Date de début de publication du BOI : 21/08/2024
Identifiant juridique : BOI-RES-TVA-000174

RES - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation - Taux applicable aux conteuses de livres audio

Question :

Une conteuse de livres audio destinée aux jeunes enfants (également dénommée « l’offre » dans le présent document), composée d’une enceinte comprenant un contenu natif de livres audio et permettant de lire uniquement certains livres audio achetés et téléchargés sur une plateforme dédiée, est-elle éligible au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 5,5 % applicable aux livres audio, au sens des dispositions du 3° du A de l’article 278-0 bis du code général des impôts (CGI) ?

Réponse :

Les 1 et 2 de l'article 98 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée permettent aux États membres d’appliquer un ou deux taux réduits de TVA aux livraisons de biens et aux prestations de services sous réserve que les biens et services en cause soient de ceux mentionnés à l’annexe III de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006.

Le 6 de l’annexe III de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 permet l’application du taux réduit de TVA à la fourniture de livres, sur tout type de support physique, y compris en location dans les bibliothèques (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessins ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevées hydrographiques ou autres), les journaux et périodiques, à l’exclusion, d'une part, du matériel consacré entièrement ou de manière prépondérante à la publicité et, d'autre part, des publications consistant entièrement ou d’une manière prédominante en un contenu audible musical ou vidéo.

Le 3° du A de l’article 278-0 bis du CGI soumet ainsi au taux réduit de 5,5 % de la TVA les livraisons portant sur les livres, y compris leur location. Ce taux s’applique aux livres sur tout type de support physique et à ceux qui sont fournis par téléchargement, y compris les livres audio.

Le II-A-1 § 30 du BOI-TVA-LIQ-30-10-40 précise que les livres audio s’entendent comme des ouvrages dont la lecture à haute voix a été enregistrée sur tout type de support et dont le contenu reproduit, pour l’essentiel, la même information textuelle que celle contenue dans les livres imprimés.

Quant aux jouets et supports de sons, ils relèvent du taux normal de 20 % de la TVA, conformément aux dispositions de l’article 278 du CGI.

Par ailleurs, en présence d’une offre commerciale composée d’éléments relevant de taux de TVA différents, la détermination du taux de TVA applicable dépend de la qualification de l’opération et de ses éléments. L'article 257 ter du CGI et l'article 278-0 du CGI précisent, conformément aux principes dégagés par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), la démarche à adopter dans une telle situation.

En principe, chaque opération imposable à la TVA est considérée comme étant distincte et indépendante et suit son régime propre, notamment en matière de taux. Toutefois, ce principe d’indépendance de chaque prestation n’est pas absolu. Ainsi, relèvent d’une seule et même opération les éléments qui sont si étroitement liés qu’ils forment, objectivement, une seule prestation économique indissociable dont la décomposition revêtirait un caractère artificiel.

Dans une telle hypothèse, un seul taux est applicable sans qu’il soit possible de procéder à une ventilation entre les différents éléments relevant de taux différents. Le taux retenu est celui le plus élevé parmi les éléments autres qu’accessoires, même s’il correspond à un élément qui ne présente pas un caractère majoritaire.

En outre, les éléments qui sont accessoires sont rattachés à l’élément auquel ils se rapportent, indépendamment de leur nature. Ils relèvent du taux de cet élément, même si ce taux est supérieur ou inférieur à celui qui aurait été appliqué à l'élément accessoire considéré isolément.

Dès lors, pour déterminer le taux de la TVA applicable à l’offre, il est nécessaire, d’une part, d’évaluer l’étroitesse des liens économiques entre ses différentes composantes et, d’autre part, d’identifier celles qui présenteraient le cas échéant un caractère accessoire.

Cette analyse, qui détermine notamment le taux applicable à une opération, résulte d’une appréciation d’ensemble réalisée du point de vue du consommateur, envisagé comme un consommateur moyen, tenant compte de l’importance qualitative et quantitative des différents éléments en cause ainsi que de l’ensemble des circonstances dans lesquelles l’opération se déroule.

1/ S’agissant de l’étroitesse des liens économiques entre les éléments de « l’offre »

Il ressort de la jurisprudence de la CJUE qu’il n'existe pas de règle absolue pour déterminer l'étendue d'une opération, c'est-à-dire l'étroitesse des liens économiques entre différents éléments ou le caractère accessoire de certains par rapport à d'autres. À cette fin, il est recouru à un faisceau d'indices, au vu des caractéristiques de l'opération ou des opérations en cause du point de vue du consommateur moyen et de l'ensemble des circonstances entourant l'opération (II § 50 et 60 du BOI-TVA-CHAMP-60-20).

La CJUE distingue plusieurs catégories d’éléments à prendre en compte. Elle identifie, en premier lieu, des éléments décisifs et, en second lieu, des éléments qui ne sont pas décisifs mais pouvant venir, le cas échéant, au soutien des éléments décisifs (CJUE, arrêt du 4 mars 2021, aff. C-581/19, Frenetikexito - Unipessoal Lda contre Autoridade Tributária e Aduaneira, point 39, ECLI:EU:C:2021:167).

Un critère décisif en faveur du regroupement de divers éléments en une opération unique est le fait que le consommateur en recherche spécifiquement la combinaison : par rapport à leur fourniture séparée, leur fourniture combinée répond à des besoins différents ou supplémentaires, s'agissant de la nature, de la qualité ou du prix des services rendus (III-A-1 § 130 du BOI-TVA-CHAMP-60-20).

Par ailleurs, l’impossibilité d’acquérir séparément les éléments en cause ou l’existence d’un prix global convenu pour un ensemble de plusieurs éléments constituent également des éléments, non décisifs, susceptibles de concourir à la qualification d’une opération unique (III-B § 160 du BOI-TVA-CHAMP-60-20).

Au cas particulier, dès lors que « l’offre » est proposée pour un prix unique et global, que la conteuse ne permet d’écouter que le contenu natif ou celui qui a été téléchargé sur une plateforme dédiée, et que le contenu natif est matériellement indissociable de l’enceinte, « l’offre » est telle que le consommateur moyen recherche spécifiquement la combinaison de ses éléments. Cette combinaison est en effet consubstantielle à l’objectif poursuivi, lequel est de permettre à un jeune enfant d’écouter des livres audio de façon autonome.

Elle constitue ainsi une opération unique au sens de l’article 257 ter du CGI, et un seul taux de TVA lui est applicable.

2/ S’agissant du caractère principal ou accessoire des éléments qui composent « l’offre »

Le caractère accessoire d’un ou plusieurs éléments d’une offre unique ressort du fait que, du point de vue du consommateur moyen, il n’a pas une finalité autonome, mais uniquement une fonction auxiliaire, qui permet de bénéficier dans les meilleures conditions des autres éléments (autres qu’accessoires) de « l’offre » (III-C § 220 à 260 du BOI-TVA-CHAMP-60-20). Il en découle que sa valeur est nécessairement minime, voire marginale. Pour autant, il ne suffit pas d'établir que cette valeur est inférieure à celle d'un ou plusieurs autres éléments ou que la part de l'un de ces autres éléments soit prépondérante. La circonstance qu'un élément pourrait, par ailleurs, être commercialisé seul et disposer alors d'une finalité économique propre n'est pas, en tant que tel, un obstacle à la qualification d'élément accessoire.

Au cas particulier, il ressort des caractéristiques relatives à « l’offre » présentée que :

  • le contenu natif de l’enceinte est constitué d’un certain nombre d’histoires, dont l’acquisition prise isolément sur la plateforme dédiée représente une part significative du prix de « l’offre », sans que cet élément matériel tenant à la valeur respective des composantes de « l’offre » ne revête une importance décisive dans l’appréciation du caractère accessoire ou non de celles-ci ;
  • l’enceinte présente un environnement partiellement « ouvert », au sens où elle permet l’ajout de livres audio achetés et téléchargés sur une plateforme dédiée en plus de son contenu natif. Elle ne peut donc s’analyser comme le seul support physique des livres audio natifs qui y sont initialement stockés, mais constitue également un support de stockage et de lecture de livres audio à part entière ;
  • le contenu natif de l’enceinte est généralement accessible à l’écoute gratuitement ou sur abonnement, par le biais de différentes plateformes de diffusion de flux audios ou vidéos, pour le consommateur équipé d’une enceinte connectée et d’une connexion internet. Pour des parents, l’intérêt d’acquérir « l’offre » plutôt que de recourir à des solutions gratuites ou disposant d’un catalogue plus large et divers résulte donc des caractéristiques de l’enceinte, en particulier du fait qu’elle peut être utilisée de façon autonome et sécurisée par l’enfant ;
  • l’enceinte est clairement destinée et adaptée aux jeunes enfants, au vu de son coloris, de l’ergonomie de ses boutons et autres équipements, de sa prise en main aisée et intuitive et de sa portabilité. L’enceinte permet donc aux parents de mettre à la disposition de leurs enfants un outil sécurisé, adapté et nomade, qui lit des livres audio et qu’ils peuvent utiliser de façon autonome.

Dans ces conditions, au vu de ses caractéristiques de conception et d’ergonomie, pensées à destination du jeune public, l’enceinte a bien une finalité autonome, élément qui est susceptible d’apporter une valeur supplémentaire à « l’offre » par rapport à d’autres solutions d’écoute de livres audio pour enfants. Il s’agit donc d’un élément central de « l’offre », qui ne saurait en conséquence s’analyser comme un élément accessoire, indépendamment du fait que d’autres éléments soient susceptibles de ne pas être accessoires au sein de « l’offre ».

Par conséquent, « l’offre » étant au moins composée d’un élément autre qu’accessoire relevant du taux normal de 20 % de la TVA, c’est ce taux qui s’applique à l’ensemble de « l’offre » en application de l’article 278-0 du CGI.

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