ces sommes sont perçues par l'entreprise A au nom et pour le compte de l'entreprise B. Les sommes versées au titre de l'abonnement sont taxables pour le calcul de la TSN due par l'entreprise A et les sommes versées ponctuellement sont taxables pour le calcul de la TSN due par l'entreprise B.
2. Exception relative aux opérations économiques indépendantes
110
Par dérogation à la règle générale exposée au I-A-1 § 80 et suivants, sont exclues des sommes taxables les sommes versées par des utilisateurs en contrepartie de livraisons de biens ou de fournitures de services qui constituent, sur le plan économique, des opérations indépendantes de l'accès et de l'utilisation de l’interface numérique.
Cette condition d’indépendance reprend celle définie à l'article 257 ter du CGI utilisée pour l’appréciation de l’étendue des opérations économiques taxables à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) lorsqu’elles sont constituées de plusieurs éléments (offres dites « composites » ou « complexes »). Elle repose ainsi sur les critères d’appréciation exposés au BOI-TVA-CHAMP-60-20 et au V § 160 et suivants du BOI-TVA-CHAMP-60-40.
Une opération n’est pas considérée comme indépendante de l'accès ou de l'utilisation de l'interface lorsque :
- l’accès ou l’utilisation de l’interface numérique, d'une part, et l'opération en cause, d’autre part, sont si étroitement liés qu’ils forment, objectivement, une seule opération économique indissociable dont la décomposition revêtirait un caractère artificiel ;
- l'opération en cause ne constitue pas une fin en soi, mais un accessoire à l’accès ou à l’utilisation de l’interface, c’est-à-dire un moyen d’en bénéficier dans de meilleures conditions, notamment sur le plan technique, tarifaire ou commercial.
Remarque : Certains services liés à l’accès ou à l’utilisation d'une interface numérique peuvent être intégrés au sein d’une ou plusieurs offres commerciales proposées par l’exploitant, parfois couplés avec d’autres éléments indépendants de l’interface numérique, sans qu’il soit possible de les dissocier. Dans ce cas, les sommes taxables sont constituées du prix de cette offre commerciale.
120
Aux fins de l'appréciation de l'indépendance d'une opération, la Cour de justice de l'Union européenne précise qu'il n’existe pas de règle absolue (CJUE, arrêt du 27 septembre 2012, aff. C-392/11, Field Fisher Waterhouse, ECLI:EU:C:2012:597, point 19). Il est recouru à un faisceau d’indices afin d’identifier les éléments caractéristiques de l’opération en cause du point de vue du bénéficiaire. La CJUE identifie, en premier lieu, des éléments décisifs et, en second lieu, des éléments qui ne sont pas décisifs mais qui peuvent venir, le cas échéant, au soutien des éléments décisifs (CJUE, arrêt du 4 mars 2021, aff. C-581/19, Frenetikexito - Unipessoal Lda, ECLI:EU:C:2021:167). Les éléments décisifs tiennent, d'une part, au caractère objectivement indissociable sur le plan matériel des éléments en cause de sorte que, dans la perception du consommateur, il n’existe qu’une seule prestation et, d'autre part, à la finalité économique de l’opération pour l’abonné, c’est-à-dire aux éléments objectifs qui traduisent son intention de rechercher ou non spécifiquement la combinaison des éléments en cause, compte tenu des caractéristiques propres à cette opération. Les éléments non décisifs comprennent, notamment, le fait que l’abonné n’aurait pas la faculté d’acquérir séparément les services compris dans l’offre qu’il souscrit en dehors du cadre de celle-ci, ou encore l’existence d’une facturation unique (CJCE, arrêt du 25 février 1999, aff. C-349/96, CPP, ECLI:EU:C:1999:93, point 31, ainsi que CJCE, arrêt du 27 octobre 2005, aff. C-41/04, Levob Verzekeringen et OV Bank, ECLI:EU:C:2005:649, point 25).
Ainsi, la condition d’indépendance est appréciée du point de vue de la clientèle des livraisons de biens ou des prestations de services, sur la base de critères objectifs, l’ensemble des circonstances dans lesquelles se déroule l’opération devant être pris en compte. En particulier, sont pris en compte les modalités de tarification, les clauses contractuelles et l’environnement commercial.
Sont notamment des indices du caractère indissociable de plusieurs éléments des modalités de tarification indépendantes de la consommation respective de chacun de ces éléments l'impossibilité pour les clients de les résilier séparément, ou encore, la latitude pour le fournisseur de suspendre l'exécution de l'ensemble du contrat si le client manque à ses obligations uniquement pour l'un des éléments.
En revanche, la circonstance que l’interface numérique facilite, permette ou promeuve une opération économique n'est pas un critère pertinent pour apprécier si cette opération est indépendante de l'utilisation ou de l'accès à cette interface. Il en résulte que les opérations réalisées au moyen d'une place de marché ou celles faisant l'objet de publicité sur la place de marché ne sont pas, de ce seul fait, prises en compte dans le calcul de l'assiette de la taxe.
130
Sous les réserves exposées au I-A-2 § 140, constituent notamment des opérations économiques indépendantes de l’accès ou de l’utilisation de l’interface numérique :
- les livraisons de biens par l’exploitant, y compris lorsque la vente est réalisée au moyen de l’interface ;
Exemple : Un commerçant vend ses produits en ligne sur son site Internet. Par ailleurs, il permet aux utilisateurs de commenter gratuitement les produits achetés. Ce faisant, il rend un service d'intermédiation numérique taxable. Les recettes tirées des ventes de produits ne sont pas taxables.
- la vente de contenus numériques par l’exploitant, y compris lorsque la vente est réalisée au moyen de l’interface et lorsque l’interface constitue le support physique de délivrance de ce contenu, notamment par téléchargement ou par diffusion en flux continu (streaming) ;
Exemple : Un professionnel commercialise un service d'accès à des livres numériques ou de vidéo à la demande. Ce même professionnel met par ailleurs en ligne une interface numérique permettant à des acheteurs et des vendeurs de réaliser des ventes de biens. Le service d'accès à des livres numériques ou de vidéo à la demande est accessible et commercialisé notamment au moyen de cette interface numérique et son acquisition n'induit aucune modification tarifaire, commerciale ou technique dans l'accès ou l'utilisation de l'interface. Les sommes versées en contrepartie de l'acquisition du service d'accès à des livres numériques ou de vidéo à la demande ne sont pas taxables.
- les prestations de services fournies par l’exploitant et matériellement réalisées sans qu’il ne soit recouru à l’interface numérique.
Exemple 1 : Un prestataire commercialise des prestations de service de nettoyage, réalisées par ses salariés, au moyen de son site internet. Par ailleurs, il permet aux utilisateurs de publier des commentaires gratuits sur les services achetés. Ce faisant, il rend un service d'intermédiation numérique taxable. Les recettes tirées des prestations de nettoyage ne sont pas taxables.
Exemple 2 : L’exploitant d’une place de marché commercialise auprès des vendeurs des prestations logistiques dédiées à l’acheminement auprès des acheteurs des biens acquis par l'intermédiaire de la place de marché. Les vendeurs peuvent ne pas recourir à ces prestations logistiques ou faire appel à d'autres prestataires, et le recours à ces prestations n'a pas pour effet de modifier les conditions, notamment tarifaires, de l'accès à la place de marché. Les recettes tirées de ces prestations logistiques ne sont pas taxables.
140
Ne peuvent, en aucun cas, être considérées comme indépendantes de l'accès ou de l'utilisation de l'interface, même dans les situations exposées au I-A-2 § 130, les livraisons de biens et prestations de services suivantes proposées par le redevable :
- celles qui sont indispensables à l’accès et à l’utilisation de l’interface numérique en cause, ou sans lesquelles cet accès ou cette utilisation s'effectuent dans des conditions dégradées par rapport aux conditions dans lesquelles les utilisateurs qui les acquièrent accèdent ou utilisent l'interface ;
Exemple 1 : Les données de l'exemple 2 du I-A-2 § 130 sont reprises. Toutefois, pour les biens acquis par l'intermédiaire de la place de marché, les vendeurs ne peuvent pas recourir à d’autres prestations logistiques que celles proposées par l'exploitant de la place de marché. Les prestations logistiques ne sont pas indépendantes de l’accès ou de l’utilisation de l’interface numérique.
Exemple 2 : L’exploitant d’une place de marché propose aux acheteurs diverses offres de transport des biens livrés (livraison standard, livraison express, livraison premium, etc.). À cette fin, il facture aux acheteurs, en son nom, des frais de livraison dont le montant varie selon la solution retenue. Les acheteurs qui souhaitent que les biens leur soient livrés ne peuvent recourir qu’à ces solutions. Ces offres de transport ne sont pas indépendantes de l’accès ou de l’utilisation de l’interface numérique.
- celles dont l'objet est de permettre de bénéficier de fonctionnalités additionnelles ou améliorées dans l’utilisation de l’interface numérique ;
Exemple : L’exploitant d’une place de marché commercialise auprès des vendeurs des services permettant notamment d’accroître la visibilité de leur offre, de mettre en avant la qualité de la livraison physique des biens aux consommateurs ou de permettre un positionnement privilégié dans les recherches. Ces services ayant pour objet une meilleure utilisation de la place de marché pour les vendeurs, ils n'en sont pas indépendants et seront donc inclus dans l'assiette de la taxe.
- celles dont le tarif, ou les modalités de calcul du tarif, dépendent explicitement de l’acquisition de biens ou de services qui ne sont pas indépendants de l’accès ou de l’utilisation de l’interface numérique ;
- celles directement destinées à accroître les interactions sur l’interface numérique en cause.
Exemple : L’exploitant d’un réseau social vend des smileys, des images, des vidéos ou des jeux ayant pour finalité d’être utilisés sur l’interface numérique, soit en tant que tels, soit pour qu’ils soient commentés ou échangés.
150
Dès lors qu’une livraison de biens ou une prestation de services ne peut bénéficier de l’exclusion, c'est-à-dire qu'elle comprend des éléments qui ne sont pas indépendants de l'utilisation ou de l'accès à l'interface, l’intégralité de la contrepartie versée par l’utilisateur de l’interface numérique est taxée.
Il n’est pas possible de décomposer cette dernière en une première composante qui serait étroitement liée, sur le plan économique, à l’accès ou l’utilisation de l’interface numérique et une seconde composante qui ne le serait pas.
Exemple : L’exploitant d’une place de marché commercialise pour un prix forfaitaire une offre comprenant, d'une part, un service de fourniture de contenus numériques et, d'autre part, diverses prestations améliorant l'accès à la place de marché. À l'issue d'une analyse circonstanciée réalisée dans les conditions exposées au I-A-2 § 120, il est constaté que ces éléments sont indissociables. L’offre ne peut être artificiellement décomposée et le prix forfaitaire est taxé dans son intégralité.
Il n’est pas non plus possible de bénéficier de l’exclusion au motif que, dans la livraison de biens ou la prestation de services, les éléments qui sont étroitement liés, sur le plan économique, à l’accès ou l’utilisation de l’interface numérique présenteraient un caractère non prépondérant.
Exemple : Les données de l'exemple du sixième alinéa du I-A-2 § 140 sont reprises. Les prestations commercialisées auprès des vendeurs sont intégrées dans une offre plus globale comprenant également des prestations logistiques dédiées au transport des biens vendus sur la place de marché. À l'issue d'une analyse circonstanciée réalisée dans les conditions exposées au I-A-2 § 120, il est constaté que ces différents éléments ne sont pas indépendants, par exemple car les premiers sont accessoires des seconds. L’offre ne peut être artificiellement décomposée et le prix forfaitaire est taxé dans son intégralité.
3. Exception relative aux produits soumis à accises
160
Le second alinéa du I de l’article 299 quater du CGI dispose que ne sont pas taxables les sommes versées en contrepartie d’un service d'intermédiation numérique qui facilite la vente de produits soumis à accises lorsque les sommes encaissées présentent un lien direct et indissociable avec le volume ou la valeur de ces ventes.
Les produits soumis à accises sont énumérés au 1 de l’article 1er de la directive 2008/118/CE du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE. Ils comprennent :
- les produits énergétiques (essences, gazoles, fioul, charbon, etc.) et l’électricité ;
- l’alcool et les boissons alcooliques ;
- les tabacs manufacturés.
170
Cette exclusion couvre les sommes dont le mode de calcul fait intervenir le prix ou le volume des produits soumis à accises.
Exemple : Une place de marché facilitant la livraison de biens se rémunère selon une commission proportionnelle à la valeur de la transaction. Pourront être exclues des sommes taxables les commissions prélevées sur les livraisons de biens soumis à accises. En revanche, si la place de marché se rémunère également au moyen d’un abonnement acquitté par les vendeurs ou d’un prix dépendant du nombre d’annonces publiées, ces sommes ne sont pas exclues des sommes taxables, y compris lorsqu’elles peuvent être rattachées à une livraison de produits soumis à accises.
B. Service de publicité ciblée
180
Conformément au 4° du I de l’article 299 bis du CGI, pour les services de publicité ciblée, les sommes taxables sont constituées de l’ensemble des sommes versées par les annonceurs, ou leurs mandataires, en contrepartie de la réalisation effective du placement des messages publicitaires ou de toute autre opération qui lui est étroitement liée au sens des I et II de l'article 257 ter du CGI (pour plus de précisions, il convient de se reporter au BOI-TVA-CHAMP-60-20).
La réalisation effective du placement des messages publicitaires inclut toutes les prestations techniques ou commerciales qui participent de ce placement et du ciblage, notamment l’intégralité des sommes versées en contrepartie des services énumérés au II § 130 et 140 du BOI-TCA-TSN-10-10-30.
Ainsi, sont notamment concernées les sommes versées en contrepartie d’un service qui ne suffit pas, à lui seul, à assurer le placement du message de manière ciblée, car il doit être combiné avec d’autres services proposés ou non par un autre acteur.
190
Toutes les sommes versées sont taxables, quelles que soient les modalités selon lesquelles elles sont calculées, notamment les suivantes :
- droit d’accès forfaitaire et abonnement ;
- coût par action (en fonction des actions réalisés par l’internaute auquel s’adresse la publicité, comme un achat sur le site promu), coût par clic (en fonction du nombre de clics qu’engendre le message), coût pour mille (en fonction du nombre de fois où le message est affiché), coût par vue (pour une vidéo, selon qu’elle a ou non été effectivement visionnée), etc. ;
- services facturés sous la forme d’une option ou d’une amélioration d’un service de base.
200
Lorsque les prestations techniques ou commerciales qui participent du placement et du ciblage sont étroitement liées, au sens de l'article 257 ter du CGI, l’intégralité de la contrepartie versée pour cette opération est prise en compte. En particulier, il n’est pas possible de ventiler cette contrepartie selon les proportions respectives de ces différents éléments.
Pour apprécier si deux services sont étroitement liés, il convient de se reporter au BOI-TVA-CHAMP-60-20.
C. Service mixte
210
Dans certaines situations, une même somme encaissée par un même redevable peut être analysée à la fois comme étant versée par un utilisateur dans le cadre d'un service d'intermédiation numérique et versée par un annonceur dans le cadre d'un service de publicité ciblée.
Dans ce cas, cette somme n’est pas taxée deux fois, mais doit être rattachée à un seul de ces deux services selon la règle suivante :
- en principe, cette somme sera taxée uniquement au titre du service de publicité ciblée ;
Exemple : L'exploitant d'une place de marché commercialise sur cette place de marché des espaces publicitaires ciblés accessibles à l'ensemble des annonceurs. Une entreprise cliente de la place de marché est donc susceptible de recourir à ce service de publicité ciblée. La rémunération qu'elle versera pour le placement des messages publicitaires, bien qu'il s'agisse d'une somme versée par un utilisateur de la place de marché, ne sera pas taxable au titre de l'intermédiation numérique, mais le sera au titre du service de publicité ciblée.
- par exception, si le service de publicité ciblée ne peut être dissocié du service d'intermédiation, cette somme est taxée uniquement au titre du service d'intermédiation numérique.
Exemple : Une place de marché, plutôt que d'appliquer une commission sur les transactions, se rémunère auprès des vendeurs sur la base des annonces qu'elle place et qui sont relatives aux produits qu'ils vendent (nombre de fois que l'annonce est affichée, positionnement dans les résultats d'un moteur de recherche etc.). Ces annonces sont positionnées sur la place de marché en fonction des données des acheteurs potentiels, par exemple en fonction des termes renseignés dans le moteur de recherche de la place de marché. La place de marché participe ainsi à la fois d'un service d'intermédiation numérique et d'un service de publicité ciblée. Toutefois, le service de publicité ciblée n'a pas d'autre vocation que d'assurer la mise en œuvre de l'intermédiation entre les acheteurs et les vendeurs. Les sommes versées par les vendeurs seront donc taxables au titre de l'intermédiation numérique et non au titre du service de publicité ciblée.
II. Coefficient de présence nationale
A. Règles communes
220
Le coefficient de présence nationale est le pourcentage représentatif de la part des services taxables rattachée à la France évalué sur l’ensemble de l’année d’imposition.
Pour l'année 2019, s'agissant de la détermination de l'assujettissement et de calcul de la taxe, le coefficient de présence nationale est évalué sur la période comprise entre le 26 juillet 2019 et le 31 décembre 2019, conformément au dernier alinéa du III de l'article 1 de la loi n° 2019-759 du 24 juillet 2019 portant création d'une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l'impôt sur les sociétés. Il est admis que tel soit également le cas pour la détermination de l'assujettissement au titre de l'année 2020.
Remarque : Lorsqu’un même service taxable est fourni successivement par plusieurs redevables au cours d’une même année d’imposition, le coefficient reste normalement, pour chacun d’entre eux, évalué sur l’ensemble de cette année. Toutefois, si un redevable démontre auprès des services de contrôle que, sur certaines périodes où le service était fourni par un tiers, il n’était pas en mesure d’obtenir les informations nécessaires, ces périodes peuvent être omises.
230
Le coefficient de présence nationale est déterminé à partir de la localisation en France des utilisateurs des interfaces numériques. Les conditions suivant lesquelles cette localisation est déterminée sont exposées au I § 10 à 40 du BOI-TCA-TSN-10-20.
240
L’évaluation du coefficient de présence nationale est indépendante de celle des sommes taxables (I § 40 et suivants).
250
Cette évaluation est réalisée de façon distincte pour chaque service identifié comme taxable.
Exemple : Une entreprise exploite trois services taxables distincts : deux services de place de marché et un service de placement de publicité. Elle doit évaluer trois coefficients de présence nationale, un pour chacun de ces services.
Pour chaque service, l’évaluation est réalisée globalement, sans qu’il ne soit tenu compte des différentes opérations économiques réalisées par le redevable dans le cadre de l'exploitation du service. En effet, il est rappelé qu’il ne peut être procédé à aucune décomposition (§ 10 du BOI-TCA-TSN-10-10-10).
Il en résulte que chaque service taxable dispose d’un unique coefficient de présence nationale qui lui est propre.
B. Règles propres à chaque sous-catégorie
260
Le IV de l’article 299 bis du CGI définit, pour chaque sous-catégorie de services taxables, une méthode différente pour calculer le coefficient de présence nationale.
1. Places de marché
270
Le coefficient est déterminé en fonction de la proportion des livraisons de biens et prestations de services réalisées entre utilisateurs au moyen de la place de marché pendant l’année d’imposition et pour lesquelles l’un des utilisateurs du service est localisé en France. Ne sont donc pas prises en compte les opérations réalisées entre un utilisateur et l'exploitant de l'interface, même lorsque les sommes reçues en contrepartie sont comptabilisées au sein des sommes taxables au motif qu'elles ne sont pas indépendantes de l'accès ou de l'utilisation de la place de marché.
Exemple : Une entreprise A exploite un service de place de marché. Au cours de l’année N, elle réalise 50 000 ventes sur son interface. Parmi ces ventes, 10 000 concernent des acheteurs localisés en France et des vendeurs localisés à l’étranger, 5 000 des vendeurs localisés en France et des acheteurs localisés à l’étranger et 2 000 pour lesquels à la fois le vendeur et l’acheteur sont localisés en France. Le coefficient de présence nationale est alors égal à (10 000 + 5 000 + 2 000) / 50 000 = 34 %. La circonstance que l'entreprise A se rémunère au moyen de commissions sur les transactions, d’abonnement prélevés auprès des acheteurs ou des vendeurs ou selon toute autre modalité est indifférente. De même, la circonstance que plusieurs ventes soient réalisées au moyen d'un même compte client est indifférente, chaque vente sera comptabilisée.
280
Lorsque la livraison de biens ou la prestation de services rattachable à la France est annulée, par le vendeur ou l’acheteur, celle-ci vient en déduction des opérations comptabilisées dans l’évaluation du coefficient de présence nationale au cours de l’année d’imposition pendant laquelle intervient l’annulation.
290
Lorsque le service taxable est une place de marché, il importe peu pour l’évaluation du coefficient de présence nationale que les livraisons de biens ou les prestations de services soient réalisées à titre gratuit ou à titre onéreux.
2. Services de mise en relation
300
Le coefficient est déterminé en fonction de la proportion des utilisateurs qui disposent d’un compte ayant été ouvert depuis la France, y compris antérieurement à l’année d’imposition, et qui ont utilisé le service d’intermédiation durant l’année d’imposition.
Exemple : Une entreprise B exploite un site de rencontres. Au cours de l’année N, 100 000 utilisateurs ont accédé à son service, 20 000 d’entre eux avaient ouvert leur compte depuis le territoire de la France et ont utilisé ce compte au cours de l'année N. Le coefficient de présence nationale est égal à 20 000 / 100 000 = 20 %.
310
Lorsqu’un compte est ouvert pour une durée déterminée, toute reconduction, y compris tacite, est assimilée à une ouverture.
3. Services de placement
320
Le coefficient est déterminé en fonction de la proportion des messages publicitaires qui ont été ciblés, au cours d’une année civile, vers un utilisateur localisé en France.
Exemple : Une entreprise C commercialise un service de placement. 300 milliards de messages ont été placés au cours de l’année N au moyen de ce service. 100 milliards ont été ciblés vers un utilisateur situé en France. Le coefficient de présence nationale est égal à 100 / 300 = 33 %.
330
Il importe peu que l'utilisateur ait effectivement visualisé le message ou cliqué sur ce dernier et ce, quel que soit le mode de rémunération du service.
335
Certains services taxables, notamment les services de stockage et de diffusion de messages publicitaires, de contrôle publicitaire et de mesures de performance, viennent en complément d'un service qui procède techniquement au placement (I-A-2 § 40 du BOI-TCA-TSN-10-10-30). Pour ces services, le coefficient est déterminé en fonction du placement effectif des messages réalisés au moyen du service en complément duquel ils sont proposés. À titre de règle pratique, lorsque l'ensemble de ces services sont proposés par une même personne auprès des mêmes acteurs, il est admis que le calcul du coefficient soit réalisé globalement pour ces services et appliqué au cumul des sommes taxables relatives à chacun d'entre eux.
4. Services de transmission de données
340
Le coefficient est déterminé en fonction de la proportion des utilisateurs pour lesquels tout ou partie des données transmises ont été générées ou collectées à l’occasion de la consultation d’une interface numérique depuis la France.
Exemple : Une entreprise vend des données de navigation d’utilisateurs. Au cours de l’année N, les données vendues ont été recueillies auprès de 275 000 utilisateurs différents. Pour 25 000 d’entre eux au moins, une partie des données de navigation a été collectée lors de la consultation d’une interface numérique depuis la France. Le coefficient de présence nationale est égal à 25 000 / 275 000 = 9 %.
350
Cette règle de calcul ne s’applique pas lorsque la transmission de données s’intègre dans un service plus complet de placement de publicité ciblée.