CTX - Contentieux de l'assiette de l'impôt – Procédure devant le tribunal de grande instance (TGI) – Procédure du référé relatif à l'arrêt ou à l'aménagement de l'exécution provisoire du jugement du TGI
L'article R* 202-5 du Livre des procédures fiscales (LPF) confère aux jugements rendus par les tribunaux de grande instance (TGI) un caractère exécutoire de droit à titre provisoire.
Toutefois, afin de garantir tant aux contribuables qu'à l'administration qu'une telle exécution provisoire n'entraînera pas de conséquences trop lourdes, le même texte a prévu, en cas d'appel, la possibilité pour le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, d'arrêter ou d'aménager cette exécution provisoire.
I. La compétence exclusive du premier président de la cour d'appel statuant en référé
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Si l'article R* 202-5 du LPF ne comporte pas, en lui-même, attribution de compétence au premier président pour prendre les mesures d'arrêt et d'aménagement de l'exécution provisoire, le renvoi que ce texte opère aux articles 523 et 524 du code de procédure civile (C. proc. Civ.) fonde le principe de cette compétence qui, par ailleurs, est exclusive.
S'agissant d'abord d'une exécution provisoire de droit, qui au surplus n'est susceptible d'arrêt ou d'aménagement qu'en cas d'appel, ni le tribunal de grande instance ayant rendu la décision exécutoire, ni le président de ce tribunal statuant en référé, n'ont pouvoir d'agir sur le caractère exécutoire de la décision.
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Ensuite, la compétence subsidiaire, réservée par l'article 523 du C. proc. Civ. du conseiller de la mise en état pour prendre les mesures prévues aux articles 517 à 522 du même code, ne trouve pas à s'appliquer dans le cadre de l'exécution provisoire de droit résultant de l'article R* 202-5 du LPF.
L'article 523 du C.proc. Civ. réserve en effet cette compétence aux cas prévus aux articles 525 et 526 du C. proc. Civ., textes visant uniquement les situations où, dans le cadre de l'exécution provisoire ordonnée, le juge a soit refusé d'accorder cette exécution provisoire (C. proc. Civ., art. 525), soit omis de se prononcer ou n'a pas été saisi d'une demande en ce sens (C. proc. Civ., art. 526).
Quant à la mesure d'arrêt pur et simple de l'exécution provisoire, c'est la combinaison des articles R* 205 du LPF et 524 (2°) du code de procédure civile qui fonde la compétence exclusive du premier président en ce domaine (Paris, 18 juillet 1977, JCP 78-II-18.826).
La disposition précitée du LPF étend, en effet, au cas précis des jugements rendus dans le cadre de l'article L 199 al.2 du LPF et exécutoires de droit à titre provisoire, les pouvoirs du premier président pour arrêter l'exécution provisoire, pouvoirs qui, en droit commun, ne peuvent s'exercer qu'à l'égard de l'exécution provisoire ordonnée.
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L'attention est, par ailleurs, attirée sur le fait que les articles 517 à 524 du CPC ne donnent aucun pouvoir au juge de l'exécution, institué par la loi du 9 juillet 1991, pour arrêter ou aménager l'exécution provisoire, domaine relevant de la compétence exclusive du premier président (Créteil, 24 août 1993, Gaz. Pal. 1993, 2, Somm. p. 515).
Le juge de l'exécution reste certes compétent pour connaître des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée (art. L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire) mais ces notions doivent être clairement distinguées de l'exécution provisoire de droit du jugement rendu sur le fond.
Il a ainsi été jugé qu'aucune disposition n'autorisait le juge de l'exécution à ordonner le sursis à exécution d'un avis à tiers détenteur en s'appuyant sur un jugement rendu en matière de droits d'enregistrement et assimilés, le recours à l'égard d'un tel jugement n'étant, en effet, pas suspensif (CA Nancy, 26 octobre 1998, JCP. éd. E, 1999, n° 14, panorama p. 607).
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Les articles 523 et 524 du CPC prévoient que les demandes relatives à l'arrêt ou à l'aménagement de l'exécution provisoire sont portées devant le premier président, statuant en référé, ce que confirme l'article 957 du même code, placé dans le chapitre relatif aux ordonnances de référé et concernant les pouvoirs du premier président en matière d'exécution provisoire.
Il convient d'observer, d'une part, que c'est le premier président de la cour d'appel saisie au fond qui est seul compétent pour connaître de l'instance autonome tendant à l'arrêt ou l'aménagement de l'exécution provisoire et, d'autre part que ce sont les règles ordinaires de la procédure civile qui ont vocation à s'appliquer, la loi fiscale ne comportant à cet égard aucune disposition spéciale.
II. Conditions d'introduction du référé
A. Condition de temps
1. Nécessité d'un appel préalable
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Aux termes de l'article R* 202-5 du LPF, l'exécution provisoire ne peut être arrêtée ou aménagée qu'en cas d'appel.
Ainsi qu'il a été jugé pour l'application de l'article 524 du C. proc. Civ. (Civ. 3ème 4 novembre 1987, Bull. III, n° 179), seule l'existence matérielle d'un appel au jour de l'introduction de la demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire doit être vérifiée, et non la recevabilité de l'appel).
Toutefois, en cas d'irrecevabilité manifeste de l'appel, notamment en raison du dépassement des délais de recours, le premier président est fondé, en considération d'une bonne administration de la justice, et sur le fondement de l'article 3 du C. proc. Civ., à prononcer un sursis à statuer jusqu'à l'intervention de la décision sur la recevabilité.
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Le point de départ de la compétence du premier président est fixé au jour de la déclaration d'appel (Versailles 11 août 1987, Gaz. Pal. 1988.80).
Aussi, dès lors que l'existence d'un appel, formalisé par la déclaration prévue à l'article 900 du C. proc. Civ., est une condition substantielle de l'ouverture du recours spécifique organisé par l'article R* 202-5 du LPF, la saisine en référé du premier président d'une demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire avant toute déclaration d'appel est irrecevable.
2. Nécessité d'une instance pendante
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La compétence du premier président pour connaître d'une demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire du jugement frappé d'appel dure aussi longtemps que la cour n'est pas dessaisie du litige, soit par le prononcé d'un arrêt sur le fond, soit par une décision constatant l'irrecevabilité du recours, et plus généralement, par toute autre décision, quels qu'en soient la forme et l'auteur, qui constate l'extinction de l'instance (caducité, péremption, désistement ...).
En revanche, une mesure de radiation du rôle n'entraîne pas, par elle-même, extinction de l'instance. Sauf les cas où elle prive l'appel de tout effet suspensif (cf. art. 915 C. proc. Civ. ). Elle ne fait donc pas obstacle à une saisine du premier président d'une demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire.
De même, le sursis à statuer décidé par la Cour, notamment en cas de décision avant dire droit ordonnant une mesure d'instruction ou formulant une question préjudicielle à l'attention du juge administratif ou de la Cour de Justice des Communautés Européennes, n'éteint pas l'instance principale.
Par ailleurs, ni la désignation d'un conseiller de la mise en état, ni le renvoi de l'affaire à l'audience n'ont pour effet de dessaisir le premier président de sa compétence exclusive en la matière.
B. Condition d'objet
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La possibilité de saisir le premier président d'une demande fondée sur les articles R* 202-5 du LPF et 517 à 524 du C. proc. Civ n'est admissible que pour autant que son objet n'ait pas antérieurement disparu.
Tel est le cas lorsque l'exécution provisoire a été entièrement consommée.
La décision des premiers juges ayant été exécutée, il n'existe en effet plus d'intérêt à empêcher ou aménager une exécution accomplie (Montpellier, 17 décembre 1981, Gaz. Pal 1982, 2. Somm. 384 ; Paris 20 octobre 1988, Bull. avoués n° 108, p. 106 ; Toulouse, 1er mars 1995, D. 1996, Jurisp. 131 et 1996, Somm. 140).
Il est en effet constant que le premier président ne peut, dans le cadre des articles 517 à 524 du CPC, prendre des mesures que pour l'avenir.
Il ne dispose en conséquence d'aucun pouvoir pour remettre en cause les effets des actes d'exécution accomplis et les paiements effectués avant sa décision (Civ. 2ème, 24 septembre 1997, Bull. II, n° 238).
De manière plus générale, une ordonnance suspendant ou aménageant l'exécution provisoire est dénuée de tout effet rétroactif. Elle n'a donc aucune incidence sur la régularité, l'efficacité et les effets déjà consommés des actes d'exécution antérieurs. Seuls sont en définitive affectés les effets futurs, non encore réalisés, de tels actes (rappr. TGI Cherbourg, 21 avril 1993, Gaz. Pal. 1993, 1, Somm. p. 289).
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Le recours prévu à l'article R* 202-5 du LPF n'est pas davantage envisageable lorsque l'affaire a été radiée du rôle de la cour en application de l'article 915 du C. proc. Civ. : l'inobservation du délai de 4 mois imparti à l'appelant pour déposer ses conclusions au greffe de la cour rend inconditionnelle l'exécution du jugement et interdit dès lors la saisine du premier président sur le fondement des articles 517 à 524 du C. proc. Civ. (Paris, 9 juillet, 2 et 23 août 1990, Bull. avoués 1990, 3, 98).
Et dès lors que le rétablissement de l'affaire au rôle n'a pas pour effet de ressusciter le caractère suspensif du recours, la mesure de radiation constitue un obstacle définitif à une demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire.
En outre, serait irrecevable la demande d'arrêt ou d'aménagement visant un chef de la décision exécutoire non frappé d'appel (Paris, 4 juin 1987, Bull. avoués 1987.3.144).
C. Condition de personnes
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La doctrine considère que ne peuvent saisir le premier président d'une demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire que les personnes parties à la procédure d'appel et ayant un intérêt à l'obtention d'une telle mesure.
Si la première condition ne pose aucun problème d'application particulière, sauf à indiquer que c'est le directeur territorialement compétent qui, partie à l'instance au fond, a donc seul pouvoir pour introduire ou défendre à l'instance en référé devant le premier président au nom de l'administration, la seconde condition appelle les précisions suivantes.
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En premier lieu, il a été jugé que l'intimé qui ne relève pas appel incident et se borne à conclure à la confirmation du jugement ne peut agir sur le fondement de l'article 524 du C. proc. Civ. (Paris 12 février 1980, Bull. avoués n° 75, p. 26 ; 25 mai 1988, id. n° 108, p. 158).
Ce principe est applicable à la demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire introduite sur le fondement de l'article R* 202-5 du LPF.
En cas de jugement mixte, la partie qui souhaite introduire une demande devant le premier président à l'égard du chef du jugement lui faisant grief doit ainsi avoir préalablement relevé appel du jugement, à titre principal ou incident.
De même, en cas de solidarité entre deux parties dont une seule a interjeté appel, est irrecevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire présentée par la partie n'ayant pas formé de recours (Versailles, 16 février 1989, Gaz. Pal. 1989, 2, somm. p. 422).
III. Modalités d'introduction du référé
A. Caractère facultatif de l'assistance et de la représentation
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Les parties n'ont pas l'obligation de se faire assister ou représenter devant le premier président statuant en référé.
Toutefois, si elles entendent se faire représenter, elles doivent alors nécessairement recourir à un avoué près la cour d'appel dont le premier président est saisi.
S'agissant de l'administration, celle-ci peut être valablement représentée par un fonctionnaire du service, habilité par le directeur compétent (rappr. Rép. V° référé civil, n° 66).
B. Forme de la demande : l'assignation en référé
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La demande est portée devant le juge des référés par voie d'assignation à une audience tenue à cet effet aux jour et heure habituels des référés (C. proc. Civ., art. 485).
Elle doit comporter, outre les mentions habituelles prévues à l'article 56 du C. proc. Civ. (rappr. BOI-CTX-JUD-10-20-30), toutes les indications propres à permettre à la partie assignée d'organiser sa défense dans les brefs délais que la nature même de l'instance en référé impose aux justiciables.
Remarque : Le décret n° 98-1231 du 28 décembre 1998 a ajouté à l'article 56 du CPC l'obligation, à peine de nullité, de préciser dans l'assignation les moyens en fait et en droit présentés au soutien de la demande. Cette nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui s'en prévaut d'alléguer et établir le grief que lui cause l'omission d'une telle formalité. Mais compte tenu des brefs délais qu'impose l'instance en référé, une assignation se bornant à demander l'arrêt de l'exécution provisoire sans indiquer concrètement les circonstances propres à caractériser, au cas d'espèce, le risque de conséquences manifestement excessives, mettrait le défendeur au référé dans l'impossibilité de préparer utilement sa défense, de telle sorte que ce grief suffirait à entraîner la nullité de l'assignation.
Doivent ainsi être en particulier mentionnées les date et heure de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée, de même que le nom du magistrat dans le cabinet duquel doit se dérouler l'instance.
En outre, l'assignation doit comprendre l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée. Ces pièces doivent être énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.
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L'assignation doit être notifiée par acte d'huissier selon les formes prévues aux articles 653 et suivants du C. proc. Civ..
Si la notification à domicile élu est possible, c'est cependant à la condition que l'assignation puisse atteindre dans les temps le défendeur au référé (rappr. Paris, 17 mars 1976, Gaz. Pal. 1977, somm. 210).
Par ailleurs, dès lors que l'instance en référé introduite sur le fondement de l'article R* 202-5 du LPF est connexe à l'instance au fond suivie devant la cour d'appel, la notification de l'assignation en référé à l'avoué du défendeur qui aurait déjà été constitué est, bien entendu, possible.
Le juge des référés est saisi par la remise d'une copie de l'assignation au greffe de la juridiction, en vue du placement de l'affaire (d'où la dénomination de cette procédure sous le vocable de référé sur placet).
IV. Déroulement de la procédure en référé
A. Délai de comparution
1. Procédure ordinaire
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Dès lors que le code de procédure civile fait seulement obligation de porter la demande à une audience tenue à cet effet aux jour et heure habituels des référés (cf. supra, § 120), aucun texte ne fixe de délai minimum entre l'assignation et la date de l'audience ainsi choisie par le demandeur ou fixée par le greffe.
Cela étant, le respect des droits de la défense et le principe du contradictoire imposent qu'il se soit écoulé un délai suffisant entre l'assignation et l'audience afin que le défendeur au référé ait pu préparer sa défense (C. proc. Civ., art. 486).
Le juge exerce souverainement son contrôle sur ce point et doit apprécier concrètement si le délai est suffisant.
Mais il ne peut, pour ce faire, se borner à constater que la partie adverse a eu connaissance de l'assignation, et doit rechercher si celle-ci a disposé d'un temps suffisant pour préparer sa défense (Civ. 2ème 18 février 1987, Gaz. Pal. 1987, 2, somm. p. 487 ; 21 janvier 1998, Bull. II, n° 25, p. 15).
Par ailleurs, les délais de distance prévus aux articles 643 et suivants du CPC ne s'appliquent pas en matière de référé dès lors qu'une telle instance n'est pas réglée par des délais stricts prédéterminés par un texte (Saint-Denis de la Réunion, 27 octobre 1989, Gaz. Pal. 1991, 69).
2. Assignation à l'heure indiquée
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Cette procédure, généralement connue sous le nom de « référé d'heure à heure », est prévue à l'article 485 al.2 C. proc. Civ. lorsque « le cas requiert célérité ». Elle permet d'assigner à très bref délai, à l'heure indiquée, même les jours fériés ou chômés, soit à l'audience, soit au domicile du juge, portes ouvertes.
Elle ne peut être mise en oeuvre que dans les cas d'extrême urgence et reste donc limitée à des situations exceptionnelles, telle par exemple une voie de fait causant un grave préjudice.
Son usage, dans le cadre du référé de l'article R* 202-5 du LPF devrait ainsi être rarissime, sauf les cas évoqués supra (§170) dans lesquels certaines circonstances particulières, susceptibles de compromettre irrémédiablement et de manière imminente les droits du Trésor, pourraient amener l'administration à solliciter un référé d'heure à heure.
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La mise en oeuvre de cette procédure suppose, à peine de nullité, l'autorisation préalable du juge saisi par une requête exposant les motifs propres à justifier la célérité demandée.
Si l'autorisation ainsi sollicitée est accordée, le demandeur assigne alors la partie adverse aux dates et heures indiquées.
Il convient cependant de relever que, même dans le cadre du référé d'heure à heure, le juge doit s'assurer de la régularité de l'assignation et vérifier si le défendeur a disposé d'un temps suffisant pour préparer sa défense (Paris, 16 octobre 1990, D. 1990, IR 267 ; 18 février 1991, D. 1992, IR 111 ; Versailles, 23 janvier 1991, D. 1992, somm. 127).
B. Caractère oral de la procédure
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En raison de la rapidité qui la caractérise, la procédure en référé est orale, de sorte qu'il n'y a pas, à proprement parler, d'instruction de l'affaire préalable à l'ouverture des débats.
L'affaire est, en réalité, instruite à l'occasion des débats.
Il en résulte que si des conclusions écrites ne sont pas obligatoires, elles peuvent néanmoins être déposées.
En raison de l'oralité de la procédure et du caractère facultatif des conclusions écrites, il n'existe aucun formalisme particulier, tant qu'à leur contenu (en particulier, les dispositions du décret du 28 décembre 1998 relatives aux conclusions récapitulatives ne leur sont pas applicables), qu'en ce qui concerne leur notification à la partie adverse.
Cette notification peut donc intervenir, soit antérieurement à l'audience par le moyen jugé le plus approprié (courrier recommandé, acte d'huissier, communication entre avoués), soit au plus tard lors de l'audience par leur remise simultanée au juge et à la partie adverse.
Mais quel que soit le moment et le mode de délivrance de telles conclusions, le juge est tenu, sur demande de l'une ou l'autre des parties, de vérifier que le principe du contradictoire a été respecté, et peut donc écarter des débats des conclusions notifiées trop tardivement ou renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour permettre à l'autre partie de préparer sa défense.
Ces principes gouvernent également la communication des pièces.
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En matière de référé, la prise de conclusions écrites peut indéniablement faciliter l'examen par le juge des éléments du litige et garantir au mieux les droits des parties.
Mais, comme dans toute procédure orale, de telles conclusions ne saisissent le juge des moyens qu'elles contiennent qu'à la condition que la partie qui en est l'auteur comparaisse, soit en personne, soit en étant représentée, afin de les exposer oralement (jugé en ce sens à propos de la procédure orale devant le tribunal d'instance : Civ. 2ème 14 juin 1989, Bull. II, n° 129 ; 23 février 1994, ibid. n° 76).
C. L'audience des référés
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L'affaire vient à l'audience des référés indiquée dans l'assignation. Cette audience est publique.
En cas de défaut de comparution du demandeur, l'affaire est supprimée, mais le défendeur peut néanmoins demander au juge de statuer.
Si le défendeur ne comparaît pas en personne et ne se fait pas représenter, le juge peut, soit donner défaut et statuer immédiatement, observation étant faite que dans ce cas, en raison de sa défaillance, aucun des écrits que ce dernier aurait pu déposer ou notifier ne saurait être pris en compte, soit ordonner la réassignation par le demandeur pour une audience ultérieure.
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Compte tenu de l'oralité de la procédure, les demandes additionnelles ou reconventionnelles formulées pour la première fois à la barre sont recevables dès lors qu'elles n'excèdent pas la compétence « ratione materiae » - la compétence matérielle - spécifique du premier président telle que fixée par les articles R* 202-5 du LPF et 517 à 524 du C. proc. Civ..
Serait ainsi recevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formulée à l'audience par le demandeur alors que son assignation ne sollicitait qu'une mesure d'aménagement.
Il revient cependant en ce cas au juge de vérifier si une telle modification des termes du litige n'implique pas un renvoi à une audience ultérieure afin de permettre au défendeur de préparer sa défense.
210
L'oralité de la procédure donne ainsi un caractère nettement subsidiaire aux conclusions écrites, et le juge ne saurait en conséquence dénier l'efficacité d'un désistement formulé oralement à l'audience des débats par le demandeur, motif pris de la communication, la veille de cette audience, de conclusions au fond par le défendeur (Civ. 2ème 26 novembre 1998, Bull. II, n° 285).
De même, les parties sont, lors de l'audience, libres d'abandonner certains des moyens contenus dans leurs conclusions écrites ou, a contrario, d'en formuler de nouveaux qui n'y figuraient pas, sauf au premier président à renvoyer l'affaire à une date ultérieure lorsque des arguments évoqués pour la première fois à l'audience appellent une réponse de la partie adverse et rendent nécessaire l'octroi d'un délai pour préparer celle-ci.
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Dans le respect du principe du contradictoire et de l'objet du référé, le premier président peut ordonner toutes les mesures d'instruction légalement admissibles.
Il règle et statue sur les incidents de procédure et peut, notamment, enjoindre la communication de pièces qui n'auraient pas été spontanément produites. Il connaît et tranche les exceptions soulevées par les parties, statue sur les dépens et peut condamner au paiement d'une somme sur le fondement de l'article 700 du C. proc. Civ. (rappr. C. proc. Civ., art. 491 al.2).
En revanche, les dispositions de l'article 487 du C. proc. Civ. , permettant de renvoyer l'affaire devant la formation collégiale de la juridiction, ne sont pas applicables au référé prévu par l'article R* 202-5 du LPF, le premier président constituant en effet une juridiction distincte de la cour d'appel.
Le premier président peut décider de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure mais il doit alors s'assurer que la nouvelle date est connue de l'ensemble des parties.
V. L'ordonnance de référé
A. Prononcé
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L'ordonnance de référé peut être rendue sur le champ, ou renvoyée, pour plus ample délibéré, à une date ultérieure (C. proc. Civ., art. 450), indiquée aux parties par le premier président.
Le prononcé en est public (C. proc. Civ., art. 451).
B. Forme - contenu
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L'ordonnance de référé est une décision contentieuse, constitutive d'un véritable jugement, soumise en conséquence à toutes les règles de forme applicables aux jugements (C. proc. Civ., art. 450 et s.).
L'ordonnance doit ainsi comporter les mentions prescrites aux articles 454, 455 et 456 C. proc. Civ. (rappr. BOI-CTX-JUD-10-50-40) et être revêtue de la formule exécutoire ( art. 502 C. proc. Civ.) à moins que le premier président n'ait fait usage de la faculté ouverte par l'article 489 du C. proc. Civ. et ordonné l'exécution au seul vu de la minute (cf. infra, § 280).
Elle doit être motivée, notamment pour permettre le cas échéant à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur la qualification des conséquences manifestement excessives.
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L'ordonnance de référé prise dans le cadre des dispositions de l'article R* 202-5 du LPF ne peut qu'accueillir ou rejeter la demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire dans les conditions prévues aux articles 517 à 524 du C. proc. Civ.
Elle ne saurait en conséquence statuer, même indirectement, sur les mérites ou la recevabilité du recours exercé au fond devant la cour d'appel, ni sur des questions touchant aux modalités de recouvrement de la créance du Trésor, et encore moins remettre en cause les mesures d'exécution forcée prises antérieurement à son prononcé (cf. supra, § 70).
Pour statuer, le premier président apprécie les faits au jour où il se prononce, et non à celui de la demande (Civ. 2ème 2 octobre 1990, Bull. II, n° 196).
L'ordonnance statue sur les dépens (C. proc. Civ., art. 491) et peut allouer une somme sur le fondement de l'article 700 du CPC (Civ. 3ème 19 novembre 1980, Bull. III n° 183).
C. Exécution
1. Caractère exécutoire de plein droit
260
Aux termes de l'article 489 du C. proc. Civ., l'ordonnance de référé est exécutoire à titre provisoire.
L'exécution de l'ordonnance de référé ne peut être suspendue, mais seulement aménagée dans les conditions des articles 517 à 522 du C. proc. Civ. (art. 489 C . proc. Civ.).
Mais cette règle est dépourvue de portée pratique s'agissant d'une ordonnance statuant elle-même sur une demande d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire d'un jugement de première instance.
Il s'ensuit que son exécution est possible dès sa notification (ou présentation de la minute en cas de mise en oeuvre de l'exécution sur minute).
2. Notification
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L'ordonnance revêtue de la mention exécutoire doit être signifiée dans les conditions de droit commun (sur les mentions relatives aux voies de recours, cf. infra, VI A 1 et suivants).
La signification est faite à partie. En effet, s'agissant d'une procédure sans représentation obligatoire, la signification préalable à avoué ou avocat n'est pas nécessaire.
L'ordonnance de référé rendue par défaut est réputée non avenue si elle n'a pas été signifiée dans le délai de deux mois de son prononcé (C. proc. Civ., art. 478).
La signification régulière fait courir les délais de recours contre l'ensemble de l'ordonnance, mais s'agissant d'une décision exécutoire de droit, il n'est pas nécessaire d'attendre l'expiration de ces délais pour mettre à exécution l'ordonnance signifiée.
280
La signification préalable n'est pas requise lorsque, le premier président le jugeant nécessaire, il a été ordonné que l'exécution aurait lieu au seul vu de la minute (C. proc. Civ., art. 489 al.2).
En ce cas, la présentation de la minute vaut notification (C. proc. Civ., art. 503 al.2), mais il est alors indispensable que la minute ait été effectivement présentée à la personne à laquelle on veut l'opposer (Civ. 2ème 28 mars 1996, Bull. II, n° 82).
D. Astreinte
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Aux termes des dispositions de l'article 491 du C. proc. Civ. le juge des référés peut prononcer des condamnations à des astreintes.
Cette faculté vise à permettre au juge des référés d'assurer l'exécution des mesures qu'il a ordonnées.
Si le principe de séparation des pouvoirs ne fait pas obstacle de manière absolue à la mise en oeuvre de ce pouvoir à l'égard de l'administration, le Tribunal des conflits restreint cependant cette possibilité aux hypothèses de voies de fait, ainsi qu'aux activités de l'administration relevant du droit privé (rappr. T.C. 15 avril 1991, Rec. CE, p. 462 ; T.C., 4 juillet 1991, Rec. CE, p. 930).
La doctrine et la jurisprudence en déduisent qu'hors les cas précités, les juridictions judiciaires sont dénuées de tout pouvoir pour adresser des injonctions ou prononcer des astreintes à l'encontre de l'administration (Civ. 1ère 9 juin 1970, Bull. I, n° 195), y compris lorsqu'il s'agit d'injonctions et d'astreintes relatives à l'exécution d'une décision de justice (Com. 25 février 1992, Bull. IV, n° 91).
L'usage de l'article 491 du CPC à l'encontre de l'administration devrait ainsi demeurer très exceptionnel.
De la même manière, l'administration ne sollicitera la mise en oeuvre de ce texte à l'égard d'un redevable qu'en cas d'indices graves et concordants dénotant une volonté manifeste de l'intéressé de se dérober à l'exécution des mesures arrêtées par le premier président.
E. Effets - Portée
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L'ordonnance de référé est une décision provisoire (C. proc. Civ., art. 484) qui n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée (C. proc. Civ., art. 488 al.1).
Il s'ensuit que le juge des référés n'a pas compétence pour dire le droit et trancher le litige au fond, et qu'en tout état de cause, la cour d'appel n'est aucunement liée par les appréciations de fait et de droit que pourrait contenir l'ordonnance du premier président (Civ. 3ème 8 juin 1977, Bull. III, n° 253).
Il résulte cependant des dispositions de l'article 488 du CPC que l'ordonnance de référé a autorité de chose jugée « au provisoire » de sorte qu'elle lie le premier président qui n'a de pouvoir pour la rétracter ou la modifier « qu'en cas de circonstances nouvelles » (art. 488 al. 2 du C. proc. Civ., cf. VI A 1 et suivants).
VI. Voies de recours
A. Recours devant le premier président
1. Le référé rétractation
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Il découle du caractère provisoire de l'ordonnance de référé et des dispositions de l'article 488 al.2 C. proc. Civ. que le juge des référés ayant rendu l'ordonnance a le pouvoir de modifier ou rapporter celle-ci en cas de circonstances nouvelles.
Ce recours, parfois dénommé référé rétractation, est introduit, instruit et jugé selon la procédure ordinaire en matière de référé d'arrêt ou d'aménagement de l'exécution provisoire.
Mais il n'est ouvert qu'à la condition que soit établie l'existence de circonstances nouvelles.
Il peut s'agir, soit d'éléments d'information et d'appréciation nouveaux dont le juge ne disposait pas au moment du prononcé de son ordonnance, et susceptibles d'exercer une influence sur les mesures alors décidées (Com. 6 juillet 1993, JCP 1993, éd. G., IV, n° 2321), soit d'une modification substantielle de la condition des parties ou des termes du débat, propre à influer notamment sur l'appréciation du risque de conséquences manifestement excessives.
En revanche, ne constituent pas des circonstances nouvelles des faits antérieurs à l'ordonnance et connus du défendeur, et que celui-ci se serait abstenu d'invoquer lors de l'instance en référé (Civ. 3ème 3 octobre 1984, Bull. civ. III, n° 161).
Le recours est ouvert indifféremment à toutes les parties présentes ou représentées lors de l'instance en référé initiale.
La rétractation ou la modification de l'ordonnance étant subordonnées à l'existence de circonstances nouvelles, elles ne sauraient produire d'effets que pour l'avenir et restent donc sans incidence sur les mesures prises en vertu, soit du caractère exécutoire à titre provisoire du jugement de première instance, soit de l'ordonnance rendue initialement par le premier président pour arrêter ou aménager cette exécution provisoire.
2. L'opposition
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L'article 490, alinéa 2 du CPC prévoit que l'ordonnance rendue en dernier ressort par défaut est susceptible d'opposition.
Or, les ordonnances du premier président de la cour d'appel sont rendues en dernier ressort et insusceptibles d'appel (C. proc. Civ., art. 490, al.1).
Il s'ensuit que la voie de l'opposition est ouverte à leur encontre si le défendeur défaillant n'a pas été cité à personne (Paris, 17 décembre 1987, Bull. avoués, 1988, 28).
L'opposition remet en question, devant le premier président, les points jugés par défaut afin qu'il soit statué à nouveau en fait et en droit (C. proc. Civ., art. 572, al.1).
Le délai d'opposition est de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance (CPC, art. 490, al. 3).
L'ordonnance étant exécutoire dès sa signification, la formation d'une opposition n'est pas suspensive de l'exécution.
L'opposition est formée (C. proc. Civ., art. 573, al. 1), instruite et jugée selon les règles applicables à la juridiction des référés du premier président (C. proc. Civ., art. 576).
B. Pourvoi en cassation
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Rendues en dernier ressort et insusceptibles d'appel, les ordonnances rendues par le premier président de la cour d'appel peuvent être attaquées par voie de cassation indépendamment de la décision sur le fond prise par la cour (Cass. plénière, 2 novembre 1990, Bull. n° 11). Le principe vaut pour les ordonnances se prononçant sur une demande d'arrêt de l'exécution provisoire comme pour celles statuant sur des mesures d'aménagement (rappr. Civ. 2ème 23 janvier 1991).
Cette voie de recours est ouverte même si l'ordonnance a été rendue par défaut, le pourvoi n'étant alors possible qu'à compter de l'expiration du délai d'opposition (C. proc. Civ., art. 613).
Le pourvoi en cassation est formé, instruit et jugé selon les règles ordinaires exposées au Titre 3 (cf. BOI-CTX-JUD-30), observation étant faite que l'ordonnance doit avoir été préalablement signifiée (C. proc. Civ., art. 979).
Les dispositions des articles 1009-1 à 1009-3 du code de procédure civile sont applicables au pourvoi formé contre une ordonnance du premier président. La Cour de Cassation peut ainsi décider le retrait du rôle du pourvoi lorsque le demandeur ne justifie pas avoir exécuté les mesures prescrites par l'ordonnance attaquée.
En cas d'annulation de l'ordonnance déférée, l'affaire est renvoyée devant le premier président d'une autre cour d'appel.