Date de début de publication du BOI : 06/05/2015
Identifiant juridique : BOI-IS-GPE-10-30-30

IS - Régime fiscal des groupes de sociétés - Formation du groupe - Cas particuliers - Aménagements consécutifs à la jurisprudence "Société Papillon“

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Avant la promulgation de l'article 33 de la troisième loi de finances rectificative pour 2009 n° 2009-1674 du 30 décembre 2009, les dispositions de l’article 223 A du code général des impôts (CGI) autorisait, sous certaines conditions, les sociétés détenues à 95 % au moins, directement ou indirectement par l’intermédiaire de sociétés membres du groupe et soumises à l’impôt sur les sociétés en France, par leur société mère à rejoindre le groupe d’intégration fiscale constitué par cette dernière.

Dans son arrêt « Société Papillon » (CJCE, arrêt du 27 novembre 2008, aff. C 418/07), la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) a considéré que :

le droit communautaire « s’oppose à la législation d’un État membre en vertu de laquelle un régime d’imposition de groupe est accordé à une société mère résidente de cet État membre qui détient des filiales et des sous-filiales également résidentes dudit État, mais est exclu pour une telle société mère si ses sous-filiales résidentes sont détenues par l’intermédiaire d’une filiale résidente d’un autre État membre ».

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Afin de tenir compte de cette décision, l’article 33 de la troisième loi de finances rectificative pour 2009 n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 apporte un certain nombre d’aménagements au régime fiscal des groupes de sociétés notamment en ce qui concerne les règles de détermination du périmètre du groupe.

I. Réalisation du chaînage entre les sociétés du groupe par le biais d'une société intermédiaire : définition des sociétés « intermédiaires »

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Le chaînage capitalistique entre sociétés du groupe peut désormais être réalisé par l’intermédiaire de sociétés du groupe et de sociétés étrangères, que l’article 223 A du code général des impôts (CGI) qualifie de « sociétés intermédiaires ».

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Bien que ces « sociétés intermédiaires » soient situées à l’étranger et ne puissent, en raison des règles de territorialité de l’impôt, être intégrées dans le groupe fiscal constitué par la société tête de groupe, les conditions imposées à ces sociétés pour pouvoir revêtir la qualité de « sociétés intermédiaires » sont similaires à celles qui leur auraient été imposées pour pouvoir rejoindre le groupe fiscal si elles avaient été implantées en France.

Remarque : En revanche, l’établissement stable français d'une société intermédiaire est susceptible, s’il respecte toutes les conditions requises, de rejoindre le groupe fiscal français. L’établissement stable français de cette société intermédiaire n’est alors pas qualifié de « société intermédiaire », mais de « société du groupe ».

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La « société intermédiaire » peut être constituée sous forme de société mais un établissement stable peut également être qualifié de « société intermédiaire ». De la même façon qu’il avait déjà été admis que l’établissement stable français d’une société étrangère puisse, dans certaines conditions, rejoindre un groupe fiscal français (BOI-IS-GPE-10-30-40 au II § 140 et suivants), rien ne s’oppose a priori à ce qu’un établissement stable étranger revête la qualité de « société intermédiaire » : c’est alors au niveau de l’établissement stable, et non de son siège, que devra être assuré le respect des conditions mentionnées au II § 50 et suivants.

II. Conditions nécessaires pour être qualifiée de société intermédiaire

A. Condition tenant à la détention du capital de la société intermédiaire

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En premier lieu, le capital de la société intermédiaire doit être détenu à 95 % au moins par la société mère, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe ou de sociétés intermédiaires.

Conformément à l’article 46 quater-0 ZF de l’annexe III au CGI, la détention du capital de la société intermédiaire à 95 % au moins s’entend de la détention en pleine propriété de 95 % au moins des droits à dividendes et de 95 % au moins des droits de vote attachés aux titres émis par cette société (BOI-IS-GPE-10-20-20).

60

Lorsque le capital de la société intermédiaire est détenu de manière indirecte, c’est-à-dire par l’intermédiaire d’une chaîne de détention, le pourcentage de détention est apprécié en multipliant entre eux les taux de détention successifs, toute détention supérieure ou égale à 95 % étant considérée comme égale à 100 % pour le calcul de ce produit.

Cette règle est applicable quel que soit le nombre de sociétés interposées entre la société mère et la société intermédiaire. Pour le calcul de ce taux, il est également fait abstraction, dans la limite de 10 % du capital de la société intermédiaire, de la part de ce capital correspondant aux titres attribués aux salariés et mandataires sociaux en application d’une réglementation étrangère équivalente aux dispositions du code de commerce et du code du travail mentionnées au sixième alinéa du I de l’article 223 A  du CGI.

L’équivalence n’implique pas l’identité des conditions dans lesquelles les actions sont souscrites ou attribuées en application de la réglementation étrangère, mais l’identité de l’objectif poursuivi par la réglementation étrangère, à savoir le développement de l’actionnariat salarié. Les modalités de calcul précisées au BOI-IS-GPE-10-20-20 au II § 40 et suivants consacré au capital détenu par les salariés sont étendues à la situation des sociétés intermédiaires.

B. Condition tenant à la soumission à un impôt équivalent à l 'impôt sur les sociétés

70

En deuxième lieu, la société intermédiaire doit être soumise, de plein droit ou sur option mais sans en être exonérée, à un impôt équivalent à l'impôt sur les sociétés (voir au BOI-ANNX-000071, la liste des impôts équivalents à l’impôt sur les sociétés) dans un État de la Communauté européenne ou dans un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales. Une société française ne peut pas être une société intermédiaire.

En revanche, l’établissement stable d’une société française qui serait situé dans un État de la Communauté européenne ou dans un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, et qui y serait soumis à un impôt équivalent à l’impôt sur les sociétés peut revêtir la qualité de société intermédiaire.

C. Condition tenant à la durée des exercices de la société intermédiaire

80

En troisième lieu, la société intermédiaire doit ouvrir et clore ses exercices aux mêmes dates que les autres sociétés du groupe. Cela étant, la législation de l'État d’implantation de la société intermédiaire peut rendre cette condition impossible à satisfaire : dans ce cas, le respect de cette condition n’est pas requis.

En revanche, dans le cas où la divergence dans les dates d’ouverture ou de clôture résulterait d’un choix de la société étrangère, que permettrait mais n’imposerait pas la législation de son pays d’implantation, le non-respect de cette condition l’empêcherait de revêtir la qualité de société intermédiaire.

D. Condition tenant à l'accord de la société intermédiaire

90

Enfin, en quatrième lieu, pour devenir une société intermédiaire, la société étrangère doit avoir donné son accord. L’accord de la société intermédiaire doit être notifié au service des impôts auprès duquel est souscrite la déclaration du résultat d'ensemble du groupe, soit en même temps que l’option par laquelle la société mère constitue son groupe, soit, si le groupe est déjà constitué, au plus tard à l'expiration du délai de dépôt de la déclaration de résultat de l’exercice à compter duquel la société acquiert la qualité de société intermédiaire, conformément aux dispositions de l’article 46 quater-0 ZD de l’annexe III au CGI.

III. Conséquences de l'existence de sociétés intermédiaires sur le périmètre des groupes fiscaux

A. Conséquences de la perte de la qualité de société intermédiaire

100

L’adaptation de la réglementation française aux principes posés par la CJCE se répercute directement sur les conditions que doit respecter une société qui souhaite être membre d’un groupe fiscal.

En effet, il n’est plus requis que la chaîne de détention reliant la société mère à cette société soit uniquement constituée de sociétés du groupe ; la société du groupe peut désormais être détenue par la société mère à 95 % au moins, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe ou de sociétés intermédiaires. Le calcul du taux de détention est effectué selon les mêmes règles qu’auparavant, telles que fixées à l’article 46 quater-0 ZF de l’annexe III au CGI (voir également au  II-A § 50 et suivants).

Naturellement, lorsqu’une société cesse d’être détenue dans ces conditions par la société mère, par exemple lorsqu’une société étrangère perd sa qualité de société intermédiaire de telle sorte que la société mère détient moins de 95 % du capital de sa filiale directement ou indirectement par l’intermédiaire de sociétés du groupe ou de sociétés intermédiaires, la filiale intégrée sort du groupe, avec les conséquences prévues à l’article 223 S du CGI.

110

Des aménagements analogues ont été apportés dans le cas des groupes d’assurance, prévus au quatrième alinéa du I de l’article 223 A du CGI et des groupes bancaires mutualistes, prévus au cinquième alinéa du I de ce même article.

B. Constitution de sous-groupes

120

Avant la promulgation de l'article 33 de la troisième loi de finances rectificative pour 2009 n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 , l’interposition entre deux sociétés imposables à l’impôt sur les sociétés en France d’une société étrangère non imposable à l’impôt sur les sociétés en France empêchait les deux sociétés françaises de former un groupe d’intégration fiscale entre elles.

En revanche, toutes autres conditions étant satisfaites, ces deux sociétés pouvaient chacune former des groupes distincts avec leurs propres filiales françaises puisque la société mère d’un groupe peut être détenue par une autre société imposable à l’impôt sur les sociétés indirectement par l’intermédiaire d’une personne morale non soumise à cet impôt (premier alinéa du I de l’article 223 A du CGI).

Désormais, la société française détenue par une autre société française indirectement par l’intermédiaire d’une société étrangère revêtant la qualité de société intermédiaire peut rejoindre le groupe d’intégration fiscale constitué par la société française qui la détient ; tel est d’ailleurs l’objectif premier des évolutions apportées par l’article 33 de la troisième loi de finances rectificative pour 2009.

130

Mais la société française ainsi détenue par une autre société française indirectement par l’intermédiaire d’une société intermédiaire peut également ne pas rejoindre le groupe d’intégration fiscale constitué par la société française qui la détient et constituer son propre groupe d’intégration fiscale. En effet, comme auparavant, une société mère peut être détenue par une autre société soumise à l’impôt sur les sociétés si cette détention se fait de manière indirecte par l’intermédiaire d’une personne morale non soumise à cet impôt.

Dans ce cas et conformément aux dispositions du i du 6 de l’article 223 L du CGI, elle pourra rejoindre ultérieurement avec les filiales qui sont membres de son propre groupe le groupe de la société française qui la détient indirectement par l’intermédiaire de la société intermédiaire. Les règles qui régissent ce passage d’un groupe à l’autre sont calquées sur celles déjà existantes, prévues au d du 6 de l’article 223 L du CGI, pour les conséquences de l’acquisition à 95 % au moins, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, d’une société mère par une autre personne morale passible de l'impôt sur les sociétés.

140

Ces dispositions sont abordées au BOI-IS-GPE-50-60-30.

IV. Exemples d'application

150

Exemple 1 :

La société M, située en France, détient directement 100 % du capital de sa filiale française F1 et indirectement 100 % de sa filiale française F2 – en l’occurrence à 50 % par l’intermédiaire de sa filiale française F1 et à 50 % par l’intermédiaire de l’établissement stable italien de sa filiale américaine A dont elle détient 95 % du capital (détention assimilée à une détention à 100 %), les titres de la filiale F2 étant inscrits à l’actif de l’établissement stable italien.

La société M peut constituer un groupe fiscal comprenant ses filiales françaises F1 et F2.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires : exemple 1

160

Exemple 2 :

La société M, située en France, détient directement 100 % du capital de sa filiale française F1 et indirectement 100 % de sa filiale française F2 – en l’occurrence à 50 % par l’intermédiaire de sa filiale française F1 et à 50 % par l’intermédiaire de sa filiale américaine A dont elle détient 95 % du capital (détention assimilée à une détention à 100 %), les titres de la filiale F2 étant inscrits pour moitié à l’actif du siège américain et pour moitié à l’actif de l’établissement stable italien de la société A.

La société M peut constituer un groupe fiscal comprenant sa filiale française F1, l’établissement stable italien de la société A peut revêtir la qualité de société intermédiaire, mais la filiale F2, détenue à seulement 75 % par l’intermédiaire de sociétés du groupe et de sociétés intermédiaires, ne peut rejoindre le groupe d’intégration fiscale constitué par la société M.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires : exemple 2

170

Exemple 3 :

La société M, située en France, détient directement 100 % du capital de sa filiale française F1 et indirectement 100 % de sa filiale française F2 – en l’occurrence à 50 % par l’intermédiaire de sa filiale française F1 et à 50 % par l’intermédiaire de sa filiale italienne A dont elle détient 95 % du capital (détention assimilée à une détention à 100 %), les titres de la filiale F2 étant inscrits pour moitié à l’actif du siège italien et pour moitié à l’actif de l’établissement stable français de la société A.

Le siège italien de la société A peut revêtir la qualité de société intermédiaire.

La société M peut constituer un groupe fiscal comprenant ses filiales françaises F1 et F2 ainsi que l’établissement stable français de la société A.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires : exemple 3

180

Exemple 4 :

La société M, située en France, détient au moins 95 % du capital de sa filiale F, située en France, par l’intermédiaire d’une chaîne continue de détention constituée de sociétés situées à l’étranger. La société M détient en effet 100 % du capital de sa filiale A, située en Belgique, qui détient elle-même 95 % du capital de sa filiale B, située aux Etats-Unis, dont l’établissement stable italien détient 100 % du capital de sa filiale C, située en Allemagne, qui détient enfin 95 % du capital de la filiale F, située en France.

Les sociétés A et C et l’établissement stable italien de la société B peuvent revêtir la qualité de société intermédiaire ; la filiale F est ainsi détenue à 95 % au moins par la société M, par l’intermédiaire d’une chaîne de détention constituée de sociétés intermédiaires. La filiale F peut rejoindre le groupe d’intégration fiscale constitué par la société M.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires  : exemple 4

190

Exemple 5 :

La société M, située en France, détient 100 % du capital de sa filiale H, située en France, et 100 % du capital de sa filiale A, située en Belgique. Cette dernière détient 100 % du capital de sa filiale F1, située en France, laquelle détient 100 % de sa filiale B, située en Allemagne. Enfin, cette dernière détient l’intégralité du capital de sa filiale F2, située en France, laquelle détient également l’intégralité du capital de ses filiales S1 et S2, situées en France.

Les sociétés A et B peuvent être qualifiées de sociétés intermédiaires.

Les sociétés H, F1, F2, S1 et S2 sont détenues à plus de 95 % par la société M par l’intermédiaire de sociétés du groupe ou de sociétés intermédiaires : elles peuvent rejoindre le groupe d’intégration fiscale constitué par la société M.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires : exemple 5

200

Exemple 6 :

La société M, située en France, détient 100 % du capital de sa filiale H, située en France, et 100 % du capital de sa filiale A, située en Belgique. Cette dernière détient 100 % du capital de sa filiale F1, située en France, laquelle détient 100 % de sa filiale B, située en Allemagne. Enfin, cette dernière détient l’intégralité du capital de sa filiale F2, située en France, laquelle détient également l’intégralité du capital de ses filiales S1 et S2, situées en France.

La société F1, qui aurait pu rejoindre le groupe d’intégration fiscale constitué par la société M, décide de ne pas le faire. Il en résulte une rupture dans la chaîne de détention des sociétés F2, S1 et S2 : ces sociétés ne sont pas détenues à plus de 95 % par la société M par l’intermédiaire de sociétés du groupe ou de sociétés intermédiaires, elles ne peuvent donc pas rejoindre le groupe constitué par la société M.

En revanche, la société F2 peut constituer un groupe fiscal et y intégrer les sociétés S1 et S2.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires : exemple 6

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Exemple 7 :

La société M, située en France, détient 95 % du capital des sociétés A, située en Belgique, B, située aux Etats-Unis, et C, située en Allemagne. La société A détient 30 % du capital de la société F, située en France ; l’établissement stable italien de la société B détient 50 % du capital de la société F ; la société C détient 20 % du capital de la société F.Les sociétés A et C et l’établissement stable italien de la société B peuvent revêtir la qualité de société intermédiaire.

En conséquence, la société M, qui détient 95 % au moinsdu capital de la société F, par l’intermédiaire de sociétés intermédiaires, peut constituer un groupe fiscal et y intégrer la société F.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires : exemple 7

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Exemple 8 :

La société M, située en France, détient la totalité du capital de la société F, située en France. La société italienne E, dénuée de capital, détient l’intégralité du capital des sociétés G, située en France, et H, située en Espagne. La société M est également la société combinante pour l’ensemble de ces sociétés.

La société M peut constituer un groupe d’intégration fiscale comprenant les sociétés F et G.

Cas des groupes dont le chaînage de détention capitalistique est réalisé par des sociétés intermédiaires : exemple 8

V. Modalités d'option et application dans le temps

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Les modalités d'option pour le régime des groupes dont le périmètre est réalisé par l'intermédiaire de « sociétés intermédiaires », ainsi que les dates à partir desquelles lesdits groupes sont autorisés à opter sont abordées au BOI-IS-GPE-10-40 au IV-C § 280 et suivants.