ENR - Cessions de brevets d'invention, de droits de possession industrielle et de marques de fabrique, de commerce ou de service
I. Cessions de brevets d'invention
A. Définition
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Le brevet d'invention est un titre de propriété industrielle protégeant une invention délivré, pour une durée de vingt ans à compter du dépôt de la demande, par décision du directeur de l'Institut national de la propriété industrielle (I.N.P.I.).
Remarque : les brevets dits européens, délivrés par l'Office européen des brevets, sont assimilés aux brevets français.
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Un brevet d'invention peut faire l'objet soit d'une cession, soit d'une concession de licence d'exploitation.
En cas de cession, le cédant transfère au cessionnaire la propriété du brevet.
Au contraire, lorsqu'il y a concession de licence d'exploitation, le titulaire du brevet qui confère à un tiers - le licencié - le droit d'exploiter celui-ci conserve non seulement la propriété du brevet, mais encore le droit de l'utiliser personnellement. Ce point est traité dans le cadre des mutations de jouissance (cf. BOI-ENR-JOMI-30).
B. Régime fiscal de la cession de brevets d'invention
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Le régime fiscal auquel sont soumises les cessions de brevets d'invention varie selon que ceux-ci font ou non l'objet d'une exploitation.
1. Le brevet n'est pas exploité
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Si le brevet n'est pas exploité, sa cession donne ouverture au droit fixe prévu à l'article 731 du code général des impôts (CGI) :
- lorsqu'elle est obligatoirement soumise à la formalité de l'enregistrement, soit en raison de la forme des actes qui les constatent (actes notariés, actes extrajudiciaires), soit en cas de vente publique (cf. BOI-ENR-DMTOM-50-10) ;.
- et, dans les autres cas, lorsqu'elle est présentée volontairement à la formalité de l'enregistrement.
Remarque : Dans ces différentes hypothèses, la perception du droit fixe d'enregistrement prévu à l'article 731 du CGI ne fait pas obstacle à l'exigibilité de Ia TVA (cf. BOI-TVA-CHAMP-10-10-30).
2. Le brevet est exploité
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Lorsque Ie brevet est exploité, la cession présente le caractère d'une vente de fonds de commerce puisque, du fait de la cession, la clientèle qui est attachée au brevet est cédée en même temps que ce dernier. Dans ces conditions, Ies cessions de brevets faisant l'objet d'une exploitation sont assujetties à la formalité dans le délai d'un mois à compter de leur date, qu'elles soient ou non constatées par un acte.
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Toutefois, elles ne donnent ouverture qu'au seul droit fixe prévu à l'article 731 du CGI. Il en est de même si le brevet est cédé en même temps que les autres éléments du fonds de commerce affecté à leur exploitation. Dans ce cas, les parties sont admises à déterminer, au moyen d'une déclaration estimative, la partie du prix de cession applicable au brevet.
II. Cessions de marques de fabrique, de commerce ou de service
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La marque de fabrique, de commerce ou de service est le signe au moyen duquel un fabricant caractérise ses produits, un commerçant les objets de son commerce, un prestataire ses services.
De même que les brevets d'invention, les marques de fabrique, de commerce ou de service peuvent faire l'objet d'une cession ou d'une concession de licence d'exploitation. Les conséquences fiscales varient selon que les marques sont ou non exploitées au moment de la cession.
Remarque : Le régime fiscal des concessions de licence d'exploitation est exposé BOI-ENR-JOMI-30.
A. Cession d'une marque exploitée
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La cession d’une marque de fabrique, de commerce ou de service exploitée doit être soumise aux droits d’enregistrement dans les conditions prévues à l'article 719 du CGI, à l’exclusion de la TVA.
Il en est ainsi, même si l’exploitation de la marque n’est pas effectuée par le propriétaire lui-même, mais a été concédée temporairement à un tiers (Cour de cassation [Cass.], req. 7 mai 1945, société Crédit-Publicité).
La cession de marques de fabrique exploitées pour partie en France et pour partie à l’étranger est imposable sur la totalité du prix (Cass., req. 7 mai 1945, société Crédit-Publicité).
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L’article 719 du CGI prévoit la taxation des mutations de propriété à titre onéreux :
- de clientèles ;
- de fonds de commerce.
La cession de la marque exploitée supporte le droit de mutation applicable aux cessions de clientèles, dès lors que la clientèle attachée à une marque de fabrique ou de commerce exploitée constitue un droit mobilier cessible indépendamment de celle du fonds de commerce (Cour de cassation, Chambre commerciale [Cass. com.], 24 mars 1992, n° 90-11870).
Toutefois, lorsque la marque est cédée en même temps que le fonds qui l'exploite, elle constitue un élément du fonds de commerce et supporte avec l'ensemble des autres éléments, le droit de mutation applicable aux cessions de fonds de commerce. En revanche, l'article 719 du CGI n'autorise pas l'imposition d'une marque prise isolément en tant qu'élément de fonds de commerce (rapp. Cass. com. 17 décembre 1991, n° 89-17028), dès lors que ces dispositions, en ce qu’elles visent les cessions de fonds, n'ont vocation qu'à appréhender la cession de l'universalité constituant le fonds (Cass. com., 24 mars 1992, n° 90-11870).
RES N°2009/31 (ENR) : Droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Levée de l’option dans le cadre d’un contrat de crédit bail portant sur une marque exploitée.
Question :
En matière de crédit-bail portant sur une marque exploitée, le prix de cession constitue-t-il l’assiette du droit de mutation visé par l’article 719 du CGI ?
Réponse :
L’acquisition d’un bien loué par le locataire, dans les conditions prévues au contrat de crédit bail portant sur un fonds de commerce, donne ouverture au droit de mutation à titre onéreux prévu à l’article 719 du CGI.
En vertu de la doctrine administrative exposée BOI-ENR-DMTOM-10-30-30, il est admis, afin de favoriser le développement de ces opérations de crédit-bail, que le droit en cause soit perçu sur le prix de cession quelle que soit la valeur vénale du bien à la date de son acquisition par le locataire.
Lors de l’acquisition de la marque exploitée, les règles applicables sont les suivantes :
- la tolérance prévue en matière de crédit-bail portant sur les fonds de commerce est également applicable aux opérations de crédit-bail portant sur une marque exploitée lorsque la cession de la marque emporte celle de la clientèle qui lui est attachée ;
- en ce qui concerne le prix de cession, sous réserve du droit de contrôle de l'administration sur la valeur vénale des biens cédés, le droit de mutation est liquidé sur le prix exprimé dans le contrat.
B. Cession d'une marque non exploitée
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Elle donne lieu au paiement de la TVA au vu de la déclaration de taxes sur le chiffre d'affaires du cédant déposée dans les conditions habituelles (cf. BOI-TVA-CHAMP-10-10-30 ).
Cette règle ne s'oppose pas cependant à la perception d'un droit fixe d'enregistrement (cas des actes sous seing privé présentés volontairement à la formalité ou des actes notariés).
C. Concession de l'usage d'un nom commercial pour une durée indéterminée
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La Cour de cassation a jugé que la concession de l'usage d'un nom commercial n'entre pas dans les prévisions de l'article 719 du CGI, applicable aux seules mutations de propriété à titre onéreux de fonds de commerce ou de clientèles (Cass. com. 12 janvier 1993, n° 90-18616).
Ainsi ne relève pas des dispositions de ce texte le contrat de concession aux termes duquel le concédant conserve la propriété de son nom commercial, subordonne l'autorisation d'exploitation à des conditions précises et se réserve la faculté de résilier le contrat en cas d'inobservation de ces conditions, ce dont il résulte que la convention n'emporte cession ni du nom commercial ni de la clientèle qui lui était éventuellement attachée.
Remarque : en tant que telles, les concessions d'un nom commercial échappent à l'article 719 du CGI, dès lors que cet article ne vise que les cessions et non les concessions. À cet égard, la circonstance que la concession soit, comme en l'espèce, d'une durée illimitée est sans incidence : même dans ce cas, la concession d'une marque ou d'un nom commercial s'analyse en principe en un contrat de louage. Cette prestation de service est soumise à la TVA dans les conditions prévues par l'article 259 B du CGI.
III. Cessions de droits de possession industrielle
A. Définition
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La pratique a mis en œuvre, à coté des droits de propriété industrielle (brevets d'invention, marques etc.) des droits de « possession industrielle » qui concernent des éléments brevetables ou non, maintenus secrets, tels que : savoir-faire (know-how) ou manière de faire, secrets de fabrication, tours de main etc.
Les droits en cause sont généralement représentés par des cahiers-journaux, rapports d'essai, plans d'appareillage, schémas de fabrication, dessins industriels, etc, qui peuvent être insérés dans des plis cachetés (enveloppes Soleau) et déposés à l'Institut national de la propriété industrielle.
Les titulaires des droits sont ainsi en mesure d'établir leur priorité de connaissance ou d'utilisation des procédés, ce qui leur permet de continuer à les exercer personnellement malgré une prise de brevet.
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Les droits de possession industrielle ne bénéficient pas de la protection juridique attachée aux brevets d'invention et ils confèrent à leurs détenteurs des droits moins étendus que ceux qui appartiennent aux brevetés, notamment quant aux possibilités de cession ou de concession. Ils constituent, néanmoins, des droits incorporels mobiliers s'apparentant étroitement, par Ieur nature, aux brevets d'invention proprement dits.
B. Régime fiscal
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Dans le cadre des mesures tendant à encourager le développement de la recherche scientifique et technique, il a été décidé d'assujettir les cessions de licences de droits de possession industrielle au seul droit fixe prévu à l'article 731 du CGI.
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Cependant, cette mesure n'est pas applicable dans les cas où les droits en cause sont cédés en même temps que tout ou partie d'un fonds de commerce dont ils dépendent, l'opération donnant alors ouverture pour le tout aux droits afférents aux ventes du fonds de commerce.